Juin FDT 2010

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Femmes célèbres

Elles ont marqué notre histoire

Sophonisbe Princesse Carthaginoise, Reine de Numidie (Carthage, 235-id, 203 a.v. J.C.)

Le destin sublime d'une femme exceptionnelle Sophonisbe ou Saphanbaal, « Celle que protège Baal », le seul nom de la fille du Carthaginois Hasdrubal évoque la fidélité conjugale et l’amour de la patrie. Fiancée à Massinissa Gaïa, roi de la Numidie massyle orientale, elle est sur le point de se marier quand éclate la Deuxième Guerre punique. Le destin des deux amants qui se retrouvent dans des camps adverses est bouleversé. Elevée dans la haine des Romains, elle accepte de se soumettre aux ordres de son père qui, pour raison d’Etat, décide de la marier à Syphax, roi des Berbères masaesyles de Numidie occidentale, l’ennemi juré de Massinissa. Lorsque Syphax devient l’allié de Carthage, Massinissa, qui avait longtemps servi la cause punique en Espagne, se met par dépit au service des Romains et de Scipion.

La reine sacrifiée

Après la défaite finale des Carthaginois et de leurs alliés, Syphax, vaincu par Massinissa et Scipion, est expédié à Rome. Toujours épris de Sophonisbe, Massinissa en fait son butin de guerre et décide de l’épouser sur le champ. Mais Scipion exige que la princesse lui soit remise en trophée de guerre. Préférant la mort au déshonneur de la captivité, elle n’hésite pas à se jeter aux genoux de Massinissa : « Nous sommes, lui dit-elle, entièrement à votre discrétion (…), je vous prie et vous conjure au nom de cette majesté royale qui naguère nous entourait aussi, au nom de ce titre de Numide que vous partagez avec Syphax (…), j’aime mieux m’abandonner à la discrétion d’un Numide, d’un prince africain comme moi, qu’à celle d’un étranger et d’un inconnu. Mais que ne doit pas craindre d’un Romain une femme carthaginoise, la fille d’Hasdrubal ? Vous le savez. Si vous n’avez pas en votre pouvoir d’autre moyen que

la mort pour me soustraire à la dépendance des Romains, tuezmoi, je vous en supplie et vous en conjure.» Massinissa propose le suicide à Sophonisbe qui, courageusement, accepte son sort. Elle meurt et par ce geste hautement symbolique, elle prive les Romains de l’extrême plaisir de la voir enchaînée et traînée dans les rues de Rome. Jusqu’à l’ultime seconde, Sophonisbe est restée digne de l’homme qui l’a ardemment aimée, de son peuple qui la tenait en grande estime, et de sa ville, l’éternelle Carthage. Personnage tragique par excellence, héroïne de quelque vingt tragédies classiques en français, italien, espagnol, anglais et allemand et d’une douzaine d’opéras dans ces mêmes langues, Sophonisbe prend ainsi la digne succession de Didon dans la liste des héroïnes africaines sacrifiées à la raison d’Etat… Fatma BENMOSBAH

Source : Massinissa et Sophonisbe - Dr Abdelmajid El Aroui Sophonisbe, la gloire de Carthage - Rafik Darragi 28


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