Cinéma belge festival de Cannes 2015

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CINEMA BELGE Festival Cannes 2015

LE TOUT NOUVEAU TESTAMENT de Jaco Van Dormael

ENGLISH INSIDE

Mai 2015 - n° 116 - 43e année



Editorial Un dynamisme exceptionnel 43 ans. Quelques-uns d’entre vous tenant cette revue en main le savent, Cinéma Belge est aujourd’hui largement quadragénaire, et constitue le plus ancien média belge – francophone – dédié au cinéma ! Créé en décembre 1972 et lancé dans la foulée 5 mois plus tard sur la Croisette, alors qu’André Delvaux (Belle) et Jacques Brel (Le Far West) représentaient le plat pays en compétition officielle, Cinéma Belge n’a en fait jamais quitté le Festival depuis, cultivant le lien étroit existant entre Cannes et notre pays. Une liaison renforcée avec le temps, voire dopée au début des années 90’, grâce notamment aux prix récoltés par Jaco Van Dormael et les incontournables frères Dardenne. Des personnalités qui, indirectement, ont permis de développer l’ensemble de l’activité cinématographique en Belgique, qu’elle soit flamande ou francophone. Il suffit de parcourir cette revue pour s’en rendre compte, alors qu’il ne s’agit ici que d’une sélection. Celle-ci permet d’apprécier cette richesse, tout en témoignant d’un dynamisme assez exceptionnel pour un pays comptant seulement 11 millions d’habitants. Et ce, dans un contexte international plus concurrentiel que jamais. Cette année marque un premier tournant, tant au niveau du fond que de la forme, avec, espérons-le, plus de confort et une lecture plus fluide, ces pages étant rédigées par une équipe de journalistes spécialisés, dont plusieurs sont nos envoyés spéciaux. Des dossiers engloberont désormais les interventions de ceux qui “font” le cinéma chez nous, et une place plus grande sera accordée aux entretiens et aux portraits. Avec bien sûr, une priorité laissée à ceux qui sont présents à Cannes. Nous veillerons toujours à opérer les choix les plus diversifiés, indépendants et neutres : une rude mission, dans un pays où… tout le monde se connaît ! Enfin, illustrations et papiers plus décalés peupleront ces pages, histoire d’animer une publication où nous espérons voir s’y retrouver tant nos professionnels que n’importe quel passionné. C’est l’un des nombreux défis que nous offrons à ce qui constitue pour nous un objet précieux, utile et conservable. Très bonne lecture, La rédaction

Cinéma belge 3 mai 2015


S RLIEFD, LI E V R O A GUERRE DE O DE BŒUF) M E S T , Ê T IE ( V P A O M K E S CE D OONI, RUND W S , NVAHIS P ’E EAN, LA CHAN U L O , L T N U D IE T L R U A C P N A, AU DE NOUS AP N O M E SAISON 1 ( L ONGO, ZOT VA , N II O H IS C A R IN A W LARGO A TORT OU , E IN L RIBULA B T M OT HOT HOT, S O E , L R , E D IJ ID T P L S A BLACK RPEDO, TOT O T , A N N GLORY, LITTLE O D U SERVICE A A M : E D IX L N E O B H O C CO T, ASTERIX & A T DE FARINE, LE IS DES TEN ’E L A L E A D P E E L , IC E C R R T E ’EX VIE D’UNE AU A L CAISSIERE, L , OUR, THE S IS M O F ’A D E N E U IR , O IS T O NE F NCE, UN HIS E S B A E, J’ENR TE, IL ÉTAIT U U N O IQ S T N E A D M E O G R A , J’ENR , BRASSERIE E M & IUS, OUR , E HARTMOED B S O E M D I, N & A L Y , A S IJ E IRAG YRTILLES, V M S E K, SOR D C T LE FIGUIER, M A U L O ,B G T E R L A , B E S N , PLA ENDRES LESSEsi IB A F ED ST E plusieurs fois tu veux … R D , BSENCE, LA T et même S IS U N B N A O , V G T E IN HANDEL DE PAPIER, H S E M A S E ELAND, DE BE L ), TU L’APPE , IT S U N N O A M L E ( D IS IS R O 8R ATS SONT G H C S PAS TROP!, 10 E L HRONICLES C S U T O N T A , L D R N U A H L STE ETAL ODY, M L E M , LES CHE RINTHUS, WA I, II O T T R A E tournages accueillis par le B L IS A U , S IS E AU, J J’AI DES AM IS A M , TOUT D NE, LOUVETE T T U R O O T M , Y IS D U N S E filmoffice.brussels LE, JE K, SAUVEZ W L A W N RIPPLE T T PRIT DE FAMIL O , O E M R , R K E C U A G L A B DRE, IN APRES L A M E ES DU Z D R , HOIX DE PEIN S U E Y L A B R A S S E L S , E E EINE D dont CONDRIAQU R E longs-métrages P U A TERR S L , CINDY C, LA R R H U C S N E E R C F A L A P L S, UNE ISSING, OUR J S E D E M PRISE… THE M U ces dix dernières années. SE, TOKYO C S ’E E L , M S O R R U P M E S N E RS L E MONACO,U D E C HOLLYWO N PARFAIT,HO A A R R ,G E S L E D IT N H , O D S F IE E DE OORVERLpar M S , RY,LA GUERR IE OUP, SWO L V U A D M projets cofinancés le fonds L E U D C E U C A CHAN OT VAN A, Z , O G T, L’ENVA N N R OCEAN, LA O K IE , T E R T A E P T P I A N S E régional bruxellois UEU NDE NOU MOimage.brussels E L , N (SAIS II ANGE, SANS Q O H IS C A R IN A W — en partenariat avec Wallimage — U O O G OT, LAR LINE, A TORT B M O ES TRIB , L R , O, HOT HOT H E D IJ ID T P L S A K T C O A TLE BL , TORPEDO, T A N N O D A TLE GLORY, LIT M : AU SERV E D IX L N E O B H O C O & entreprises réunies dans C E IX E, L TAT, ASTER ’E L SAC DE FARIN E D PALAIS DES E E L , IC E C R R T E U X A ’E E L E, audiovisuel D’UN LA VIEscreen.brussels , IS O NE CAISSIER le cluster F ’AMOUR, T D E N E U IR , O IS T O IS F H E N IT U BSENCE, UN A N O JESTE, IL ÉTA S TIQUE, J’ N E A D M E O G R A R IE N R ’E E ED, J ME, BRASS & , S OBIUS, E LLIE HARTMO M D I, N & A L Y , A S IJ E V G , A S R, MIR ES MYRTILLE D T U LACK, O ,B US LE FIGUIE G T E R L A , B E S N S A E L R P A TEND FAIBLESSE, E D S VONNIS U N ABSENCE, L B T A E , H G , R IN L IE E P D A E BEHAN AMES DE P S E L , S N ASTELAND, D O M 108 ROIS DE !, P O R T S A P AIS

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) S 1 A

N S R R R T E S E D T Z R O O O A S B V S T ’

S

SOMMAIRE 6.

22.

30.

32.

A L’AFFICHE DE CANNES Tout savoir sur les films belges sélectionnés

36.

INTERVIEW : MATTHIAS SCHOENAERTS Gentleness behind a tough exterior

6. 11. 12. 13. 15. 16. 17. 19. 20. 21.

47.

LIBRAIRIE Filigrane, source de scénario

50.

POSTPRODUCTION Les premiers les derniers, et une bonne dose d’humanité

52.

BRÈVES L’actu du cinéma belge

Le Tout Nouveau Testament Je suis un soldat Marguerite et Julien Maryland Ni le ciel, ni la terre Les cow-boys Valley of Love Love Het paradijs, Copain Short Film Corner

54. DOSSIER : Mais où est donc passé le public belge ? Sept protagonistes qui “font” le cinéma belge

ACTEURS 89 comédiens belges à Cannes

60.

PREMISSES DU CINEMA Le cinéma en nous depuis toujours

INTERVIEW : BENOÎT POELVOORDE Sur la terre comme au ciel

68.

TOURNAGE La Belgique, une éternelle terre de cinéma

70.

INTERVIEW : MARC ZINGA Le nouvel espoir du cinéma belge

PROCHAINEMENT Tout savoir sur les films belges bientôt à l’affiche

CINEMA BELGE N°116 – Mai 2015 – Spécial Festival de Cannes Rédaction : Place des Bienfaiteurs, 3 1030 Bruxelles – nestor.lison@gmail.com Chef d’édition, scénario & graphisme : Nestor Lison Rédacteur en chef : David Hainaut (hainaut.david@gmail.com) Secrétaire de rédaction Coordination : Julien Polet Journalistes : Fred Arends,

Charles Cachelou, Adi Chesson, Olivier Clinckart, Anne Feuillère, Astrid Jansen, Djia Mambu, Elli Mastorou, Jessica Matthys, Sarah Pialeprat, Matthieu Reynaert / Illustrations : Cost. Photos : Nestor Lison / Crédit photo couverture : Kris Dewitte / Traduction : Cross Word Translation Service / P.R. Cannes : Salvatore Leocata Remerciements : Marie-Hélène Massin, Stéphanie Waroquier, Lucile Poulain, Pauline Michel Cinéma belge 5 mai 2015

Editeur responsable : Nestor Lison +32 498 49 57 20 Edité par Cinéma Belge scs - Place des Bienfaiteurs, 3 1030 Bruxelles - nestor.lison@gmail.com Publication annuelle – Magazine distribué gratuitement au Festival de Cannes et en Belgique – Téléchargement libre sur Internet (usage strictement privé / reproduction interdite) – La rédaction n’est pas responsable des textes, photos, illustrations, dessins publiés, qui engagent la seule responsabilité de leurs auteurs.


LE TOUT NOUVEAU TESTAMENT A l’affiche de Cannes

de Jaco Van Dormael

© Ricardo Vaz Palma

Après un travail de plus de douze ans sur Mister Nobody, dont on aurait pu craindre qu'il l'ait laissé exsangue, Jaco Van Dormael s'est immédiatement remis à l'ouvrage sur un film à échelle plus modeste, mais pas moins ambitieux sur le fond. Il s'est également adjoint deux talentueux nouveaux collaborateurs : le romancier Thomas Gunzig au scénario et la star des comédiens belges, Benoît Poelvoorde, dans le rôle de… Dieu !

Cinéma belge 6 mai 2015


A l’affiche de Cannes

Cinéma belge 7 mai 2015


A l’affiche de Cannes

L’EVANGILE SELON JACO Car oui, Dieu existe. Il habite à Bruxelles dans un grand immeuble anonyme. Et c'est un sale type ! Non content de s'être coupé de son fils et d'être distant avec sa femme, il est carrément du genre misanthrope (un comble!) et se montre odieux avec sa petite dernière, Ea. Celle-ci va fuguer après avoir, en guise de vengeance, dévoilé sur Internet la date de mort de tous les humains ! Un sacré bazar qui va forcer Dieu à descendre dans ce monde qu'il a créé et qu'il connaît si mal. Avec un tel pitch, on devine sans mal comment certains thèmes chers au réalisateur de Toto le héros vont s'intégrer dans l'histoire. La lutte entre le destin et le choix, bien sûr, déjà au cœur de Mister Nobody ; mais aussi la difficulté de s'adapter à un monde qui n'est pas bâti pour soi et la possibilité de trouver le réconfort dans les relations les plus inattendues, comme celle qui se liait entre un homme d'affaire et un jeune trisomique dans Le Huitième Jour.

Un film très attendu Dévoilées en marge du Festival de Berlin en février dernier, les premières images du film lui ont valu d'être prévendu dans dix-sept territoires, de l'Allemagne à Hong-Kong (le film sera distribué par Belga en Belgique et par Le Pacte en France). Surtout, cette première présentation a suscité un buzz formidablement positif, auquel le public belge a enfin pu goûter lors de la soirée d'ouverture du dernier BIFFF (un festival où Van Dormael avait été récompensé en 1993 pour son premier court métrage E Pericoloso Sporgersi). Son public, pourtant réputé difficile, a été pris par surprise grâce à la projection d'un teaser de plusieurs minutes et a ri de bon cœur à la vision d'un Benoît Poelvoorde hirsute et ivre affirmant sa divinité aux passagers médusés d'un bus de la capitale. La vision de ces quelques images a aussi permis de se rassurer sur les qualités plastiques du film et d'apprécier une nouvelle fois la travail de Christophe Beaucarne, déjà directeur de la photographie sur Mister Nobody, mais aussi par exemple sur Le mystère de la chambre jaune ou encore La Belle et la Bête. Une collaboration inédite S'il n'est pas biblique, le pari n'est pas mince pour Van Dormael. Le monumental Mister Nobody (coproduction internationale et de loin le plus gros budget de l'histoire du cinéma belge), a divisé et son échec commercial a laissé un goût d'inachevé. Le Tout Nouveau Testament doit permettre au réalisateur bruxellois de retrouver une place centrale dans le paysage cinématographique européen et lui rendre son rôle officieux de meilleur ambassadeur du fameux “surréalisme à la belge”.

© Christophe Beaucarne

© Kris Dewitte

Moins évident à jauger est l'équilibre qui sera instauré entre drame et comédie. En tous cas, l'étrange sera de mise puisque, outre Poelvoorde et Yolande Moreau (qui interprète l'épouse de Dieu avec un look qui rappelle son rôle culte de Madeleine Wallace dans Amélie Poulain), on retrouvera Catherine Deneuve, dans une relation passionnelle avec… un gorille. C'est que la jeune Ea devra, sur les conseils de son célèbre frère, s'entourer de quelques apôtres rocambolesques parmi lesquels on retrouvera aussi des noms bien connus des cinéphiles belges comme François Damiens, Serge Larivière, Laura Verlinden ou Dider De Neck (collabora-

teur de Van Dormael depuis ses années théâtre). Il faudra aussi leur ajouter un David Murgia incroyablement ressemblant dans le rôle de Jésus, et une apparition de Dominique Abel (du duo Abel et Gordon) en Adam.

Cinéma belge 8 mai 2015


© Climax Film

A l’affiche de Cannes

Et il semble avoir mis toutes les chances de son côté en s'adjoignant les services de Thomas Gunzig. L'écrivain, aussi célèbre pour ses chroniques radio incisives, est un grand fan de cinéma fantastique, auquel il a consacré le roman 10.000 litres d'horreur pure. Pour lui, le cinéma doit « se servir de cet outil merveilleux qu’est l’imaginaire pour aller vers l’inattendu, éviter le cliché […] et ne s’embarrasser d’aucune convention du beau, du bon, du joli, du bienséant… L’idéal étant qu’il dise quelque chose sur la société, sur la politique. » On devrait donc voir poindre une dimension plus militante dans l'œuvre du réalisateur. Cependant, le film n'a pas non plus été conçu comme un pamphlet anticlérical, et c'est plutôt le vertige exitentiel lié aux questions soulevées par la révélation des dates de mort de chacun qui s'annonce comme central. Sur sa rencontre avec Gunzig, le réalisateur expliquait récemment à nos collègues de Cinergie : « Le grand plaisir que j'ai quand on collabore, c'est quand on ne reconnaît plus qui a fait quoi et que cela donne un résultat unique, inatteignable seul. Je connais Thomas depuis pas mal d'années maintenant, il avait écrit le texte de mon spectacle Kiss & Cry. Je suis très content d'avoir rencontré cet ami et collaborateur car l'association est belle. Je suis plutôt dans l'image, lui dans les mots, nous sommes complémentaires. » Gageons que l'association de ces deux artistes iconoclastes chacun dans leur genre fera autant d'étincelles qu'on peut le supposer. Divine enfant Enfin, le tour d'horizon des nombreux talents réunis autour de ce Tout Nouveau Testament ne serait pas complet sans mentionner Pili Groyne, alias Ea, la fille rebelle de Dieu. Si l'on parle déjà de la toute jeune actrice comme de la révélation du film, Pili n'est pas complètement inconnue. Avec son visage d'ange et ses grands yeux foncés, elle a déjà signé deux performances remarquées. D'une part, elle interprétait la fille du couple incarné par Marion Cotillard et Fabrizio Rongione dans Deux jours, une nuit des Frères Dardenne,

mais surtout elle était au centre du sanglant climax d’Alléluia de Fabrice Du Welz où sa maman à l'écran était Héléna Noguera. Matthieu Reynaert Belgique-Luxembourg-France – 110’ – Comédie, drame / De Jaco Van Dormael. Avec Benoît Poelvoorde, Yolande Moreau, Pili Groyne, Catherine Deneuve, David Murgia, François Damiens / Produit par Terra Incognita. Coproduit par Climax Films et Caviar / Sortie : automne 2015

OH MY GOD ! À l'heure où la question du blasphème et de la représentation des divinités est au cœur de vibrants débats (nous rappelant l'époque pas si lointaine où des cinémas projetant La Dernière Tentation du Christ de Martin Scorsese étaient incendiés), il est bon de voir débarquer un film qui, sans chercher à choquer, ne prend pas de pincettes pour détourner les concepts religieux. Si l'on ne doute pas qu'il en livrera une version unique et mémorable, Benoît Poelvoorde ne sera cependant pas le premier acteur à incarner le dieu des chrétiens à l'écran. Le plus célèbre est probablement Morgan Freeman en 2003 dans Bruce tout puissant et sa suite. Mais souvenons-nous aussi pêle-mêle de John Huston dans son propre film La Bible de 1966, de Dieudonné (alors encore humoriste) dans Les Onze Commandements en 2004, de Dustin Hoffman dans la Jeanne d'Arc de Luc Besson en 1999 ou de la chanteuse Alanis Morisette la même année dans la tartufferie de Kevin Smith, Dogma. Enfin, côté cinéma belge, c'est ni plus ni moins que le légendaire Robert Mitchum qui a déjà endossé la toge divine. C'était dans Les sept péchés capitaux, film à sketch de 1992 et une de ses dernières apparitions à l'écran.

Cinéma belge 9 mai 2015


La SACD vous invite à rencontrer sur la Croisette... Maison des Auteurs

Jaco Van Dormael, présent à la Quinzaine des Réalisateurs avec Le tout nouveau testament

David Lambert

Erwan Augoyard &

Frédéric Fonteyne

Sophie Kovess-Brun

Ils sont là pour évoquer leurs films avec vous. Vous souhaitez prendre contact avec eux ?

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La SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques) rassemble plus de 53.000 auteurs, dont plus de 2.300 en Belgique : auteurs d’œuvres de cinéma, de fictions télévisées, de théâtre, de danse, de musique de scène ou de fictions multimédia. www.sacd.be

La Scam (Société civile des auteurs multimédia) rassemble plus de 25.000 auteurs, dont plus d’un millier en Belgique : écrivains, chercheurs, journalistes, illustrateurs, scénaristes, bédéistes, auteurs dramatiques… www.scam.be

© Pour toutes les photos : Droits réservés

Retrouvez Anne Vanweddingen au Pavillon des auteurs de la SACD ou contactez la par mail à l’adresse : actionculturelle@sacd-scam.be


© Christophe Brachet/Mon Voisin Productions/Saga Film

A l’affiche de Cannes

JE SUIS UN SOLDAT de Laurent Larivière Sandrine, trente ans, est obligée de retourner vivre chez sa mère à Roubaix. Sans emploi, elle accepte de travailler pour son oncle dans un chenil qui s’avère être la plaque tournante d’un trafic de chiens venus des pays de l’Est… C’est en 1999, après plusieurs années d’assistanat à la mise en scène, que Laurent Larivière, auteur et performer, réalise son premier court métrage, L’Un dans l’autre. 16 ans et 5 courts plus tard, on le retrouve aux commandes de son premier long, Je suis un soldat, pour lequel il avait été bénéficiaire de l’aide à l’écriture du CNC en 2012. Il y retrouve Louise Bourgoin avec qui il avait déjà eu chance de travailler pour la performance La Peur au Festival Hors Pistes de Beaubourg. Car parallèlement au cinéma, Laurent Larivière travaille régulièrement sur des projets au théâtre. Citons le projet pluridisciplinaire qui mêle théâtre et cinéma, Eldorado dit le policier, pour lequel il est lauréat de la Villa Médicis Hors-Les-Murs (Résidences Culturesfrance). Jean-Hugues Anglade, Nina Meurisse et notre compatriote, Laurent Capelluto complètent le casting d’un film qu’il nous tarde de découvrir. Julien Polet France-Belgique – 96’ – Drame / De Laurent Larivière. Avec Louise Bourgoin, Laurent Capelluto, Jean-Hugues Anglade, Nina Meurisse / Coproduit par Saga Films et Umedia / Sortie : automne 2015

Laurent Capelluto Comédien pour le jeu et non le je Le Festival de Cannes jette cette année Un certain regard sur Lau rent Capelluto. Le nom de l’acteur belge est à l’affiche du film Je suis un soldat de Laurent Larivière présenté en compétition parallèle. Rencontre avec ce comédien porté par l’envie furieuse mais toujours réfléchie de raconter les histoires des autres.

chacun, avoir un discours commun. « Une formation que j’essaye d’appliquer au cinéma. » En 2008, Laurent Capelluto foulait une première fois les marches du Festival de Cannes pour Un conte de Noël d’Arnaud Desplechin, film grâce auquel il sera nommé aux César du meilleur espoir et qui lancera, un peu par hasard, sa carrière de cinéma. Exceptionnellement, Laurent - alors homme de théâtre depuis dix ans - avait accepté de jouer dans Le Tango des Rashevski de Sam Garbarski qu’Arnaud Desplechin avait vu. « C’est comme ça qu’il est venu me chercher, six ans après. »

Être acteur, est-ce s’éprendre d’une histoire qui sti-

Cette année, il joue au côté de Louise Bourgoin

mulera des talents ? Alors Laurent Capelluto en

dans Je suis un soldat de Laurent Larivière. Encore

est un. Et un bon. Au théâtre comme au cinéma,

une fois, c’est d’abord parce que l’histoire devait être

son jeu est gonflé à bloc. Sans en faire trop, il est

racontée que Laurent Capelluto a dit oui. « C’est un

dedans c’est tout. « Si je me préoccupe de mon

film éminemment politique sans être anecdotique ni

image, je suis faux. Si je suis uniquement connecté

prétentieux. C’est un scénario magnifique et Laurent

au sens de l’histoire, je suis juste. Ce qui doit nous

Larivière est un homme talentueux, extrêmement at-

animer est plus simple que la charge inutile qu’on

tentionné. J’aurais du mal à tourner un truc génial

s’impose souvent. »

avec une crapule. »

Quand Laurent parle d’un rôle il explique avant

Quand on lui demande ses envies pour des rôles fu-

tout l’intention et les qualités du réalisateur,

turs, la réponse en dit long sur le personnage : « des

d’abord attentif à la nécessité du film. Peut-être

choses nouvelles. » C’est vrai, il évite un maximum de

parce qu’il vient du théâtre - où la recherche col-

jouer des rôles qui ressembleraient trop aux précé-

lective est grande - c’est un acteur humble. « Au

dents. Et puis toujours « ce fantasme de faire partie

delà de l’égo, l’important est d’avoir conscience de ma

de quelque chose de plus grand que soi. Une aventure

fonction : je participe à raconter une histoire, je suis

collective, qui nous amène au delà de ce qu’on pourrait

à son service. » Avec Dominique Serron et son In-

faire seul. Ca ne dépend jamais uniquement de soi. »

fini théâtre, Laurent a appris “l’enfance de l’art”, le “on disait que”. C’est à dire, avec la subjectivité de

Cinéma belge 11 mai 2015

Astrid Jansen


A l’affiche de Cannes

MARGUERITE ET JULIEN de Valérie Donzelli

Quatre ans après le succès public et critique de La guerre est déclarée, Valérie Donzelli passe de La Semaine De la Critique à la Compétition Officielle. Pour son quatrième long métrage en tant que réalisatrice, elle n'a pas eu peur de se mettre la pression en tournant un scénario initialement destiné… à François Truffaut. Un défi qui, grâce à Scope Pictures, dont c'est déjà la deuxième collaboration avec la réalisatrice, est un peu belge ! L'histoire de ce projet commence… en 1603. Marguerite et Julien de Ravalet, fille et fils d'un seigneur de Tourlaville sont décapités en place publique après que Marguerite a donné naissance à un enfant issu de leurs amours. Depuis leur adolescence leurs parents avaient tenté de séparer les scandaleux, mais en vain. 363 ans plus tard, François Truffaut découvre leur histoire dans un article de la revue Elle et charge Jean Gruault d'en tirer un scénario. Gruault n'est pas un débutant, il a déjà signé le

mythique Jules et Jim et écrira encore quelques-uns des plus beaux films de Truffaut (L'enfant sauvage, L'histoire d'Adèle H.) mais aussi d’Alain Resnais (L'amour à mort, Mon oncle d'Amérique). Il fut aussi collaborateur des frères Dardenne sur leur deuxième long métrage, Je pense à vous, en 1992.

© Wild Bunch Distribution

L'actrice-réalisatrice en signe l'adaptation avec son complice habituel, Jérémie Elkaïm, que l'on retrouve sans surprise devant la caméra dans le rôle-titre masculin, alors que sa sœur et amante sera incarnée par Anaïs Demoustier (Thérèse Desqueyroux, Bird People).

vraiment dans l'oubli et, en 2011, il trouve le chemin des librairies via une édition supervisée par Gruault lui-même (alors âgé de 87 ans et devenu producteur de documentaires). C'est cette édition qui décidera Valérie Donzelli à s'en emparer.

Le scénario est bouclé en 1973 et Truffaut l'aime. Mais, plusieurs films sur le sujet de l'inceste venant de sortir, il choisit de repousser le projet. En 1978, deuxième tentative, avec cette fois l'idée d'étirer l'histoire en deux téléfilms pour pouvoir raconter l'enfance des protagonistes. Jugé trop scabreux, le projet ne trouve pas de financement et est officiellement abandonné, ce que Gruault jugera plus tard « emblématique de la profession de scénariste : un long travail qui n’aboutit pas toujours. » Néanmoins, l'aura de Truffaut ne se démentant pas au fil des ans, le projet ne tombe jamais

Cinéma belge 12 mai 2015

Difficile de savoir ce qui restera au final du scénario original. Pour tout dire, la seule photo dévoilée au moment de mettre sous presse ne fait guère “film d'époque”, même si le synopsis officiel semble, lui, toujours aller dans ce sens. Sans doute un premier indice est-il à trouver dans l'altération faite au titre qui est passé du “Julien et Marguerite” original à “Marguerite et Julien”. Matthieu Reynaert France-Belgique – 110’ – Drame / De Valérie Donzelli. Avec Jérémie Elkaïm, Anaïs Demoustier, Aurélia Petit, Frédéric Pierrot / Coproduit par Scope Pictures / Sortie : septembre 2015


MARYLAND

Huis-clos post-traumatique

d’Alice Winocour

Trois ans après avoir fait sensation à Cannes avec Augustine, Alice Winocour est de retour sur la Croisette où elle concourra dans la section Un Certain Regard avec Maryland. En 2012, pour son premier long métrage, Augustine, Alice Winocour relatait la liaison entre le célèbre neurologue Pierre-Martin Charcot (incarné par Vincent Lindon) et l’une de ses jeunes patientes atteinte d’hystérie dans le Paris de la fin du 19ème siècle. La mise en scène maîtrisée de la réalisatrice et scénariste française lui permettait alors d'éviter tous les pièges de la reconstitution historique pour s'aventurer aux confins du fantastique. Sélectionée à la Semaine de la Critique, elle fut également nommée au César du Meilleur premier film dans la foulée. Trois ans, c’est le temps qu’il aura fallu à Alice Winocour pour finaliser son second opus, Maryland, qui lui vaut l’honneur d’être sélectionné dans la section parallèle Un Certain Regard. An-

ciennement nom-mé “Close Protection”, le film, tourné entre octobre et décembre derniers dans le Sud de la France, met en scène Matthias Schoenaerts. Ce dernier y incarne Vincent, un soldat tout juste revenu du combat en Afghanistan. Souffrant de stress post-traumatique et incertain de vouloir repartir au combat, il se tourne vers des petits boulots. C’est ainsi qu’il se retrouve chargé d’assurer la sécurité d’Imad, un homme d’affaires libanais proche d’un candidat à l’élection présidentielle. Au lendemain d’une fête dans sa villa luxueuse, baptisée Maryland, Imad est amené à quitter la France pour 48h. Il demande alors à Vincent de s’occuper de sa femme Jessie, et leur fils. Mais bientôt, Vincent est pris d’angoisses paranoïaques et d’hallucinations. Malgré le calme apparent qui règle sur la propriété, il est peu à peu persuadé qu’une menace extérieure inconnue plane sur eux. Par ailleurs, il commence à éprouver pour Jessie une étrange fascination… Aux côtés de l’acteur belge, le

film réunit la comédienne allemande Diane Krüger (Les Adieux à la Reine, Un plan parfait) dans le rôle de Jessie. On y retrouve également l’acteur français Paul Hamy, vu chez Katell Quillévéré (Suzanne) et Emmanuelle Bercot (Elle s’en va). Produit par Dharamsala, Darius Films et France 3 Cinéma pour la France, où il sera distribué par Mars Distribution, le film est également coproduit par Scope Pictures pour la Belgique, où la distribution en salles sera assurée par Victory Productions. A noter

Cinéma belge 13 mai 2015

© George Lechaptois/Dharamsala/Mars Distribution

A l’affiche de Cannes

que la sélection du film en compétition Un Certain Regard amène à 4 le nombre de films coproduits par Scope Pictures présents au Festival de Cannes, en comptant Valley of Love de Guillaume Nicloux, Marguerite et Julien de Valérie Donzelli (Sélection Officielle) et Love de Gaspar Noé (Séance de Minuit). Elli Mastorou France-Belgique – 101’ – Drame, thriller / De Alice Winocour. Avec Matthias Schoenaerts, Diane Kruger, Paul Hamy / Coproduit par Scope Pictures / Sortie : 2015

Qui a... PT


WALLONIE BRUXELLES IMAGES ET LE CENTRE DU CINÉMA ET DE L’AUDIOVISUEL FÉLICITENT JACO VAN DORMAEL POUR LA SÉLECTION DE SON FILM À LA QUINZAINE DES RÉALISATEURS

UNE DIVISION DE

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A l’affiche de Cannes

NI LE CIEL, NI LA TERRE de Clément Cogitore

Pour son premier long métrage, Clément Cogitore revisite le rapport au divin et à l'invisible dans un contexte troublé, celui de l'Afghanistan, où un groupe de militaires va devoir faire face à de mystérieux événements. Belle récompense pour son réalisateur, dont c'est le premier long, Ni le ciel ni la Terre, se voit sélectionné cette année à la Semaine de la Critique. Le sujet, il est vrai, a de quoi susciter la curiosité : une confrontation des hommes avec le mystère et le sacré. Une question qui a toujours passionné le jeune cinéaste, né en 1983 : « Cette capacité et ce désir qu'ont les hommes à croire en des choses irrationnelles me fascinent, tout comme me fascinent les récits qu'ils se construisent pour parvenir à coexister avec ces mêmes choses qu'ils ne comprennent pas et qui les dépassent. »

© Diaphana Distribution

Des hommes face au mystère et au sacré Alors que ses troupes sont sur le point de quitter l'Afghanistan, le capitaine Antarès Bonassieu et sa section se voient confier une mission de surveillance dans le secteur d'une vallée reculée. Mais alors que tout semble sous contrôle, des soldats se mettent à disparaître soudainement. Ces faits inexplicables vont amener Antarès à s'interroger sur le sens de son travail tout en ouvrant des brèches spirituelles et affectives insoupçonnées. La question de la foi, brûlante d'actualité, s'inscrit donc en filigrane du récit : « Ce projet prolonge mes recherches documentaires sur le sujet, confirme Clément Cogitore, tant dans ce qu'il a de plus usuel, la foi en l'apparence et en la parole de l'autre, que dans ce qu'il a de plus métaphysique, la foi en l'invisible

et la présence de Dieu. Je veux montrer l'homme tel que je me le représente : comme un animal qui croit et qui, porté par cette croyance, se révèle à lui-même, capable du geste le plus abject comme du plus sublime. » Le thème, original, a séduit la société de production Tarantula, qui apporte, par sa contribution, un ancrage belge au film. Comme le précise son fondateur, Joseph Rouschop, « La proposition de Clément nous a tout de suite paru originale. Le lien entre notre choix et la présence du film à Cannes, c'est l'envie de porter un projet et de le défendre, tout en préservant farouchement la liberté d'une démarche artistique. » Une coproduction certes minoritaire, mais qui n'a rien d'anecdotique pour la Belgique :

Cinéma belge 15 mai 2015

hormis l'acteur Jérémie Renier dans le rôle principal, le montage son et les effets visuels ont été traités entre Bruxelles et Liège, tandis que le Centre du Cinéma et de l'Audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles a, parmi d'autres partenaires, apporté son soutien au développement du projet. Un film ambitieux, que son réalisateur souhaite « physique et profondément ancré dans le réel, porté par des personnages qui, dressés ensemble contre l'inexplicable, s'effondrent et s'élèvent à la fois. » Olivier Clinckart

France-Belgique – 100’ – Drame / De Clément Cogitore. Avec Jérémie Renier, Kévin Azaïs, Swann Arlaud, Finnegan Oldfield, Christophe Tek, Marc Robert / Coproduit par Tarantula / Sortie : 2015


LES COW-BOYS

A l’affiche de Cannes

de Thomas Bidegain

Premier film de Thomas Bidegain, Les Cow-boys est une quête familiale portée par un casting remarquable. Doté d'une carrière prolifique et de nombreuses récompenses en France et dans le monde, Thomas Bidegain se profile aujourd'hui comme un des scénaristes les plus convoités de la nouvelle vague du cinéma français. À 46 ans, fort de son succès en tant qu'auteur de films originaux et d'adaptations, il décide de passer derrière la caméra et signe un premier film, Les Cow-boys, qui se retrouve d’emblée en compétition à la Quinzaine des Réalisateurs cette année, un exploit en soi ! Si le public belge a pu l'applaudir pour sa contribution récente au biopic polémique À perdre la raison de Joachim Lafosse, Bidegain est avant tout un partenaire de longue date de Jacques Audiard, avec qui il

© Antoine Doyen

Jamais sans ma fille collabore régulièrement, depuis leur association officieuse en 2005 autour de De battre mon cœur s'est arrêté jusqu'au tout récent Dheepan, en passant par Un Prophète et De rouille et d'os.

tique en France, un combattant tamoul sri-lankais qui travaille comme concierge dans une cité de banlieue parisienne. Bidegain débarque donc à Cannes avec plus d'un tour dans son sac.

Bien que fasciné depuis son plus jeune âge par le grand cinéma hollywoodien, Thomas Bidegain peut se vanter d'une démarche individuelle et particulière et, en tant que cinéaste, promet de livrer une œuvre singulière avec la marque d'un véritable auteur. Il avait déjà eu l'occasion d'arpenter la Croisette l'année dernière où il s’était fait remarquer pour le scénario de Saint Laurent de Bertrand Bonello, sélectionné en compétition officielle. Cette année, le fruit de sa plus récente collaboration avec Audiard et Noé Debré, Dheepan, se trouve également en lice pour la Palme d’or. Le film raconte l'histoire d'un réfugié poli-

Le scénariste n'a pas pour autant rangé sa plume pour Les Cow-boys. Il coécrit ce film ambitieux une nouvelle fois avec Noé Debré. Il en résulte une sorte de road movie aux allures de western revisité qui se déroule entre la France et le Pakistan. Les Cow-boys suit les péripéties d'Alain, parti à la recherche de sa fille adolescente disparue sous l'influence de son petit-ami, un fondamentaliste musulman. Dans sa course pour la retrouver, Alain est accompagné par son fils Kid et plus tard par un “chasseur de têtes” américain. Avec cette riche prémisse dramatique en toile de fond, le film aborde le sujet d'actualité

Cinéma belge 16 mai 2015

très sensible de la politique et la religion. Le résultat est une intrigue passionnante portée par un casting séduisant et éclectique, avec François Damiens dans le rôle principal. À ses côtés, dans le rôle du fils, on retrouve Finnegan Oldfield, jeune talent français émergeant déjà repéré dans le circuit des courts métrages (dont le film belge ironiquement intitulé Ce n'est pas un film de cow-boys, lauréat de la Queer Palme en 2012). Et, last but not least, le chouchou de Hollywood John C. Reilly, un des acteurs de genre les plus versatiles de l'Outre-Atlantique avec une filmographie aussi longue que variée, vient couronner cette distribution impressionnante. Adi Chesson France-Belgique – 100’ – Drame / De Thomas Bidegain. Avec François Damiens, John C. Reilly, Finnegan Oldfield, Agathe Dronne, Maxim Driesen / Coproduit par Les Films du Fleuve / Sortie : automne 2015


A l’affiche de Cannes

d'un savoir faire qui n'a rien à envier à un certain âge d'or du cinéma américain, transcendé par une sensibilité voire une certaine poésie européenne. Anecdote amusante : ce n'est pas Gérard Depardieu mais Ryan O'Neal (Barry Lyndon, entre autres) qui devait initialement tenir le rôle du père, avant que le destin s'en mêle et écarte l'acteur américain au profit du plus américain des acteurs français...

VALLEY OF LOVE de Guillaume Nicloux

© Le Pacte

Du deuil à l’amour Trois ans après La religieuse, Guillaume Nicloux retrouve Isabelle Huppert pour un thriller mélodramatique, qui signe par ailleurs les retrouvailles entre l'actrice et Gérard Depardieu, couple mythique s'il en est de l'histoire du cinéma français. De bonne augure pour cette sélection de dernière minute en compétition cannoise ? Isabelle et Gérard ont perdu leur fils il y a six mois. Pourtant, ce dernier leur a adressé une lettre dans laquelle il donne rendezvous à ses parents dans la “Vallée de la Mort”, en plein cœur des Etats-Unis. Malgré l’absurdité de la situation, le père et la mère ont décidé de s’y rendre et de l’attendre... « Je me suis rendu dans la Vallée de la Mort fin 2012, explique le réalisateur quand il aborde ses intentions. Mon séjour dans l’un des plus grands parcs naturels des Etats-Unis s’apparente à un rêve éveillé. Mais un rêve dont les impressions et les détails ne s’évanouirent jamais tota-

lement. Au contraire même, les rémanences se firent plus précises au fil des mois, à l’instar de ces rêves de gosses dont on garde une saveur étrangement familière, presque tactile. Là-bas le temps est horizontal, comme en Afrique. Un vrai piège. La Vallée de la Mort est un piège à vérité. C’est votre cerveau solitaire ouvert à tout ce qui vous échappe. Et si vous acceptez l’idée que l’essentiel n’est jamais ce que vous décidez alors le sujet peut jaillir comme une source et cette source irriguer votre cœur mis à nu. » Difficile en voyant les têtes d'affiche du film de ne pas sentir le poids de l'héritage de Maurice Pialat sur le cinéma de Nicloux : un couple en pleine tourmente, un deuil impossible à faire, les retrouvailles entre Depardieu et Huppert trente-cinq ans après Loulou et une production signée Sylvie Pialat. Rien de bien étonnant quand on connaît la touche cinéphilique qui se retrouve de ci de là dans l'ensemble de la filmographie de Guillaume Nicloux,

cinéaste relativement atypique dans le cinéma français contemporain. Dans Valley of Love, le mélodrame y croise tout naturellement l'intrigue policière au sens “quête de la vérité”, créant une atmosphère étrange, vénéneuse, implacablement éreintante comme le soleil brûlant de la bien nommée Vallée de la Mort, par ailleurs décor de plusieurs cinéastes hollywoodiens en leurs temps (notamment le célèbre Erich Von Stroheim et son non moins fameux Les rapaces). L'allusion au cinéma hollywoodien n'est pas anodine, Nicloux ayant fait preuve dans ses précédents films

Cinéma belge 17 mai 2015

Mais si le film se distingue par sa mise en scène et le savoir-faire technique et surtout narratif de Guillaume Nicloux, il ne faudrait pas pour autant sous-estimer la puissance dramatique du couple vedette, chacun rappelant (ou plutôt faisant taire les détracteurs) combien ils incarnent à eux deux la quintessence des acteurs hexagonaux, Huppert comme Depardieu ayant par ailleurs déjà été récompensés à Cannes. Autant de pistes et d'éléments qui offrent l'agréable pressentiment que le film ne passera pas inaperçu au sein du Festival ni du Jury. B.M. France-Belgique – 90’ – Drame/ De Guillaume Nicloux. Avec Gérard Depardieu, Isabelle Huppert, Dan Warner, Dionne Houle / Coproduit par Scope Pictures / Sortie : juin 2015

Een wind gelaten ?


2>9.10.2015 ÈME

30 FESTIVAL INTERNATIONAL DU FILM FRANCOPHONE DE

NAMUR


A l’affiche de Cannes

LOVE de Gaspar Noé

Le dernier film de Gaspar Noé, Love, ne manquera pas de sus-

Shortbus -également présenté à Cannes en 2006- conte-

citer la curiosité -et la polémique ?- au Festival de Cannes,

nait des séquences non simulées jouées par les acteurs eux-

où il sera projeté en Séance de Minuit dans le cadre de la Sé-

mêmes, le récent Nymphomaniac de Lars Von Trier utilisait

lection officielle.

dans sa version non censurée des plans tournés par des acteurs X en y insérant ensuite numériquement les têtes des

Les premières affiches diffusées ne laissent guère planer de

acteurs principaux.

doutes quant à la volonté de provoquer : après une première photo de trois bouches s'embrassant goulûment,

C'est donc avec une certaine impatience que l'on attend

c'est une deuxième image, au cadrage très serré qui a été

de découvrir Love, dont Gaspar Noé affirme qu'il sera très

publiée montrant un pénis au moment de l'orgasme avec,

godardien : « J’ai l’intention d’insérer toutes sortes de car-

à l'arrière-plan, un sein surmonté du titre du film écrit

tons (citations sur l’amour, textes sur la biologie cérébrale de

dans un graphisme évoquant un fluide corporel.

l’état amoureux…). » Un travail typographique que l'utilisation de la 3D devrait rendre « plus ludique, tout en per-

Le réalisateur, il est vrai, aime bousculer le spectateur. Ir-

mettant certainement au film d’exister davantage

réversible avait fait scandale sur la Croisette en 2002 pour

artistiquement et commercialement, et provoquer un plus

deux scènes extrêmement dures. Et Vincent Maraval, pro-

grand engouement », selon le souhait de son réalisateur.

ducteur du film, annonçait d'ores et déjà la couleur l'an

Olivier Clinckart

dernier, au moment où le projet était en chantier : « Pour Gaspar, la plupart des films traitant du sexe dans le cinéma

France-Belgique – Drame, érotique / De Gaspar Noé. Avec Karl Glusman / Coproduit par Scope Pictures / Sortie : 2015

mainstream sont sombres et dramatiques, celui-ci sera très joyeux. C'est un film qui fera bander les mecs et pleurer les filles. » Et c'est ainsi que Love, comme son titre l'indique, parlera d'amour, mais de façon très réaliste, selon le souhait du cinéaste : « Je voudrais faire un mélodrame moderne avec une forte dimension érotique qui intégrerait donc de multiples scènes sexuelles explicites, et dépasser le clivage de genres qui fait qu’un film dit normal ne doit pas intégrer des scènes sexuelles non simulées. Je voudrais filmer ce que le cinéma n’a généralement pas pu faire complètement, que ce soit pour des raisons commerciales ou légales, c’est-à-dire filmer la dimension sexuelle de l’état amoureux, alors que dans la plupart des cas, c’est là que réside l’essence même de l’attraction à l’intérieur d’un couple. » La démarche de Noé n'est cependant pas unique en son genre : un certain nombre de films considérés comme non

© Wild Bunch Distribution

pornographiques contiennent des scènes à caractère sexuel non simulées. Que ce soit dans le but de déranger ou de pousser le raisonnement artistique à l'extrême en filmant la réalité de l'acte sexuel de la manière la plus directe, ces productions très diverses n'ont pas forcément abordé la chose de façon identique : alors que le film américain Cinéma belge 19 mai 2015


HET PARADIJS A l’affiche de Cannes

Des images qu'on se fait Het paradijs raconte l'ailleurs qui se rêve des deux côtés de l'océan. La frontière est un dédale labyrinthique de lignes. Certains la traversent, d'autres non. Personne ne se rencontre. Après quatre ans d'études au Rits School of Arts, Laura Wandewynckel réalise, en fin d'études, Het paradijs. Son film, qui travaille l'animation d'objets en volume, prend à bras le corps l'un des maux de notre monde contemporain : la tragédie des migrants. Mais elle s'y attaque sous l'angle sarcastique des touristes en partance. Et l'ironie du titre

© Rococo

COPAIN

est cinglante. Quel est ce paradis que certains quittent au prix de leur vie ? Quel est ce paradis où va se vautrer, dans une chaise longue, un personnage en bouts de ficelle blanche ? L'avion qui l'emporte au soleil, comme un oiseau dompté, survole une mer où de petites figurines en ficelle jaune, elles, se noient. Sorte de squelettes en mouvement, ils se frôlent, se touchent, mais s'ignorent. Le décor, les espaces, ses personnages, Laura Wandewynckel fait les choix de les ancrer dans des symboles épurés et abstraits. Réduit à l'essentiel et stylisé, le film raconte une Afrique de carte postale, mais désertique, aride, appauvrie. Et le touriste, lui, n'y voit

En apnée

de Raf & Jan Roosens

D'un côté, les potes, l'amour, le vélo, la nage. De l'autre, les repas de famille, les tics-tacs des horloges, les silences douloureux... Quand les deux mondes se rencontrent, les risques d'éclats sont partout. Raf et Jan Roosens travaillent en famille. Une grande famille élargie, celle de Rococo, maison de production anversoise, où ils portent plusieurs casquettes. Producteurs de clips, de publicités et de

courts métrages, ils cosignent eux-mêmes de nombreuses pubs. Côté cinéma, Raf Roosens avait déjà réalisé deux courts et Clim bing Spielberg, en 2009, un premier long documentaire coréalisé avec Cecilia Verheyden et Senne Dehandschutter. Jamais très loin, Jan le rejoignait en 2012 sur Rotkop, un court qui a fait le tour des festivals. Et de nouveau, Copain s'attache à un jeune adolescent déchiré entre sa famille et sa vie Cinéma belge 20 mai 2015

© RITS School of Arts Brussels

de Laura Vandewynckel

que musique, femmes, soleil, avant de revenir dans son univers terne et transparent où s'échouent ceux qui cherchent à rejoindre son monde. De cet aller-retour éclair, il ne ramène rien d'autre qu'une photographie. Suite de clichés donc qui rend toute rencontre impossible. Anne Feuillère

Belgique - 5' – Animation / De Laura Vandewynckel. Avec les voix de Nico Sturm, Liesje De Backer, Thomas Bellinck, Jerom Sturm, Rocky Sturm / RITS School of Art (Bruxelles)

sociale. “Copain”, c'est le petit nom que lui donne son père. Mais copains, ils ne le sont pas du tout. Opposant les lumières fortes, les mouvements vifs, les corps énergiques de ses amis avec l'univers immobile et tamisé, bourgeois, empesé de sa famille, le film raconte les allers-retours de ce jeune homme qui a cloisonné ses mondes qu'il ne veut pas faire communiquer. Et puis un univers en pénètre un autre. Avec beaucoup de maestria, les frères Roosens construisent un film fluide et électrique, une sorte de plongée en apnée dans les méandres d'une tension sourde, qui finira par exploser en un face-à-face violent. Mais l'on ne fait jamais face qu'à soi-même... Un bel essai sur la douleur d'être à soi. Anne Feuillère Belgique – 15' – Drame / De Raf & Jan Roosens. Avec Felix Meyer, Anne-Laure Vandeputte, Hicham Mallouli, Desmond Badu, Jan Hammenecker, Jeanne Dandoy, Violet Braeckman Produit par Rococo


A l’affiche de Cannes

6 COURTS BELGES EN VITRINE AU SHORT FILM CORNER

Chaos

Dernière porte au Sud

Ineffaçable

Jay parmi les hommes

L’ours noir

Dans un contexte cinématographique au-

Bruxelles Images, dites WBImages) assurant ce

de Jaco, et le film est coproduit par Nicolas Guiot

jourd’hui hyperconcurrentiel, le court métrage

travail précieux, notamment dans plusieurs

(César et Magritte du Meilleur court métrage en

se présente comme un laboratoire de plus en

grands festivals internationaux (Annecy, Berlin,

2013). Celui-ci se retrouve par ailleurs mêlé à la

plus incontournable avant le fameux passage au

Toronto...). Chaque année, cet organe, géré par

production d’Ineffaçable (de Grégory Lecocq, un

long. Le Festival de Cannes l’a bien compris, en

Eric Franssen, se charge de visionner un maxi-

habitué du court), qui confirme le potentiel d’un

imaginant en 2004 un marché spécifique: le

mum de courts intra-muros. Un comité de pro-

jeune comédien, Arthur Buyssens.

Short Film Corner.

fessionnels, se réunissant deux fois par an, en

© WBImages

Août 1914

retient ensuite vingt, parmi les plus représentatifs

L’illustration d’un riche vivier

Repérer les talents de demain

de la partie sud du pays. Ces films, placés sur une

Belle surprise d’Abyssal Process, une toute jeune

Lieu pensé pour qu’acheteurs, distributeurs, pro-

clé électronique, sont alors disponibles pour les

boîte bruxelloise, Août 1914 de Fedrik De Beul

ducteurs, programmateurs et producteurs se ren-

professionnels du monde entier. Et, spécifique-

s’inspire de faits réels du début de la Première

contrent tout en y repérant de futurs talents, le

ment pour Cannes, le WBImages a retenu une sé-

Guerre mondiale, alors que les Belges étaient

Short Film Corner a permis l’an dernier à 2.658

lection de six films récents.

considérés comme francs-tireurs par les Allemands. L’occasion d’y croiser Fabrizio Rongione,

professionnels d’y visionner en primeur 1.919 courts métrages issus de 98 pays (dont, bien sûr,

Avec l’élève de Joe Dante

Magritte du meilleur acteur cette année. Véritable

tous ceux en compétition), grâce à trois mini-

Chapeauté par Arte, Dernière porte au Sud est le

ovni fantastico-étrange teinté d’humour british,

salles de projection et une cinquantaine de postes

deuxième court métrage de Sacha Feiner, un réa-

L’ours noir est une coréalisation de Méryl Fortu-

de visionnement. Cerise sur le gâteau, les inscrits

lisateur prodige qui a fait parler de lui en Belgique

nat-Rossi et de Xavier Seron. Ce dernier vient

peuvent profiter de prix d’une valeur globale de

lorsque Joe Dante, le célèbre créateur des Grem-

déjà de tourner son premier long métrage, Je me

50.000 euros. Comme, par exemple, la possibi-

lins, l’a désigné comme un possible successeur.

tue à le dire. Enfin, s’il a étonné le microcosme du

lité d’écrire le scénario d’un futur court métrage

Son adaptation, mêlant animation et fantastique,

cinéma belge en étant nommé l’an dernier aux

et la réalisation d’un petit film sur place, avec une

a d’emblée trusté trois importants prix à

Magritte du court métrage via un film de genre

ème

(Bowling Killers), Sébastien Petit fait davantage

Festival International du Film Fantastique. Jay

que confirmer son talent avec Chaos, un étonnant

Une sélection spécifique pour Cannes

parmi les hommes est un bijou signé Zeno Graton,

court apocalyptique, parfaitement inscrit dans

Le Short Film Corner reste donc une aubaine

un réalisateur également à suivre, dont il s’agit du

son époque. Bref, six petites perles à découvrir, il-

pour promouvoir le court métrage belge à l’étran-

troisième court. Une fiction âpre, où un ado se

lustrant à merveille la diversification de l’immense

ger. Or, depuis 1984, il existe précisément une

retrouve confronté à la violence des hommes.

vivier belge actuel.

agence en Belgique francophone (le Wallonie

L’image est signée Juliette Van Dormael, la fille

mini-caméra offerte.

ème

Bruxelles, lors du 34

Festival Anima et du 33

Cinéma belge 21 mai 2015

David Hainaut


Dossier

© photos dossier Nestor Lison

MAIS OÙ EST DONC PAS Le phénomène est connu. Régulièrement salué dans les festivals du monde entier, où il continue à truster de nombreux prix - 310 récompenses rien que l’an dernier! -, le cinéma belge jouit toujours d’une très bonne image à l’étranger. Mais paradoxe à domicile, du moins, dans la partie francophone du pays, la rencontre entre ce cinéma belge et son propre public tarde encore à se faire. Cinéma belge 22 mai 2015


Dossier

SSÉ LE PUBLIC BELGE ? Mais des solutions existent. Aujourd’hui, une nouvelle génération semble pointer le bout du nez, rêvant d’élargir le spectre des genres, diversifier les styles et par là, attirer davantage ce public, dont une part de curiosité est encore à susciter. L’occasion était donc belle de prendre le pouls de quelques-uns des acteurs qui, l’année durant, sont au cœur de cette large réflexion. Cinéma belge 23 mai 2015


Dossier Un cinéma qui se diversifie En 2011, alors président de la toute première édition de la Cérémonie des Magritte, Jaco Van Dormael prédisait : « La naissance de cette cérémonie est importante pour le cinéma belge, mais nous ne pourrons vraiment en mesurer ses effets que dans dix ans. » Philippe Logie, cofondateur et diffuseur de l’événement sur Be TV où il est directeur des acquisitions, détaille le propos du réalisateur. « Nous n’avons bien sûr pas imaginé les Magritte pour que les professionnels s’accrochent une médaille entre eux. Notre but, c’est d’aller vers le public, de mieux faire connaître nos talents, de susciter des envies, du désir voire même des vocations. Ma foi, au bout de cinq éditions, on constate que les gens commencent tout doucement à mieux connaître nos films et nos acteurs. Regardez, cette année, pour le Magritte

notre cinéma se diversifie, que les producteurs et réalisateurs ont envie de faire autre chose. Alors peut-être que la comédie reste chez nous un parent pauvre, mais là aussi, on sent ces derniers mois pointer quelques nouveaux talents. Mais peut-être que l’impulsion pourrait, qui sait, être donnée du côté du Centre du Cinéma. »

« Le changement fait toujours peur, rappelle quant à lui Philippe Logie, surtout pour des gens qui fonctionnent sur les mêmes canevas depuis x années et qui sont plus installés. Mais clairement, personne ne pourra nier qu’on ressent l’appétit d’une plus jeune génération, qui aimerait faire bouger les lignes. »

L’appétit d’une jeune génération

L’exemple flamand

L’occasion, justement, de céder la parole à Jeanne Brunfaut, directrice du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles. « Pour être confrontée régulièrement aux professionnels, on voit clairement une différence de conceptions des choses entre les anciens et les nouveaux. Mais attention, moi j’aime beaucoup la nouveauté, mais cela ne veut pas dire qu’on doit pour autant jeter tout ce qui est ancien ! Disons que dans le contexte ac-

Patrick Quinet, lui aussi bien placé, puisqu’il cumule les casquettes de producteur chez Artémis, d’initiateur du Tax-Shelter et cofondateur des Magritte (et même encore président de l’Union des Producteurs Francophones, à l’heure où nous écrivions ces lignes), semble un peu plus partagé. « Ce que je constate à mon niveau, c’est qu’il n’y a pas, chez nous, énormément d’auteurs qui proposent des choses radicalement différentes. J’ai parfois l’impression que

Côté francophone, on manque d’un projet collectif. Il y a là-aussi quelque chose à faire Joëlle Milquet, Ministre de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles

du meilleur film, vous aviez du cinéma politique avec La Marche de Nabil Ben Yadir, du cinéma d’auteur avec Henri de Yolande Moreau, une comédie romantico-dramatique avec Pas son genre de Lucas Belvaux, une comédie pure avec les Rayures du Zèbre et puis, le dernier Dardenne (Deux jours, une nuit). C’était plutôt riche et varié, non ? » Au-delà de ce constat, pense-t-il que le cinéma belge est en train de changer ? « Pour moi, oui. Dès la première année d’ailleurs, nous nous sommes affranchis de cette image un peu clichée, mais qu’on nous rabâche encore souvent : le cinéma belge n’est que prise de tête, social et ennuyeux. C’est sans doute lié au fait que les Dardenne ont retenu énormément d’attention, bien que celle-ci ait bien sûr toujours été légitime, normale et méritée. Or, la réalité, c’est que

tuel, nous devons surtout expliquer à pas mal d’auteurs qu’au cinéma, on ne peut plus créer un film pour dire de créer un film, en ne pensant qu’à soi. » L’incontournable Philippe Reynaert, haut responsable de la politique culturelle en Belgique et directeur du Fonds économique Wallimage, ne dit rien d’autre : « Plus je vieillis, plus j’ai du mal à me dire qu’on va investir des millions d’euros d’argent public dans un film qui va réaliser quelques centaines d’entrées. Si on veut juste se faire plaisir, je pense qu’il vaut mieux vaut faire de la poésie que du cinéma. Par ces temps qui courent, où l’on vit des drames humains avec de plus en plus de gens qui dorment dans la rue, cela me pose un problème. Alors que ceux qui me connaissent savent que j’ai longtemps été un fervent défenseur de l’art pour l’art. »

Cinéma belge 24 mai 2015

l’auteur belge n’est pas naturellement porté vers la grosse comédie. Mais peut-être que cette nouvelle génération, qui a une autre manière d’aborder les choses, va nous apporter ça. Laissons, en tout cas, les anciens faire ce qu’ils font. On ne peut pas leur demander de changer leur fusil d’épaule et nous écrire 25 comédies par an, simplement pour en espérer deux bonnes. Laissons évoluer les choses, et puis on verra où poussera le plus beau jardin. Regardez en Flandres, pendant une décennie, il ne s’est pratiquement rien passé, et puis coup sur coup, pendant cinq ans, ils ont eu une suite de triomphes exceptionnels. Cela pourrait tout à fait se passer chez nous. On a, dans notre paysage, toujours eu d’excellents films. Et voyez donc Jaco, il vient de nous sortir une très belle comédie, là ! (sourire) » « On le sait tous, fait bien de rappeler Philippe Reynaert, le problème de la Belgique franco-


Dossier

Joëlle Milquet Ministre de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles

J’ai envie de continuer à valoriser le cinéma belge e que le Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel reste Ministre de la Culture depuis l’an dernier, Joëlle Milquet rappell seule production audiovisuelle belge, l’organe disle premier partenaire du cinéma belge francophone. En 2014, pour la de ces apports l’ont été directement aux films, composait d’une enveloppe budgétaire de 28 millions d’euros : 63,5% plétés par 36,5 % d’apports extérieurs. se retrouve en sélection à Cannes, cela vous procure quel Quand vous apprenez qu’un film comme Le Tout Nouveau Testament sentiment ? Comme Ministre de la Culture, belge et francophone, Joëlle Milquet : Très sincèrement, j’en suis heureuse, évidemment. juste valeur, tant via ses producteurs que ses réavoir que le cinéma belge francophone est apprécié et reconnu à sa eu la chance de voir et d’aimer le film de Jaco Van lisateurs et ses acteurs, c’est gratifiant. D’autant que j’ai déjà ur, parce qu’il y a une âme belge, qu’il est hors du Dormael. Ce film incarne à mes yeux tout le talent de ce réalisate me, d’émotion, d’humour, de questionnement, et commun voire même alternatif. Il y a une poésie et un zeste de surréalis de virtualité même : il y a tout dans ce film !

Vous êtes une cinéphage, à la base ? ne permet pas de tout voir, mais étudiante, j’ai quand J.M. : J’ai toujours aimé le cinéma. Forcément, la vie politique le journal de la faculté de droit de l’Université Camême fait pendant deux ans des critiques de cinéma dans Le Bègue, voyais. Mais bon, tout ça s’est passé à une époque tholique de Louvain. J’aimais beaucoup écrire sur les films que je culturel (sourire). où je ne pensais pas du tout me retrouver dans la politique ou le senti particulièrement impliquée Lors de votre premier bilan annuel, en mars dernier, on vous a sont primordiaux et nombreux. Nous avons encore J.M. : Oui, car les enjeux autour de notre culture et notre cinéma . Je reviens d’ailleurs du Québec où leurs probeaucoup de choses à faire au niveau de la promotion et de la diffusion des solutions. Je crois aux nouvelles salles que blèmes sont un peu similaires. Mais je suis convaincue qu’il existe ement aussi, où nous n’avons par exemple pas de cours nous allons ouvrir, au rôle des centres culturels et de l’enseign sujet mais cela pourrait tout à fait changer ! lié au cinéma comme cela se passe en France. Rien n’est écrit à ce

Comment voyez-vous le cinéma belge évoluer ? de nouer de nouveaux accords de production avec J.M. : Notre réputation en matière de savoir-faire est là. Nous venons évolution générationnelle logique. Une nouvelle gél’Amérique du Sud et le Canada. Maintenant, chez nous, il y a une besoins. On a besoin de diversités, simplement parce nération, différente j’ai l’impression, va arriver avec d’autres en tout cas très envie de continuer à valoriser le que la Belgique est diversifiée, avec des origines diverses. J’ai Une enquête vient de démontrer que notre investisconcept cinéma belge francophone, et de tout ce qui se passe autour. interpellant. Les Flamands, comme les Québécois, sement en termes de séries était l’un des plus mauvais d’Europe. C’est côté francophone, on a tendance à trop éparpiller ont su construire une identité, et nous pouvons le faire aussi. Car clairement quelque chose à faire. Il n’y a rien les forces. On manque d’un véritable projet collectif. Il y a là-aussi pas nécessairement avec arrogance, n’est-ce pas ? de mal à être un peu plus fiers de ce qu’on fait. Fierté ne rime

D.H.

Cinéma belge 25 mai 2015


Dossier phone, cela reste son marché. En Flandres, vous avez un matelas de spectateurs. Que vous fassiez un film d’amour ou de guerre, vous avez 50.000 spectateurs assurés. Certains vont jusqu’à un mil-

d’un certain académisme. Que ça soit en Allemagne, en France, aux Pays-Bas ou en Turquie, vous pouvez le vérifier, les films champions nationaux sont souvent des comédies ou du moins,

« Moi, dit Philippe Reynaert, je dis oui à 100% aux films de genre, mais je pense que nous devons surtout continuer à faire des choses à part. “Soyez Belges, soyez fous !”,

Le temps où l’on ne produisait qu’un certain type de film en Belgique est révolu Jeanne Brunfaut, Centre du Cinéma

lion, ce qui est à peine croyable pour une population qui en compte six. La Belgique francophone elle, doit faire face à presque tous les films français qui sortent chez nous. Se démarquer est compliqué, mais attention, personne n’a dit que c’était impossible ! » On rappellera qu’il y a à peine vingt ans, le public flamand, en dépit de la fierté qu’on lui attribue volontiers, ne se rendait pas davantage au cinéma pour y voir ses films.

« On doit continuer à faire nos trucs à nous » Bruno Plantin-Carrenard, directeur d’exploitation du groupe UGC depuis 1992, est ré-

des films qui parlent du quotidien des gens. Ce sont peut-être ces films-là qui manquent chez nous. » « C’est vrai, renchérit Philippe Logie, les gens ont envie de voir un cinéma qui leur parle. Regardez la popularité d’un programme télévisé comme The Voice, les gens ont toujours envie de voir leur voisin chanter à la télé. Cette attirance pour contenu local, ça a toujours existé. » Ces dernières années, certains signes d’ouverture ont été démontrés par les commissions de sélection, en passe, d’ailleurs, d’être réformées. « Le temps où l’on ne produisait qu’un

m’a récemment dit une productrice française. (rire) » Patrick Quinet prévient : « Ce n’est que ma pensée, mais je crois qu’on ne doit pas marcher sur les plates-bandes d’autres cinématographies bien plus performantes. On ne va pas se mettre à réaliser des comédies musicales parce que ça marche très bien en Inde. On doit, je pense, continuer à faire nos trucs bien à nous. Mais on doit peut-être avoir une meilleure compréhension du marché et du public. Quand on le connaît bien, c’est là qu’on peut agir. Regardez la Flandre : De Zaak Alzheimer, Rundkskop ou The Broken

Par les temps qui courent, investir des millions d’euros dans un film qui va réaliser quelques centaines d’entrées, cela me pose problème Philippe Reynaert, Wallimage

gulièrement convié lors de débats autour du cinéma belge. « Je ne sais pas quelle est la nature ou la définition d’un auteur belge, mais j’ai l’impression qu’il faudrait peut-être parfois sortir

certain type de films est révolu, dit encore Jeanne Brunfaut. Sans doute avons-nous encore quelques progrès à faire en matière de polar ou de comédie, mais cela viendra. »

Cinéma belge 26 mai 2015

Circle Breakdown sont des films formidables. C’est exotique, c’est dur, c’est noir, mais c’est très typique : ni les Américains ni les Français ne font ça et ne pourraient faire ça ! Mais


Dossier

Nous sommes aujourd’hui conscients de la grande responsabilité prise en nous impliquant dans le cinéma belge Alain De Greef, BNP Paribas Fortis

côté francophone, on a les talents pour y arriver aussi. »

Le défi de la distribution En attendant, le chemin d’un film belge francophone en salle reste encore un vrai parcours du combattant. En coulisses, les soucis liés à la distribution (peu de temps à l’affiche, noyés dans la masse…) sont régulièrement évoqués. Mais quelques pistes existent, comme la mise en place de quotas. L’an prochain en outre, treize nouveaux écrans viendront peupler le parc de salles, à Bruxelles, Charleroi et Namur, entre autres pour permettre une meilleure diffusion du cinéma belge.

Le vaste et important chantier des (web)séries L’adage dans le milieu, certes un peu réducteur, est souvent entendu : « Si le cinéma flamand marche si bien aujourd’hui, c’est grâce aux séries télévisées. » Car en effet, au nord du pays, le succès reste étroitement lié à la popularité de nombreux acteurs locaux, qui se sont fait connaître à travers la dizaine de séries qui peuple, encore aujourd’hui, le petit écran flamand. Les téléspectateurs ont là-bas accompagné sur grand écran des visages qu’ils connaissaient via le petit. C’est notamment la raison pour laquelle en 2013, la Fédération Wallonie-Bruxelles et la RTBF ont à leur

« C’est soulageant, avoue Jeanne Brunfaut, car dans le turnover actuel, les films belges, même quand ils sont bons, restent trop peu de temps à l’affiche. Là, j’espère que ces écrans permettront d’en garder quelques-uns plus longtemps. »

La responsabilité prise par une banque

De son côté, Bruno Plantin-Carrenard, tempère légèrement : « c’est une piste parmi d’autres, mais la théorie seule qui voudrait nous faire dire que parce qu’il y a plus d’écrans, plus les films belges vont marcher, cela reste acrobatique et improbable. C’est le public qui finira toujours par trancher. Nous, exploitants, notre rôle est d’attiser cette passion

En 2010, un nouvel acteur important a surgi sur le marché cinématographique belge : BNP Paribas Fortis. Outre le financement des récompenses flamandes (les Ensors) et francophones (les Magritte), la banque a permis de lancer Cinevox, une vaste plate-forme de promotion du cinéma belge, alliant site internet et capsules diffusées au cinéma.

tour imaginé, via un fond commun, la mise en place simultanée – du jamais vu – de quatre séries hebdomadaires belges francophones, pour permettre une diffusion hebdomadaire en primetime durant la saison. Une intention louable, mais qui, reconnaissons-le, a suscité quelques légères interrogations voire divergences au sein du secteur : un jury à 90% non-belge, des budgets low-cost, une identification difficile des projets souhaités (entre Plus belle la vie et …Borgen) et le processus, long et ambitieux, est déjà retardé, après l’échec de la première, peut-être un peu lancée à la hâte. Mais même si le temps passe, on peut tout à fait pardonner l’une ou l’autre erreur de jeunesse, et quelques espoirs peuvent donc être nourris quant

Cinéma belge 27 mai 2015

pour le cinéma. Mais l’appétence, bien sûr, on peut tous la stimuler. Car si le film plaît, y’a effet boule de neige et cela créé des succès. »

à la suite. D’autres séries sont en cours de production, voire en tournage comme La trêve, de Matthieu Donck. Du côté des webséries, la RTBF se mobilise aussi. Après le joli succès rencontré par Typique, la websérie Euh, lauréate d’un appel à projets (sur 40 inscrits) a débuté sa diffusion le 26 mars dernier avec un budget de 100.000 euros. Un nouvel appel vient déjà d’être lancé pour 2016 et d’autres projets sont en chantier. Bref, en plus du court métrage belge dont le niveau semble plus relevé que jamais, on assiste là aussi à la création d’une nouvelle émulation. Qui s’en plaindra ?

D.H.


Dossier « En Belgique, nous sommes peu nombreux dans le monde bancaire à se partager l’espace cinématographique, explique Alain De Greef, responsable du sponsoring et de l’événementiel. Avec également, des initiatives comme les BNP Paribas Fortis Films Days, le BE Film

Quant à un rapprochement Ensors-Magritte pour une seule cérémonie nationale, il n’y croit pas. « C’est une utopie. En Flandre, on connaît à peine Benoît Poelvoorde et pas du tout Bouli Lanners par exemple. Côté francophone, les films flamands sont aussi méconnus.

malin, on va directement lui dire : “Oh t’es Belge, prends une bière et calme-toi” (sourire). C’est génial, mais c’est peut-être à cause de cela qu’on ne décolle pas sur autre chose. Bien que oui, regardez en foot avec l’équipe nationale belge, ou en tennis, ça peut tout à fait marcher.

Ce qu’il manque chez nous, ce sont des films qui parlent du quotidien des gens Bruno Plantin-Carrenard, UGC

Festival, le FIFF, nous sommes devenus en très peu de temps incontournables dans le microcosme du cinéma belge, un créneau particulier mais volontairement choisi. Au départ, les réalisateurs se demandaient un peu ce qu’on venait faire là, nous voyant même d’un drôle d’œil. Aujourd’hui les mentalités ont changé, les mêmes personnes reviennent vers nous afin de se concerter sur le meilleur moment pour sortir leur film. Après cinq ans, le bilan est donc positif. Cependant nous sommes à présent conscients de la

Mais j’aime l’idée de continuer à faire des ponts entre les communautés, à tous les niveaux. Outre Matthias Schoenaerts, des personnalités comme Stijn Coninx, Sam Louwijk, Wim Willaert font ça très bien. »

Mais n’oublions pas qu’on va vers un monde et une génération plus égoïste, plus fière. De ces valeurs qui peuvent nous sembler négatives, on peut bizarrement en tirer quelque chose de positif à terme ! »

Un peu de fierté ?

« Objectivement, pense encore Bruno Plantin-Carrenard, on doit peut-être un peu sortir de discussions qui tournent en rond entre professionnels belges. Il faut se rendre compte que le marché mondial évolue vite. On vit une époque de mondialisation où l’activité du ci-

Si une certaine fierté belge francophone n’existe pas vraiment dans le cinéma comme elle peut par exemple exister dans sport, elle peut se créer, selon Philippe Logie. « A partir du moment où l’on a un vivier de talents et

Nous devons peut-être avoir une meilleure compréhension du marché et du public Patrick Quinet, Artémis

grande responsabilité que cela représente. Sans nous, je pense que les Magritte ou Cinevox auraient beaucoup du mal à se financer. Il n’est donc pas question de changer notre stratégie du jour au lendemain. Nous nous inscrivons dans une optique de continuité. »

qu’on ne dupe personne, où serait le mal d’exprimer un peu de fierté francophone ? Surtout qu’il y a matière à, c’est là tout le paradoxe ! » « Mais bon, explique Patrick Quinet, notre manque de fierté est aussi ce qui fait le côté génial des Belges, personne ne se prend au sérieux, ici. C’est bien simple, s’il y’en a un qui fait son Cinéma belge 28 mai 2015

néma est très dépendante de l’activité mondiale. En ce moment, on assiste d’ailleurs à une baisse évidente du box-office aux États-Unis, à une stagnation en l’Europe et à une nette augmentation du pays émergent. Sachez qu’on construit une nouvelle salle par jour en Chine, une par semaine au Brésil et en Russie. Il n’y a


Dossier

Grâce aux Magritte, les gens commencent à mieux connaître nos films et nos acteurs Philippe Logie, Be TV

jamais eu autant de spectateurs dans les salles du monde entier. Donc, une chose est sûre, la fin du cinéma, ce n’est pas pour tout de suite. Daniel Toscan du Plantier le disait lui-même : “le cinéma a été en crise avant même son apparition !” En réalité, il ne s’est jamais aussi bien porté qu’aujourd’hui. Mais chez nous, j’ai l’impression qu’un changement de génération est en train de s’opérer. Même si certes, en Bel-

Quelques chiffres TOP 3 des films belges (nombre d’entrées en Belgique de Mars 2014 à Mars 2015)

gique francophone, disons-le, on fait encore de l’artisanat. Cela dit, attention : l’artisanat peut tout à fait permettre de toucher un public important. Ce n’est pas contradictoire. »

une enquête sera menée autour de la perception qu’ont les Belges de leur cinéma. Un indicateur qu’on devine utile, face aux nombreux et passionnants défis qui attendent le cinéma belge dans les années à venir.

Sans doute y verra-t-on un peu plus clair dans les mois à venir. Pour la première fois depuis 2009 et sous l’impulsion de la Ministre de la Culture Joëlle Milquet (cfr encadré),

David Hainaut

Films francophones

Films flamands

Les rayures du zèbre

62.312

Bowling Balls

269.000

Deux jours, une nuit

60.488

K3 dierenhotel

264.157

Pas son genre

32.085

De behandeling

139.757

www.hella-casting.be 00 32 477 41 25 58


Interview Comédien éclectique, passionné de littérature, et trublion gouailleur, Benoît Poelvoorde fait son grand retour à Cannes dans un rôle… divinement prometteur. Il paraît que nul n’est prophète en son pays. Pourtant en Belgique, si quelqu’un met tout le monde d’accord, c’est bien Benoît Poelvoorde. Dans le milieu du cinéma tout d’abord, où sa réputation n’est bien sûr plus à faire : depuis l’explosif C’est arrivé près de chez vous qui fit sensation sur la Croisette en 1992, chaque apparition du comédien originaire de Namur sur le grand écran a attiré ses compatriotes en salles… Même s’ils le préfèrent dans des comédies cultes (Les Randonneurs, Podium, Le Vélo de Ghislain Lambert, Rien à Déclarer) que dans des drames d’auteur intimistes (Entre ses mains d’Anne Fontaine, Une histoire d’amour d’Hélène Fillières, Trois cœurs de Benoît Jacquot). Dans le milieu littéraire, aussi : en 2013, ce passionné de lecture lance à Namur l’Intime Festival, un événement pluridisciplinaire abordant la littérature par le prisme du cinéma, de la photographie ou de la littérature. Résultat : un franc succès, avec plus de 4.000 visiteurs pour sa seconde édition en août dernier. Et en politique, Benoît Poelvoorde fait aussi des émules grâce à son franc-parler légendaire. En 2011, face à la crise politique sans précédent que traverse la Belgique, il appelle ses compatriotes à « ne plus se raser jusqu’à ce que la Belgique se relève ». Ou encore en 2014, où, excédé par la Manif pour tous en France, il lâchait qu’« En Belgique, on s’enfile comme des rois » (sic). Des propos allègrement repris dans les médias des deux côtés de la frontière. Bref, en Belgique, en France mais aussi en Suisse, où il tournait récemment La Rançon de la Gloire de Xavier Beauvois, la carrière de Benoît Poelvoorde, 50 ans depuis septembre dernier, a de beaux jours devant elle. N’en déplaise aux rumeurs récurrentes annonçant sa retraite (rumeurs encore démenties par le comédien il y a quelques mois). La preuve : en février 2014, avec la comédie sportive Les Rayures du Zèbre de Benoît Mariage (Les Convoyeurs attendent), le comédien caracolait en première place du Box-Office belge (francophone)… et tant pis si le film a fait un flop monumental en France. L’année 2015 promet d’être tout aussi riche, puisqu’elle marque le grand retour de Benoît Poelvoorde sur la Croisette avec le Tout Nouveau Testament, le nouvel opus de son compatriote Jaco Van Dormael, sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs. Et même s’il n’est pas cer-

La dernière fois que… Vous avez fait votre scolarité chez les Jésuites à l’internat de Godinne, en Belgique. La dernière fois que vous avez prié ? Benoît Poelvoorde : « Hier soir. Je suis croyant, je l'assume sans problème. » Vos Carnets de Mr Manatane, au Grand Journal sont devenus cultes. La dernière fois que vous êtes passé à Canal ?

Il faut dire que le scénario du film, coécrit par Van Dormael et le romancier belge Thomas Gunzig, l’est tout autant. Le pitch : Dieu vit à Bruxelles avec sa femme et sa fille (la jeune Pili Groyne). Cette dernière, pour se venger de son père, décide de balancer sur internet la date de décès de tous les humains. S’ensuit un chaos général, qui contraint Dieu à redescendre sur Terre… Il s’agit de la première collaboration entre le Namurois et le réalisateur de Mister Nobody : « Jaco qui m'a demandé un jour : “Est-ce que tu veux tourner un petit truc avec moi ?” explique Benoît. J'ai dit oui sans avoir lu le scénario car j'adore Jaco. Il me dit “Tu feras tel personnage”. Pour finir il change d'avis : “Ecoute, je préférerais que tu fasses Dieu”. Je n’ai toujours pas lu le scénario, mais je dis d'accord, je ferai Dieu. Et puis ensuite j'ai lu le scénario ! » Coproduction belgo-franco-luxembourgeoise, le film réunit également Yolande Moreau, François Damiens et Catherine Deneuve, qui partage des scènes avec… un gorille. « Oui, vous allez voir, il y a vraiment des trucs de dingue. » confirme Poelvoorde, qui a lui-même hâte de découvrir le résultat. « De toute façon, c’est Jaco, il a une grâce... Donc je ne sais pas du tout ce qu'on va voir, mais ce sera gracieux. En tout cas ça ne ressemblera à rien de ce qu'on connaît, ça j'en suis certain. Je suis très content de l'avoir fait, par contre je suis curieux de découvrir ce que va donner mon personnage, car moi-même pendant le tournage je demandais à Jaco : “T'es sûr qu'il est si méchant ?” et il disait “Oui, vas-y !” Donc je l'ai fait comme il voulait ! Je ne me dédouane pas, que du contraire, c'était très amusant. En plus Jaco il sait très bien ce qu'il veut. » Prévendu à une quinzaine de pays (dont l’Allemagne, l’Autriche, la Grèce ou Hong-Kong) grâce à un promoreel projeté au marché du film du Festival de Berlin en février dernier, le film fera donc sa grande première à Cannes avant de sortir à l’automne dans les salles belges (Belga Films) et françaises (Le Pacte). Pour la plus grande joie du public, le prophète Poelvoorde est de retour dans un rôle divin. La boucle est bouclée.

ça m'emmerde. J'avais promis que j'irais avec Edouard Baer, et puis pour finir je me suis dégonflé. Ça m'ennuie un peu, ces trucs-là. » Dernière fois à Cannes ? B.P. : « Oh bah euh... (Il réfléchit). C’était avec Gustave Kervern et Benoît Delépine, pour Le Grand Soir en 2012. C'était assez pathétique, d'ailleurs. » Pourquoi ? B.P. : « Ben Cannes, ça m'ennuie un petit peu maintenant. Et puis j'ai 50 ans, j'en ai un peu fait le tour. Je n'ai plus la forme physique. »

© Belgaimage

B.P. : « Oh, j'ai refusé d'aller aux 30 ans, parce que les réunions de vieux combattants

tain qu’on y croisera le comédien en chair et en os (voir ci-contre), ce sera l’occasion de le découvrir sur grand écran dans un nouveau rôle très, très prometteur : celui de Dieu. « Mais attention, c’est un Dieu particulier, hein ! Je n'ai pas une grande barbe et tout ça, je bois de la bière et je fume comme un pompier ! » prévient l’intéressé, hilare.

Cinéma belge 30 mai 2015

Elli Mastorou

Vous avez lancé l'Intime Festival, un festival de littérature. Dernier livre lu ? B.P. : « Alors je viens de lire un bouquin magnifique, dont j'oublie tout le temps le nom. Je lis comme un malade mais je ne retiens jamais les noms, parce que j'en lis plein en même temps. C'est sûr… Bon, je ne vais pas pouvoir en parler. C'est un truc intime (rires) ! Je crois que mon cerveau le fait exprès, car à un moment, j'ai ressenti qu'il était important que je me remette à lire pour moi, et pas pour le festival. Et à partir de ce moment-là je me suis réapproprié les livres de manière à ne pas les partager (rires). »


BENOIT POELVOORDE Interview

SUR LA TERRE COMME AU CIEL

Cinéma belge 31 mai 2015


© Versus production/F.Maltese

Prochainement

Joachim Lafosse nous revient avec Les chevaliers blancs. Une adaptation libre de l’affaire de l’Arche de Zoé, ce scandale sur la tentative d’enlèvement de mineurs tchadiens qui avait éclaté en octobre 2007.

zaine des Réalisateurs en 2008 et qui avait pris part à l’Atelier du Festival de Cannes en 2005 sous le titre “Révolte intime”).

Donzelli (en Sélection officielle cette année avec Marguerite et Julien) et Reda Kateb. Tous, pour une toute première collaboration.

Un autre fait divers Octobre 2007. Les membres de l’association française L‘Arche de Zoé d’aide aux orphelins sont arrêtés par les forces de police tchadiennes pour la tentative d’embarquement illégal d’une centaine d’enfants en vue de les faire adopter en Europe. Les représentants seront rapatriés en France fin décembre et condamnés à des travaux forcés, puis à la prison ferme avant d’être finalement grâciés par le président du Tchad. Libérés, ils feront cependant face à un procès en France en 2012 et seront condamnés un an plus tard. Éric Breteau, le président de l’association et sa compagne Emilie Lelouch écoperont de deux années de prison par la justice française plus une amende, tandis que les autres membres de l’équipe seront condamnés à des peines allant de 6 mois à un an de prison.

Un casting essentiellement français certes, mais complété par des acteurs belges avec qui le réalisateur a l’habitude de travailler : Stéphane Bissot, Raphaëlle Bruneau, Jean-Henri Compère mais également Yannick Renier (Nue Propriété), Catherine Salée (Folie privée) et Luc Van Grunderbeeck (Elève Libre, projeté à la Quin-

Dans les légendes classiques d’antan, les chevaliers blancs font souvent référence à ces braves héros toujours au service des faibles et des plus démunis. On les imagine alors intervenir pour la cause de personnes en détresse, sauver les victimes innocentes en repartant avec elles sur leur cheval blanc, après les avoir délivrées du mal, du

Son précèdent long métrage À perdre la raison, présenté à Cannes dans la catégorie Un Certain Regard en 2012, avait permis à Emilie Dequenne de remporter le Prix d’interprétation féminine pour son rôle de Murielle auprès de Tahar Rahim et de Niels Arestrup. Pour son 6ème long métrage, dont le tournage prévu pour huit semaines avait débuté le printemps passé au Maroc, l’auteur bruxellois met en vedette Vincent Lindon, Louise Bourgoin, Valérie

Manifestement chère au réalisateur, la problématique du cercle familial est traitée dans presque tous ses films.

Cinéma belge 32 mai 2015


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LES CHEVALIERS BLANCS

de Joachim Lafosse

méchant. Souvent charismatique, beau, voire séduisant (et doté d’une prophétie), le leader de ce type d’action humanitaire est en principe une personnalité très respectée dans son milieu. Vincent Lindon en héros tragique dans le rôle du président de l’ONG “Move for Kids” devrait bien faire l’affaire au volant de sa camionnette blanche salvatrice. En général, ce superman pense que tout lui est dû sous prétexte qu’il part d’une bonne intention. Sauf que le temps où ONG était synonyme de “sauvetage” semble désormais révolu. Les volontaires n’étant plus ces libérateurs faiseurs de miracle. Les assistés font maintenant la différence entre Occident et Paradis et comprennent qu’une couverture médiatique ne veut pas nécessairement dire faire écho dans le Nord. De la sphère familiale à l’associatif Si on retrouvait encore le thème de la famille dans À perdre la raison, aussi inspiré d’un fait divers (l’affaire Geneviève Lhermitte, du nom de cette mère de Nivelles qui avait assassiné ses cinq enfants en 2007), le foyer fait place ici à la sphère associative. Manifestement chère au réalisateur, la problématique du cercle familial est traitée dans presque tous ses films. En effet, dans À perdre la raison, un couple se laisse surmener par leur ménage au fur et à mesure que la famille s’agrandit. Dans Nue Propriété, deux frères dont les parents sont séparés finissent par se déchirer suite à

un conflit avec leur mère. Elève Libre retraçait quant à lui la jeunesse d’un adolescent dont les parents divorcés confient l’éducation de leur fils à des amis. Après une séparation violente et douloureuse dans Folie Privée, un père ne s’en remet pas et décide de s’acharner sur son ex et sur le compagnon de celle-ci. Aussi, le court métrage Tribu mettait en scène une famille explosée ayant du mal à passer outre les conséquences de la séparation. En tant qu’auteur qui pousse le spectateur à sortir de sa passivité, Joachim Lafosse devrait parvenir une fois de plus ici à le mener vers la réflexion. L’action du héros pourrait nous révéler les véritables motivations et les raisons qui le poussent à agir ainsi. Entre le besoin des autres pour se sentir exister et celui d’être secouru soi-même, les intentions peuvent mener à la confusion. Sans jugement pour autant ? Pas si sûr quand on traite un fait divers au cinéma, même librement, on peut s’attendre à ce que le spectateur compare le récit avec la version réelle en cherchant davantage une réponse plutôt qu’une explication. Djia Mambu Belgique-France – 105’ – Drame / De Joachim Lafosse. Avec Vincent Lindon, Louise Bourgoin, Valérie Donzelli, Reda Kateb / Produit par Versus Production. Coproduit par Prime Time / Sortie : second semestre 2015

Cinéma belge 33 mai 2015


© Twitter @GGallienne

Prochainement

DOWN BY LOVE de Pierre Godeau

Guillaume Gallienne et Adèle Exarchopoulos se donnent la réplique pour la première fois dans ce drame amoureux situé en milieu carcéral. L’histoire de Down By Love se déroule au sein d’une prison pour femmes. Son directeur,

Jean, connu et apprécié de tous, connait une ascension professionnelle exemplaire. Tout bascule le jour où arrive une nouvelle détenue, Anna. Ensemble, ils vont vivre une histoire d’amour passionnelle et interdite aux conséquences parfois tragiques… Pierre Godeau,

qui fit ses débuts de réalisateur en 2012 avec Juliette, prend ici en main la réalisation et l’écriture du scénario basées sur des faits tirés d’une histoire vraie. Il s’entoure d’un casting prometteur en prenant à ses côtés deux acteurs consacrés aux Césars 2014, à savoir Guillaume Gal-

Cinéma belge 34 mai 2015

lienne (Les gatçons et Guillaume à table) et Adèle Exarchopoulos (La vie d’Adèle). Jessica Matthys France-Belgique – 100’ – Drame / De Pierre Godeau. Avec Adèle Exarchopoulos, Guillaume Gallienne / Coproduit par Versus Production / Sortie : 2016


Je suis mort mais j’ai des amis de Guillaume & Stéphane Malandrin

Potes, dernier voyage et rock’n’roll : le nouveau film des frères Malandrin délaisse quelque peu (mais pas trop) les sombres histoires de dysfonctionnement familiaux et les ambiances un brin ténébreuses pour se lancer dans le road movie déjanté qui sent bon le soleil, l'alcool et la sueur des showcases. Yeah baby ! Quatre rockers bientôt cinquantenaires enterrent leur meilleur ami chanteur. Par amitié (et peut-être aussi pour se prouver que rien n’arrête le rock), ils décident d’emmener les cendres du

rive pas et Où est la main de l’homme sans tête), à savoir des comédies amères sur fond de psychanalyse et de relations humaines pas toujours simples. Il ne faudrait toutefois pas sous-estimer le potentiel humoristique du film, les frères ayant toujours teinté leurs films d’un univers un peu décalé, aux frontières du surréalisme. Ça tombe bien : Bouli Lanners et Wim Willaert (Quand la mer monte), deux habitués du road movie déjanté par ailleurs (Eldorado pour l’un, Hitler à Hollywood pour l’autre), sont deux des fameux rockers en quête d’aventures, barbus poivre

demeurent pas moins le pendant burlesque et masculin du sombre et féminin Où est la main de l'homme sans tête, ce qui n'est pas peu dire. Point de sexisme néanmoins : si Je suis mort mais j'ai des amis est un film de mecs, c'est surtout un film sur l'amitié et le refus de vieillir, ou plutôt sur le fait de mal vieillir la tentative, dans un baroud d'honneur, de concrétiser ses rêves. Si le film est drôle, il n'en est pas moins profond et scrute, avec un œil malicieux, cette vieille faiblesse du

© Versus production/Hugo Poulain

Prochainement

regret de ne pas rester jeune. En résulte une œuvre tantôt punk tantôt mélancolique, drôle et amère. Bref un film à la fois émotionnellement complexe et profondément humain. Typiquement belge, en somme. B.M.

Belgique-France – 95’ – Comédie dramatique / De Guillaume & Stéphane Malandrin. Avec Bouli Lanners, Wim Willaert, Lyes Salem, Serge Riaboukine / Produit par Versus Production / Sortie : second semestre 2015

Sexe, cendres et rock'n'roll chanteur en tournée américaine. La veille de partir, un militaire se présente à eux comme l’amant caché du chanteur. Leur voyage prend un tour inattendu… A bien des égards, le nouveau film des frères Malandrin s’annonce à l’image de leurs précédentes œuvres (Ça m’est égal si demain n’ar-

et sel qui découvrent la drôle histoire d’amour de leur ami disparu. Et si leur programme contient presque autant de concerts surprenants que de moments éthyliques (qui, comme tout bon road movie, les dirigent vers de rocambolesques surprises au réveil), ces papys du rock n'en Cinéma belge 35 mai 2015

Who’s farted ?


Interview

Matthias SCHOENAERTS 11 maimai Cinéma Cinémabelg belgee 36 2015 2015


Interview

GENTLENESS BEHIND A TOUGH EXTERIOR A regular in tough guy parts, Matthias Schoenaerts is back in Cannes with Maryland, a new military role following the release of Suite Française last April. But you’re unlikely to spot him partying in Cannes even so. He’s appeared as an irascible cattle farmer (Bullhead), as a yob (The Loft), as a drifter (Rust and Bone), as a dangerous criminal (Blood Ties, The Drop), and more recently as a Nazi officer (Suite Française). But don’t be fooled by all the bad boy roles, because Matthias Schoenaerts is only interested in talking about one thing: love. It’s the main factor in his choice of roles in films such as Suite Française directed by Saul Dibb (The Duchess), an historical film in which he plays a German soldier in love with a French woman (played by Michelle Williams). ‘That love grows through a shared passion for music, which for me is the language of the soul. So it’s a love that grows through the soul. The story between the French woman and the German officer is not pri-

2015: a full year Since the success of Bullhead, which has brought him international fame and led to projects such as Jacques Audiard’s Rust and Bone and Guillaume Canet’s Blood Ties (presented Out of Competition last year), Matthias Schoenaerts’ career seems to have taken a definite trans-Atlantic turn. He is present at Cannes this year in Alice Winocur’s Maryland, competing in the Un Certain Regard selection, and can soon be

marily one of physical attraction: it’s much more profound. This is what makes love so exciting and complicated at the same time. Physical relationships can be dazzling too, but they are fleeting. Love is the only thing that can save us.’ Mind you, the actor explains, not in some trite, everyday meaning of the word. ‘I’m not talking about love in some hippyish or corny sense. Love is the most potent thing there is, the thing with the most power in the world. It’s much easier to hate, to be cynical or violent. But to be consistent in love, to love deeply – only tough people can do that.’

there’s a certain loneliness that comes with that. But that’s just the way it is. Anyway, I’m not a big party animal, I go clubbing every now and then, but I’ve learned not to overdo it because it’s no fun. I don’t mind people coming up to me, but if it’s all the time it becomes intrusive. And the alternative of going places flanked by three bodyguards is also ridiculous... so it’s better just not to go. I prefer eating out, meeting people... There are plenty of interesting things to do. It’s a shame that people think that interesting things only happen in nightclubs, because they’re wrong (laughs).’

Under the hard man exterior, then, the actor from Antwerp conceals a sensitive nature. Appearances can be deceptive... as Schoenaerts of all people knows well. Because since the success of Bullhead, he has been stuck with the image of a ‘red carpet star’, far from reality though that is. ‘Yes, when you show up somewhere, people see you as a symbol of success or something, because they identify you with what they have seen and have an opinion about you. But in fact they don’t know you at all. And

All of which makes you wonder whether he’ll show up in Cannes, or at any rate whether he’ll attend its lively parties. But that’s unlikely to stop female fans from trying their luck, given that the Belgian press announced in late April that the actor had ended his five-year relationship with a supermodel from Antwerp. A word to the wise...

seen playing a shepherd in love with Carey Mulligan in Far From The Madding Crowd, a superb film by Thomas Vinterberg (to whom we owe The Hunt among other works). Adapted from the novel by Thomas Hardy, the film will be released in Belgium on 20 May and in France on 3 June. Since 6 May, the French have also been able to see A Little Chaos, the second film by actor Alan Rickman, in which he stars with Kate Winslet. The Belgians will have to wait until 1 July for the film’s release. By the end of the year, Schoenaerts’ talents will also be on

display in Luca Guadagnino’s A Bigger Splash (inspired by Jacques Deray’s The Swimming Pool) alongside Ralph Fiennes and Tilda Swinton, as well as in the TV miniseries Lewis and Clark with Casey Affleck. Not to mention The Danish Girl directed by Tom Hooper (The King’s Speech), on the story of the first person to have a sexchange operation, in which he acts alongside Eddie Redmayne (2014 Oscar for Best Actor for The Theory of Everything), the filming of which was completed in Brussels in March of this year.

Elli Mastorou

Matthias Schoenaerts in seven dates 1992 : Cinema debut in Stijn Coninx’s Daens alongside his father, the actor Julien Schoenaerts

2002 : Start of his professional career with Dorothée Van den Berghe’s film Meisje

2010 : First film in France: The Pack directed by Frank Richard, with Emilie Dequenne

Cinéma belge 37 mai 2015

2011 : Breakthrough with Michaël R. Roskam’s Bullhead (in a role for which he gains an Oscar nomination), which opens the path to an international career

2012 : Included in the Official Selection at Cannes with Jacques Audiard’s Rust and Bone and wins the César Award for Most Promising Actor

2014 : Back in Cannes with Alice Winocour’s Maryland in the Un Certain Regard selection © Belgaimage

1977 : Born in Antwerp


FAMILLE A LOUER de Jean-Pierre Améris

Après Les émotifs anonymes, Jean-Pierre Améris reste à la comédie et propose une rencontre à nouveau insolite entre deux êtres complémentaires sans qu’ils le sachent. Un petit bonbon acidulé et une romance forcément décalée. Paul-André Delalande se retrouve oisif après avoir revendu avec succès sa société à la suite d’un burn-out. Il a les moyens de tout s’acheter, mais quoi ? Que lui manque-t-il ? Une famille… Il va donc louer une famille pendant 3 mois. Violette Deschamps presque la quarantaine, pleine de peps, battante mais dans la difficulté depuis toujours va rentrer dans sa vie avec ses trois enfants. Paul-André succombera, après quelques demitours et péripéties, à l’attachement et à la joie de ces trois larrons en foire… Dixième long métrage de Jean-Pierre Améris, un habitué de Cannes (Prix de la Semaine de la Cri-

tique en 1996 pour Les Aveux de l’innocent, sélection à Un Certain Regard en 2004 pour Poids léger), Famille à louer marque les retrouvailles du duo gagnant Améris/Poelvoorde. Film délicat et subtil, véritable numéro de funambule entre la comédie romantique standard et l’œuvre intimiste plus personnelle, plus arty, Famille à louer est aussi surprenant que le précédant film d’Améris. La personnalité et le jeu tout en contraste de Benoît Poelvoorde, tour à tour clown et mélancolique, n’est certes pas étranger au film, mais Virginie Efira n’est pas en reste et offre au film un formidable duo inattendu, souvent amusant, forcément touchant. B.M.

France-Belgique – 110’ – Comédie dramatique / De Jean-Pierre Améris. Avec Benoit Poelvoorde, Virginie Efira, François Morel, Edith Scob / Coproduit par Versus productions / Sortie : second semestre 2015

Cinéma belge 38 mai 2015

© Pan-Européenne/Thierry Valletoux

Prochainement


Prochainement L’adolescence, le couple, le poids de la transmission... Les courts métrages de Guillaume Senez, récompensés dans nombre de festivals, portaient déjà les germes de son premier long métrage, Keeper.

KEEPER

© Denis Jutzeler

Les cinémas du monde entier ont filmé la jeunesse, les ados, les ragazzi, les teenagers. Pour son premier long métrage de fiction, le jeune cinéaste Guillaume Senez explore cette période trouble entre enfance et âge adulte, et met en scène un jeune garçon de 15 ans, Maxime, interprété par Kacey Mottet Klein, le bouleversant Enfant d'en haut d'Ursula Meier. Maxime aime la vie et le foot. Mais il aime surtout Mélanie, explorer avec elle une sexualité naissante. Seulement voilà, les jeux de grands sont parfois dangereux. Mélanie tombe enceinte et le garçon se retrouve face à un choix. « Je filme ce que je connais. J’ai vécu des choses fortes dans mon adolescence, je les ai digérées et je me sens assez à l’aise pour en parler aujourd’hui. Je ne suis pas à l’âge où je pourrais tourner un film comme Amour, même si ça m’intéresse. »

de Guillaume Senez

Keeper suit, du point de vue d'un garçon, une aventure presque toujours exclusivement filmée du côté des femmes. « Lorsqu’on parle d’enfants, et surtout d’un enfant à venir, c’est la plupart du temps comme si le père n’existait pas. Ici, c’est Maxime que l’on suit. C’est lui qui va tout faire pour garder cet enfant. »

retrouver à la place de coscénariste, un cinéaste éloigné autant que possible des trames convenues, David Lambert. Les deux hommes avaient déjà écrit ensemble Dans nos veines, un court métrage sur un adolescent s'apprêtant lui aussi à devenir père. Visiblement, la question du choix, ce choix déterminant qui va décider de

comment un adolescent va pouvoir grandir, n'a pas fini d'interroger le cinéaste. Sarah Pialeprat Belgique-France-Suisse – 95’ – Drame / De Guillaume Senez. Avec Kacey Mottet Klein, Galatea Bellugi, Catherine Salée, Laetitia Dosch, Sam Louwyck / Produit par Iota Production. Coproduit par Savage Films / Sortie : début 2016

Attaché aux pas de son personnage principal, le film avance, mettant en parallèle son rôle de gardien de but et de père en devenir. Au fond, les mêmes limites, la même impuissance, Maxime n'a pas le pouvoir de gagner la partie, il pourra seulement l'influencer. Dans cette histoire non balisée, hors cadre, les cinéphiles ne e s'étonneront sans doute pas d

Chi ha scoreggiato ?

40

28e édition

7-13 mars 2016 Amicale Solvay Jemeppe-sur-Sambre

Le festival fête ses 40 ans.

info@cinemabelge.be - www.cinemabelge.be

Cinéma belge 39 mai 2015

CINÉMA ET MÉDIAS


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Prochainement

La Belle Saison

connaissance de Carole, 35 ans, en couple avec Manuel. Très vite leur relation se transforme en histoire d'amour. Mais alors que Delphine est contrainte de rentrer à la ferme, Carole décide de la suivre dans cette nouvelle vie. Là-bas, elles vont devoir affronter une autre réalité… L'histoire du mouvement féministe français a malheureusement été très peu traitée dans la fiction cinématographique. En nommant ses deux personnages principaux par les prénoms de deux grandes figures du féminisme français qu'étaient Carole Roussopolous et Delphine Seyrig, cette histoire d'amour sera, on l'espère, l'occasion d'évoquer une période centrale pour la lutte du droits des femmes mais aussi de la lutte contre le patriarcat et le sexisme.

de Catherine Corsini

Retour attendu pour Catherine Corsini, la réalisatrice du magnifique Partir et du troublant Trois Mondes. La Belle saison sera l'occasion de revivre les débuts du mouvement féministe en France à l'orée des années 70.

1971. Fille de paysan, Delphine a 23 ans lorsqu'elle décide de monter à Paris pour monter sa propre affaire et acquérir ainsi son indépendance, projet rare et difficile pour une femme à cette époque. Elle y fait la

UN DEBUT PROMETTEUR d’Emma Luchini

Un homme déçu par l'amour, un père amoureux des fleurs, un petit frère idéaliste et une créature de rêve... De quoi faire tourner les têtes, les cœurs et les genres façon comédie grinçante, un brin nostalgique. Son premier film, Sweet Valentine, était un road-movie à la Fellini, foutraque et tendre où une paumée au grand cœur s'entichait

d'une petite frappe. La Femme de Rio, meilleur court métrage aux César 2015, racontait de nouveau les rêves d'un couple improbable. Ce second long-métrage d'Emma Luchini s'avère encore un film sur l'amour mais cette fois, c'est aussi une affaire de famille. Elle cosigne en effet le scénario d'Un début prometteur avec l'écrivain

Cinéma belge 41 mai 2015

Fred Arends

France-Belgique – 100’ – Drame / De CatherineCorsini. Avec Cecile de France, Izia Higelin, Noémie Lvovsky / Coproduit par Artémis Production / Sortie : août 2015

Nicolas Rey, son compagnon, qui adapte ici l'un de ses romans... Et elle dirige son père Fabrice dans un film que cet amoureux de Flaubert, des femmes et de la langue française qualifie « d'irrésistible. » Un rôle pour lui taillé sur mesure, celui d'un horticulteur romantique, qui accueille son fils (Manu Payet) à la suite d'un terrible chagrin d'amour. À leurs côtés, Zacharie Chasseriaud, l'un des Géants de Bouli Lanners, et la belle Veerle Baetens, tout droit sortie du flamboyant mélodrame de Felix Van Groeningen, Alabama Monroe. Trois générations d'hommes donc (un père en fin de course, un trentenaire usé, un jeune adolescent fougueux) et une jeune femme intrépide et surprenante, voici le programme d'une éducation sentimentale sans doute douce-amère, mordante et rêveuse... Anne Feuillère France-Belgique — 100' — Comédie / De Emma Luchini. Avec Manu Payet, Fabrice Luchini, Veerle Baetens, Jean-Michel Balthazar, Zacharie Chasseriaud / Coproduit par Nexus Factory et Umedia / Sortie : octobre 2015


© Partizan/Nexus Factory/Potemkino

Prochainement

Moonwalker

Mélange improbable et réussi de Big Lebowski, de Snatch et de buddy movie sur fond de théorie du complot, Moonwalkers est un divertissement de haut vol, synthèse de l’action et de l’humour dans un Swinging London tout en décalage. Juillet 1969. Tom Kidman, un agent spécial de la CIA, est en-

de Antoine Bardou

voyé à Londres pour trouver Stanley Kubrick et le convaincre de tourner un faux alunissage au cas où la mission Apollo échouerait. Il ne trouve pas Kubrick mais, à sa place, Jonny, manager minable d’un groupe de rock… Quand il doit définir son film, le réalisateur Antoine Bardou-Jacquet déclare : « Ce film est à la fois

un film d’action et une comédie qui combine ce que j’ai toujours rêvé de filmer : des combats et une bonne dose de stupidité. » Et le résultat est à la hauteur des ambitions ! En optant pour un ton délibérément déjanté sans renier pour autant un certain héritage burlesque (beaucoup de gags visuels, l’opposition entre le

petit et le grand gaillard), Moonwalkers pourrait bien devenir rapidement culte si on le laisse faire. B.M. France-Belgique – 100’ – Comédie, action / De Antoine Bardou-Jacquet. Avec Ron Perlman, Rupert Grint, Erika Sainte / Coproduit par Nexus Factory et Potemkino / Sortie : automne 2015


© Copyright Emmanuelle Nico

Prochainement

LE CHANT DES HOMMES

pation de l'église Saint Boniface, du Béguinage ou au Petit-Château... Il y a eu un texte par nécessité dramaturgique, puis tout cela est reparti vers le vivant, vers des hommes et des femmes qui ont vécu eux-mêmes une situation d'exil. » Car parmi tous les personnages présents dans le film, tous en effet collent, de près ou de loin, à leur propre histoire, qu'il s'agisse de l'actrice iranienne Maryam Zarée, de l'acteur marocain Assaâd Bouab ou encore du comédien turc Ahmet Rifat. Incarnation et puissance. La richesse du réel alliée à la force de la fiction constitue la colonne vertébrale de leur travail. Et lorsqu'on évoque la lutte, l'engagement, le cinéma comme ma-

de Marie Jimenez et Bénédicte Liénard

Mary Jimenez et Bénédicte Liénard étaient déjà parties ensemble sur les rives de l’Ucayali filmer la survie d’une mère courage pour Sobre las brasas. Ce nouveau film à quatre mains fait place aujourd'hui à une autre aventure cinématographique mais surtout humaine. Le chant des hommes, c'est le titre du premier long métrage de fiction réalisé conjointement par Mary Jimenez et Bénédicte Liénard. Un film expérience, un film monde, un film qui replace le cinéma là où il devrait être, toujours, qui tente de traduire et de mettre en partage une humanité possible. Difficile donc de faire entrer dans un projet aussi intime et fort les mots forcément usés par les médias. Et si l’on essaie de parler de cinéma avec les réalisatrices,

c'est forcément de la vie dont il faut parler, car entre les deux, il n'y a pas de frontière. Leur “métier”, elles ne l'exercent pas. C'est la seule manière qu'elles ont trouvé pour être au monde, pour être vivantes, pour être des êtres humains parmi les êtres humains. Alors oui, Le chant des Hommes parle des migrants sans-papiers avec lesquels elles vivent depuis plus de 15 ans, et pour autant, non, les Sans-Papiers ne sont pas le “sujet” de leur film. D'ailleurs, ceux qui les incarnent sont plus les personnes que les personnages d'une longue histoire qui a commencé il y a sept ans : « On a commencé à écrire ce film en 2008. Le travail s'est fait sur base de ce qu'on vivait, Mary Jimenez et moi-même depuis 2003, au milieu des sans-papiers, pendant l'occu-

Cinéma belge 43 mai 2015

chine de guerre, c'est un refus catégorique que l'on sent chez Bénédicte Liénard : « Nous faisons ce film pour rendre grâce à ces résistants. Faire un film en guerre, c'est être “contre”. Nous, nous croyons en la générosité du cinéma. Nous croyons qu'il ouvre une porte qui peut changer la vie des gens. » Ne pas faire un film contre, mais un film pour, et continuer à dire que l'art permet ce que les temps présents peinent à mettre en mouvement, créer un Nous qui réunit. Sarah Pialeprat

Belgique-Luxembourg – 97’ – Drame / De Mary Jimenez et Bénédicte Liénard. Avec Maryam Zarée, Assaâd Bouab, Ahmet Rifat, Sam Louwyck / Produit par Tarantula Belgique / Sortie : 2015


Bamberski de Vincent Garenq

Dans ce drame policier, Daniel Auteuil incarne un père qui se lance dans un combat judiciaire long de 27 ans afin de comprendre les circonstances de la mort de sa fille. Une quête de vérité qui se transformera en véritable obsession. Bamberski est la quatrième réalisation de Vincent Garenq, à qui l’on doit notamment Pas comme les autres et Présumé coupable. Tiré de

faits réels, le film raconte comment André Bamberski (Daniel Auteuil), apprend douloureusement la mort de sa fille alors qu’elle est loin de lui, en vacances. L’enquête mal menée par la police et une autopsie bâclée le laisseront sceptique. Pour lui, le coupable est Dieter Krombach, un homme dont l’attitude lui semble trop suspecte. André décide alors

Cinéma belge 44 mai 2015

© LGM Cinéma/Black Mask Productions/Arena Multimedia Group/Nexus Fac-

Prochainement

de faire lui-même la lumière sur cette affaire et se lance dans un combat judiciaire de 27 ans, dont le but sera de faire éclater la vérité. Jessica Matthys France-Belgique – 100’ – Drame / De Vincent Garenq. Avec Daniel Auteuil, Sébastien Koch, , / Produit par Nexus Production et Umedia / Sortie : fin 2015


Prochainement

© Wrong Men

Préjudice d’Antoine Cuypers

Après un succès indiscutable en festivals avec son court métrage A New Old Story et une résidence prestigieuse, Antoine Cuypers passe au long métrage avec un drame familial au casting trois étoiles qui évoque par touches le cinéma de Maurice Pialat et sa violence psychologique et soudaine. Lors d’un repas de famille, Cédric, 32 ans, apprend que sa sœur attend un enfant. Alors que cette nouvelle suscite dans toute la famille un engouement sincère, chez Cédric – qui vit toujours chez ses parents – elle résonne étrangement, emprunte d’un certain ressentiment. Cédric, dont le rêve simple – un voyage en Autriche – est sujet à discussions, transformera peu à peu son ressentiment en colère puis en fureur. Au cours de cette célébration familiale, il tentera d’établir, au regard de tous, le préjudice dont il se proclame victime. Entre déni et paranoïa, révolte et faux-semblants, jusqu’où une famille est-elle capable d’aller pour préserver l’équilibre ? A partir de quand doit-elle réprimer la différence ? Bien qu'il s'agisse de son premier long métrage, Antoine Cuypers est un talent prometteur : lauréat du prix du Meilleur court métrage au Festival International du Film francophone de Namur ainsi qu'au Brussels Film Festival avec A New Old Story, son projet Préjudice avait retenu l'attention en son temps de la Résidence Emergence (cette résidence de mise en scène, créée en 1998 par Élisabeth Depardieu, qui s’adresse à des auteurs réalisateurs développant leurs projets de premiers longs métrages ; les lauréats tournent une ou deux séquences de leur scénario au sein de la résidence et bénéficient d’un accompagnement concret artistique et technique). Quelques années plus tard, le résultat est là : sous forme de drame du quotidien, Préjudice est un huis clos (l'histoire se déroule entièrement dans une maison, qui agit presque comme un personnage) étouffant sur les liens ténus et fragiles d'une famille où les non-dits et l'égoïsme sont plus présents qu'ils ne devraient. Porté par un casting alléchant (Nathalie Baye et Arno en parents), tourné majoritairement dans la région du Luxembourg, Préjudice ressemblerait presque sur le papier au secouant Pardonnez-moi de Maïwenn ou au cinéma de Pialat (notamment la lente et violente rupture familiale de A nos amours). Mais

ce serait sous-estimer l'univers et la signature d'Antoine Cuypers, dont A New Old Story abordait déjà, à sa manière, fugace, presque sensuelle, la fragilité des relations humaines. B.M. Belgique-Luxembourg-Pays-Bas – 106’ – Drame / De Antoine Cuypers. Avec Nathalie Baye, Arno, Thomas Blanchard, Eric Caravaca, Ariane Labed / Produit par Wrong Men Films / Sortie : automne 2015

Cinéma belge 45 mai 2015


Prochainement

Ladygrey

© Le Bureau Films

d’Alain Choquart

Alain Choquart signe un drame historique en plein cœur de l’Afrique du Sud avec un Jérémie Renier d’une rare intensité.

Alain Choquart s’était fait connaître auparavant en tant que directeur de la photographie de Bertrand Tavernier. Son troisième film,

Ladygrey, nous plonge au sein d’une mission française située au pied des montagnes du Drakensberg dix ans après la fin de l’Apartheid. C’est là qu’une communauté de Sudafricains noirs et blancs tente de vivre pacifiquement en essayant d’oublier les affrontements de cette triste période. Mais peu à peu, le souvenir d’un massacre non résolu va venir troubler les esprits et mettre en péril l’équilibre de la réconciliation. En effet, quelques années plus tôt, plusieurs personnes avaient péris mystérieusement sans qu’aucun des corps ne soit jamais retrouvé. Une jeune femme (incarnée par la talentueuse Emily Mortimer) tentera par tous les moyens de résoudre cette énigme en remuant le passé. Côté casting, on retrouve également Peter Sarsgaard (vu dernièrement dans Blue Jasmine), Claude Rich et notre compatriote Jérémie Renier dans un rôle particulièrement torturé. Jessica Matthys France-Belgique-Afrique du Sud – 109’ – Drame / De Alain Choquart. Avec Emily Mortimer, Peter Sargaard, Jérémie Renier, Claude Rich, Liam Cunningham / Coproduit par Artémis Production / Sortie : juin 2015

BELGIAN DISASTER de Patrick Glotz

Quand trois losers se lancent dans une arnaque trop évoluée pour eux, ça donne une comédie burlesque et une satire de notre temps. Autodidacte, Patrick Glotz est venu au cinéma par passion. Après quelques courts métrages il a l'occasion de proposer à Eric Vanbeuren, producteur d'YC Aligator le scénario de son premier long. Une amitié naît et un projet de film loufoque et poétique :

Belgian Disaster. Cette comédie grand public se plonge dans les Marolles, le quartier populaire haut en couleur du Marché aux Puces de Bruxelles. Dans ce monde de la débrouille, trois bras cassés se lancent dans une arnaque un peu plus sérieuse que d'habitude. Ils ont tout pour foirer... Ils vont foirer. A la manière des grandes comédies italiennes, Belgian Disaster multiplie les situations jubilatoires, les aventures rocambolesques, les répliques savoureuses et rend, avec tendresse,

Cinéma belge 46 mai 2015

hommage à ceux qui luttent encore contre le rouleau compresseur de la modernité, la loi des riches et du plus fort. « C'est que la comédie, rappelle Patrick Glotz, c'est l'art de la colère. » Anne Feuillère Belgique – 89' – Comédie / De Patrick Glotz. Avec Sam Louwyck, Jean-Luc Couchard, Michel Schillaci, Arsène Mosca, Erika Sainte, Stéphane Bissot, Chantal Pirotte,Christelle Delbrouck, Lio / Produit par YC Aligator Film / Sortie : hiver 2015


FILIGRANES, SOURCE DE SCENARIO Librairie

Filigranes est, depuis plus de 30 ans, la référence des librairies de Belgique et l’une des plus extraordinaires d’Europe. Du haut de ses 2.600m² remplis de coins et recoins regorgeant de lectures et de coups de cœur, la librairie est aujourd’hui plus qu’un simple lieu de culture. C’est un rendez-vous, un lieu à haute utilité sociale, un concept-store dont le succès n’a d’égal que la qualité des conseils qui y sont prodigués. Filigranes, c’est d’abord et avant tout une histoire, humaine et littéraire. Née de l’enthousiasme et de la vision de Marc Filipson, la petite librairie de quartier de ses débuts s’est étoffée, sans perdre l’âme humaine qui lui provient d’une passion inégalable. Lieu de vie, de liberté (comme Werber, pour Filigranes, « le secret de la liberté, c’est les librairies »), le concept-store des bibliophiles offre à ses lecteurs la possibilité de flâner, prendre un café, écouter Vincent jouer du piano ou boire les conseils littéraires de Marianne. En constante recherche de renouvellement, Filigranes n’a jamais cessé d’évoluer, pour s’adapter aux exigences du métier, aux

et permettent à tous les lecteurs et cinéphiles de poser leurs questions, d’obtenir une dédicace ou de simplement converser, en toute intimité, avec les acteurs, artistes et créateurs du monde cinématographique. Filigranes vit et fait vivre le cinéma. Depuis longtemps dotée d’un rayon DVD à la sélection variée, la librairie Filigranes se targue aujourd’hui de pouvoir réunir, en un même lieu, ces deux mondes que tout rassemble.

Marc Filipson

nouvelles technologies et aux nouveaux modes de lecture, mais aussi pour proposer, toujours, un service à la hauteur de sa réputation. Mais Filigranes, plus que simplement lettres, est aussi cinéma. Le rayon beaux-arts fourmille d’ouvrages plus incroyables les uns que les autres, du plus détaillé au plus généraliste. David et son équipe vous y attendent pour faire partager leurs découvertes et leurs lectures.

Car chez Filigranes, les présentations et séances de dédicaces sont autant d’occasions de côtoyer les grands noms du septième art. De Jean-Claude Drouot, en mars, à Stéphane de Groodt, de Frédéric Beigbeder à Dominique Besnehard, les rencontres à la lisière des lettres et de l’image se succèdent

Nombreuses également sont les personnalités du cinéma à pousser les portes de l’enseigne trentenaire pour y présenter leurs œuvres.

¿Quién se tiró un pedo? Cinéma belge 47 mai 2015

La librairie et son fondateur, Marc Filipson, peuvent aujourd’hui faire de l’opinion de Jean Cocteau un véritable leitmotiv : « Le cinéma, c’est l’écriture moderne dont l’encre est la lumière. »

Charles Cachelou


Prochainement

EN MAI FAIS CE QU’IL TE PLAIT

© Jean-Claude Lother/Nord-Ouest Films

de Christian Carion

Alors que depuis 2014, la France se focalise sur la Première Guerre Mondiale, le cinéaste Christian Carion, dans une parfaite indépendance, s’intéresse pour sa part à la Deuxième, et signe un film ironiquement intitulé En mai fais ce qu'il te plait.

Plus particulièrement, le cinéaste revient sur un épisode peu évoqué au cinéma, l'exode de 1940 qui jeta sur les routes près de dix millions de personnes. La Première Guerre, le cinéaste l’avait précédemment traitée en 2005 dans le très beau Joyeux Noël.

AVRIL ET LE MONDE TRUQUE de Franck Ekinci & Christian Desmares

© Need Productions

On en avait rêvé, voilà qui est fait : l'univers rétro-futuriste, tendre, mystérieux et... pluvieux de Jacques Tardi débarque enfin au cinéma. Pour les puristes de l'animation, les amoureux de Nestor Burma et d'Adèle Blanc-Sec et les accros du “steampunk”, Avril et le monde truqué, c'est LE projet qui fait frémir tout le milieu de l'animation traditionnelle. Car c'est la première fois que l'œuvre de Jacques Tardi est adaptée au cinéma dans un film d'animation classique où le traitement est dessiné. Grosse production en gestation depuis plusieurs années, Avril et le Monde truqué est réalisé par Christian Desmarre (qui a notamment dirigé l'animation de Persepolis et animé Corto Maltese) et Franck Ekinci (passé par plusieurs séries animées,

Pour construire ce drame historique avec véracité, le producteur français Nord Ouest Production n’a pas hésité à lancer préalablement un appel visant à recueillir les témoignages de tous ceux qui ont vécu, de près ou de loin,

cet épisode douloureux. Pour le cinéaste, c'est un hommage rendu à ces oubliés de l'histoire officielle, qualifiés de fuyards par Pétain, qui formèrent un des mouvements de masse les plus importants du 20ème siècle en Europe.

Dans les chariots et les charrettes, sur les chemins poussiéreux ou boueux, Christian Caron a embarqué des acteurs belges, français et allemands reconnus pour leur force d’engagement comme Mathilde Seigner, August Diehl ou encore Olivier Gourmet. Sarah Pialeprat

France-Belgique – 110’ – Drame historique / De Christian Carion. Avec August Diehl, Mathilde Seigner, Jacques Bonnaffé, Olivier Gourmet, Joshio Marlon-Oenicke / Coproduit par Artémis Productions / Sortie : novembre 2015

dont Tintin ou Les Zinzins de l'espace), tous deux du Studio “Je Suis Bien Content”, producteur délégué du film. Avec Benjamin Legrand, Ekinci signe un récit de science-fiction fidèle à l'univers de Tardi où les menaces planent, où l'oppression est patente, et où les machines fonctionnent encore à la vapeur. Dans ce monde resté bloqué à la révolution industrielle du 19ème siècle, dirigé par un énième Napoléon, les savants disparaissent mystérieusement les uns après les autres. La jeune Avril part à la recherche de ses parents scientifiques portés disparus, avec son grand-père et son chat à la langue bien pendue. La direction artistique de cette uchronie à la Orwell faite de mystères, d'aventures et de révoltes est assurée par Jacques Tardi lui-même. De quoi régaler petits et grands. Anne Feuillère France-Canada-Belgique – 90' – Animation / De Franck Ekinci & Christian Desmares. Avec les voix de Marion Cotillard, Marc-André Grondin, Jean Rochefort, Philippe Katerine, Bouli Lanners, Olivier Gourmet, Anne Coesens / Coproduit par Need Production, RTBF, Centre du Cinéma, Wallimage, Inver Invest / Sortie : automne 2015

Cinéma belge 48 mai 2015


La dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil de Joann Sfar

Le cinéaste et dessinateur Joann Sfar aime les réalités troubles, les douces folies, l'absurde et l'improbable. Pour son troisième long métrage après Gainsbourg (Vie héroïque) et Le Chat du Rabbin, il s'attaque au

ARRETEZ-MOI LÀ de Gilles Bannier

Réalisateur habitué de séries françaises (Reporters, Les beaux mecs, Paris), Gilles Bannier signe ici un premier long métrage dans lequel un chauffeur de taxi est piégé dans un engrenage infernal. En prenant en charge une cliente à l'aéroport de Nice, Samson Cazalet va voir sa vie basculer. Car si cette rencontre donne lieu à un coup de foudre réciproque, la disparition de la fille de cette femme le soir-même va semer le trouble. Un faisceau de preuves

roman culte de Sébastien Japrisot. Le producteur Patrick Godeau, scénariste du film avec Gilles Marchand, l'a embarqué dans cette aventure coproduite par Versus. Tourné à la fin de l'été, le film réunit l'Ecossaise

© Legato Films/Nexus Factory

Sur un coup de tête, une femme prend seule la route vers la mer. Mais une agression, des inconnus qui la reconnaissent et une macabre découverte transforment peu à peu ce voyage en descente aux enfers. Un polar noir et vénéneux...

© Versus Production/Kris Dewitte

Prochainement

vont accuser le taximan qui devient le coupable idéal. Inculpé et arrêté, il est libéré lors d'un coup de théâtre mais devra affronter les regards toujours suspicieux et accusateurs. Dès lors, il devra se battre pour rétablir son honneur et sa vérité. Fred Arends

France-Belgique – 95’ – Thriller / De Gilles Bannier. Avec Reda Kateb, Léa Drucker, Gilles Cohen, Erika Sainte / Coproduit par Nexus Factory et Umedia / Sortie : été 2015

Cinéma belge 49 mai 2015

Freya Mavor, le chanteur français Benjamin Biolay, la star italienne Elio Germano et la franco-britannique Stacy Martin. Derrière la caméra, le surdoué Manu Dacosse, à qui l'on doit, entre autres, la photographie d'Alleluia ou de L'étrange couleur des larmes de ton corps. La dame dans l'auto devrait ainsi baigner dans une atmosphère inquiétante, à mi-chemin entre David Lynch et Claude Chabrol.

Anne Feuillère

France-Belgique – 100' – Policier / De Joann Sfar. Avec Freya Mavor, Benjamin Biolay, Elio Germano, Stacy Martin / Coproduit par Versus Production / Sortie : automne 2015


© Versus Production/Kris Dewitte

Prochainement Postproduction

Avec son quatrième long métrage en tant que réalisateur, Bouli Lanners confirme son engagement au service d'un cinéma tout autant lucide qu'attachant, à l'image de ce qu'il est au quotidien. Cinquante années au compteur de la vie et quasi autant de tournages : Bouli Lanners fêtera son demi-siècle ce 20 mai 2015, pendant que le Festival de Cannes, où il était venu présenter deux de ses films, battra son plein. Remis de problèmes de santé assez sérieux, l'acteur-réalisateur a plus que jamais conscience de l'importance de profiter de l'existence, même si son regard sur la société n'est pas pour autant débordant d'optimisme. C'est d'ailleurs ce constat qui lui a donné l'idée du titre de sa dernière réalisation en date : Les premiers, les derniers, dont le tournage s'est achevé fin mars. Comme il le déclarait début janvier dans les colonnes du quoti-

Les premiers, les derniers dien belge Le Soir, « j'ai fait un parallèle entre les premiers hommes et les derniers. Parce que j'ai l'impression qu'on a amorcé l'Apocalypse. On est dans une fin du monde, qui va peutêtre se faire lentement, mais on est clairement dans un déclin. Depuis peu de temps, on ne peut envisager l'avenir que de manière sombre. C'est un cap dans l'humanité, me semble-t-il. » Thématique récurrente Une sensation de destruction qui s'applique de manière plus intimiste à ses propres personnages, ainsi qu'il l'expliquait lors de la sortie des Géants : « Ce film m'a permis de comprendre qu'il y avait une thématique récurrente dans mon travail qui est l'éclatement de la structure familiale classique, avec des personnages projetés dans des formes d'errance suite à cela et qui essaient ensuite de reconstruire quelque chose qui pourrait pallier à cette absence de structure. Ce qui me fascine n'est pas cette destruction, mais

bien la reconstruction qui s'ensuit avec des éléments différents.» A chaque fois, Bouli Lanners prend le temps de laisser ses projets se décanter afin qu'ils trouvent un nouvel écho par rapport au présent. Une inspiration qui dépend donc énormément de la vie quotidienne, de rencontres, de musiques et des gens qu'il observe. Une fois le sujet bien ciblé, il est capable d'écrire assez rapidement, sans devoir apporter de nombreuses modifications au récit en cours de développement. Un décor idéal Les premiers, les derniers a été tourné en Belgique mais aussi en France dans la région naturelle agricole à vocation très fertile de la Beauce. Située au sud-ouest de Paris, le cinéaste en est tombé amoureux un jour où il voyageait en train du côté d'Orléans. Un décor idéal pour y raconter l'histoire d'Esther et Willy, un

Cinéma belge 50 mai 2015

jeune couple en marge du monde qui semble fuir quelque chose et dont la route va croiser celle de Cochise et Gilou, deux inséparables chasseurs de prime chargés de retrouver au plus vite un smartphone au contenu embarrassant. Suite à leur rencontre, dans une petite ville perdue où le temps semble s'être arrêté, les choses ne vont pas se dérouler comme prévu. Un récit qui peut compter sur un casting relevé, dont font partie Suzanne Clément (sublime co-interprète féminine principale du Mommy de Xavier Dolan), Michael Lonsdale, David Murgia et le grand Max von Sydow. Sans oublier Bouli Lanners, à nouveau des deux côtés de la caméra, qui donne la réplique à l'acteur français : « C'est vraiment un mec que j'apprécie énormément pour son intégrité, son humanité, sa tendresse. Il est tout à fait raccord avec son cinéma. » Olivier Clinckart


Postproduction

et une bonne dose d’humanité UNE HISTOIRE D'AMITIÉ L'amitié, décidément un élément fondamental pour le réalisateur dans la conception de ses films. Jaques-Henri Bronckart en sait quelque chose. Co-fondateur en 1999 de Versus production avec son frère Olivier, il a produit tous les films de Bouli Lanners et est donc particulièrement bien placé pour en parler. Votre collaboration avec Bouli Lanners remonte à plus de quinze ans. Jacques-Henri Bronckart : « Bouli venait de tourner un court métrage, Travellinckx, dans des conditions qui semblent presque inimaginables aujourd'hui. Filmé en Super 8, en noir et blanc et figurant en quelque sorte parmi les pionniers du crowdfunding, puisque financé en partie par des amis et connaissances à raison d'une participation de 1.000 francs belges de l'époque (25 euros), à qui Bouli avait promis en échange une... cassette VHS du film ! Il est venu me montrer les images et j'ai trouvé le projet très intéressant malgré les moyens dérisoires avec lesquels il avait été développé. J'ai ensuite encouragé Bouli à écrire un autre court, dans

le cadre d'une production plus classique, et c'est à partir de là que les choses se sont enchaînées, tant pour lui que pour mon frère et moi, puisque c'est quasiment au même moment que nous avons créé Versus production. Il y a donc eu beaucoup de premières fois avec Bouli, qui est devenu pour nous un vrai partenaire de jeu et de route ! » Mais comment poursuit-on une telle collaboration de manière fructueuse pendant autant d'années ? J.H.B. : « De façon très naturelle, car elle va bien au-delà du simple aspect professionnel. Mais il est important de savoir trouver le bon timing et de rester à l'écoute en respectant le rythme de la personne avec qui on travaille, d'autant plus compte tenu du fait que Bouli n'est pas uniquement réalisateur mais aussi comédien. Par ailleurs, il n'y a pas de recette miracle, chaque film étant différent. Ainsi, après Eldorado qui a connu un joli succès, il a fallu oser prendre des risques pour le projet suivant, Les géants. Alors qu'il aurait été possible de s'offrir un certain confort en engageant des comédiens connus, Bouli a décidé de faire appel à des enfants, ce qui

ne constituait pas la démarche la plus simple de prime abord. Mais nous avons assumé tous ensemble ce risque réfléchi et nous ne le regrettons aucunement.» Eldorado et Les géants ont tous deux connu les honneurs d'une présentation cannoise, à la Quinzaine des réalisateurs. Quelle est l'importance pour un réalisateur et ses producteurs d'être présents au Festival de Cannes ? J.H.B. : « Cela semble être une évidence, mais tout dépend aussi des films concernés : certains en ont plus besoin que d'autres. Pour Eldorado, ça a permis de créer une notoriété autour du film ainsi que d'en élargir la programmation, tant en France qu'en Belgique. Pour Les géants, l'optique était

Cinéma belge 51 mai 2015

Who’s farted?

très différente : le film était programmé en clôture de la Quinzaine et Le gamin au vélo, des frères Dardenne, qui mettait aussi un enfant au premier plan, était en Compétition officielle la même année. Les retombées furent donc moindres, mais la présence à Cannes n'en était pas moins un honneur qui ne se refuse pas. Un film se fabrique de toute façon avant tout pour le public, mais participer au Festival peut constituer un formidable tremplin. » Deux premiers séjours cannois qui ne seront sûrement pas les derniers pour Bouli Lanners, un réalisateur profondément attachant à qui la cinquantaine va très bien. O.C.


Brèves

Visiteuse de choix

depuis fait du chemin, entre cinéma, musique et télévision. Dans le même jury que Jean-Marie Poiré lors du

dernier Festival International du Film Historique de Waterloo, la jeune

ateur pour camper le rôle de trentenaire a été embrigadée par le réalis Les Visiteurs 3 : la Terreur, Victoire-Eglantine de Montmirail dans er. « Il m’a regardé bizaraux côtés de Jean Reno et Christian Claiv de moyen âge ! » a comrement, en me disant que j’avais une tête cheval entre la Belgique et la menté la comédienne. Le film, tourné à ry. On y retrouvera d’autres Tchéquie, est coproduit par Nexus Facto Cornil, Jean-Luc Couchard, comédiens belges, comme Christelle re Alexandre Von Sivers. Christian Hecq, Éric De Staercke ou enco

Pas carriériste pour un Ce qu’en dit Cinéma Belge : Enfin ! cenar, au-delà d’un chasou, la petite-nièce de Marguerite Your comédiennes les plus risme évident, est sans conteste l’une des félicite. authentiques du cinéma belge. On s’en La Capitale a choisi Juliette Oui, Bruxelles a elle aussi son festival dédié aux longs métrages traditionnels : le Brussels Film Festival, qui se focalise chaque année autour du riche cinéma européen. Treizième du nom et organisé à Flagey, l’événement a succédé à trois anciennes formules (1935, 1947 et 1974), initialement imaginées par l’Association des journalistes de cinéma. Lui-même ancien journaliste – entre autres pour Cinéma Belge –, Ivan Corbisier a repris le flambeau en centrant son festival sur un invité, avec un package “films + master-class”. Cette année, c’est la comédienne Juliette Binoche qui se prêtera au jeu succédant ainsi aux réalisateurs Peter Greenaway (2012), Bertrand Tavernier (2013) et Sir Alan Parker (2014). D’autres grands noms du cinéma sillonneront bien sûr le BRFF.

Ce qu’en dit Cinéma Belge : Le tout dernier festival belge de la saison est organisé à une période plutôt creuse, et possède un certain charme, avec aussi, des concerts et des projections de films en plein air. Il mérite donc une attention.

Lino comment ?

! Les Dardenne... à Seraing ront-ils sur la CroiLes Frères Dardenne se rend e n’est pas tout à chos sette l’an prochain ? La bre fratrie tourcélè la que puis le, fait impossib fille inconnue, La nera cet automne à Seraing ans, l’actrice 26 t emen seul À el. avec Adèle Haen : celui du inée chem a déjà deux césars sur sa 4) et celui (201 nne Suza pour meilleur second rôle (2015). nts atta comb de meilleure actrice pour Les se en ores doct e d’un re stoi Le pitch évoque l’hi sé de refu a lle qu’e quête du nom d’une patiente idendre moin la sans e recevoir, retrouvée mort rieur anté est s-le, tité. Un projet qui, précison à Deux jours, une nuit.

: Tiens ? Habitués à Ce qu’en dit Cinéma Belge s ans depuis 1996 troi les tous venir à Cannes la Quinzaine des à avec La promesse sélectionné s suivants en film six s leur Réalisateurs (et avec eurs pourssad amba sélection officielle !), nos un an plus nt issa surg en e raient briser leur cycl u. tôt que prév

L’EXPLOIT DE MARIE

© France 2

Les Amours d’Astrée et Céladon, la Bruxelloise Stéphanie Crayencour a

© Denis Rouvre

Repérée en 2006 par Eric Rohmer pour les besoins de son dernier film,

Nommée à quatre reprises aux Césars, Marie Gillain aura attendu une deuxième nomination aux Molières pour se voir décerner le prestigieux et convoité titre de meilleure comédienne, pour son rôle Vanda dans La Vénus à la fourrure, par ailleurs désignée meilleure pièce. L’actrice avait frôlé le sacre il y a près de 20 ans, pour Le journal d’Anne Frank. Au cinéma, l’actrice liégeoise était présente cette année lors du dernier Festival du Film d’Amour de Mons pour Miracle d’amour avec Fanfare (un film belge réalisé par Hubert Toint), et a cette année, joué dans le dernier film de Pascal Thomas, Valentin Valentin.

Ce qu’en dit Cinéma Belge : Et dire que dans son impitoyable pays, beaucoup pensaient que le meilleur était déjà derrière elle. On apprécie.

Cinéma belge 52 mai 2015

L


Brèves

Bruxelles Richard cœur de

ua les esprits En 1982, il marq documentaire en signant un sur Marvin un mm co hors du côte belge la Gaye, filmé à ant son décès dix-huit mois av ans, Richard 70 A tragique. toujours en Olivier est on espère et e, rm fo grande re. L’un co en s pour longtemp les plus rs eu at is al ré des mpathiques – libres – et sy e vient de du cinéma belg coffret de un ir rt nous so haustif, ex © Richard Ol e ivier 6 DVD du genr es docubl ra mo mé 12 avec chienne de mentaires (Mar Foretroux, Esther Du nd fo Au e, vi telligence in et té ci causti ver…). Humour, . 29,99 € en bi cela fait du au programme : ns revendeurs. chez tous les bo

Coup d’œil sur l’Union des Artistes du Spectacle avec Julie Basecqz, comédienne et administratrice de l’Association. Vous avez coordonné notre encart dédié aux comédiens. Quels choix avez-vous opérés? Vu le nombre assez important de sollicitations, les professionnels ont été privilégiés par rapport aux comédiens encore aux études. Sans quoi la liste aurait alors été beaucoup trop longue!

accord, à néma Belge : D’ Ce qu’en dit Ci argement ch lé VOD et du té l’heure de la d an gr plus sur Internet, de DVD. Mais te hè ac n’ e nd mo il doit se cet objet-là, i. posséder chez so ut. to t es Un point c’

ce t en Fran

iste ? E à Paris ges 100% belges, ças,eaxu Centre-Walloneien s e lg e B Les Court s métra er u 6 juin à Pari liot, “Le de court

a Hé al er Un festiv la se passe du 1 ème fois par Louis hort Corn 3 ce pour le S 2 t le s e b é la i, fi ia r u li n u a é O o u d ? é p e l’in des 6 q . Emmen compte d long s, dont 5 re n d u lm n , fi Bruxelles n re 4 io 4 e adit pour s réunira veut la tr haine, e idéale dit long” comme le fois L’année proc ne vitrin t U E . . e s e lg n e n b cette de Ca u court t. Ce sera ctuelle d vénemen é qualité a l’ ra . e q tu Leturc ponc de ce fesmétrage de Vania té du nom mier film li a re p in g li ri jo o le pour l’ ue fois… Rien que rend chaq a Belge : ’y m s é n in O C ? it d is Ce qu’en sté. Depu ur, on a te tival, un jo

s jurys cannois Deux confrères dans le

Quelles sont les activités de l’Union des Artistes? D’abord, nous tâchons d’être présents dans les principaux festivals, comme lors du récent Brussels Short Film Festival ou du prochain Brussels Film Festival en juin avec, dans chaque cas, une journée dédiée à l’association. Nous pouvons organiser tant bien un débat sur la direction d’acteur - en présence de réalisateurs - qu’un stage de doublage pour nos membres. On espère en lancer d’autres: de marionnettes, de tangos, de doublage chanté, de voix pub etc…. Par ailleurs, nous avons un « Fond Union » à la Bibliothèque Royale et en 2007, nous avons relancé le Gala de l’Union des artistes et organisé le Bal des Acteurs à Bruxelles, en 2010. En ce moment, quels sont vos principaux "combats » ? De manière générale, nous menons une

© Instagram

Si les cinéastes belges gardent un lien étroit avec le Festival de Cannes, les journalistes ne sont pas en reste. Ainsi, notre confrère Boyd van Hoeij, basé en Europe mais qui œuvre notamment pour The Hollywood Reporter et le média hollandais Filmkrant, a l’honneur de se retroue de la Cricinq jurés de la Semain ver cette année parmi les storou – Ma i re collaboratrice Ell tique. En marge, not aire Bel-Cl rie Ma et ir e pour L’Aven également collaboratric féminin de à elle dans le jury 100% gique – se retrouve quant ition née pét long métrage), une com la Queer Palm (court et exuelles bis , lles xue questions homose en 2010 et qui traite des ou transgenres. Belges : Fred ge : Queer Palm apprécie les Ce qu’en dit Cinéma Bel re confrère not et ge, Bel éma e pour Cin Arends, également journalist ent en 2011 et intégré ce jury, respectivem Nicolas Gilson ont chacun 2013. Cinéma belge 53 mai 2015

vaste action philanthropique de défense morale de nos membres, pour renforcer la solidarité entre eux . Nous essayons de défendre les professions de nos membres, leurs emplois, la reconnaissance et la promotion des artistes au sein des nombreuses instances où nous sommes représentés. L’Union est présente par exemple chez Pro-Spere, la fédération des créateurs de l’audiovisuel et du cinéma), à la CCAS (Comité de Concertation des Arts de la Scène), au Théâtre des Doms à Avignon et au Guichet des Arts. Soit tant dans le secteur du cinéma que celui des arts de la scène. Et puis, nous nous battons pour la défense de la culture, comme c’est le cas cette saison avec la RTBF. Quels sont vos plus célèbres ambassadeurs? En vrac, je citerais José van Dam, Fabrizio Rongione, des membres d’honneur comme Annie Cordy ou Toots Thielemans. Mais tout cela reste finalement exponentiel, car depuis deux ou trois ans, nous tentons de recréer un nouveau dynamisme, pour solidifier cet organisme qui existe quand même depuis 1927. Votre Association se rend-elle à Cannes ? Bien sûr! Je serai moi-même présente a Cannes tous les jours à 17h sur le Belgian Boat, en vue de récolter de nouvelles inscriptions. Mais surtout, pour soutenir les Belges de l’Union présents sur la Croisette.

La liberté belge Alexandra Lamy dans un film belg e flamand, c’est la petite cocasserie du printemps. Dan s Vincent et la fin du monde, elle campe une tante qui voudrait freiner un neveu trop idéaliste à son goût . Un road movie comico-dramatique qui se balade entre la France et Belgique. Sur le tournage à Anv ers, l’actrice française, métamorphosée physiqueme nt pour l’occasion, a concédé à nos confrères du Soir : « En plus de la découverte d’un autre pays, d’un e autre sphère et d’une autre langue, je rencontre ici un cinéma qui offre plus de libertés. » Le film est réali sé par Christophe Van Rompaey, sélectionné en 2008 à la Semaine de la Critique, pour Moscow, Belgium. Ce qu’en dit Cinéma Belge : Cett e année, l’humoriste belge André Lamy, qui a vaguemen t fait carrière en France, a de son côté débuté au ciném a dans Jacques a vu, de Xavier Diskeuve. Aucun lien. Juste pour l’anecdote…


90 comédiens belges à Cannes

Aflalo Esther

Baeyens Dominique

Basecqz Julie

www.comedien.be/estheraflalo +32 479 669 274

jeanlucdarier@agencea.fr Agent : Jean-Luc Darier +33 1 44 88 20 88

www.juliebasecqz.com +32 475 316 431

Bastoen France

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www.comedien.be/francebastoen +32 486 302 602

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Brahy Sarah

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www.comedien.be/sarahbrahy +32 476 478 668

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Cinéma belge 54 mai 2015


90 comédiens belges à Cannes

Caron Laurent

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Clairembourg Anne-Pascale

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www.vimeo.com/94692560 + 32 478 618 560

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Cinéma belge 55 mai 2015


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Denis Geraldine

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Cinéma belge 56 mai 2015


90 comédiens belges à Cannes

Dherte Pierre

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Dujardin Caroline

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www.vimeo.com/SibylleduPlessy Agent: Stéphane Lefebvre +33 1 47 82 04 81

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Dussaiwoir Vincent

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Cinéma belge 57 mai 2015


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Cinéma belge 58 mai 2015


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Hebbelynck Florence

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Hinnekens Amandine

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Laroche Sandrine

Laroche Nathalie

Lecarte Jacques

laroche.sandrine@gmail.com +32 472 367 936

laroche.nath@gmail.com +32 473 462 343

jacques.lecarte@yahoo.fr +32 475 565 492

Cinéma belge 59 mai 2015


Prémisses du cinéma

Le cinéma en nous depuis toujours L’histoire de la naissance du cinéma est un véritable puits sans fond. De plus en plus, certains chercheurs remontent aux origines de l’humanité en accordant aux hommes du Paléolithique la maitrise des “techniques graphiques d’animation”. Car depuis la nuit des temps, l’homme a besoin de rêver et traduit son imaginaire dans les images. Flashback.

© Collection Iconothèque de l’INSEP

« Ces images sont la mémoire des rêves de nos ancêtres. » En 2011, le cinéaste Werner Herzog nous plongeait dans la grotte ChauvetPont-d’Arc et ses peintures rupestres, figures endormies depuis des dizaines de milliers d’années. Son documentaire, La grotte des rêves perdus, invite le spectateur à se rendre compte des prémices de l’image animée. Comme le panneau des Lions, spectacle vivant véritablement mis en scène par une grammaire visuelle à l’aide de profondeur de champs et des effets de mouvement. Le jeu des lumières vacillantes des torches d’alors, donne vie aux dessins, la notion d’animation est bel et bien là, délibérée. Avec ce film vient un témoignage fort, celui de la puissance de l’image présente dès que l’homme prend conscience de sa présence au monde. Une prise de

conscience qui passe par la création artistique dont la puissance expressive et dramatique anime littéralement la roche et ses accidents de relief. Rechercher la grâce du mouvement Dans un tout autre film, le mélancolique Holy Motors de Leos Carax présenté à Cannes en 2012, Monsieur Oscar explique qu’il continue à travailler – faire du cinéma – « comme j’ai commencé, pour la beauté du geste. » Leos Carax fait constamment référence au mouvement dans le cinéma, en reprenant notamment les chrono-

photographies d’Etienne JulesMarey. Depuis des dizaines de milliers d’années, l’homme tente d’animer son imaginaire mais jusqu’au 20ème siècle les technologies ne permettaient pas de réaliser un film comme on l’entend aujourd’hui. Peter Kubelka, cinéaste expérimental viennois, affirme que « le cinéma n’est pas le mouvement. Le cinéma est une projection d’images – qui ne bougent pas – à un rythme très rapide. » C’est à dire, exactement ce que faisaient les hommes de la Grotte de Chauvet. Les dessins y sont figés dans la pierre mais il est presque certain que les dessinateurs voulaient montrer des éléments mouvants. Toute l’histoire de l’art part de l’image. Elle va exploser au 19ème siècle avec l’avènement de la photographie qui à son tour entraine la naissance de la cinéma-

Cinéma belge 60 mai 2015

tographie. Déjà, la chambre noire cherchait à raconter des fragments de vie. Le cinéma est dans l’homme depuis la nuit des temps. Dans un texte “A propos de l’impression de réalité”, initialement publié en 1965 dans Les Cahiers du Cinéma, Christian Metz écrit que « le secret du cinéma, c’est aussi cela : injecter dans l’irréalité de l’image la réalité du mouvement, et réaliser ainsi l’imaginaire jusqu’à un point encore jamais atteint. » La quête de l’image Le cinéma est perpétuellement en mutation. En 2012, Le Hobbit : un voyage inattendu de Peter Jackson proposait une nouvelle technologie, la “Haute Fréquence d'Image”, plus précise et plus fluide et permettant d’augmenter le nombre d’images à 48 par seconde (au lieu des 24 habituelles). Les montages actuels sont plus accélérés qu’avant, enchainant les “plans-citation”.


Prémisses du cinéma Le cinéma est encore dans des processus balbutiants. Avec l’avènement du numérique et des jeux vidéo, des rythmes nouveaux nous obligent à être en constante mouvance. Le cinéma évolue très vite, les expériences foisonnent. Ce qui conduira sans doute à quelque chose de nouveau, qui sera le prolongement de ce que l’homme a connu il y a 30.000 ans. Le cinéma n’étant en soi qu’une tran-

sition, une étape. Car tout part dans tous les sens, on le voit dans la vidéo qui a des cadastres de plus en plus rapides. L’idée est de restituer une image dynamique la plus proche possible de la réalité. La quête du mouvement continue. L’objectif ne change jamais, il est de nous immerger complètement dans l’image. Astrid Jansen

La préhistoire du cinéma

La scène du puits

Raconter des histoires

En 1955 au Congrès International de Filmologie en Sorbonne, la pellicule d’un film est comparée à une longue frise de Lascaux formée de têtes de cerfs. Depuis, l’idée de pré-cinéma reste peu étudiée. En 2011, Marc Azéma, préhistorien, chercheur au CNRS et cinéaste, publie comme un ovni son ouvrage La Préhistoire du cinéma : origines paléolithiques de la narration graphique et du cinématographe. Depuis 20 ans, l’auteur analyse les figures représentées sur les parois des grottes afin de « mettre en évidence des mouvements. » La découverte d’une petite plaquette en schiste (15.000 ans avant J.-C.) prouve même que certains objets jusqu’il y a peu considérés comme des boutons sont en fait des jouets optiques. En effet, la succession rapide du côté pile puis face de ce “bouton” montre un renne se coucher et se relever.

Sur les murs de la grotte de Lascaux, « loin de se contenter de symboliser les animaux, [les hommes] voulaient aussi en représenter les mouvements et les émotions associées, telle que la colère de ce bison » sur le point de transpercer un homme en érection. Les techniques d’ani-

Certains artistes préhistoriques ont été jusqu’à ajouter à la représentation du mouvement, la dimension du temps. Cela à travers deux processus : la juxtaposition et la succession d’images, comme pour le bison à huit pattes de la grotte Chauvet. Ils avaient compris que l’œil humain – comme l’a décrit Ptolémée au 2ème siècle – conserve une image lumineuse pendant environ 50 millisecondes après que l’image ait disparu. Ce qui explique que le regard perçoit les images de façon continue et non saccadée. Parfois les effets sont poussés encore plus loin pour raconter une action. La frise des lions, trouvée dans la grotte de la Vache, est à ce sujet très significative. « La succession de félins gravés sur cette côte de bovidé explicite probablement la course d’un seul individu. […] La contemplation de pareilles images déclenche dans le cerveau un réflexe de recomposition du mouvement évoqué. »

mations sont très nombreuses mais l’œil des hommes modernes ne perçoit pas systématiquement ces animations quand ils sont discrets. « Pour un homme préhistorique en revanche, l’animation était évidente. » Il faut tenir compte du fait qu’une caverne n’était pas un musée mais bien « un espace où des observateurs en mouvement apercevaient les images pariétales sous des angles variés. »

L'Union de la Presse Cinématographique Belge soutient Cinéma Belge

Cinéma belge 61 mai 2015


Le patron, Maître Georges comme on l’appelle depuis longtemps, vous accueille et vous enveloppe de sa bienveillance. Attentif, il vous installe. Dans un décor sobre et stylé, le contact amical et chaleureux vous détend. Pas de doute, vous allez passer un délicieux moment. Il revient avec sa carte et vous découvrez toute la générosité des saveurs libanaises : le choix est exceptionnel ! Chaque plat accompagné d’une explication très claire, vous emmène au pays des cèdres, pays dont le patron parle avec passion. Vous apprendrez que Le Mont Liban abrite les meilleurs vignobles libanais… Que vous dégustiez les fabuleux Mezze ou que vous choisissiez le menu dégustation 27 euros par personne), vous sortirez comblé et… convaincu. Vous pourrez aussi ramener un peu de soleil chez vous en passant chez le traiteur Mont Liban, à droite de l’entrée. Ou encore emmener toute la famille dimanche au brunch généreux de Maître Georges, tout cela sans vous ruiner… Pour vos diners d’affaires ou entre amis, le Mont Liban se situe idéalement entre la place Stéphanie et la place du Châtelain, à deux pas du Steigenberger Grandhotel. Détail qui a son importance dans le quartier : pas de problème de parking grâce au service voiturier.

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90 comédiens belges à Cannes

Ledune Stéphane

Leempoel Alain

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www.comedien.be/stephaneledune +32 479 273 307

www.leempoel.net Agent: Naima Kadiri +33 6 30 62 15 77

www.vimeo.com/29143741 + 32 477 955 289

Liberatore Laura

Lombard Cédric

Loriaux Fabienne

laura.liberatore@skynet.be +32 497 449 534

www.cedriclombard.wordpress.com +32 477 806 818

www.comedien.be/fabienneloriaux +32 475 693 178

Maes Julie

Marchese Michelangelo

Mariaule Alix

www.comedien.be/juliemaes +32 486 578 979

www.comedien.be/michelangelomarchese +32 477 172 517

alix@alixland.com +32 495 75 97 68

Cinéma belge 63 mai 2015


90 comédiens belges à Cannes

McNeese Bérangère

Nusselder Berdine

Oertli Stéphane

contact@agencesimpson.com Agent: Elizabeth Simpson +33142228550

www.agence-vacarme.com/artiste.cfm/414456_115_1-Berdine_Nusselder.html +32 473 174 591

steph.oertli@gmail.com +32 486 884 595

Pappi Nathalie

Perschewski Andréas

Piras Psyché

www.nathaliepappi.be +32 495 124 578

http://vimeo.com/29420184 +32 485 102 525

www.psychepiras.eu +32 479 200 169

Quertigniez David

Rausin Jean-Jacques

Remacle Amélie

https://vimeo.com/83419427 Agent : Marie Claude Schwartz +33 1 42 78 17 17

jjrausin@hotmail.com Agent: Brigitte Descormiers +33 1 42 74 31 86

www.cinetea.fr/artiste.cfm/314279-amelie-remacle.html Agent: Marie-Claude Schwartz +33 6 14 77 60 69

Cinéma belge 64 mai 2015


Acteurs

Resimont Philippe

Ridolfi Achille

Rittweger CĂŠcile

www.cinetea.fr/artiste.cfm/314433_-Philippe_RESIMONT.html

info@nouvellegarde.eu Agent: Emilien Trottin

cecilerittweger@gmail.com Agent: Anne Roc +33 6 62 82 14 04

Agent : Marie-Claude Schwartz: +33 1 46 02 99 09

Rogriguez Ana

Sbille Jean-Louis

Schwab Denyse

www.comedien.be/anarodriguez +32 485 102 682

http://www.comedien.be/jeanlouissbille +32 478 299 089

schwab.denyse@brutele.be +32 474 345 639

Seddio Sylvie

Seront Carine

Sodoyez Colette

http://sylvieseddio.blogspot.com +32 496 621 971

c.seront@hotmail.com +32 477 625 740

http://colette.jimdo.com Agent: Isabelle Brulier +33 1 45 74 69 44

CinĂŠma belge 65 mai 2015


90 comédiens belges à Cannes

Sornin Baptiste

Spinhayer Martin

Swysen Serge

www.baptistesornin.com Agent: Juanita Fellag +33 1 85 34 14 54

martspin26@hotmail.com +32 472 971 293

www.comedien.be/sergeswysen +32 486 320 269

Valemberg Mélodie

van Linthout Frédéric

Vovk Jean-Michel

www.comedien.be/melodievalemberg +32 474 223 540

fredericvanlinthout@gmail.com +32 476 210 618

www.vimeo.com/15257923 Agent: Chafika Kadem +33 6 09 54 34 83

Warland Sybil

Wilkin Anne-Sophie

Hespel Christophe

www.comedien.be/sybilwarland +32 478 490 781

annesophiewilkin@hotmail.Com +32 497 446 670

Chris.Hespel@gmail.com + 32 486 69 02 23

Cinéma belge 66 mai 2015


PAS DE DRESS CODE CHEZ ARTES NOUS SOMMES À VOTRE ÉCOUTE, QUE VOUS SOYEZ SHORT… OU LONG ! “ARTES gère les droits d’auteur de nombreux scénaristes réalisateurs belges de fiction, documentaires, reportages, de publicité, clips… tant en Belgique qu’à l’étranger, grâce à ses accords de réciprocité avec les sociétés d’auteurs. ARTES a pour mission d’adopter une approche personnalisée pour chacun des scénaristes réalisateurs membres de la SABAM. La volonté d’ARTES rejoint celle de «Cinéma Belge» : mettre à l’honneur la diversité et la spécificité de notre cinéma et faire circuler les films auprès d’un large public”.

WWW.SABAM.BE


Tournage

LA BELGIQUE, UNE ÉTERNELLE TERRE DE CINÉMA Hooper, le réalsateur du mythique Massacre à la tronçonneuse, a lui aussi fait un passage discret. Tout comme Eternité de Tran Anh Hung avec Audrey Tautou, Mélanie Laurent et Bérénice Béjo qui vient de se terminer. Si Bruxelles reste encore

Pierrette Baillot

Petit tour dans les bureaux du Brussels Film Office, l’organe qui aiguille et coordonne de nombreux tournages dans la capitale européenne, qu’ils proviennent de Belgique, des États-Unis, de France, de Grande-Bretagne ou même, de Bollywood. « En comptabilisant tout, explique sa directrice Pierrette Baillot, soit séries, courts et longs métrages, on tourne

modeste par rapport à tout cela, elle peut quand même être fière ! » Bruxelles, trop modeste ? « Oui, renchérit-elle. Par rapport à son potentiel et tout ce qu’il s’y passe, vraiment. Car nous avons continuellement des retours positifs sur notre accueil et ce dont nous disposons. Niveau architectural, convivialité ou même pratique, en tout

Cineman

à une moyenne de 300 à 350 tournages dans les 19 communes bruxelloises. On a déjà dépassé la barre des 100 cette année. Cela va du premier court d’un réalisateur à une machinerie comme la série The Missing (NDLR : une série de la BBC nommée aux Golden Globes), qui est restée 20 semaines chez nous. Tout récemment, Tobe

Londres. Et puis, ce serait important de varier les endroits. Certains lieux sont beaucoup utilisés, alors que d’autres, dans certaines communes, sont encore à explorer, comme Evere, Forest ou Uccle. »

étrangères cherchent un château ou des campagnes, nous donnons les contacts du Clap, pour Liège et Namur, et celui du Batch en Hainaut. C’est aussi cette union qui fait qui fait la force de chacun. »

Dans un précédent entretien, Pierrette Baillot disait rêver d’un tournage emblématique dans la capitale. C’est-à-dire ? « Oui, pourquoi pas, avec Bruxelles dans le titre. Ce n’est pas encore arrivé, mais cela pourrait peut-être se passer cet été avec le tournage de Michaël R.Roskam (Rundskop). On aimerait aussi, développer un jour le Ciné Tourisme qui a décollé avec le Seigneurs des Anneaux en Nouvelle-Zélande et Bienvenue les Ch’tis à Bergue dans le Nord-Pasde-Calais. Il me semble que l’initiative serait intéressante et se justifierait. Mais outre l’ouverture vers de potentiels nouveaux lieux et

« Nous sommes les apôtres de la coproduction ! »

Dédales

cas. Puis, en dehors des heures de pointes, la ville n’est pas trop embouteillée. » Développer le Ciné-Tourisme Un souhait, pour les années qui viennent ? « On aimerait que Bruxelles devienne plus un acteur à part entière, car disons-le, on la fait souvent passer pour Paris ou

la mise en place de ces circuits touristiques, on aimerait améliorer notre structure. On pourrait atteindre un niveau d’expertise avec davantage d’indépendance. Mais c’est un autre débat. » Cela dit, entre les régions belges, l’entente est bonne, voire cordiale. « Quand des productions

Cinéma belge 68 mai 2015

Philippe Reynaert, via le Fonds Wallimage qu’il dirige, a permis d’amener beaucoup de tournages au sud du pays. « C’est la relative faiblesse de notre marché intérieur qui, depuis André Delvaux, nous a naturellement poussés à faire de la coproduction. Par la force des choses, nous sommes devenus des apôtres en la matière (sourire). Chaque producteur belge a cela ancré dans son ADN. C’est différent dans un pays comme la France, qui est peut-être le dernier pays d’Europe à pouvoir faire les choses en autarcie. »

Largo Winch

© Marc Bo

© Nestor Lison

Il n’y a pas si longtemps, un tournage en Belgique était quelque chose de marginal, voire rare. Aujourd’hui, on en dénombre plusieurs centaines par an. Avec un constat : l’internationalisation du phénomène.

Hyperactif et visionnaire, il nous livre encore : « On en parle pas énormément, mais la refonte du Tax-Shelter nous autorise désormais à intervenir sur des films minoritaires non-européens, pour autant qu’il y ait un traité de coproduction. La Chine, les EtatsUnis ou même le Canada peuvent donc être intéressants


© Nestor Lison

Tournage

Philippe Reynaert

pour nous dans le futur. Si un scénario de film le permet, un bon producteur peut, sans trop de difficultés, allier la Belgique, la France et le Canada autour d’un même projet. »

Le petit Nicolas

Philippe Reynaert tient encore à prévenir : « Vous savez, pour nous, la coproduction est davantage une ouverture d’esprit qu’un concours. Je passe mon temps à expliquer que non, on ne cherche pas à rapatrier toutes les grosses productions françaises chez nous. Moi, je tiens aussi à voir passer des films d’auteur internationaux. Je regrette d’ailleurs de voir moins de films dits du milieu, comme ceux de Bernard Rapp que nous produisions autrefois. » « Dans les cinq années qui viennent, continue Philippe Reynaert, mon souhait, c’est que

Libre échange

nous arrivions à mieux nous développer sur quatre axes : le long métrage, l’animation, la série et la websérie. Et mon obsession, c’est la pérennisation de nos mécanismes. Mais on peut être optimistes, car nous avons pris le train au bon moment. Les régions, et c’est historique, sont en train de monter en puissance partout en Europe. C’est de toute façon vital, sinon l’Europe ne pourra pas longtemps tenir face à l’Asie et aux Etats-Unis. Il faut

La Belgique peut donc s’attendre à encore accueillir pas mal de tournages dans les années qui viennent.

CINEMA

PREMIERE & SPECIAL SCREENING, CINEMA & THE ARTS, DOCUMENTARY, FILM FESTIVAL, FAMILY-FRIENDLY FILM

David Hainaut

CENTRE FOR FINE ARTS BRUSSELS

A CELEBRATION OF CINEMA

qu’il y ait davantage de cinéma européen, mais pour que cette Europe reste incarnée, les pouvoirs régionaux doivent encore se développer. Selon moi, les fonds régionaux de cinéma sont appelés à un bel avenir. »

PALAIS DES BEAUX-ARTS BRUXELLES PALEIS VOOR SCHONE KUNSTEN BRUSSEL

Rue Ravensteinstraat 23 1000 Brussels +32 2 507 82 00 / bozar.be

Copyright photos: Sergei Loznitsa © DR/GR, Claudia Cardinale © Lydie Nesvadba , Atom Egoyan © DR/GR, Denis Coté © DR/GR, Marjane Satrapi © Filip Vanzieleghem, Albert Serra & Alexandre Sokourov © So Film


Interview

L’espoir masculin du cinéma belge s’appelle Marc Zinga Entre Dheepan de Jacques Audiard en Sélection officielle à Cannes et Jamais de la vie de Pierre Jolivet actuellement en salle, Marc Zinga poursuit sa percée comme acteur sur les grands écrans. Et dire que la prochaine fois qu’on le verra, il sera parmi les adversaires de James Bond dans Spectres de Sam Mendes attendu pour novembre prochain.

© Nestor Lison

Les projets s’enchaînent depuis Les Rayures du Zèbre pour lequel vous avez remporté le Magritte 2015 du Meilleur espoir masculin. Vous voilà pris dans les manifestions les plus importantes du 7ème art. Marc Zinga : « Cannes, c’est tout d’abord un plaisir d’y être et de retrouver toute l’équipe. Je suis dans un tunnel depuis plusieurs mois déjà et je fais de superbes rencontres à travers ces différents projets. J’ai l’occasion de travailler avec des personnes qui ont une grande conscience citoyenne. Jacques Audiard est un réalisateur dont je suis très amateur, je connais toute sa filmographie. Il a une exigence dans son cinéma à laquelle je suis très sensible. Pierre Jolivet m’a rencontré pour me proposer de travailler avec lui. C’est quelqu’un qui a une véritable réflexion sur le monde qui l’entoure, sur la vie politique sociale locale et mondiale. “Jamais de la vie” a quelque chose de difficile dans ce qu’il raconte, c’est un film sur la question du sacrifice et de l’héroïsme ordinaire. C’est une chance de travailler avec lui qui a tout de même participé à façonner un vrai cinéma social en France. » Alors qu’on découvre encore votre jeu, vous tournez déjà auprès d’acteurs tels que Benoît Poelvoorde et Olivier Gourmet. Comment sortir son épingle du jeu ? M.Z. : « Ce sont des acteurs d’exception et c’est énorme de travailler avec eux. Moi, quand j’interprète un rôle, je suis plutôt guidé par la mise en scène, la direction. J’envisage un personnage comme étant avant tout une histoire à raconter. La première question que je me pose est quel est le message de l’histoire ? Quel est le

point de vue de l’histoire ? Je regarde la finalité et l’architecture du film, et en déconstruisant ainsi je découvre comment appréhender l’histoire. »

le film font peur. J’imagine qu’un titre de film avec les mots “France” et “Allah” n’est pas encore prêt de sortir en Belgique, surtout avec les temps qui courent, ça doit être difficile... » On vous verra bientôt aux côtés de Christopher Waltz et Daniel Craig dans Spectres. Vous serez tenté de vous expatrier dans un avenir proche ? M.Z. : « Professionnellement, ce qui me tente c’est de participer à de belles histoires qui ont un impact culturel. Mais je ne me vois pas déménager à l’étranger pour autant. Ça fait quatre ans que je travaille en France et pourtant j’habite toujours en Belgique. Je suis attaché à mon environnement, j’ai besoin de mes proches pour garder mon équilibre. Regardez Viggo Mortensen par exemple, un acteur hollywoodien qui vit à Madrid ! »

Est-ce ainsi que vous avez procédé pour interpréter Régis dans Qu’Allah bénisse la France d’Abd Al Malik ? (NDLR : rôle qui lui a valu une nomination cette année aux Césars dans la catégorie Meilleur espoir masculin) M.Z. : « La rencontre avec Abd Al Malik a été immédiate. J’ai longtemps fait de la musique et plus jeune, j’écoutais son groupe N.A.P. Me retrouver en train d’auditionner pour lui c’était quelque chose de particulier. Qu’on soit deux artistes musicaux a beaucoup aidé pour l’efficacité du travail. On a un parcours plein de similarités donc je me suis vite reconnu dans ce personnage et dans cette histoire. Abd Al Malik a une telle humanité. Je respecte ce travail de longue haleine, ce combat qu’il mène depuis longtemps sur la réflexion du vivre ensemble. » Le film n’est malheureusement pas sorti en Belgique. M.Z. : « Faute de distributeur ou doute sur le potentiel de réussite commerciale, je ne sais pas vraiment. Peut-être les questions soulevées par Cinéma belge 70 mai 2015

Quel rôle rêvez-vous de jouer au cinéma ? M.Z. : « J’ai eu l’occasion d’incarner Mobutu pour la télévision, un personnage antagoniste dans un divertissement d’action. J’aimerais pouvoir raconter, dans une envergure plus importante, la prise de pouvoir de Mobutu, parce ce que je pense que c’est une histoire qui est porteuse d’une grande réflexion et qui a tous les traits d’un grand film. » Et avec quel réalisateur en particulier ? M.Z. : « Je suis intéressé par ce modèle d’acteurs qui se mettent à l’initiative de projets, qui se trouvent un scénariste ou achètent les droits d’un roman, le développent, trouvent un metteur en scène. Par exemple Le Loup de Wall Street est une initiative de Leonardo DiCaprio et il a fait appel à ce réalisateur de génie qui est devenu son ami, pour raconter une histoire forte. Puis, y’a tellement de réalisateurs talentueux, je pense à Steeve McQueen qui m’inspire fort, Sam Mendes très impressionnant ou encore Pierre Schoeller pour ne citer que ceux qui me viennent vite à l’esprit. » Propos recueillis par Djia Mambu


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