Cedar Wings magazine. Design & Architecture. December 2018 - January 2019

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Ma soirée avec une GEISHA ! « Certains s’accrochent à son kimono en pleine rue pour une photo ». « Tout touriste aimerait au moins une fois dans sa vie apercevoir une geisha »… C’est vous dire, combien ces « dames de compagnie » sont importantes au Japon. Ce n’est pas pour vous narguer, mais j’ai eu droit à un spectacle privé de geishas avec entrevue à l’appui. A « Ashiya », l’un des restaurants super chic fréquenté par les célébrités du monde entier (Bill Clinton, Dustin Hoffman,Tom Cruise, la reine du Danemark, Carlos Ghosn…), je me rends le dernier soir pour goûter au « Kobe meat », viande de boeuf toute sa vie dorloté et massé au sake et à la bière : un délice ! Une fois le fameux (mais si cher) Kobe-gyu savoureusement englouti, l’un des panneaux en papier de riz adjacent à la table coulisse et à ma grande surprise, une magnifique geisha fait son entrée théâtrale. Des notes aigues s’échappent aussitôt d’une radio-cassette et voila la belle Japonaise en train d’esquisser des pas de danse traditionnelle. Mains fines, bouche écarlate, yeux entourés d’un trait rouge, tout en elle est expressif malgré la blancheur de son visage maquillé. Une dizaine de minutes plus tard, la voila agenouillée à côté de nous, clients du bout du monde. Les minutes de stupéfaction passées, ma nature journalistique prend le dessus et la soirée tourne à l’interview. Un moment de grande intensité. L’une des serveuses du restaurant joue les interprètes. « J’adore les kimonos. C’est l’une des premières raisons qui m’ont incitées à devenir geisha », chuchote Fukuwa. Elle n’a que 22 ans et malgré le maquillage qui lui masque le visage, on la devine très belle. « Il me faut une demi-heure chaque soir pour m’habiller ». Quatre couches de kimonos et une ceinture (obi) longue de 8 mètres. Tout l’art réside dans le nœud au dos.« Ma tenue pèse 10 kilos » ! « Parfois, je porte un jean et des baskets, lors de mes rares jours de congé : deux jours par mois à peine, car la demande est très forte et les geishas peu nombreuses. D’ailleurs, Kyoto est la seule ville au Japon où s’exercent des maikos, apprenties geishas ». Son maquillage, lui, prend aussi 30 minutes et elle le fait elle-même : avec la poudre de riz mélangée à l’eau, elle recouvre tout son visage et ses épaules, mais au niveau du cou, derrière, elle laisse deux languettes vides pour donner un aspect élancé. En parlant, Fukuwa bouge beaucoup les mains qui tranchent avec le sur-maquillage du visage. « Il est vrai que l’on ne met pas du tout de vernis et que nous gardons les ongles courts. Cela est plus pratique pour jouer du shamisen (instrument à trois cordes proche du luth et du banjo) et pour manier l’éventail. Car être geisha, est un art à part entière. Rien ne lui échappe : ni le chado (cérémonie du thé), ni l’ikebana (art floral), ni la danse, ni le chant. Loin d’être des prostituées comme le croient les étrangers, elles sont des dames de compagnie qui perpétuent à travers les siècles le patrimoine culturel nippon. «Etre geisha est une passion. Si on n’a pas la vocation, impossible de continuer : rien que pour me faire coiffer, il faut 2 heures de temps. Un spécialiste s’en charge. Une fois le brushing terminé, il insère dans ma chevelure des grelots, des fleurs artisanales, des peignes typiques… Et durant une semaine complète, je dors le cou appuyé sur un petit strapontin en bois, histoire de ne pas gâcher cette œuvre d’art ». Il faut le faire ! LE MONDE À PORTÉE DE MAIN, AVEC LA MEA ET SES PARTENAIRES SKYTEAM. page 18


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