Elephant extrait

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Le géant de plâtre

« CONSERVATION des monuments publics, rue St.-Honoré, n° 319, [...] C’est à cette administration que l’on doit s’adresser pour obtenir des billets de permission pour visiter l’intérieur des monuments qui n’ont point de directeurs particuliers, tels que la colonne Vendôme, la fontaine de l’éléphant, etc. » C. Harmand | Manuel de l’étranger dans Paris | 1824

Page de gauche Le modèle en plâtre de l’éléphant trouve refuge sous un immense hangar. Si l’animal est pourvu de son palanquin, il ne comporte en revanche aucun harnachement. Adossés contre le socle, on aperçoit quelques-uns des vingt-quatre bas-reliefs représentant les sciences et les arts. Paris and its environs displayed in a series of picturesque views, Augustus Charles Pugin, 1830

« Arrivé à la porte Saint-Antoine, qui, par parenthèse, n’y est plus, et sur la place où fut la Bastille, je cherchai de tous mes yeux la fontaine monumentale que doit décorer un gigantesque éléphant. Je ne pus admirer que la cage qui se détruit lentement depuis une dizaine d’années. Rien n’égale notre promptitude à enfanter des projets, que notre lenteur à les exécuter. » Nouveaux tableaux de Paris ou observations sur les mœurs et usages des Parisiens au commencement du xixe siècle, t. 2 | 1828

Porté par l’enthousiasme de Vivant Denon, le projet de la fontaine de l’éléphant semble devoir trouver un achèvement rapide. Commencés en 1810, les ouvrages en terrassement et maçonnerie sont quasiment terminés en 1813. Afin de se faire une idée précise des proportions, Vivant Denon confie en 1810 la réalisation d’un modèle grandeur nature au sculpteur Moutoni. Connaissant parfaitement l’anatomie des animaux pour avoir travaillé pour le Muséum national d’histoire naturelle pendant plusieurs années, celui-ci est en effet le candidat idéal. Il est pourtant évincé par Pierre-Charles Bridan, dont le modèle en plâtre est finalement retenu. Le sculpteur exécute, selon les plans et dessins tracés par Alavoine, un modèle « en charpente, armé de fer, et recouvert en plâtre ». Dès lors, pour gagner le cœur des Parisiens, l’éléphant s’exhibe. En 1812, le sieur Ballu construit un immense hangar au sud-est de la place de la Bastille, pour abriter la construction de la maquette. Curieux, sceptiques et critiques peuvent ainsi à loisir se confronter au prodigieux animal. Dans le même esprit, Alavoine en présente une vue au Musée royal des arts à l’automne 1814. Pour le préserver de l’agressivité de la ville – la rumeur voulait qu’il abritât des voleurs en son ventre – , on prend soin de lui adjoindre un cornac. Pour huit cents francs par an, le dénommé Levasseur assure donc la surveillance de l’éléphant, lequel le lui rendait bien en offrant une de ses pattes pour le loger. Le lien entre l’éléphant et le fonctionnaire, promu pour sa peine véritable mahout indien, dura de longues années ; affecté avant 1816, Levasseur occupait encore la jambe de l’éléphant en 1831. Ci-contre Le projet initial de hangar déposé en mars 1812 par Alavoine prévoyait un « polyèdre de 66 faces pour renfermer sous la moindre superficie extérieure, l’espace nécessaire afin de l’exécuter avec le moins de dépense possible ». Estimant que la conception proposée par l’architecte parisien ne convenait pas à un hangar, le Conseil des bâtiments civils recommanda de construire l’édifice « en forme de tente, couvert de tuiles ou en ardoise ». Vue du hangar de construction de l’éléphant de la Bastille, Jean-Antoine Alavoine Paris, musée du Louvre, D.A.G.


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