La Traversée des Pays et des Âges

Page 29

terme tout droit sorti de nos livres scolaires d’histoire et qui refait surface dans ce territoire reculé. On désigne, sous le terme «villa romaine», ces grandes fermes autour desquelles les Romains, aidés par la main d’oeuvre locale, défrichaient la forêt pour faire place à de vastes champs de culture céréalière. Les produits récoltés servaient en grande partie à nourrir les troupes militaires postées sur le front septentrional de l’Empire. On retrouve plusieurs traces de ces constructions dans les environs: à Steinbach (au lieu-dit «La Croix de l’Homme»), à Limerlé (aux lieux-dits «Hursindje» et «Wassompré»), à Gouvy (aux lieux-dits «Hebeindje» et «Hadja»), à Rettigny (au lieu-dit «Devant le Beuleu»), à Basbellain (au lieu-dit «Kasseckt»)... Mais alors, si cette route fut autant utilisée, pourquoi ce tronçon n’a-t-il pas été dallé ? Une fois de plus, l’analyse du paysage nous fournit quelques éléments de réponse: sa position topographique, soit généralement sur les crêtes (ou, plus précisément, à quelques mètres en contrebas, de façon à ce que les utilisateurs soient à l’abri des vents et puissent observer les environs tout en restant discrets), et son sol rocailleux lui confèrent une assise naturellement plus solide et moins boueuse que, par exemple, dans les plaines alluviales ou sur les plateaux limoneux. Cette voie romaine fut tracée peu après l’invasion de la région par les troupes romaines (milieu du Ier siècle avant J.-C.), vraisemblablement à partir de sentiers préexistants et empruntés par les Celtes; elle s’insère ainsi tardivement dans la construction du réseau routier romain. Ce dernier servait à intervenir rapidement dans les régions colonisées les plus turbulentes de façon à maintenir le bon fonctionnement du commerce et la collecte des impôts. En dehors du village de Buret, la partie de la voie romaine empruntée par la Traversée des Pays et des Âges ne pénètre dans aucun village; ceci tend à nous indiquer qu’elle perdit de son importance durant le haut Moyen Âge jusqu’à l’époque de l’implantation des villages ardennais (vers l’an 1000). Le réseau routier romain est également à la base d’échanges commerciaux interrégionaux, de mélanges ethniques et d’apports culturels; il est la pierre angulaire de l’unification du monde romain et de la naissance d’une société européenne organisée.

Le Grand Chemin de Bastogne à Saint-Vith Au 5ème siècle après J.C., les invasions des peuples germaniques entraînent la chute de l’Empire romain. La Voie romaine Reims-Cologne voit son trafic diminuer, mais elle reste utilisée comme voie de liaison facile via les crêtes. Elle est énumérée comme «strata publica» dans les années 915 et 1195 pour la région de St Vith et Neundorf. En 1150, on parlait d’une liaison routière entre Orval, St Vith et Cologne.

Schéma du développement du réseau routier romain; Différentes étapes de réalisation du réseau routier romain: 1. Deux axes partent de Lyon: Lyon-LangresReims-Boulogne et Lyon-MetzTrèves-Cologne 2. Construction d’une première transversale: Boulogne - Bavai - Tongres - Cologne 3. Création de nouvelles voies durant le premier siècle: ReimsTrèves, Reims-Cologne, et MetzTongres

Traversée des Pays et des Âges

29


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.