Archiscopie #1

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Saint-Paul depuis la rue de la Procession. L’autel se trouve dans la partie vitrée à droite. Ph. © Franck Badaire. 2. Coupe transversale. 3. Plan du Rdc. 4. Plan de situation. © Berger & Anziutti arch. 4 – Patrick Berger en explique la genèse, comme celle de la Canopée des Halles, dans son dernier livre, Animal ?, paru aux Presses polytechniques et universitaires romandes / Presses du réel, en avril 2014.

AU PIED DU MUR

1. La maison d’église

En France, dans les années 1970-1980, nombre de catholiques très attachés au renouvellement des pratiques, stimulés par le concile Vatican II, prônent l’inclusion des églises dans le monde, au plus près des humbles, sans faste, discrètes, quitte à les glisser dans des structures existantes, des immeubles lambda. La décennie 1990 sonne un renversement de tendance. Sans devenir tapageuses, les églises font leur retour en ville, avec pour parangon la cathédrale d’Évry, conçue par Mario Botta (1995). L’église Saint-Paul s’inscrit dans ce courant. En pied de sa parcelle triangulaire, elle marque l’angle des rues du Landy et de la Procession, assumant son rôle de signal. Mezza voce. À part la croix de pierre taillée accrochée en hauteur de façade, rien ne permet de l’identifier comme telle, et surtout pas son architecture, inconnue au fastueux répertoire des lieux de culte chrétiens qui l’ont précédée. La position de Berger et Anziutti est intéressante. Ils rejettent l’idée même de clocher, considérant les cloches comme désormais inutiles pour donner l’heure - sans prendre en considération leur fonction symbolique de repère du sacré - et concentrent le sens en un seul signe. Faiblesse, dissolution des repères et jeu dangereux menant droit à l’indifférenciation formelle ? Oui et non. Les limites entre perte de sens et appropriation sont ténues et dépendent de subtils décalages. Certes, dans le grand brouillage des formes, à coup de recyclage immédiat et planétaire via le web, rien ne ressemble plus aux nefs des cathédrales que l’atrium des tours, aux chapelles que les salles d’audience des tribunaux, aux auditoriums des palais des congrès que les méga-churches des Évangélistes. En l’absence de repères tangibles, il est difficile d’attribuer avec certitude une fonction à une architecture. À l’inverse, pour christianiser un lieu, une simple croix est un signe reconnu par tous et peut suffire. Par imprégnation, de nouvelles typologies peuvent même être associées à un corpus séculaire, ajoutant ainsi une énième figure à une histoire deux fois millénaire. Pour clairement dissocier en deux espaces distincts le sacré et le profane, Berger et Anziutti les typifient, leur attribuent à chacun une identité différente. L’accueil, la salle de réunion et de partage et le petit appartement adjacent constituent un rez-de-chaussée modeste, à structure métallique d’acier galva, qui donne par une porte sur la nef blanche, également accessible côté rue par un portail massif. Pour décrire la genèse du plan et de l’élévation assez étranges4, les architectes racontent leur rejet de toute forme préconçue, leur désir d’explorer d’autres pistes. Ils mentionnent aussi les sources - Henri Focillon et Gabriel Le Bras - qui inspirent leur réflexion : le plan est “une figure sociologique”, “une

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