La structuration d’une œuvre chorégraphique met donc en jeu ces deux paramètres : - faire apparaître ce que peut le corps, comment il contribue à l’art; - concevoir un déroulement dans le temps dont on souhaiterait qu’il puisse revenir à l’infini. C’est-à-dire, à la lettre, créer une structure chorégraphique dont la destinée est de revenir le plus de fois possible (c’est là mon clin d’œil à l’Éternel Retour nietzschéen comme force de création!).
4. Des débuts et des fins Je n’étais pas suffisamment satisfaite de ma typologie de structuration des œuvres. Alors, tel un limier, je me suis concentrée sur leurs débuts et leurs fins. À vrai dire, au début, j’ai été déçue. Beaucoup de pièces commencent par la présentation d’un plateau vide. C’est sans doute pour donner au spectateur le temps de se rendre disponible pour ce qui va advenir. Souvent, un danseur entre ensuite en scène, puis un deuxième, etc. Cette manière de débuter un spectacle est finalement très répandue. C’est le cas de Café Muller de Pina Bausch, de Biped de Merce Cunningham. Les exemples sont très nombreux. Un autre début “type”: les danseurs sont déjà sur le plateau quand les spectateurs s’installent dans la salle. La lumière bascule de la salle à la scène. Les danseurs se mettent alors en mouvement. Le très impressionnant début de Fase d’Anne Teresa de Keersmaeker, par exemple où une ombre fort suggestive sème le trouble sur le nombre de danseuses. Elles sont deux, on les perçoit trois ! Le décor, la lumière, la musique sont des éléments importants d’une création chorégraphique. Ils orientent fortement la perception du spectateur. Mais j’ai décidé de me concentrer sur la matière corporelle et sur ce qu’elle propose au tout début d’un spectacle. J’ai voulu m’attacher à la façon dont le corps entre sur le plateau ou bien est déjà en scène, à la manière dont il se commence à se mouvoir. Je pense que cet instant est décisif, qu’il est un véritable indice des enjeux esthétiques du chorégraphe. Quelque chose se joue indéniablement à ce moment-là. Certains débuts donnent une image de ce que sera toute la pièce. D’autres sont une introduction. Certains encore sont de “fausses pistes ”. Comment cela commence ? Ce n’est pas rien. Et comment cela finit-il ? Merce Cunningham déclarait avec humour que la pièce est finie quand la durée prévue initialement est atteinte. Il n’empêche que la plupart de ses pièces s’achève de la même façon, en impliquant la totalité des danseurs. Il y a souvent une
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