Air Canada enRoute — August / août 2011

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CenRoute

8.2011

Rome, les touristes avertis comme George Clooney convoitent le joyau de l’hôtel de Russie : son luxuriant jardin à flanc de colline doté d’une oasis à papillons et d’une cascade. Dans quelques jours, je serai au Trianon Palace Versailles, juste à l’ouest du château idoine, mais au lieu de googler le spa je rêve aux suaves parfums d’agrumes de l’Orangerie. Au Syon Park, la noblesse dort à côté ; à Versailles, on l’a envoyée paître. C’est ce que je constate par les grandes baies vitrées de la salle à manger du Gordon Ramsay au Trianon, où je regarde brouter les descendants des moutons de Marie-Antoinette en me gavant de foie gras rôti servi sur un lit de pomme sure et de betterave blanche. Quand je sors de l’hôtel pour me rendre aux illustres jardins, je suis chaussée en prévision d’une bonne marche. (Après m’être salement amoché les pieds pendant des années, j’essaie désormais d’en prendre soin, surtout depuis que mon père m’a dit : « Ma fille, aucun homme ne t’épousera après avoir vu ces horreurs. » Il a failli avoir raison.) Je prends à droite, franchis la grille de la Reine et enfile une allée ombragée, saluée par les moutons qui bêlent doucement de chaque côté. De la musique me parvient de derrière les murs verts de grands ormes parfaitement alignés ; je presse le pas dans sa direction. Au détour d’un bosquet bordé de haies d’ifs taillés, je me rappelle qu’André Le Nôtre, le jardinier paysagiste de Louis XIV, a conçu ce labyrinthe de treillages et de charmilles pour surprendre le promeneur. La musique baroque devient soudain assourdissante et je débouche sans crier gare sur le Grand Canal, où je contemple les fontaines et leurs eaux jaillissant au rythme de la musique, avec le palais en toile de fond. Le Nôtre a créé ce suprême jardin à la française (summum du paysagement baroque) pour le plaisir d’un roi ; c’est aujourd’hui l’arrièrecour du Trianon Palace. Je me demande ce qu’il aurait pensé de mes pieds dans sa fontaine. Vos commentaires : courrier@enroutemag.net

From left to right: Views fit for a king: A shot of the Orangerie with the Swiss Ornamental Lake in the distance at the Château de Versailles, which houses more than 1,000 orange, lemon and pomegranate trees; one of over 300 sculptures commissioned in 1661 to adorn the gardens. De gauche à droite : Un paysage digne d’un roi : une vue de l’Orangerie (où poussent plus de 1000 orangers, citronniers et grenadiers) avec en toile de fond la Pièce d’eau des Suisses ; l’une des quelque 300 sculptures commandées en 1661 pour décorer les jardins.

For addresses and travel information, see Itinerary (page 83). / Pour des adresses et la façon d’y aller, consultez l’Itinéraire (p. 83).

photos: Miguel Angel sAnz lÓpez

that savvy Roman tourists (like George Clooney) retreat to the prized possession at Hotel de Russie: a lush hillside garden complete with butterfly sanctuary and waterfall. In a few days I head off to Versailles to stay at the Trianon Palace hotel, just west of the Château de Versailles, and I’m conjuring the sweet, citrusy smell of the Orangerie when most people would be Googling the spa. You might be sleeping next door to royalty at Syon Park, but you can watch them nibble on grass in Versailles. Tucking into roasted foie gras served on a bed of tart apple and white beetroot in Gordon Ramsay’s dining room at the Trianon Palace, through the windows I watch the descendants of Marie Antoinette’s sheep grazing. Slipping out of the hotel, I’m anticipating a power walk before reaching the famous gardens and have the footwear to prove it. (After years of terrible abuse I now try to take care of my feet, especially after my father told me this: No man will marry you after seeing those up close.) At the end of the short driveway I take a right, strolling though the Grille de la Reine and along the overgrown allée as sheep bleat quietly on either side. Music wafts over tall elms trimmed to form green walls, and my pace quickens toward the source. As I round a grove lined with clipped yew hedges, I remember that André Le Nôtre – Louis XIV’s landscape architect – designed this labyrinth of trellises and tree-covered archways to surprise the spectator. Before I know it, the baroque music is deafening and I find myself standing in front of the Grand Canal, staring up at the fountains pumping water up into the sky to fall in time with the music. Le Nôtre created this quintessential French garden – the pinnacle of Baroque landscape design – to please a king; now it’s the Trianon Palace’s backyard. I wonder what he would’ve thought about my feet in his fountain. Write to us: letters@enroutemag.net


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