FIE Escrime # 39

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R E P O RTA G E S

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«MESSIEURS, PRENEZ VOS RESPONSABILITÉS!» By Jean-Marie Safra

Entretien avec Jean-François Lamour

a aussi souvent du mal à admettre qu’il nous faut sans cesse évoluer, être dynamique, jeune, pour montrer au monde que l’escrime a de l’avenir. Imaginer qu’on va faire fléchir le CIO serait emprunter une fausse route et nous envoyer dans le mur.

Jean-François Lamour

■ Vous êtes membre de la Commission du programme olympique pour les Jeux d’été. Comment avez-vous vécu les dernières négociations et discussions concernant le nombre d’épreuves attribuées à l’escrime pour les JO de 2004? Jean-François Lamour*: il faut que les choses soient bien claires. Le nouveau président du CIO, Jacques Rogge, a été catégorique: Il n’y aura pas plus de 300 épreuves et 10000 athlètes dans deux ans à Athènes. C’est à partir de cette enveloppe globale qu’il faut raisonner. Le programme général est maintenant connu. La seule incertitude concerne l’escrime à cause de la volonté de la Fédération internationale de faire rentrer le sabre féminin. Le problème est à la fois simple et compliqué: comment terminer la féminisation de notre sport en incluant le sabre féminin alors que nos possibilités sont limitées à 200 tireurs et 10 épreuves? C’est la quadrature du cercle. Le monde de l’escrime n’a pas l’air de se rendre compte de la position dans laquelle nous nous trouvons. Certes, on est un sport socle. Nous sommes dans les rares sports qui ont toujours été au programme olympique depuis 1896. C’est un atout, mais il n’est pas suffisant. En revanche, en dépit des efforts qui ont été faits pour développer l’escrime dans le monde, nous ne sommes pas universels. On est dans la tradition des Jeux mais on

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■ Y a-t-il véritablement un risque? Nous sommes à un tournant. De mes passages à la commission du programme, je tire une première conclusion : nous n’augmenterons plus. Je conseille donc aux dirigeants de l’escrime de bien prendre en compte les enjeux. 2004 peut permettre à l’escrime mondiale d’intégrer le sabre féminin tout en préservant des rencontres par équipes, d’un nouveau type certes mais des rencontres par équipes. Si, pour une raison ou pour une autre, la FIE, finalement, revenait sur sa décision d’inclure le sabre féminin ou la reporte à 2008, je crains qu’avec la pression que va subir le CIO de la part d’un certain nombre de nouveaux sports qui, de toutes façons, frapperont à la porte, le coût d’entrée du sabre féminin à Pékin ne soit pas plus élevé que maintenant. Cela veut dire que l’entrée du sabre féminin sonnerait le glas de toutes les épreuves par équipes. On se retrouverait avec seulement six épreuves individuelles. Je crois pouvoir ajouter que la plupart des dirigeants du CIO n’y verraient rien à redire : ils considèrent l’escrime comme un sport individuel. En outre, qu’est ce que cela voudrait dire en terme de chiffres? Cela impliquerait une perte de visibilité de l’escrime aux Jeux – de quatre ou cinq jours de compétitions, on passerait à deux – et donc un intérêt moindre de la sphère économique qui entoure le CIO. L’escrime serait fragilisée. Là se reposerait la question d’une sortie de l’escrime du programme olympique.

■ Que préconisez-vous? J’attire l’attention du monde de l’escrime. Un: il faut faire rentrer le sabre féminin aux Jeux. Deux: il faut le faire vite. Trois: il faut modifier les règles de la compétition par équipes. Après, je pense que nous serons stabilisés pour quand même quelques années. Alors, prenez vos responsabilités, messieurs! ■ Vous avez rappelé les règles du CIO pour l’escrime: dix épreuves, pas une de plus. Dans l’esprit des dirigeants olympiques, l’escrime a-t-elle le choix d’organiser ses épreuves ou doit-elle là encore se plier aux souhaits du CIO? Il y a eu deux réactions à la proposition de René Roch après le Congrès de La Havane. D’une part, le CIO a dit: nous prenons acte de votre volonté d’intégrer le sabre féminin, pourquoi pas. D’autre part, vous ne nous proposez pas de compétitions d’essais et nous ne voulons pas que les Jeux servent de laboratoire. On a proposé à Jacques Rogge et Franco Carraro d’accepter deux épreuves tests : les championnats du monde 2002 et 2003. C’est un vrai défi à relever et je comprends parfaitement qu’il s’agit d’une profonde modification de l’esprit des rencontres par équipes. Cependant, il faut bien que le monde de l’escrime comprenne que ces deux rendez-vous sont des moments cruciaux. Surtout celui de Lisbonne. Je pense que Gilbert Felli va s’y rendre. Si jamais il recueille des impressions négatives de la part des tireurs, de la part des dirigeants, ou de la part de certains responsables de la FIE, le CIO n’hésitera pas à dire: «ils ne sont pas contents, ce n’est pas un bon choix, terminé. On n’accepte pas». A nous de faire la preuve que tout le monde est d’accord sur le principe et que ça marche bien. Il n’y a pas de meilleure solution. ● * Champion olympique de sabre en 1984 et 1988. Champion du monde.


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