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Ainsi, le travail biographique tel que je le conçois n’est pas tant sur le biographique, mais avec le sujet biographique, et dans ce sens j'estime que nous étions déjà, à Genève, dans une perspective très proche de la recherche biographique. Je m'explique : je ne pratique que rarement l'entretien biographique, mais travaille depuis de nombreuses années dans une optique de recherché formation, dans un travail dans lequel la personne choisit de socialiser son propre récit de formation en petit groupe, pour ensuite travailler(toujours en groupe) à une coélaboration de sens. Une telle démarche qui allie recherche et formation peut conduire à une transformation de soi, certes, mais également à une transformation de son rapport au monde, voire de son "être social au monde" (j’y reviendrai tout à l’heure). De fait, je précise que les histoires ou récit de vie ne sont pas nécessairement au centre de mes intérêts de recherche, mais plutôt l’adulte, son parcours, et la place de la formation dans celui-ci, dans une perspective biographique. Je me retrouve bien dans une prise en compte du sujet biographique (quel que soit son âge) aux prises avec le monde.

2. Les jeunes adultes et le travail de biographisation de leur parcours J’ai eu l’occasion de travailler avec de nombreux publics dans le dessein de faire émerger ensemble (en groupes très restreints) une cohérence dans leur parcours de formation. L’évolution, ces dernières années, des interrogations des jeunes étudiants destinés à se professionnaliser dans un des champs de l’éducation, m’a beaucoup interrogée. Suite à ce travail biographique autour de leur parcours de formation, ces étudiants ont récemment choisi d’approfondir ensemble la place réelle des expériences scolaires et extrascolaires, leur articulation et leur rôle dans la formation de l'adulte en devenir qu'ils représentent. Je me limiterai à deux remarques :

2.1. Etre autorisé à dire je De nombreux étudiants éprouvent de la crainte, dans le milieu universitaire, à utiliser je quand ils s’expriment et écrivent. Le phénomène n'est pas nouveau, bien qu'il me semble en expansion. Pourquoi, leur ai-je encore demandé récemment. - on n'a pas le droit … - mais qui vous dit cela ? - certains professeurs…et de plus, comme chacun ne dit pas la même chose, on ne sait plus quoi faire. Alors, on utilise le nous, même en écrivant un rapport personnel de stage, précise encore une étudiante, tout en ajoutant qu'elle ne "s'y retrouvait plus …" Peut-on parler de soi, de sa vie, autrement qu’en disant je ? La question n’est pas si simple. Mais j’estime que dans la formation des jeunes adultes, nous pouvons, d'autant plus par la recherche biographique, contribuer à l’émergence du je, et faire ainsi passer les sujets d'un "récit exogène" (j'en suis l'objet mais il n'est pas le mien) à un "récit intérieur". Je me réfère ici à Malherbe et à son livre Déjouer l'interdit de penser. Essais d'éthique pratique (2001). Celui-ci insiste sur le fait que les deux récits se tissent : "Notre récit extérieur est le nécessaire point d'appui de notre


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