Le Guillon n° 44 - FR

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LA REVUE DU VIN VAUDOIS

WITH ENGLISH SUMMARY

N째 44 1/2014

REVUELEGUILLON.CH


Avec l'aimable participation de la Sinfonietta de Lausanne - www.sinfonietta.ch et du Théâtre Grand-Champ de Gland / Crédits photographiques : imagevideo.ch

WWW. BADOUX- VINS. CH


LA REVUE DU VIN VAUDOIS

N° 44 1/2014

Revue Le Guillon Sàrl Chemin de la Côte-à-Deux-Sous 6 CH-1052 Le Mont-sur-Lausanne Tél. +41 (0)21 729 72 68 – revue@guillon.ch

www.revueleguillon.ch Le Guillon, la revue du vin vaudois paraît deux fois par an en langues française et allemande; résumés en langue anglaise.

Les vertus de l’incertitude

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La minéralité, rêve ou réalité? Interprétée avec le talent habituel par Régis Colombo et avec l’aimable collaboration du Musée cantonal de géologie (coll. de minéralogie). www.regiscolombo.com

Françoise Zimmerli Moments de riches émotions et d’intenses découvertes pour les vins vaudois pendant le second semestre de 2013, que ce soit sur leur territoire ou au-delà des frontières. Ainsi, en septembre dernier, se sont-ils envolés pour explorer le marché nippon. Les représentants des quatorze caves qui ont fait le déplacement ont pu constater avec un brin d’étonnement, mais un ravissement certain, la proximité des gastronomes japonais avec notre chasselas. Certes, leur manière d’affirmer cette affinité élective a parfois pu frapper de stupeur les Vaudois… avant que, reprenant leurs esprits, ils ne comprennent la complexité de l’hommage qui était rendu à leur cépage d’élection. Au point d’ailleurs, qu’au Pays du Soleil levant, il s’accorde avec un raffinement extrême à la subtilité de leur gastronomie. Mais pas seulement aux sushis et aux sashimis, car les vins vaudois ont aussi bien d’autres atouts à faire valoir en termes de spécialités dans un pays dont les relations diplomatiques étroites avec la Suisse ont fêté officiellement leurs 150 ans en février dernier. Selon l’OVV, ces premiers contacts devraient être suivis d’autres rencontres, donnant ainsi un véritable impact à ses actions promotionnelles. Sur cette lancée et pendant la même période, les vins vaudois ont fait assaut de médailles dans les concours en Suisse et à l’étranger, décrochant l’or plus souvent qu’à leur tour, et contribuant ainsi à l’accroissement de leur notoriété. En cela, ils soutiennent les nouvelles impulsions de la Suisse viticole pour inscrire notre pays dans le haut de gamme des nations viticoles. Et ils se sont aussi tout particulièrement distingués à l'IGEHO à Bâle en novembre. Osons espérer que 2014 offrira les mêmes occasions d’envol à nos vins que 2013, et ce quel que soit le flou qui plane sur notre pays depuis les votations de février. Seule leur capacité à s’unir et à se projeter dans l’avenir avec un esprit conquérant leur ouvrira de vraies portes de sortie. Ce sont d’ailleurs bien les seules vertus de l’incertitude présente. P. S. A big welcome to those of you reading the magazine in English. Whether you live in Switzerland or are just visiting, we hope you enjoy learning more about the exceptional wines made in the Pays de Vaud and our unique art of living.

Tendance La minéralité, rêve ou réalité?

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Vin Vaudois Grande opération de charme de l’OVV à l'IGEHO 6 Chronique (valdo-)japonaise 11 er 漫画 Manga 1 cru 18 Les Lauriers de platine aux Délices de Pierrot 2012 21 Dégustation Grand Prix du vin suisse 25 Concours 26 Mariages blancs en Pays de Vaud 28 Nos terroirs ont du talent Bex et Ollon, le Chablais en rouge et blanc

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Nos régions sont des perles rares La truffe suisse pointe le bout de son nez

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Confrérie du Guillon Message du Gouverneur 51 Ressats 52 Propos de Clavende 62 Soixante ans au service du vin vaudois 63 Cotterd 64 Les Quatre heures du vigneron 66 Hommage 69 Soulevons le couvercle 70 Guillon d'or 74 La colonne de Michel Logoz 80

IMPRESSUM: Gérants: Dr Jean-François Anken (président), Gilbert Folly, Daniel H. Rey. Partenaires: Confrérie du Guillon; Office des Vins Vaudois; Label de qualité Terravin; Fédération des caves viticoles vaudoises; Section vaudoise de l’Association suisse des vignerons encaveurs; Service de l'agriculture (SAGR) – Office cantonal de la viticulture et de la promotion (OCVP); Service de la promotion économique et du commerce (SPECO). Direction de l'édition: Françoise Zimmerli. Ont collaboré à ce numéro: Pascal Besnard, Gilbert Folly, Romain Hofer, Michel Logoz, Claude-Alain Mayor, Richard Pfister, Pierre Thomas, Alexandre Truffer, Jean-Claude Vaucher, Eva Zwahlen. Adaptation en langue allemande: Evelyn Kobelt (Confrérie), Eva Zwahlen. Adaptations: Loyse Pahud (français), IP Communication in English. Art director: STLDESIGN – Estelle Hofer Piguet. Photographes: Studio Curchod – Edouard Curchod, diapo.ch – Régis Colombo, Kairos atelier photos – Sandra Culand, Philippe Dutoit, weinweltfoto.ch – Hans-Peter Siffert. Photolitho et impression: IRL plus SA. Régie des annonces et abonnements: www.revueleguillon.ch – revue@guillon.ch – ISSNN 0434-9296


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Tendance

La minéralité, rêve ou réalité? La complexité du vin a inspiré religions et mythologies à travers les siècles. Ses innombrables descriptions évoluent avec le temps, certains termes apparaissant cycliquement. La minéralité est assurément l’un des plus en vogue aujourd’hui. Nous allons tenter de mieux la comprendre au fil des lignes qui suivent… Richard Pfister – Photo: Régis Colombo Même si peu de publications scientifiques ont paru sur le sujet et qu’aucune ne peut prétendre être LA référence en matière de définition de la minéralité, cela ne veut pas dire que celleci n’existe pas. En effet, elle compte pour chaque dégustateur qui emploie ce terme descriptif. Le hic, c’est que rares sont ceux qui s’entendent sur sa signification… Christian Guyot, professeur d’analyse sensorielle à Changins, souligne le manque de consensus à l’encontre de la minéralité: «Il y a à peu près autant de définitions de la minéralité que de dégustateurs et commentateurs de vins! […] Je ne peux pas accepter d’employer le terme de minéralité dans la description professionnelle d’un vin, puisque je n’en ai pas de définition claire. J’ai de la peine à comprendre l’origine de cette mode lexicale. Qui en effet utiliserait ‹floralité›, ‹fruititude›? En revanche, j’emploie volontiers le terme de minéral, à l’instar de fruité, floral, animal, épicé… qui définissent les familles d’odeurs des vins». Afin de tenter d’apporter un peu de clarté à ce brouhaha vineux, il me paraît important de traiter séparément les deux organes qui pourraient déceler la minéralité: le nez et la bouche.

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Commençons par le nez… Un consensus qui pointe à l’horizon consisterait à dire que la minéralité d’un vin se traduit par la présence de notes minérales dans son bouquet. Mais qu’est-ce qu’une note minérale? Un article paru dans Le Guillon 42 (septembre 2012) présentait une classification des odeurs qui précise ce point: une note qui nous fait penser par analogie à l’odeur dégagée naturellement par une substance d’origine minérale, partiellement du moins. Comme celles-ci, par exemple: Craie - fer - iode - pétrole pierre à fusil - tourbe. Certaines odeurs minérales sont peu odorantes, comme la craie. A forte intensité, d’autres font parfois penser à de la réduction, comme la fameuse pierre à fusil (odeur de deux silex frottés l’un contre l’autre). Corollaire: un dégustateur pourrait tout à fait flairer des côtés minéraux alors que son voisin aurait une impression de réduction. On saisit mieux le problème à la lecture du nom de la molécule soufrée principalement responsable de cette note: benzylmercaptan. Dans les vins, mercaptan est régulièrement synonyme de réduction… Léonard Pfister, œnologue chez Obrist, abonde dans ce sens: «A mon avis, une

des notes les plus typiques de la minéralité est celle de pierre à fusil, même si plusieurs notes soufrées amènent souvent les dégustateurs à ressentir des côtés minéraux». Ces notes soufrées sont aussi relevées par Philippe Corthay, œnologue conseil: «La minéralité, je la perçois comme un élément qui touche l’olfactif, le gustatif et les sensations tactiles en bouche. […] Les odeurs minérales sont celles appartenant au règne minéral, comme la pierre à fusil, la pierre mouillée; le terreux; une allumette après avoir été allumée; des facettes empyreumatiques; des notes soufrées…»

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Tendance

A force d’habitude et d’entraînement, il est possible de reconnaître par la dégustation des configurations de sol qui se cachent derrière un vin. Beaucoup plus difficile par contre de déceler les minéraux qui tiennent compagnie aux racines des plants de vigne… Stéphane Burgos, professeur en sciences de la terre à Changins, le confirme: «On avait fait un travail sur l’odeur de pierre à fusil en 2004 et les résultats montraient une relation sur certains types de fonctionnement du sol. Par contre, rien de lié à une roche, comme beaucoup de producteurs le désiraient ou le disaient…» Et en bouche? Il semble plus difficile de s’entendre sur la définition de la minéralité en bouche. Aujourd’hui, de nombreuses explications sont proposées, explorant des

«La difficulté de cerner la minéralité dans un vin provient sans doute de ce que cette notion mêle plusieurs plans de perception: d’une part, des notions aromatiques et, d’autre part, une dimension de structure liée à une forme de tension ou de trame minérale et, enfin, une impression de vivacité et de salinité.» Jacques Perrin, CAVE SA

univers régulièrement plus poétiques que scientifiques. En effet, difficile de trouver une définition pour un mot qui n’existe pas (encore?) dans les dictionnaires de langue française. On pourrait malgré tout en proposer une qui a le mérite de se fonder sur des éléments mesurables, et qui peut donc être aisément explicable. Essayons donc…

De l’avis de ceux qui utilisent le terme de minéralité, tous les vins n’en expriment pas forcément. En dehors de l'aromatique, elle se manifesterait par des sensations à la fois gustatives et tactiles. Répondant à ces quelques critères, la salinité ne pourrait-elle pas en être une bonne représentation? Souvent présente en filigrane, rare-

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ment intense, la salinité a l’avantage d’être la sensation perçue en raison de l’action des sels… minéraux, quelle coïncidence! Ceux-ci ne se décèlent pas que par une sensation saline: ils peuvent notamment apporter de la viscosité et de la rondeur. Cette complexité gustative pourrait expliquer partiellement la difficulté à caractériser la minéralité. Jacques Perrin, directeur de CAVE SA , perçoit aussi une certaine salinité dans la minéralité: «La première approche de la minéralité est d’abord celle des sels minéraux, comme dans une eau minérale dont les teneurs en sodium, calcium, sodium, etc. varient d’une source à l’autre.» D’infimes variations de sels minéraux peuvent avoir un impact organoleptique tout à fait perceptible. En général, l’augmentation de leur concentration correspond à un accroissement de la sensation de rondeur. Toutefois, l’augmentation de cette concentration n’est pas toujours perçue linéairement et peut, par exemple, passer de la rondeur à l’assèchement pour revenir ensuite à la rondeur pour certains dégustateurs, comme l’a observé l’Institut Œnologique de Champagne. Peut-être n'y-a-t-il plus qu’un pas à faire avant d’affirmer que minéralité égale salinité, avis à ceux qui aimeraient se prononcer… La minéralité multifactorielle Fréquemment, d’aucuns voient dans la minéralité une notion plus complète. Pour Vincent Chollet, vigneron à AranVillette, «elle évoque des souvenirs du lieu terroir – la pierre chaude, humide – les végétaux environnants – une fleur, une abeille qui passe, le miel – c’est un tout, rêvons un peu...» Pour Jacky Rigaux, professeur à l’Université de Bourgogne, la minéralité représente notamment l’inconscient du vin. Elle est bien plus importante sur des vins de terroirs favorisés par une culture biodynamique que sur des vins technologiques. Elle se manifeste principale-

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ment en bouche par de la sapidité, de la viscosité, révélée par l’acidité. «Ce n’est pas parce qu’on n’arrive pas à la définir précisément qu’elle n’existe pas». On ne saurait lui donner tort! La dégustation géosensorielle, un de ses ouvrages paru aux éditions Terre en vues, développe plusieurs chapitres intéressants sur la minéralité. La multifactorialité de la minéralité, Jacques Perrin la corrobore: «La difficulté de cerner la minéralité dans un vin provient sans doute de ce que cette notion mêle plusieurs plans de perception: d’une part, des notions aroma-

tiques et, d’autre part, une dimension de structure liée à une forme de tension ou de trame minérale et, enfin, une impression de vivacité et de salinité.» Le mot de la fin? En matière de bouquet, il semble souhaitable de ne pas parler de «minéralité», mais plutôt d’odeurs «minérales», notion plus facile à comprendre et à faire partager. Mais en bouche, à quand une définition claire de la minéralité? Parfois, les rêves sont suffisamment mûrs pour être réalisés…

Les parfums du vin Sentir et comprendre le vin Richard Pfister

L’ouvrage de Richard Pfister Les parfums du vin explore l’univers olfactif des vins grâce aux travaux effectués par l’auteur sur la dégustation depuis 2002, ainsi que sur son expérience dans la création en parfumerie. Ce livre s’articule autour de la liste des 152 odeurs des vins d’Œnoflair, une classification des odeurs des vins créée en collaboration avec Changins.

Le livre en bref - 152 odeurs de vins décrites en détail - Nombreux exemples de vins pour chacune des odeurs - Conseils pour la mémorisation olfactive - Description actualisée de la neurophysiologie de l’olfaction - Liste des ressemblances entre les odeurs des vins - Classification Œnoflair Pour plus d’informations: www.oenoflair.com et www.delachauxtniestle.com Pour commander Les Parfums du Vin, merci d'envoyer un e-mail à richard.pfister@oenoflair.com. Prix: Fr. 35.– (+ frais de port)

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Vin Vaudois  Juste avant l’ouverture du salon, le stand vaudois attend les visiteurs dans tout l’éclat de sa modernité et de sa diversité.

Grande opération de charme de l’OVV à l'IGEHO

Pour leur première participation, en novembre dernier, au Salon international de l’hôtellerie, de la gastronomie et de la consommation hors domicile (IGEHO) de Bâle, les vins vaudois ont vu très grand. En compagnie de quatre partenaires de choix – Premiers Grands Crus, Arte Vitis, Terravin, Clos, Domaines & Châteaux –, l’OVV a réussi à présenter les vins vaudois comme autant de séduisants joyaux. Et cela dans le cadre d’un stand d’une modernité ébouriffante. Eva Zwahlen - Photos: Sandra Culand Foin de vieux fûts, feuilles de vigne et anciens outils de cave! Dans la halle 2.1 de l’IGEHO, au royaume des vins vaudois, la nostalgie n’est pas de mise. Ni la fausse modestie. Sur une surface de 100 m2, l’écrin est lumineux, dépouillé, aéré, soutenu par des images de vignes estivales en format mondial − les mêmes qui ornent les affiches de la campagne actuelle. Tels de luxueux bijoux, les bouteilles sont exposées dans d’élégantes vitrines et attirent tous les regards, tandis que les petites tables de bar blanches,

serties de hauts tabourets, invitent à une pause dégustation. Le style du stand du canton vaudois (seule région viticole suisse à être officiellement présente à l’IGEHO) se montre – avec bonheur − éloigné du chic version années 50 de nombreux carnotzets. Un tel raffinement contemporain a évidemment son prix. Entre 80 000 et 100 000 francs pour les cinq jours du salon. «Oui, c’est un gros investissement, reconnaît placidement le directeur de l’OVV, Nicolas Joss, mais qui en vaut la peine.»

L’élite comme délégation Et pourquoi? «Regardez autour de vous! réplique Nicolas Joss. Vous verrez les stands immenses des vins d’Autriche, d’Italie, d’Amérique du Sud et, face à eux, les petites surfaces occupées par des producteurs suisses. Les Vaudois sont les seuls Suisses à oser se mettre en avant.» On l’a compris, il faut que cela change, une nouvelle ère commence… «Le vin reste certes au centre, affirme énergiquement Nicolas Joss, mais en tant que produit de luxe et de qualité, André Fuchs (à g.), président de Clos, Domaines & Châteaux et Nicolas Joss, directeur de l’OVV, se réjouissent de la présence vaudoise à l'IGEHO. 

 Le

passionné Ernst «Aschi» Born présente les vins du prestigieux label de qualité Terravin à une visiteuse.

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comme quelque chose d'infiniment précieux, d’unique.» Les vitrines qui accueillent les vins sélectionnés pourraient tout aussi bien abriter de belles montres suisses. Car ce sont quelques-uns des meilleurs vins vaudois qui sont exposés au salon de Bâle. Les quatre associations pour lesquelles l’OVV a mis surface et structures à disposition ont beaucoup œuvré ces dernières années en faveur de l’image et de la qualité des vins vaudois: Arte Vitis, une troupe d’élite de treize vignerons; Terravin, le label exclusif de qualité qui, depuis cinquante ans, désigne le meilleur des vins vaudois (presque 5%); les Premiers Grands Crus, le top de la pyramide en termes de qualité; l’association Clos, Domaines & Châteaux, qui prend en compte la dimension historique des domaines en plus de la qualité. Objectif: une meilleure image Comment les différents participants au stand vaudois jugent-ils cette première? Jürg Perrot, qui fait déguster les vins de l’association Clos, Domaines & Châteaux, explique que l’affluence du public reste contenue mais que les visiteurs sont intéressés et qu’ils dégustent ciblé. «Beaucoup sont attirés par l’élégance des vitrines, à nous

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«Celui qui croit en la Suisse, consomme des produits suisses. Il y a tant de travail et de cœur dans un vin vaudois: il a une âme, il incarne une culture, il nous fait rêver… C’est un vin rempli d’authentiques émotions, marqué par le terroir dont il est issu.» Nicolas Joss, directeur de l'OVV

ensuite de leur adresser la parole et de les mettre à l’aise.» Mais le but n’est pas ici, à l’IGEHO, de vendre du vin. Il s’agit plutôt de montrer la production vaudoise, d’améliorer son image et d’établir des contacts. Ce que confirme Ernst «Aschi» Born qui, dans la partie du stand dédiée à Terravin, semble totalement dans son élément. Le label Terravin n’est de loin pas aussi connu en Suisse alémanique que du côté romand, mais le Lausannois d’élection a l’impression que les Alémaniques sont de plus en plus sensibles à la qualité et prêts aussi à en payer le prix. Ernst Born apprécie particulièrement les contacts avec les jeunes professionnels des établissements hôteliers ou gastronomiques. «Ils savent beaucoup de choses et ils posent des questions très précises sur le climat, les sols, la vinification.» Le vin le plus

souvent demandé à être dégusté est naturellement le gagnant des prestigieux Lauriers de platine Terravin, le chasselas Délices de Pierrot, de Féchy (voir en page 21). Et qu’en penset-on? Les visiteurs l’apprécient? «Oui, beaucoup!» Qualité «bonne», communication «à développer» Le jour de notre visite, Louis-Philippe Bovard, d’Arte Vitis, est là avec son collègue Christian Dugon. Le Culliéran se montre enchanté de la scène vaudoise au salon. «Je ne suis pas objectif, puisque cela fait longtemps que je dis que les Vaudois doivent être présents à l’IGEHO», commence-t-il, manifestement satisfait. Et de poursuivre: «L’image des vins vaudois a surtout souffert en Suisse alémanique, et il est urgent d’entreprendre quelque

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SERVAGNIN MORGES GRAND CRU

Le vrai goût DU du SERVAGNIN Servagnin

LE VRAI GOÛT

DESCRIPTION Seules les vignes plantées en Pinot Noir, clone Salvagnin, situées dans le lieu de production Morges, ont droit à l’appellation Servagnin de Morges. La production maximale ne doit pas dépasser 50 hectolitres à l’hectare et son raisin doit atteindre un minimum de 82 degrés Oechslé. Vinifié obligatoirement en barrique de chêne, son élevage doit durer au moins 16 mois. Il ne peut pas être commercialisé avant le 1er avril de chaque année. La Commission du Servagnin, qui contrôle toutes ces normes, attribue l’appellation Servagnin de Morges après avoir jugé par une sévère dégustation que les qualités obtenues correspondent à la haute définition exigée. Les bouteilles ayant obtenu l’agrément portent la capsule rouge d’authentification Servagnin de Morges.

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Vin Vaudois

Martin Federer, le représentant en Suisse alémanique de la maison Hammel, à Rolle, discute des atouts des Premiers Grands Crus vaudois avec deux visiteuses. 

La nouvelle campagne OVV, à la fois dynamique et colorée. 

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Waadtland, Weinland, Wunderland !

Un vrai problème. «Celui qui croit en la Suisse, consomme des produits suisses, assène-t-il sans équivoque. Il y a tant de travail et de cœur dans un vin vaudois: il a une âme, il incarne une culture, il nous fait rêver… C’est un vin rempli d’authentiques émotions, marqué par le terroir dont il est issu.» C’est précisément pour ces raisons – et comme contre-proposition à un produit de masse sans visage − que Nicolas Joss veut promouvoir une image du vin vaudois qui soit celle d’un produit de luxe. Il s’inspire en cela du succès unique au monde de l’horlogerie suisse. «Nous voulons, dit-il avec assurance, devenir une référence. Boire du vin vaudois, c’est comme porter une bonne montre suisse…» Un statut. Un signe distinctif. Un style.

Waadtland, Weinland, Wunderland !

Pays de Vaud, terre de grands crus Côtes de l’Orbe, Arnex-sur-Orbe, 7 juillet 2013

Lavaux, Epesses, 6. September 2013

Vully, Môtier, 8. August 2013

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© OVV / Foto : Erol Gemma

© OVV / Photo : Erol Gemma

Les restaurateurs, ambassadeurs des vins vaudois Martin Federer, représentant en Suisse alémanique de la Maison Hammel, de Rolle, présente les Premiers Grands Crus aux visiteurs. Pour lui, il est essentiel que les vins vaudois participent à cet important rendez-vous biennal. «La cote des vins vaudois a baissé, il n’y a qu’à regarder la carte des vins des restaurants. Leur image a souffert. La réputation du chasselas, en particulier, est à tort mauvaise en Suisse alémanique. Il nous faut presque forcer les gens à en déguster. Et le résultat est toujours le même: ils sont très étonnés qu’un chasselas puisse être si bon.» Martin Federer

trouve que la qualité des vins vaudois est au top, celle des rouges également, «qui sont devenus excellents et qui séduisent d’autant plus que leur rapport qualité-prix est attractif». L’homme est convaincu que, pour améliorer l’image de leurs vins, les producteurs n’ont pas de meilleurs alliés que les professionnels de la gastronomie et de la restauration. «C’est pourquoi notre présence ici est essentielle.» Nicolas Joss ne peut que confirmer: «Pour nous, les restaurateurs sont plus déterminant que les clients privés, car ils sont un miroir de la production indigène. Il y a des pays producteurs où, sur la carte des restaurants, on ne trouve pour ainsi dire aucun vin étranger, alors que chez nous c’est à la loupe qu’on doit chercher nos vins.»

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chose.» De son point de vue, le fait que quatre associations d’élite ont fait le voyage à Bâle sous le parapluie de l’OVV est absolument logique, car ce sont les locomotives de la région qui doivent montrer aux consommateurs, revendeurs et restaurateurs ce qu’ils ratent en ne consommant pas les vins vaudois. «Seule la Baronnie du Dézaley manque encore à l’appel, mais on espère bien qu’elle sera avec nous dans deux ans, à la prochaine édition de l’IGEHO.» Autocritique, il admet qu’animer un stand dans une telle foire requiert une bonne dose de réactivité: «Il faut aller vers les gens, les amener à discuter, on ne peut pas se cacher derrière les bouteilles!»

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Chronique (valdo-)japonaise Le titre s’impose, inspiré du classique de l’écrivain-voyageur genevois Nicolas Bouvier, paru à Lausanne, aux Editions Rencontre (1975), puis à L’Age d’Homme. On y parle peu de vin: aujourd’hui encore, le Japon n’est pas un pays de buveurs de vin. Mais, conduit par Pierre Keller, le sémillant président de l’Office des vins vaudois (OVV), des producteurs d’ici y sont allés en mission exploratoire du 1er au 6 septembre 2013. On était du voyage: récit de quatre jours intenses et prometteurs. Pierre Thomas Les quelque 120 millions de Japonais consomment 2 litres de vin par tête et par an. Dans les dernières statistiques de l’Organisation internationale de la vigne et du vin (O.I.V.), le Japon figure au sixième rang des pays importateurs, en valeur, entre la Chine et la… Suisse. «C’est une culture qui leur échappe», témoigne Pierre Bouvier, le propriétaire du Château Le Rosey, à Bursins, neveu de feu l’écrivain Nicolas. Dans cette famille, le Japon est contagieux: Pierre en est un inconditionnel et y a exposé, à Osaka, des batiks d’Appenzell, réalisés par la famille de sa mère. Et ce Bouvier-là était un des représentants des 14 caves vaudoises du voyage.

1.9 Où les Vaudois savent

2013

choisir leur jour Les vignerons vaudois ont bien choisi leur heure et leur lieu d’arrivée. Sur le coup de 10 heures du matin, à l’Imperial Hotel. Jour pour jour, nonante ans auparavant, le 1er septembre 1923, un terrible tremblement de terre, suivi par des incendies, détruisit la ville de Tokyo, alors la plus grande du monde, et fit plusieurs dizaines de milliers de victimes. Ami de Jean-Jacques Gauer, le patron du Lausanne-Palace & Spa, aussi de l’équipe, Setsuvo Inumaru, le numéro

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trois de l’hôtel tokyoïte, appartient à la dynastie des hôteliers qui se sont succédé à la tête de ce palace. Son grandpère avait fait l’ouverture officielle de l’hôtel. Le bâtiment, construit dans un style aztéco-égyptien par le grand architecte américain Frank Lloyd Wright, résista au tremblement de terre. Mais pas à la pioche des démolisseurs, un demi-siècle plus tard… Sa façade est conservée à Meijimura, près de Nagoya. Un bâtiment sans grâce lui a succédé. Et les Inumaru sont toujours impliqués dans l’hôtel. Le fils de Setsuvo, Yoichiro, termine sa formation à l’Ecole hôtelière de Lausanne. La délégation vaudoise s’en va faire un tour de ville. Dans une allée précédant le premier temple visité, d’un côté, un mur de fûts à saké, l’alcool de riz traditionnel japonais. Et, en face, une alignée de fûts de chêne… de vin de Bourgogne. Gilbert Hammel ne manque pas de photographier son fût

de Clos des Varoilles: «Chaque année, j’envoie trois bouteilles de mon vin à l’initiateur de cette magnifique promotion pour le bourgogne.» La maison rolloise, elle, espère en exporter bientôt!

2.9 Où les Vaudois sont 2013

rassurés d’emblée Il y a de l’inquiétude et de la fébrilité chez les vignerons vaudois, le directeur de l’OVV, Nicolas Joss, et Benjamin Gehrig, son adjoint, cheville ouvrière de ce «raid» japonais. Des invitations ont été lancées à quelques dizaines de professionnels du vin, importateurs, marchands, sommeliers et journalistes. Vont-ils répondre à l’appel? A peine la porte de la salle ouverte, c’est la ruée. Quelque 120 personnes s’intéressent aux vignerons et dégustent les 42 vins présentés. Plusieurs importateurs ont rédigé des brochures en japonais - tout comme l’est le prospectus

«Chasselas is nothing!» Moment de stupeur… vite passé: s’il n’est «rien», c’est parce que le cépage s’efface derrière la diversité des terroirs et le savoir-faire des vignerons vaudois. Katsuyuki Tanaka, journaliste et dégustateur japonais

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Vin Vaudois

de l’OVV. Curieusement, les Japonais parlent peu l’anglais. Même si certains cultivent le français, comme Takako Inoué, fière de donner sa carte de visite de «spécialiste en vins suisses»: elle connaît bien les vins vaudois et a participé, par le passé, au fameux concours Jean-Louis organisé alors par l’OVV, où elle s’est particulièrement illustrée. Elle a entre autres publié un guide bien connu au Japon pour aider ses compatriotes dans leurs voyages en Suisse, et dans lequel le vin, le vin vaudois en particulier, tient une large part. Dans le feu de l’action, face à LouisPhilippe Bovard, dont une tante émigra au Japon au début du XXe siècle, Sala Yamamoto se rappelle à son bon souvenir de voisine. Elle fut sommelière à l’Hôtel du Raisin, à Cully! Aujourd’hui, elle achète et vend du vin dans un magasin de café: «J’aime le chasselas, son goût sec, comme les meilleurs sakés. Mais je dois trouver des vins à moins de 5 francs, pour pouvoir les revendre à 1000 yens (10 francs)», dit-elle. Le Français Yves Ringler, qui exploite un bar à vins, Le Terroir, et passe ses vacances d’hiver en Valais, confie: «Je ne savais même pas que les vins vaudois sont importés! Le chasselas donne des vins minéraux et peu

aromatiques. Avec la cuisine japonaise, ils font plutôt un accord de texture que d’arômes. Leur caractère sec va bien avec le poisson cru.» A l’entrée de la salle, Patrick Fonjallaz, qui n’a pas (encore) d’importateur, est assisté par un New-Yorkais émigré au Japon, où, depuis vingt ans, il aide les entreprises à s’installer. Dans un excellent français, Larry Greenberg avoue: «J’adore les vins suisses. Ils sont souples et directs. Quand je bois un vin suisse, je sais ce que je vais boire. Les Japonais n’ont aucun problème à rechercher et à trouver des produits excellents, et à en payer le prix.» Cyril Séverin, du Domaine du Daley, opine. C’est grâce à lui que Pierre Keller a eu le déclic de cette expédition: «C’est la huitième fois que je viens en six ans. Mon réseau se tisse comme une toile d’araignée. J’ai déjà trois importateurs et je vise les 10 000 bouteilles pour 2014. Si la confiance s’établit, que les vins sont bons, les Japonais sont très fidèles.» Fuichi Vauthier-Morimoto est à l’aise, dans sa langue maternelle. Elle pourrait être la «régionale de l’étape»; pourtant, pour la productrice d’Aubonne, qui a vécu «vingt-sept ans ici et trente-cinq en Pays de Vaud», cette dégustation à Tokyo est une pre-

mière historique. «On aurait dû venir en expédition officielle il y a vingt ans déjà!» s’exclame-t-elle. Le Domaine du Moulin exporte 30% de son chasselas chez des clients privés japonais… Le soir, cap sur le restaurant franchisé de Michel Troisgros, logé au rez-de-chaussée du Hyatt-Regency de Shinjuku. Le journaliste Katsuyuki Tanaka lance un vibrant «Chasselas is nothing!» Moment de stupeur… vite passé: s’il n’est «rien», c’est parce que le cépage s’efface derrière la diversité des terroirs et le savoir-faire des vignerons vaudois. «C’est le vin le plus proche du néant que j’aie dégusté. En gastronomie, le chasselas supporte la pureté des mets. Il ne les domine jamais. Il est modeste, retenu, sans excès. Quand vous buvez du chasselas, vous ne buvez pas seulement du vin, mais aussi le caractère des Suisses. Et celui des Japonais est proche…» Je partage ce repas, remarquable synthèse entre les cuisines japonaise et française, avec une journaliste gastronomique qui découvre le vin, chaperonnée par l’importateur Tsuji Hidenori, un professionnel de l’informatique, tombé amoureux, il y a trois ans, des vins de cinq producteurs vaudois qu’il importe, et avec Raymond Paccot, à l’honneur

Takako Inoué, à g., et Akemi Sugiyama entourent la journaliste Chandra Kurt. 

A Japanese © Takako Inoué

The title is inspired from the brilliant 1950’s journal of the Swiss traveller and writer, Nicolas Bouvier. His nephew Pierre Bouvier, owner of Château Le Rosey, was among the 14 Vaud winemakers on the Japanese trip organised by OVV President, Pierre Keller, 1-6 October 2013.

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«Les Japonais comparent souvent le chasselas avec le saké, parce que les meilleurs, et les plus chers, sont aussi les plus purs, les plus neutres au goût!» Eric Bovy, vigneron à Chexbres

© HUBLOT

avec une splendide Colombe Noire (un pur pinot) 2010. «C’est important d’aller à la rencontre des gens, même si l'on vend presque tout notre vin en Suisse», déclare sobrement le vigneron de Féchy. En after je retrouve Eric Bovy. Le vigneron de Chexbres vient au Japon pour la seconde fois de l’année. En février, il a fait une tournée à Nagasaki, Kyoto et Osaka, avec plusieurs wines and dine. En Suisse, les Bovy reçoivent à Chexbres quelque 5000 touristes nippons par an. «Je parle même un peu japonais… C’est l’inscription de Lavaux au patrimoine mondial de l’Unesco, en 2007, qui a donné le déclic. En 2008, on est passé de l’accueil de 7 à 70 groupes et on en est à plus de 200 pour 2013», se félicite le Vaudois. Avec son père, il est allé visiter quelques domaines de vins japonais dans la préfecture de Yamanachi, au pied du mont Fuji, à la rencontre du koshu, «un cépage rouge vinifié en blanc, mais qui a souvent un goût foxé». Il a apprivoisé aussi le saké, cet alcool fermenté puis distillé à base de riz.

 Philippe

Gex, très à l'aise avec une amatrice japonaise de chasselas.

3.9 Où les Vaudois pactisent

avec la haute horlogerie Le matin, la journaliste zurichoise Chandra Kurt, qui prépare un livre sur le chasselas et développe une ligne de quatre vins blancs de «terroirs» vaudois avec Bolle & Cie, à Morges, me donne rendez-vous avec Katsuyuki Tanaka et son épouse, pour aller faire un tour du côté du marché aux poissons. L’attribution des JO d’été 2020 à Tokyo, pour la deuxième fois après 1964 – obtenue une semaine après le

retour des Vaudois dans leur «capitale olympique»… – va signer l’arrêt de mort de ces entrepôts. On profite pour aller déguster, en guise de petit-déjeuner, quelques sushis et un café dans des bars minuscules. Puis on gagne une vinothèque: parmi la cinquantaine d’étiquettes de vins japonais, peu trouvent grâce aux yeux du spécialiste local! Tanaka est aussi impitoyable qu’un journaliste suisse pourrait l’être en recommandant les vins de son pays à un Japonais. Mais

his assistant, anxiously await their guests. Some 120 wine professionals, importers, merchants, sommeliers and journalists arrive for this 42-wine presentation and tasting. Takako Inoué, a Swiss wine specialist, who distinguished herself in the OVV-organised Jean-Louis competition, is among them. Louis-Philippe Bovard listens to Sala Yamamoto as she recounts

her experience as a wine waitress at Cully’s Hotel du Raisin, next door to his Dézaley winery. The French wine barman, Yves Ringler asserts that Chasselas wines pair well with Japanese raw fish dishes. Patrick Fonjallaz’s local consultant praises Swiss wines and informs that the Japanese select the finest products and are ready to pay the price.  cont. p. 15

2013

Chronicle Sunday, 1st September The winegrowers are greeted at the Tokyo Imperial Hotel by Setsuvo Inumaru, whose grandfather presided the 1923 official opening of the Frank Lloyd Wrightdesigned hotel. Monday, 2nd September The delegation, including Nicolas Joss, the OVV director and Benjamin Gehrig,

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il réitère sa profession de foi sur le chasselas, que confirme Chandra Kurt: «C’est le seul vin qu’on peut boire après avoir goûté à tous les autres, dans un repas, par exemple. Il ne fatigue jamais!» Les Vaudois disent même «qu’il redemande» et «ne passe jamais la soif»... Le soir, people event Hublot au Palace Hotel, sur le versant est du jardin impérial. Ambiance classe noire où il faut montrer patte blanche: les Japonais cultivent volontiers une forme décontractée d’excentricité vestimentaire. Les participants s’amusent beaucoup à un blind test de quelques vins vaudois… Puis Pierre Keller rend hommage «à mon ami Bibi». Le patron de la marque nyonnaise (jusqu’à fin 2013), JeanClaude Biver, déjà très en verve la veille chez Troisgros, remet ça, d’une voix tonitruante, ponctuée d’éclats de rires: il en est à son 118e voyage au Pays du

Soleil levant: «Le Japon est la Suisse de l’Asie, les ennuis des banques en moins!» Et il fait sienne une métaphore «tanakaienne» de la veille: «Quand vous buvez notre vin, vous buvez un peu de Suisse, c’est unique.» A l’apéritif, du fromage de l’alpage du boss horloger et un verre de son chasselas, vinifié par Pierre-Alain Dutoit, des Fous du Roi, qui était en vacances au Japon la semaine précédente! Tous les producteurs sont ravis. Pour Cidis, sa directrice commerciale, Sylvie Camandona, qui précisait la veille que l’exportation de la coopérative de La Côte porte sur du chasselas romand et des vins d’entrée de gamme - avec 11 000 bouteilles cette année, le Japon est le plus gros marché d’export d’Uvavins -, témoigne que les Japonais aiment aussi le doral et le gamaret: «Il y a un potentiel pour le haut de gamme au Japon!» Louis-Philippe Bovard

approuve: «Je crois à ce potentiel. Mais il faudra revenir dans trois à cinq ans.» Et Paul Baumann, directeur d’Obrist, sans importateur jusqu’ici, précise: «Il faut approfondir le segment et le positionnement du vin. Fait remarquable, ce sont les Japonais eux-mêmes qui affirment que le chasselas va bien avec leur cuisine. Ici, deux tiers des vins que j’ai vus dans les commerces sont des vins français. Que les Vaudois parlent le français est une chance supplémentaire!» Jean-Pierre Cavin, des Artisans d’Yvorne, abonde: «Les Japonais, très bordeaux pour les rouges, aiment notre blanc. Il faudra revenir.» Et Philippe Gex s’enthousiasme: «On donne aussi une autre image de l’OVV, plus positive, avec une action qui a un véritable impact. C’est étincelant et top. Il y a pire que d’associer les meilleurs vins avec la haute horlogerie!» 

suite p. 16

 Au Palace Hôtel, depuis la gauche,

Jean-Claude Biver, CEO de Hublot et appelé depuis par LVMH à prendre la tête du pôle horloger du groupe, Pierre Keller, l'ambassadeur de Suisse, Urs Bücher et Emmanuel Pratt, Président LVMH Japan.

Cyril Séverin, the owner of Domaine du Daley, confirms Japanese loyalty to quali­ ty products. Domaine du Moulin’s Swiss-Japanese Fuichi VauthierMorimoto underscores the importance of this event. That evening at the Michel Troisgros restaurant at the Shinjuku Hyatt-Regency, the journalist Katsuyuki Tanaka proclaims “Chasselas is nothing” referring to its self-effacing nature, relying on the wine-growers’ know-how, and its modesty and restraint which means it can partner the purest of dishes. I share this remarkable Franco-Japanese meal with a gastro-

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A Japanese Chronicle (cont.)

nomic journalist and Raymond Paccot, whose Colombe Noire 2010 is honoured. After dinner, I meet the Chexbres winemaker, Eric Bovy. His winery has seen an increase in Japanese visitors since Lavaux became a UNESCO World Heritage site in 2007.  cont. p. 17

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Vin Vaudois

Pour les 150 ans des relations diplomatiques entre la Suisse et le Japon, fêtés à Tokyo début février 2014, deux Vaudois étaient du voyage et ont posé avec le président de la Confédération, Didier Burkhalter, Benoît Riboulet, à g., du Domaine du Rosey, et Bernard Cavé, œnologue à Ollon et Aigle. 

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Pierre Bouvier est aussi sous le charme: «Une histoire d’amour peut se nouer»; et son collaborateur, Benoît Riboulet, est fier du succès du rosé du Rosey. Quant à Alain Leder, sous-directeur de Schenk (et successeur désigné de Paul Baumann à la tête d’Obrist), 10 000 bouteilles par an de vins suisses expédiées au Japon (vaudois et… fendant), il salue «le buzz, capital pour la notoriété des vins, jusqu’ici réservés à des cercles d’initiés!»

4.9 Où les Vaudois fêtent 150 ans de 2013

diplomatie, un peu en avance A midi, rendez-vous à Ginza, le quartier chic du centre, pour aller manger des sushis avec Akemi Sugiyama. Elle était ma voisine à la dégustation des derniers Lauriers de platine. Cette épouse d’un importateur de denrées alimentaires et mère d’un fils de 19 ans, Yoshimi, qui a fait son collège à Leysin

et vient de commencer ses études universitaires en family business à Londres, est une passionnée de vins vaudois. «Je rêve d’écrire un livre sur le mariage sushis-chasselas», confiet-elle. Chez le maître Shinji Kanesaka, elle a amené une bouteille des derniers Lauriers de platine, dont elle a importé quelques centaines de flacons. Le jeune chef, 41 ans, qui a ouvert deux autres succursales à Singapour, dont une au fameux Raffles, manie avec une dextérité époustouflante son yanagiwa (couteau) à manche d’ébène. Il tranche les poissons pour des sashimis et des sushis d’une fraîcheur extrême: dixhuit secondes, chrono en main, pour «formater» une petite boule de riz, délicatement assaisonnée de vinaigre et de wasabi, avec «son» poisson. Il est très fier d’une pièce de thon rouge bien rassise, payée 500 francs le kilo. Et, quand on lui demande si le chas-


 Le roi du sushi, Shingi Kanesaka, immortalisé par

«pipeules» ont fait honneur à la soirée Hublot. Et que l’ambassadeur de Suisse, en mettant sa résidence à disposition, a permis d’officialiser le tout.» Le lendemain, Pierre Keller retrouvait une autre casquette, celle de directeur retraité de l’ECAL et d’ambassadeur du design industriel, pour signer une convention entre Design Price Schweiz

et la Japan Design Promotion pour faciliter le travail des professionnels des deux pays. Le jeudi 5, les vignerons vaudois sont allés voir de près le Fuji Yama. Mais j’étais déjà dans l’avion de retour: je ne l’ai pas vu une seule fois, versant une larme, comme le Gruérien privé de «son» Moléson ou le Genevois de «son» Salève…

La délégation des vignerons vaudois au complet.

Tuesday, 3rd September The Zurich journalist, Chandra Kurt, organises a morning trip to the fish market in the company of Katsuyuki Tanaka and his wife. Tanaka restates his faith in Chasselas, a wine that never tires. In the evening, a joint Hublot event is held at the Palace Hotel. After the blind tasting, Pierre Keller pays tribute to Hublot CEO, Jean-Claude Bivier. His Alpine cheese appetiser is accompanied by a PierreAlain Dutoit Fous du Roi Chasselas. Sylvie Camandona, Cidis sales director, affirms there is a potential in Japan for high-end Doral and Gamaret. LouisPhilippe Bovard agrees but suggests giv-

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ing it another few years. Obrist CEO, Paul Baumann, proposes better segmentation and positioning; the Japanese themselves assert that Chasselas marries well with their cuisine. Jean-Pierre Cavin of Artisans Vignerons d’Yvorne adds that the Japanese like Bordeaux reds and Swiss whites. Philippe Gex appreciates the wine/watch alliance, while Schenk assistant director, Alain Leder, acclaims this promotional expedition. Wednesday, 4th September Sushis at the great chef Shinji Kanesaka’s restaurant with Akemi Sugiyama who is passionate about Vaud wines and is planning a book on the sushi-Chasselas

otos

A Japanese Chronicle (cont.)

© iStockph

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selas accompagne tous les sushis, il répond: «Cela dépend de l’intensité du goût du poisson.» La cuisine japonaise s’accommode aussi d’accords mets et vins subtils, qu’on se le dise! Le point d’orgue de cette tournée japonaise, c’est la réception à l’ambassade de Suisse. Pourquoi donc PierreLuc Leyvraz et son épouse étaientils du voyage? Pour promouvoir ses Blassinges autant «terravinées» que «parkérisées»? Secret bien gardé et dévoilé: ce chasselas est le vin exclusif de l’ambassade de Suisse. Son Excellence Urs Bücher et sa femme l’ont découvert il y a quelques années et l’ont fait venir à Tokyo. Les quelque 3000 Japonais qui passent chaque année par l’ambassade y ont droit… Le choix, pour les 150 ans des relations diplomatiques entre le Japon et la Suisse, sera élargi, lors des festivités officielles (qui ont eu lieu en début février 2014). Au final, Pierre Keller savoure son triomphe: «C’étaient trois soirées et trois clientèles différentes. Je remarque que le vin passe par les femmes, au Japon. Ensuite que les

© Akemi Sugiyama

Pierre-Emmanuel Buss, journaliste au Temps.

partnership. The high point of the trip is a reception at the Swiss Embassy where we are served their exclusive Chasselas Pierre-Luc Leyvraz’s highly awarded Les Blassinges. Pierre Keller wraps up on a triumphant note!

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Vin Vaudois

漫画 er Manga 1 cru Un manga, bande dessinée japonaise, pour découvrir le vin, ses secrets et sa complexité au travers de descriptions méticuleuses, voire mystiques? Un mariage harmonieux où la lecture du vin se fait émotion. Les Gouttes de Dieu, série manga sur le thème du vin, est la référence bien au-delà du Pays du Soleil levant.

© Ed. Glénat

Un témoignage de Romain Hofer, conseiller en communication J’aime partager un bon flacon de vin avec mes amis, j’adore aussi passer des moments à lire des bandes dessinées. Mais dévorer une série manga – qui se lit à l’envers, entendez de la dernière page à la première et de droite à gauche –, y découvrir des vins, un nombre impressionnant d'anecdotes, de conseils et des descriptions de dégustations qui vous font plonger dans un monde d’émotions, je n’y aurais jamais pensé. Un mariage pourtant divin avec Les Gouttes de Dieu. L’histoire se déroule sur les cinq continents mais principalement au Japon. Yutaka Kanzaki, œnologue réputé et respecté mondialement, possède l’une des plus prestigieuses collections de vin d’Asie, évaluée à plus de 12 millions d’euros. A sa mort, son testament surprend: son extraordinaire cave reviendra à celui de ses deux fils, Shizuku Kanzaki, qui n'a aucun goût pour le vin mais se révélera être plus qu’à la hauteur, et Issei Tomine, célèbre expert et jeune œnologue surdoué, qui résoudra douze énigmes dévoilant douze apôtres, soit douze grands crus. Il découvrira alors un treizième et mystérieux vin, inconnu de tous, surnommé les Gouttes de Dieu. Chaque énigme est une description détaillée, poétique, et même mystique, qui mène nos héros dans une quête qui va bouleverser la vie des deux frères que tout oppose. Tout au long

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de ce duel, le lecteur découvre l'univers du vin, son langage, ses particularités, ses traditions et, bien entendu, quelques-uns des crus les plus prestigieux: romanée-conti, château mouton rothschild, château lafite rothschild, château la tour haut-brion, château lynch-bages, mais aussi nombre de crus plus abordables. Les descriptions sont riches et minutieuses, les dessins des bouteilles et étiquettes presque réels, les conseils d’alliances mets-vins pertinents. Et, lors des dégustations, les mots, les images et autres références prennent leur envol vers un monde majestueux. Dans la description du deuxième apôtre, l’auteur met en parallèle deux millésimes de château palmer et la théorie selon laquelle Da Vinci aurait peint deux tableaux représentant une Mona Lisa, l’une pleine de cœur et d’affection (château palmer 1999) et l’autre débordante de jeunesse et de puissance (millésime 2000). Exprimer une telle énigme au travers du vin en devient une prouesse. Gilles Wannaz, du domaine éponyme, producteur en biodynamie depuis bientôt dix ans et amateur de BD, reconnaît dans Les Gouttes de Dieu une richesse du vocabulaire œnologique et une émotion qui trop souvent font défaut dans le langage des professionnels. «L’approche hédonique, la lecture émo-

tionnelle du vin et sa nouvelle interprétation» l’ont frappé, et d’ajouter que «le consommateur a trop souvent un complexe pour parler du vin. Les professionnels en sont en partie responsables par leur lecture intellectuelle et technique. La perception d’un vin est personnelle, intuitive, chacun ayant son vécu et ses expériences de la vie pour 

Deux millésimes comparés à deux Mona Lisa.


Quarante tomes sont déjà parus au Japon, dont 31 traduits en français (le 32e est annoncé pour mars 2014). 

«Raconter, faire vibrer quelque chose en vous, procure des émotions, c’est un peu le principe des Gouttes de Dieu» Gilles Wannaz

s’exprimer, remonter dans la mémoire d’un moment.» Après une lecture trop souvent technique, place, dans cette série, à une lecture émotionnelle. L’expression du vin «passe par une nouvelle interprétation, une nouvelle forme de communication non verbale, avec son énergie et ses vibrations. Parfois les mots ne suffisent pas, et le dessin, forme de réalité augmentée et richesse infinie accessible à tous, permet de visiter son intérieur. «Raconter, faire vibrer quelque chose en vous, procure des émotions, c’est un peu le principe des Gouttes de Dieu», conclu Gilles Wannaz. La série n’est pas près de s’arrêter, puisque le 30e volume (le 32e devrait paraître en français courant mars

2014) ne dévoilera que le dixième apôtre: grands-échezeaux 2002, du domaine Robert Sirugue Bourgogne, côte de Nuits. Le duel opposant les deux frères garde son suspense, Shizuku et Tomine sont ex æquo avec chacun cinq apôtres découverts. Le scénario est de Tadashi Agi, un pseudonyme sous lequel travaillent un frère et une sœur, Yuko et Shin Kibayash. Le dessin, riche et renseigné, est de Shu Okimoto qui, fort de son talent graphique, invite le public non habitué au manga à aborder cette série sans a priori culturel. Les vins suisses ont-ils leur place dans un tel univers manga à succès planétaire? Oui, en général. Toutefois, Nicolas Joss, directeur de l’OVV, relève: «Nous serions bien incapables de répondre à la demande, la production étant trop faible. Nous ciblons plus volontiers le haut de gamme, au travers par exemple de clubs exclusifs et privés à la recherche de produits uniques.» Même s’il reconnaît que le placement de produits dans Les Gouttes de Dieu «contri-

bue à construire l’image du vin auprès des jeunes adultes». Et pourtant nos héros font un passage en Valais pour y gravir le Cervin, et y découvrir le fendant et l’apprécier! Son mariage avec la cuisine japonaise se révèle être divin (lire à ce sujet l’article de Pierre Thomas en page 11). Figurez-vous que cette mention dans le 17e volume est «le fruit du hasard et une belle surprise», nous assure Adeline Rouiller, chef de projet marketing chez Provins. Quant au succès de la série, Philippe Duvanel, directeur du festival BD-FIL, relève que la «série aurait pu exister en France» et, même s’il a un doute sur la dramaturgie et craint de «s’ennuyer à la longue, la série reste ludique et forte», et de noter «la qualité des recherches des auteurs, l’exactitude, la reconstitution fidèle des lieux, des bouteilles et étiquettes». Il avoue d’ailleurs avoir «souvent mis en avant cette série et l’offrir volontiers à des amis». On l’a dit, Les Gouttes de Dieu sont un énorme succès en Asie. En Suisse, la série se vend à quelque 300 exemplaires par tome, «et les ventes augmentent à chaque tome, un succès d’estime», nous confie Edith Malzahm, des Editions Glénat pour la Suisse, qui viennent hélas de fermer. L’univers manga reste encore trop souvent et par erreur associé aux seuls ados. Je n’ai pas honte d’avoir abordé mon initiation au monde de l’œnologie à la lecture de cette série et garde volontiers mon âme d’enfant, amateur de vins, oui, et un peu de manga. Et, si le manga vous effraie, je vous encourage à découvrir Les ignorants. Une BD cette fois-ci. Un ouvrage magnifique, fruit d’une collaboration remarquée et remarquable entre Richard Leroy, le vigneron de la Loire, et Etienne Davodeau, le dessinateur et scénariste. «Une initiation croisée», comme le dit son sous-titre, une aventure humaine, drôle et touchante. Les Gouttes de Dieu, Ed. Glénat, coll. Seinen Les ignorants, Etienne Davodeau, Ed. Futuropolis

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Les Lauriers de platine aux

Délices de Pierrot 2012 La commune de Féchy jubile: c’est la troisième fois que les Lauriers de platine de Terravin consacrent un vin élevé sur les terres de ce lieu de production. Quant à l’heureux «papa», Thierry Molliex, au service militaire lors de la cérémonie, il n’a pu venir cueillir ses lauriers. C’est son père, Pierre-Louis, qui est venu chercher la distinction à sa place. Eva Zwahlen – Photos: Hans-Peter Siffert Une cause de mélancolie que ce Pierrot qui danse sur toutes les étiquettes de la maison Molliex? En aucun cas. D’abord, il a été dessiné en rouge (et non en blanc) par la mère de Pierre-Louis pour son mari, et ensuite, en 2013, le chasselas Délices de Pierrot 2012 a carrément explosé. A un tiercé d’or (Sélection des vins vaudois, Mondial du chasselas, Grand Prix du vin suisse) a succédé la couronne: ces prestigieux Lauriers de platine de Terravin. Le meilleur chasselas de l’année est donc tout sauf un vainqueur de hasard. «Lorsqu’on nous a appelés pour nous l’annoncer, mon mari ne voulait d’a­ bord pas y croire, se souvient en riant Anne-Lise Molliex, l’épicentre de cette famille de vigneron. J’ai dû presque le forcer à aller à Crissier.» Après la victoire, le téléphone n’a pas cessé de sonner pendant plusieurs jours. «Il y a même deux ou trois collègues vignerons qui m’ont félicité», note simplement Pierre-Louis. La famille est bien connue dans le canton de Vaud, qui a vu le portrait de Pierre-Louis Molliex, incarnation du vigneron débonnaire enraciné dans sa terre, orner les affiches de la Banque Cantonale Vaudoise (BCV). Dans le petit village cosy de Féchy (Dessus et non pas Dessous!), Pierre-Louis et Thierry, son fils de 28 ans, cultivent 7,5 ha de

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Pierre-Louis Molliex et le parrain des prestigieux Lauriers de platine, le chef triplement étoilé Benoît Violier.

vignes dont 6 leur appartiennent. Le reste est propriété de la commune, et ils le travaillent en tant que vignerons-tâcherons. Nonante pour cent des surfaces se trouvent sur les terres de Féchy, 10% sur celles d’Aubonne et de Perroy. Le chasselas est le roi des cépages avec 80% de la production, les 20 autres sont constitués de pinot noir, gamay, gamaret, garanoir, viognier et gewurztraminer. Le jeune Thierry reprendra officiellement le domaine le 1er janvier 2015,

«Cette dégustation professionnelle nous montre si l’on est sur le bon chemin ou pas. En outre, les consommateurs accordent de plus en plus d’importance à ce label de qualité.» Thierry Molliex

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Vin Vaudois Pas de chance pour Thierry Molliex: pendant que nous célébrions avec son père ses Délices de Pierrot, il était sous les drapeaux. Le «Chapeau vert», qu’il a gagné quelque temps auparavant lors du prestigieux Concours Jean-Louis 2013, l’a désigné «Meilleur dégustateur des moins de 30 ans» du canton. 

Le «délicieux» Pierrot orne toutes les étiquettes de la maison Molliex. Elle a été dessinée par Renée Molliex, la mère de Pierre-Louis, à l’occasion du 50e anniversaire de son mari. Cette Française d’origine ne fut pas qu’épouse de vigneron, mais aussi écrivaine de talent, mainte fois publiée.

© Philippe Dutoit

mais déjà c’est lui qui a pris la main dans les vignes et en cave. Comme son père, il se montre plutôt économe en paroles: «Nous travaillons de manière conventionnelle, lâche-t-il finalement, mais vinifions chaque parcelle séparément et essayons de manipuler le vin le moins possible.» Bien que le domaine soit désormais mécanisé, l’effeuillage et la vendange se font manuellement. La fermentation du chasselas s’opère au moyen de cinq ou six levures sélectionnées, le vin est élevé de façon classique dans des cuves émaillées. «Le chasselas Délices de Pierrot est un assemblage de différentes parcelles, seul le Grand Cru provient toujours de la même vieille vigne.» Deux œno-

logues renommés œuvrent comme conseillers: Nicolas Mairhofer et Thierry Ciampi, ce dernier travaillant également pour la Maison Schenk, qui achète depuis quarante ans 60% du vin ouvert des Molliex. Thierry Molliex a fait Changins et prépare actuellement sa maîtrise. Depuis quelques mois, il est le père de jumeaux alors qu’au même moment il raflait le chapeau vert, distinction du JeanLouis au Comptoir Suisse, récompensant le meilleur dégustateur vaudois de moins de 30 ans. Mais le plus grand défi qui attend sa génération, explique le jeune homme, «est de se maintenir sur le marché». En cela, Terravin peut être une aide. «Cette dégustation pro-

fessionnelle nous montre si l’on est sur le bon chemin ou pas. En outre, les consommateurs accordent de plus en plus d’importance à ce label de qualité.» Mais alors pourquoi toutes les bouteilles ne sont-elles pas munies du sigle doré Terravin? Pierre-Louis Molliex semble un peu embarrassé: «Ce n’est pas simple, il faut tout faire à la main… Mais les Lauriers de platine, bien sûr que nous les avons collés!» Ceux qui, d’ailleurs, désireraient déguster cet élégant chasselas, très tilleul et fruits frais, seront agréablement étonnés par son prix: 8 fr. 80 la bouteille de 7 dl. Pas grand-chose, vraiment, pour un vin qui vaut plus que de l’or.

Le temps fort de la remise des prix: (de g. à dr.) Pierre Monachon, président de Terravin, le conseiller d’Etat Philippe Leuba, le vainqueur (ou presque) Pierre-Louis Molliex, et les hôtes Brigitte et Benoît Violier. 

Journalistes et professionnels de la filière apprécient les vins en lice. 

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The Terravin Platinum Laurels award goes to Délices de Pierrot, Féchy, 2012 The commune of Féchy is rejoicing. It is the third time that a wine from its vineyards has obtained the Terravin Platinum Laurels distinction. Pierre-Louis Molliex collected the award on behalf of his son Thierry, who was away on military service. The Pierrot one sees dancing on the labels of the Molliex wines has no reason to be sad. The Délices de Pierrot 2012 had already won a gold, Swiss wine Grand Prix at the 2013 Mondial du chasselas. The Platinum Laurels award was not by any means a random distinction! The family has become well-known in the Vaud Canton thanks to the portrait of Pierre-Louis Molliex, the jovial winegrower on Banque Cantonale Vaudoise posters. Pierre-Louis and his 28-yearold son Thierry grow their vines on 7 ½ hectares of land. Six hectares are owned by the family and the rest belongs to the Féchy commune. Chasselas is king; it represents 80% of production. Other grapes

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include Pinot Noir, Gamay, Gamaret, Garanoir, Viognier and Gewurztraminer. Thierry is already in charge of the vineyards and the cellar, and by 1st January, 2015 he will take full responsibility of the domain. He explains that their wine-making methods are conventional, but each vineyard lot is vinified separately, with minimal handling. Although the domain has been mechanised, leaf plucking and harvesting are done manually. The fermentation is carried out by means of 5 to 6 selected yeasts and the wine is aged in the classical manner, in enamel vats. The Délices de Pierrot is an assemblage of Chasselas from different vineyard lots only the Grand Cru comes from the same, old vine stocks. Two famous oenologists, Nicolas Mairhofer and Thierry Ciampi, are the wine-making advisors. The latter consultant also works with Maison Schenk which has been buying 60% of Molliex unbottled wine for the last forty years.

Thierry Molliex graduated from Changins and is now working on a master’s degree. According to him, the greatest challenge facing his generation is to maintain one’s place in the market. In this respect, Terravin is a great help. “These professional wine tasting sessions can tell us whether we’re on the right track. What’s more, consumers now attach far more importance to the Terravin Quality label.” It may seem rather surprising that not all Mollieux wine bottles actually carry the Terravin gold logo. Somewhat embarrassed, Pierre-Louis Molliex explains that it is not that simple because the sticking has to be done by hand. But, of course, the Platinum Laurels stickers have already been attached to all the bottles! By the way, if you wish to try this elegant Chasselas, with rich aromas of linden blossom and fresh fruit, you will be pleasantly surprised by its price: CHF 8.80 the 7dl bottle. That is really not a lot for a wine that is worth more than gold!

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Š Siffert/weinweltfoto.ch


Grand Prix du vin suisse

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Douze Vaudois sur le podium Jamais encore les producteurs vaudois n’avaient été pareillement à la fête que le soir du 29 octobre 2013, pour la proclamation du palmarès du Grand Prix du vin suisse, à Berne. Trois champions sur la plus haute marche du podium. Mais toujours pas de «vigneron de l’année» vaudois en sept éditions. Face aux Valaisans, dans le sillage de la coopérative Provins, promue «team de l’année 2013» (et non «vigneron»!), les Vaudois n’ont cédé qu’une catégorie comme champion (à trois contre quatre) et fait jeu égal sur l’ensemble des trois premières places, avec pas moins de six dauphins et de trois troisièmes, pour 20 «nominés» vaudois (lire Le Guillon N° 43). Ce concours national a rassemblé près de 3000 vins soumis par 600 producteurs de tout le pays. Champions du chasselas, du rosé et des rouges purs Le président de l’Union suisse des œnologues, Daniel Dufaux, a pu fêter le titre national en chasselas: le Petit Vignoble d’Yvorne 2011 (1), d’Henri Badoux SA, l’a emporté devant un autre vaudois, un yvorne aussi, le Grand Cru 2011 (2) de la Collection Chandra Kurt, du nom de la publiciste zurichoise, vinifié par Bolle & Cie SA, à Morges. L’exploit n’est pas mince, puisque pas moins de 471 chasselas étaient en compétition. Autre exploit: une humagne rouge, des bords du Léman, millésime 2011 (3), élevée dix mois en fûts de chêne, de la cave du Château de Glérolles, à Saint-Saphorin, s’est payé le luxe de battre un cornalin et une humagne, bien valaisans, dans la catégorie des «autres cépages rouges purs»

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(342 vins). Troisième titre en rosé, pour Alain Parisod, du Domaine de la Grille, à Grandvaux, et son Melrose 2012 (4). Dans cette catégorie (163 concurrents), le podium est entièrement vaudois, avec Rodrigo Banto, chef œnologue d’Uvavins Cave de La Côte, à Tolochenaz, et Le Rosé 2012, un assemblage de gamaret-garanoir, et un autre producteur réputé de La Côte, Philippe Bovet, de Givrins, et son Méditerranée 2012, qui termine de surcroît dauphin en vins mousseux (sur 55), avec son brut non millésimé. Un doublé en rouge Sur la deuxième marche du podium encore, Martial Neyroud, du Domaine des Châbles, à Blonay, et son 1807 blanc 2012, derrière un Fribourgeois du Vully, Jean-Daniel Chervet, et sa Cuvée de l’Arzille 2011, dans les assemblages blancs (90 vins). Même rang parmi les gamays (105 vins) pour le Château de Lully 2012 (5), grand cru, vinifié par Bolle & Cie SA, à Morges, où le podium est complété par Les Romaines Grande Réserve 2009 (6), des Frères Dutruy, à Founex, à la troisième marche. Le Clos du Châtelard, à Villeneuve (7), vinifié par Hammel SA, à Rolle, réussit un joli doublé en rouge, avec le deuxième rang pour l’Apicius 2010 (8), en merlot (sur 164 vins), et le troisième rang de la Cuvée des Sens 2010, en pinot noir (sur 441 vins). (PTs)

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Concours (9)

Un panaché de mé (10)

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Les Vaudois sont plus ou moins assidus dans les nombreux concours du monde. Résumé − exclusivement en or − des palmarès du second semestre 2013. Il avait beau être organisé à Sierre, pour la seizième fois, par Vinea, le Mondial des pinots, au pluriel, a récompensé de nombreux vins vaudois, sous toutes les mutations et formes de vinifications du cépage le plus cultivé de Suisse, parmi les 1359 vins provenant de 23 pays. Belle surprise que la grande médaille d’or obtenue par un mousseux de Champagne (VD), un brut rosé nommé l'Orphelin (9), puisqu’il n’a légalement plus droit à la mention d’appellation communale, relayée par celle de Bonvillars. Ce vin du domaine Champagnoux, d’Eric Schopfer, propriétaire-encaveur à Champagne cumule, logiquement, le titre de «meilleur mousseux» du concours.

Mais c’est dans la formule du pinot noir traditionnel que les Vaudois ont glané le plus de médailles d’or: de Lavaux, Pinot noir 2011 (10) de Saint-Saphorin, du Domaine Bovy à Chexbres, Le Portaroux 2012 (11), du Domaine J.-D. Porta à Villette, et L’Amarante 2012 (12) des Fils Rogivue à Chexbres; ou de La Côte, avec le Château de Crans (13), près Céligny, le Domaine de Chantemerle à Tartegnin (2011), le Grand Cru 2012 de SaintLivres, de Richard Aguet à Féchy, et le Domaine de La Treille à Founex (2012). Auxquels s’ajoutent l’œil-de-perdrix 2012, étiquette sérigraphiée, de Parfum de Vigne (14) à Dully, et le blanc de noirs d’Aigle, Le Frimeur (15), de Sébastien Chappuis, d’Arc-en-Vins SA à Puidoux.

Swiss wine Grand Prix: 12 (15)

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The president of the Swiss Union of Oenologists, Daniel Dufaux, presented the national Chasselas title to Henri Badoux SA - Petit Vignoble d’Yvorne 2011. Another Schenk group wine came second, Grand Cru 2011 Collection Chandra Kurt, vinified by Bolle & Cie SA, Morges. With 471 wines competing, this was no meagre achievement. Another winner, in the pure reds category, was a 2011 Humagne, matured ten months in oak barrels, produced by Château de Glérolles, Saint-Saphorin. The third rosé title went to Alain Parisod’s Domaine de la Grille, Grandvaux – Melrose 2012. Other distinguished rosés in this category were the Uvavins Cave de La Côte, Tolochenaz – Gamaret-Garanoir assemblage – Le Rosé 2012, and the Philippe Bovet Givrins –

Méditerranée 2012. Their non-vintage brut was also runner up in the sparkling wine category. Martial Neyroud, Domaine des Châbles, Blonay, came second in the white assemblage group with his 1807 Blanc 2012. Another second place went to the Gamay Château de Lully 2012, grand cru, vinified by Bolle & Cie SA, with third place going to Frères Dutruy, Founex – Les Romaines Grande Réserve 2009. In the red category, second and third places went to Apicius 2010 and Cuvée des Sens 2010 resepctively, both from Le Clos du Châtelard, Villeneuve, vinified by Hammel SA, Rolle. Gold medals for Vaud wines At the Vinea Mondial des Pinots, the

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dailles d’or La coopérative de La Côte sur tous les fronts Au même concours de Sierre, en blanc cette fois, le Pinot Gris Expression 2012 (16), d’Uvavins-Cidis à Tolochenaz, s’est également paré d’or, comme une kyrielle de vins de la coopérative de La Côte. Jugez-en: au concours Mundus Vini, en Allemagne, or également pour le Doral (17) et le sauvignon blanc (18), tous deux de 2012, de la nouvelle ligne Emblem, tandis qu’un pinot gris 2012 (19), en version liquoreux, a obtenu l’or encore, comme un gewurztraminer 2011 (20), au Concours des sept ceps, à Bourg-en-Bresse. Pour sa quinzième édition, fin novembre, ce concours interrégional, qui a, depuis ses débuts,

quelques fidèles adeptes vaudois, a récompensé pour la première fois le vin blanc et le vin rouge le mieux noté de la compétition. Et c’est David Kind, du Domaine de Terre-Neuve à Saint-Prex, qui s’est imposé en rouge, avec son merlot 2012 (21), médaillé d’or, comme le chardonnay 2011 du Domaine de Marcelin (22) à Morges. Enfin, de plus en plus de vignerons suisses, surtout alémaniques, envoient des vins au méga-concours AWC de Vienne (Autriche). Un seul vin vaudois figure parmi la vingtaine de médailles d’or pour 2013, le diolinoir de Saint-Saphorin Optimus 2009 (23), du Domaine Bovy, Chexbres. (PTs)

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Vaud wines on the podium gold awarded to Eric Schopfer’s dry rosé sparkling wine, Orphelin, was a nice surprise as his Champagnoux estate, Champagne (VD), had recently lost its ‘Champagne’ appellation. Traditional Pinot Noir wines collected the most golds: Domaine Bovy Chexbres – SaintSaphorin Pinot noir – 2011; Domaine J.-D. Porta, Villette – Le Portaroux - 2012; Fils Rogivue, Chexbres – Amarante 2012; Château de Crans, near Céligny; Domaine de Chantemerle, Tartegnin (2011); SaintLivres Grand Cru 2012 - Richard Aguet, Féchy; and Domaine de La Treille, Founex (2012). And more golds for Oeil-de-perdrix 2012, Parfum de Vigne, Dully, with its screen-printed label, and the Arc-en-Vins SA, Puidoux, Sébastien Chappuis – Aigle Blanc de noir de pinot noir - Le Frimeur.

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Cooperative de la Côte did extremely well The white Uvavins-Cidis, Tolochenaz – Pinot Gris Expression 2012 was also awarded gold at Vinea, while the new Emblem line Doral 2012 and Sauvignon Blanc 2012 were winners at Mundus Vini, in Germany. Both a Pinot Gris 2012 dessert wine, and a Gewurztraminer 2011 won first prizes at Bourg-en-Bresse where David Kind’s red Domaine de Terre-Neuve, Saint-Prex – Merlot 2012, and the white Domaine de Marcelin, Morges – Chardonnay 2011 both obtained first prizes. Finally, the Domaine Bovy, Chexbres – Saint-Saphorin Diolinoir – Optimus 2009 obtained a gold medal at the Vienna AWC competition, 2013.

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Dégustation

Mariages blancs en Pays de Vaud Faut-il assembler deux, trois ou plus de variétés de raisins blancs dans un seul flacon? Et pour quel mariage avec quels cépages? Quelques pistes, à la lumière des plus réussis des 30 vins dégustés par notre jury, tous élaborés en terres vaudoises. Pierre Thomas – Photos: Philippe Dutoit Assemblages blancs vaudois? Peutêtre, cher lecteur-consommateur, ignorez-vous qu’il en existe. Combien? Difficile de le savoir: les registres ne tiennent compte que des cépages cultivés (voir notre tableau p. 31). Et pas de ce que le vigneron en tire – tel le rosé, répertorié en rouge, dont il est issu. Dans le vignoble vaudois, les spécialités blanches ne représentent que 3,60% de la vendange 2013, largement dominée par le chasselas (68,47%), devant l’ensemble des rouges (28%, dont 18,6% de pinot noir et de gamay). D’en avoir réuni 30, sur deux millésimes, paraît représentatif de ce qui se trouve sur le marché. Et, parmi 

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ceux qui ont été considérés comme les meilleurs par notre jury (lire la double page 32-33), figurent des vins de grande consommation, comme l’As de cœur blanc, Cave de Jolimont, trilogie chardonnay-charmont-doral, ou l’assemblage de Saint-Saphorin-sur-Morges d’Uvavins, mêlant vin blanc et blanc de noirs, à destination de la Coop. Un pionnier de l’aligoté et du pinot gris La surprise de la dégustation revient à un négociant-éleveur de Luins, JeanMichel Walther. Son grand-père, fils d’instituteur qui possédait quelques parchets, fut parmi les premiers en terres vaudoises à introduire de l’aligoté (de Bourgogne), du chardonnay et

Jean-Michel Walter à Luins, affineur et éleveur de vins.

du pinot gris, en 1924 déjà. L’instituteur avait dit à son fils: «Tu feras vigneron, il y a de l’avenir!» Après avoir suivi l’Ecole cantonale de Marcelin, puis bourlingué, notamment aux EtatsUnis, Jean-Michel, 47 ans, est revenu sur ses terres, il y a une dizaine d’années. Il ne cultive pas ses 3,6 hectares de vignes, confiées à des voisins. Mais veille sur son chai. C’est là qu’il affine des vins blancs et rouges, dans un contenant de chêne encore insolite: des demi-muids, fûts moyens de 600 litres, choisis avec soin chez SeguinMoreau, la Rolls-Royce de la tonnellerie bordelaise. Même si notre jury n’a pas eu de franc coup de cœur, deux de ses vins sont arrivés en tête de la dégustation. Sur fond de Harley-Davidson cuivrée et de collection de whiskys, dans la cave construite en 1984 au bord de l’antique Vy Etraz, à Luins, Jean-Michel Walther s’excuse de ne pouvoir présenter des diplômes et médailles du dernier Grand Prix du vin suisse, qui l’a pourtant récompensé dans un passé récent. Au printemps 2013, le décès de son père l’a empêché de concourir. Jean-Michel, féru de cuisine au point d’avoir donné des cours à des professionnels, est aussi passionné par la lune montante, la qualité du chêne («le goût du bois me dérange») et l’alchimie de l’assemblage. Le Curieux ne date pas d’hier, mais de 1994: «On a fait des essais avec mon père et mis plusieurs années pour y arriver. Depuis,

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Ci-contre, Reynald Parmelin, pionnier du bio en terres vaudoises. 

Ci-dessous, près de Blonay, Martial Neyroud fait évoluer l'encépagement du Domaine des Châbles en blanc et en rouge.

la formule ne change pas, parce que les trois cépages se complètent: le chardonnay est plutôt carré, le pinot gris, floral et fin, et l’aligoté ajoute une dimension citronnée.» Depuis qu’il a repris la cave, Jean-Michel a donné un nom fantaisie à chacun de ses vins (19 étiquettes!), bannissant appellation et cépage, et il démultiplie les assemblages. «Comme un cuisinier imaginatif, je ne suis pas du genre à proposer du steak frites tous les jours!» Et lui qui va à la rencontre de sa clientèle dans le grand Genève, Pays de Gex compris, n’est pas peu fier que les Français le surnomment l’alchimiste… Il cite aussi ses amitiés avec des chefs de cuisine, comme Carlo Crisci: «Les restaurants gastronomiques m’amènent du monde chaque jour.» Une demande de la gastronomie A quelques hectomètres de là, dans la plaine sous Begnins, c’est aussi la restauration qui a incité Reynald Parmelin à proposer un assemblage blanc. Son domaine, La Capitaine, s’est encore agrandit de 4 hectares (pour 21 ha l'an passé), cultivés entièrement en bio: bio classique et biodynamie, avec la revendication des deux labels, le Bourgeon et Demeter, pour tous les vins. «Les restaurants de poisson de la région me réclamaient depuis longtemps un vin fruité, mais sec.» Il y a quinze ans, avant qu’il ne plante son johanniter, triple champion suisse des vins bios, il compose la bien nom-

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mée Réserve gastronomique. Dans la foulée, sans sauvignon blanc, les acheteurs de la Coop choisissent une Cuvée noble: ils négocient le nombre de bouteilles chaque année, en février, et les commandes sont en progression (12 000 flacons en 2013, où Coop a fêté les vingt ans de son label Naturaplan). «Je suis rarement emballé par les assemblages blancs, confesse le vigneron-encaveur. Souvent, c’est le vin qui arrange l’œnologue, pour faire du volume et lisser les millésimes, au détriment du caractère.» Pour lui, un bon assemblage doit avoir «de la complexité aromatique au nez et en bouche. Il ne doit pas être un chardonnay bis!» Sa Réserve gastronomique, proposée en flacons bleus de 75 et 50 cl, car-

tonne au bord du lac… Les deux cuvées, pour la restauration et pour la grande distribution, ne connaissent ni le bois ni même les amphores, où, pourtant, Reynald Parmelin passe tous ses vins blancs – sauf le gewurztraminer, qu’il va bientôt proposer en effervescent! Jouer sur le sucre et l’acidité Pas de bois, non plus, chez le jeune Martial Neyroud, 34 ans, étoile montante de Lavaux. Son 1807 – le numéro postal de Blonay! – a terminé au deuxième rang des assemblages blancs au dernier Grand Prix du vin suisse (lire en page 25). Notre jury l’a moins bien noté, relevant une certaine douceur, que le vigneron-encaveur assume pleinement: «Je lui laisse 4 à

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Dégustation

Cépages blancs du vignoble vaudois 1) Chasselas 2312 ha 2) Chardonnay 40 ha 3) Pinot gris 32 ha 4) Doral 26 ha 5) Pinot blanc 14 ha 6) Sauvignon blanc 13 ha 7) Viognier 12,7 ha 8) Gewurztraminer 11 ha 9) Müller Thurgau 5,7 ha 10) Charmont 5,2 ha 11) Muscat/muscat Ottonel 3,7 ha 12) Sylvaner 3,5 ha 13) Altesse 3 ha 14) Auxerrois 1,5 ha 15) Aligoté 1,4 ha 16) Savagnin blanc 1,3 ha 17) Chenin blanc 1,2 ha

60,71% 1,06% 0,86% 0,70% 0,37% 0,35% 0,33% 0,29% 0,15% 0,14% 0,10% 0,09% 0,08% 0,04% 0,04% 0,04% 0,03%

Source: Registre cantonal des vignes 2013

A Yvorne, le vigneron Jean-Daniel Suardet et l'œnologue André Hotz, au Clos des Rennauds, cher à Ramuz. 

5 grammes de résiduel, pour compenser le fait que ce vin n’accomplit pas de deuxième fermentation.» Juste à côté de son Domaine des Châbles, qu’il exploite depuis dix ans, Martial Neyroud vient de planter du chenin blanc, le grand cépage de la Loire. Pas sûr, pourtant, qu’il s’achemine vers un ménage à trois. Son 1807 risque bien de rester du pinot gris à 60% et du doral à 40%, qui, en 2012, ont été récoltés ensemble et assemblés au pressoir, avant vinification en cuve inox. «J’adore les vins rouges travaillés en fûts, mais le bois me chatouille sur les blancs!» Alors que certains vignerons, à l’image de l’Alsacien Jean-Michel Deiss, explorent de nouvelles voies viticoles et «complantent» sur une même parcelle divers cépages blancs, comme Raymond Paccot, pour son Curzille, ou Charles Rolaz, pour des cuvées tirées des domaines chablaisiens (Clos du Châtelard à Villeneuve et Montet à Bex), Obrist a choisi de partager en quatre le Clos des Rennauds, à Yvorne. Notre jury a préféré la version 2011, un quatuor de chasselas en cuve, et du chenin blanc, de l’arvine et du riesling, vinifiés séparément en barrique,

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puis assemblés et tenus au repos ensemble, plutôt que les deux duos chasselas-chenin et riesling-arvine de 2012. Ces assemblages, au moût pressé à Aigle, mais vinifiés dans le chai à barriques de Vevey, sont signés André Hotz. Le hasard des travaux de cave lui a forcé la main en 2012… Pourtant, l’œnologue n’exclut pas qu’à l’avenir on retrouve non pas des assemblages, mais quatre monocépages. «Le consommateur revient aux vins issus de cépages purs», assure celui qui a accompli, à 60 ans, sa dixième vendange pour Obrist. Un clos, haut lieu d’Yvorne Pour la maison veveysanne, le Clos des Rennauds et ses 6000 m2 de vignes, cultivées désormais en biodynamie, représente son secteur recherche et développement. C’est aussi à propos de ce Clos des Rennauds que Charles-Ferdinand Ramuz, qui passa toutes ses vacances scolaires d’adolescent à Yvorne, dans la maison située au-dessus des vignes, écrivit Vendanges, son premier récit autobiographique. Dans ses premières lignes, l’écrivain offre la parfaite

conclusion à la question – marginale! – des assemblages vaudois face à la pérennité du chasselas, roi du vignoble vaudois: «(…) La renommée des vins, tout comme celle des hommes, est pleine de vicissitudes, d’insécurité, de renversements; et aujourd’hui (réd., en 1927) l’Yvorne n’ose même plus porter son nom, je crois; la mode s’est déplacée. (…) Toutes les modes passent; et c’est ainsi que ce beau vin doré d’alors semblerait suspect aujourd’hui que la mode est au «vin gris», comme on l’appelle, c’est-à-dire un vin sans couleur, un vin pour gens qui ne savent pas ce que c’est que du vin, un vin pour clientèle étrangère, un vin pour buveurs d’eau ou pour buveurs de goutte. (…) Nos temps d’hygiène et de prophylaxie en sont venus à se méfier de tout ce qui est complet, c’est-à-dire vivant. On pasteurise, on sépare, on décante, on confond pureté et stérilisation.» Ce beau texte, ciselé durant l’été 1927, quand Ramuz allait sur ses 50 ans, est à lire dans les Ecrits autobiographiques, parus en 2011 chez Slatkine. Et, tout entier, à méditer sans modération. Avec, à portée de main, un verre d’yvorne, assemblage ou chasselas, c’est selon.

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Dégustation

La dégustation Un jury, formé de Jérôme Aké Béda, sommelier de l’Auberge de l’Onde à Saint-Saphorin, Daniel Dufaux, œnologue de Badoux Vins à Aigle et président de l’Union suisse des œnologues, Marco Grognuz, vigneron-encaveur à Villeneuve, dégustateur, chef de file du label vaudois Terravin, Jean Solis, commerçant en vins à Pully et double

champion suisse de la dégustation, et Pierre Thomas, journaliste spécialisé (www.thomasvino.ch), a apprécié 30 assemblages blancs fournis par des caves vaudoises, le 10 décembre 2013, au bar à vins Midi 20, à Lausanne. Une seule bouteille avait été demandée pour chaque vin, de sorte que les «faux goûts», attribués en général à un défaut

de bouchon, n’ont pu être dégustés. Avec 6 bouteilles éliminées, le taux (20%) paraît anormalement élevé. Aucun vin n’a dépassé les 16 points sur 20. Seuls 5 vins obtiennent 2 étoiles (de 15 à 16 points sur 20) et 9, une seule étoile (entre 14 et 15 points). Globalement, le jury s’est déclaré un peu déçu par les vins présentés (lire l’article principal).

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Saveurs d’automne 2011 (Vin suisse) Cave La Rose d’Or, Jean-Michel Walther, Luins, (sauvignon 50%, chardonnay 50%, 9 mois de barrique, 850 bout.), 19 fr. www.caverosedor.ch Nez complexe de fruits mûrs et d’abricot; en bouche, riche, gras; bel équilibre, belle longueur et racé, tendre; à garder jusqu’à cinq ans.

Clos des Rennauds 2011 Grand Cru Yvorne, Obrist SA, Vevey (chasselas 40%, chenin blanc 20%, riesling 20% et arvine 20%, 10 mois de barrique, sauf chasselas, 4000 bout.), 23 fr. 30 www.obrist.ch Nez fumé et de noix de coco, avec des notes d’agrumes et de fruits mûrs; bouche dominée par le boisé; finale un peu chaude.

Clos des Rennauds 2012 Grand Cru Yvorne, Obrist SA, Vevey (chasselas 50%, chenin blanc 50%, 10 mois de barrique, 2000 bout.), 22 fr. 20 www.obrist.ch Nez discret, avec des notes vanillées; attaque sur l’acidité, arôme de coing; finale un peu raide et sèche, manquant quelque peu d’arômes et de fruit.

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Le Curieux 2011 Cave La Rose d’Or, Jean-Michel Walther, Luins, AOC La Côte (chardonnay 50%, pinot gris 40%, aligoté 10%, 12 mois de barrique, 1760 bout.), 18 fr. www.caverosedor.ch Nez complexe de pomme et de poire; en bouche, frais, élégant; bel équilibre entre la richesse et l’acidité; puissant, avec un bon potentiel de garde.

Réserve gastronomique 2012 Domaine La Capitaine, Begnins, labels Demeter et Bourgeon (chardonnay 35%, pinot gris 25%, pinot blanc 25%, sauvignon blanc 15%, 7000 bout.), 23 fr. www.lacapitaine.ch Nez de fruits frais; carbonique à l’attaque, puis bouche équilibrée; finale sur le citron vert; belle acidité; tendu, avec une pointe de sucrosité.

★★ Lune Blanche 2011 Les Frères Dubois, Cully (50% riesling x sylvaner, 30% muscat, 20% chardonnay, 568 bout.), 19 fr. www.lesfreresdubois.ch Nez aromatique intense de fruits mûrs, d’épices douces; attaque ample, sur des arômes de pêche et de mangue; riche, bonne longueur; finale sur une sucrosité marquée.

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★ Cuvée Noble Blanche 2012 Domaine La Capitaine, Begnins, labels Demeter et Bourgeon (chardonnay 55%, pinot gris 25%, pinot blanc 20%, 12 000 bout.), exclusivité Coop, 19 fr. 90 Nez de pêche et d’abricot; attaque sur les fruits mûrs, avec des notes poivrées; belle longueur, finale un tantinet riche et sèche.

★ La Licorne blanche 2011 Bolle & Cie, Morges (chardonnay 30%, pinot blanc 25%, pinot gris 15%, doral 20% et chasselas 10%, 25% élevés en barrique, et 75% en cuve, 3000 bout.), 15 fr. 20 www.bolle.ch Nez flatteur d’ananas; puissant à l’attaque, riche et gras; avec une pointe de bois et d’alcool en finale qui l’alourdit; bon potentiel de garde de cinq ans.

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Le jury pour cette dégustation, de g. à dr., Daniel Dufaux, Jean Solis, Jérôme Aké Béda, Marco Grognuz et Pierre Thomas, au bar à vins Midi 20, à Lausanne. 

As de cœur blanc 2012 Cave de Jolimont SA, Rolle (chardonnay 33%, charmont 33%, doral 33%, nbre de bout. total non communiqué), 12 fr. 50 www.vins-schenk.ch Nez de fruits mûrs; attaque fruitée, milieu de bouche sur le coing et l’abricot; notes poivrées, finale vive, un brin déséquilibrée.

Plant-Joyeux blanc 2012 AOC Lavaux, Terres de Lavaux, Lutry (chasselas 25%, sylvaner 25%, chardonnay 25% et pinot blanc 25%, en cuve sur lies, 2000 bout.), 14 fr. 30 www.terresdelavaux.ch Notes aromatiques et lactiques au nez; attaque souple, finale à la fois acide et brûlante, avec des notes opposées, à la fois végétales et d’évolution.

La Céleste 2011 Domaine Delaharpe, Yann Menthonnex, Bursins (sauvignon, chardonnay, païen, 14 mois en barrique, 1500 bout.), 27 fr. 50 www.domainedelaharpe.ch Nez intense, avec des notes de résine de pin; manque un tantinet de chair par rapport au bois; finale dure, presque tannique; la matière est dominée par l’élevage…

Symphonie blanche 2011 Cave La Rose d’Or, Jean-Michel Walther, Luins (marsanne 33%, chardonnay 33%, pinot gris 33%, 9 mois en barrique, 850 bout.), 19 fr. www.caverosedor.ch Nez beurré, avec des notes d’écorce d’orange; attaque légèrement suave; structure moyenne; tendre et enrobé, avec une finale sur les épices douces et le poivre blanc.

1807 Blanc 2012 AOC Montreux Lavaux, Domaine des Châbles, Martial Neyroud, Blonay (60% pinot gris, 40% doral en cuve, 2500 bout.), 18 fr. www.domainesneyroud.ch Nez discret, notes florales, d’herbes sèches, et mentholées; riche et un peu chaud en finale, un peu douceâtre.

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★ Saint-Saphorin-sur-Morges 2012 Cave de La Côte, Morges (chasselas, doral, pinot noir et gamay pressés en blanc, 50 000 bout.), 10 fr. 95 www.uvavins.com Nez discret, avec des notes anisées; attaque sur le carbonique, peu de volume; un vin simple et tendre.

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LabeL Vigne d’Or La quête de l’excellence

Quintessence de la nature

Les Artisans Vignerons d’Yvorne ont réservé leurs meilleures terres et leurs meilleurs raisins à cette ligne d’exception. Microclimat, orientation, pente, ensoleillement et aptitude du sol à absorber et restituer l’eau confèrent à chaque parchet sa nature, sa force et sa personnalité. Cette rigoureuse sélection permet d’exprimer la parfaite adéquation des terroirs et des cépages, en donnant à ses vins une grande complexité aromatique et une empreinte hors du commun.

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White Marriages in the Vaud canton A report by Pierre Thomas from a tasting of 30 white assemblage wines produced in Vaud (see below) The main surprise came from the producer/merchant from Luins, Jean Michel Walther, whose grandfather was among the pioneers who, back in 1924, introduced the Aligoté (from Bourgogne), Chardonnay and Pinot Gris grapes into Vaud. After a stint in the US, Jean-Michel returned to Vaud some 10 years ago. He has delegated the wine-growing to a neighbouring estate and himself focuses on the refining of his whites and reds which is carried out in unusual oak containers: demi-muids, Bordeaux-made oak barrels that hold 600 litres. Two of his wines came out on top at the tasting. His formula, developed some 20 years ago, combines three grapes that complement each other: Chardonnay gives character, Pinot Gris gives refined floral notes; and Aligoté gives hints of citrus. Not far from Luins, in the plain below Begnins, Reynald Parmelin has composed a white assemblage, Réserve Gastronomique, to meet the demand from local restaurants for a fruity yet dry white. In his La Capitaine estate all the grapes are grown organically, and all wines are

certified Bio Bourgeon and Demeter (produced using biodynamic methods). His Naturaplan Bio Cuvée Noble has long been very successful with Coop buyers. Reynald Parmelin is hard to please when it comes to blended wines. For him a good assemblage must be aromatically complex on the nose and in the mouth; not just a Chardonnay. His Réserve Gastronomique, available in 70cl and 50cl blue bottles, enjoys huge success in Geneva’s lakeside restaurants. And neither his restaurant special nor his massmarket Naturaplan have been anywhere near wood or amphora, although most of his whites are kept in barrels. No wood barrels either at the Domaine des Châbles winery run by Martial Neyroud, the rising star in the Lavaux region. His white assemblage, 1807, - the Blonay area code! – came second in the last Swiss wine Grand Prix. Our jury ranked it less well on account of a slight sweetness for which the wine-grower takes full responsibility explaining that he leaves 4 to 5 grams of residual sugar to make up for the fact that it is not put through a second fermen-

tation. Although he has recently planted some Chenin Blanc – the famous Loire grape – that does not necessarily mean that he is opting for a ménage à trois. His 1807 is likely to remain 60% Pinot Gris and 40% Doral. After harvest, these grapes are blended in the press and then undergo vinification in inox vats. Martial Neyroud makes the point that he loves red wines vinified in barrels, but not whites. The 2011 assemblage from the Clos des Rennauds estate, in Yvorne, was among our jury’s selections. This ChasselasCheninBlanc-Arvine-Ries­ling quartet, which is vinified separately in barrels and then blended and left to rest, had better marks than either of the 2012 duos, Chasselas-Chenin and Riesling-Arvine. These assemblages bear the signature of the oenologist, André Hotz. Interestingly, he does not rule out the possibility that in the future, instead of an assemblage wine, we will have four monovarietal wines as consumers move back to pure, single grape wines. The Clos des Rennauds, with its 6000 m2 of organically grown vines, is the R&D division of Obrist SA, Vevey.

The wine-tasting event

Thirty 2011 and 2012 white assemblages from the Vaud canton were evaluated by a jury comprising: Jérôme Aké Béda, sommelier, Auberge de l’Onde, Saint- Saphorin; Daniel Dufaux, Badoux Vins oenologist and Swiss oenologists’ Union president; Marco Grognuz, wine producer and chief Terravin taster; Jean Solis, Pully wine merchant and Swiss wine-tasting champion; and Pierre Thomas, a specialised journalist (www.thomasvino.ch). ★★

Le Curieux 2011 (Swiss wine) Cave La Rose d’Or, Jean-Michel Walther, Luins, AOC La Côte (Chardonnay 50%, Pinot Gris 40%, Aligoté 10%, 12 months in barrel, 1760 bottles), 18 fr., www.caverosedor.ch Complex nose of apple and pear; fresh and elegant in the mouth; fine acidityintensity balance; powerful, with good aging potential

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★★

Clos des Rennauds 2011 Grand Cru Yvorne, Obrist SA, Vevey (Chasselas 40%, Chenin Blanc 20%, Riesling 20% et Arvine 20%, 10 months in barrel, except Chasselas, 4000 bottles), 23 fr. 30, www.obrist.ch Smoky coconut nose with notes of citrus and ripe fruit; a dominant woody taste; final notes slightly hot

★★

Réserve gastronomique 2012 Domaine La Capitaine, Begnins, Demeter and Bourgeon labels (Chardonnay 35%, Pinot Gris 25%,Pinot Blanc 25%, Sauvignon Blanc 15%, 7000 bottles), 23 fr., www.lacapitaine.ch Nose of fresh fruit; carbonic attack then balanced in the mouth; final notes of lime; good acidity; tight with a touch of sweetness.

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Nos régions sont des perles rares

Bex et Ollon, le Chablais en rouge et blanc A l’extrémité orientale du canton, Bex et Ollon n’ont jamais été les appellations les plus réputées du vignoble vaudois. Riches en spécialités, bénéficiant de conditions climatiques et pédologiques favorables, ces deux communes possèdent toutefois un potentiel indéniable dont tirent profit des vignerons opiniâtres et inventifs que nous avons rencontrés. Alexandre Truffer – Photos: Sandra Culand Riccardo Mattei dirige en parallèle les Celliers du Chablais et les Artisans Vignerons d'Ollon. 

Artisans Vignerons d’Ollon: le renouveau du Caviste Sur la carte d’identité de la cave coopérative d’Ollon, on peut apprendre que l’entreprise compte 109 sociétaires qui travaillent 37 hectares de vigne, dont 70% proviennent de cépages blancs (chasselas dans la grande majorité) et 30% de rouges (pinot noir et gamay surtout). On découvre aussi que la cave créée en 1906 a adopté son nom actuel en 2008, qu’elle est dirigée par Riccardo Mattei et présidée par Marcel Crolla. On comprend enfin que l’âme, le moi profond, de ces artisans vignerons est un chasselas harmonieux et floral, le Caviste, dont l’étiquette est copiée d’une œuvre éponyme du peintre Frédéric Rouge. En 1925, l’habillage du vin vedette de ce qui s’appelait alors l’Association viticole d’Ollon était tendance, moderne et branché. «Aujourd’hui, cette étiquette plaît moins aux nouveaux consommateurs. Nous perdons des clients, parce que, même si le vin plaît, une partie de la clientèle ne désire plus avoir ce type de bouteille classique sur sa table. C’est pourquoi, sur proposition du comité,

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l’assemblée générale nous a donné son aval afin de faire évoluer cette étiquette», explique Riccardo Mattei. Un défi? «Pire que cela, rigole Marcel Crolla. J’ai toujours entendu dire que celui qui tenterait de changer l’étiquette du Caviste serait viré. Pourtant, je suis sûr que les clients vont réagir de manière positive. Le thème a été maintenu et le nom Caviste ressort sur le nouvel habillage, ce qui n’était pas le cas sur l’étiquette d’origine.» La métamorphose du vaisseau amiral n’est pas le seul changement qu’a connu la coopérative centenaire. Pas moins de quatorze vins, répartis en cinq gammes, s’affichent désormais sur le prix courant. «Les Artisans ont connu des années difficiles, mais aujourd’hui nous possédons une entreprise saine d’un point de vue financier et qui produit des vins de qualité (en 2013, les chasselas on été couronnés au Mondial du chasselas, à Expovina, au Grand Prix du vin suisse et aux Vinalies de Paris), poursuit Marcel Crolla. Par contre nos locaux sont vieillots et surdimensionnés.» «Les bâtiments ont été prévus pour loger 700 000 litres de vin, alors

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que notre poids de forme actuel se situe à la moitié de ce volume. Pour rationnaliser, nous avons mis sur pied une collaboration avec la coopérative d’Aigle, les Celliers du Chablais SA, dont je suis également directeur», explique Riccardo Mattei qui précise: «Il ne s’agit pas d’une fusion. La vendange 2015 – voire 2016 – sera livrée et vinifiée à Aigle, mais les Artisans Vignerons conserveront un bureau, un local de vente et de réception à Ollon.» Artisans Vignerons d’Ollon Société coopérative Rue Demesse 7, 1867 Ollon Tél. +41 24 499 25 50 www.avollon.ch Domaine du Luissalet: le royaume de Willy Deladoëy «Là, à chaque pas, tout n'est qu'abondance et prospérité, on est comme dans un jardin de châtaigniers et de noyers. Çà et là percent des cyprès et des grenadiers. Il y règne une chaleur méridionale, comme si l'on était entré en Italie…», voilà ce que pensait de Bex Hans Christian Andersen, l’auteur de La Petite Sirène, en 1861. Un siècle et

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Nos régions sont des perles rares

demi plus tard, la douceur du climat et la beauté des paysages attirent toujours des amateurs de dolce vita. Willy Deladoëy exploite déjà une résidence de vacances entre vignes et châtaigniers, que l’on peut louer pour trois jours ou plus, mais caresse le projet de transformer l’une de ses granges afin de créer trois ou quatre chambres d’hôtes. «Il a fallu un certain temps pour mettre en marche les choses, mais depuis trois ans nous sommes satisfaits du taux d’occupation de notre maison d’hôtes, toujours pleine de juin à octobre», confirme le président de la Fédération vaudoise des vignerons qui avoue qu’œno et tourisme ont souvent de la peine à s’accorder. «Je pensais que les touristes seraient plus intéressés à découvrir les vins du domaine qui les entoure. Certains viennent bien entendu acheter quelques bouteilles à la cave, alors que d’autres vont simplement se fournir en vin dans les commerces du village. C’est surprenant, mais pas un problème, car l’objectif de notre maison d’hôtes n’a jamais été de faciliter la vente des vins.» Sur les 5 hectares du domaine, commercialisés à 85% en bouteilles, Willy Deladoëy élabore une douzaine de vins. Le chasselas, complanté sur le seul sol en ardoise du canton de Vaud, reste un cépage important, mais le

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seigneur du Luissalet est le gamay vieilles vignes: «Par tradition, Bex est une terre à rouges, et le gamay reçoit un excellent accueil dans le Chablais.» Et le Valais tout proche, que pense-til des vins vaudois? «Lorsqu’on voit des vignes depuis Saint-Maurice, ce sont des vignes vaudoises», sourit Willy Deladoëy. «Il m’est plus facile de vendre du vin à Monthey qu’à Lavaux ou à Aigle. Bien sûr, les Deladoëy ont des racines valaisannes et ma fille gère un restaurant à Champéry, ce qui facilite sans doute les choses!» Willy Deladoëy Domaine du Luissalet, 1880 Bex Tél. +41 24 463 44 49 www.luissalet.ch Frères Rapaz: les Bellerins touche-à-tout Fabien et Yvan Rapaz cultivent 10,5 hectares de vignes sur les communes de Bex et de Lavey. Revendiquant leur statut de vignerons-encaveurs (producteurs qui ne vinifient que le fruit de leurs propres vignes), les deux frères ont aménagé le domaine créé avec leur père, Gilbert. «Pendant plusieurs années, nous avons arraché des vignes existantes pour modifier l’encépagement et le système de culture. Les vignes en gobelet ont fait place à des banquettes bordées de talus

enherbés», explique Yvan. «A la différence d’autres vignerons, nous avons remplacé du rouge par du chasselas. Tout le monde a planté du gamaret et du garanoir, et il y a bien assez de ce genre de vin sur le marché», poursuit Fabien. Avec plus de 6 hectares, le chasselas demeure le roi du domaine. Il se décline en trois versions: le Bélénos, classique et minéral, né sur les sols de gypse typiques de la commune, le Violet des Galèches, un chasselas violet – une variété aromatique oubliée – vinifié sur lies et non filtré, ainsi que le Bélénos Gâtion, concentré naturellement sur souche avant la vendange. A côté de cépages plutôt classiques comme le chardonnay, le pinot gris ou le gamay, la gamme, qui comprend une vingtaine de vins, offre des curiosités comme le Casta Néa, un assemblage élevé dans des tonneaux de châtaignier originaire des forêts communales, et le plant basile, né d’un mystérieux cépage dont l’ADN fait, à l’heure actuelle, l’objet de recherches approfondies. Un bref coup d’œil sur le site internet du domaine permet d’affirmer que les frères Rapaz aiment se diversifier. Outillage électronique, lampes solaires et baguettes de sourcier cohabitent avec sauvignon blanc et pinot noir. Rien d’étonnant donc à ce que le

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Willy et Nathalie Deladoëy ont fait du Domaine du Luissalet une référence en termes d'œnotourisme. 

Yvan, Fabien et Gilbert Rappaz, une famille de vignerons inventifs. 

Richard Bonvin et Maurice Cheseaux ont fondé la Cave du Courset en 2001. 

duo fasse partie des producteurs bellerins qui laissent reposer leurs meilleures cuvées dans les célèbres mines de sel de la commune. Vieillis quatre ou cinq ans à l’abri de la lumière et des changements de température, les vins atteignent leur apogée dans des bouteilles que le temps recouvre d’une couche de sel caractéristique. Rapaz Frères Vignerons-encaveurs Chemin du Perey 1, 1880 Bex Tél. +41 24 463 34 72 www.rapazfreres.ch Cave du Courset: l’Extrême-Orient vaudois Créée en 2001, la Cave du Courset a un pied de chaque côté de la frontière cantonale. Ce domaine de 6 hectares s’étend sur les communes de Lavey, Bex et Saint-Maurice. «En plus du domaine familial, situé sur les collines du Montet et de Chiètres, à Bex,

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nous travaillons les vignes des trois domaines communaux. Tout est pourtant vinifié sur le canton de Vaud», précise Marie-Laure Cheseaux, qui partage son temps entre la vente, l’administration et le travail des vignes. La cave elle-même se situe dans le village de Lavey-les-Bains, à quelques centaines de mètres du complexe thermal. «C’est la seule cave du village, ce qui nous permet de bien travailler avec les restaurants locaux, le Grand Hôtel des Bains compris», poursuit notre interlocutrice. Parmi les vins précis, vifs et structurés du domaine, signalons le Chasselas 2012. Médaille d’or au Grand Prix du vin suisse et récompensé au Mondial du chasselas, ce blanc est vinifié «de manière traditionnelle, comme presque tous les vins de la large gamme du domaine, pour préserver les spécificité des sols qui les ont vu naître», par Richard Bonvin, l’œnologue qui, pour fonder la Cave

du Courset, s’est associé à Maurice Cheseaux au début du millénaire. Ce dernier fait partie des vigneronstâcherons récompensé à la Fête des Vignerons de 1999. Et, s’il est bien trop tôt pour parler de l’édition de 2019, sa femme est convaincue «qu’une nouvelle distinction devrait être possible». Comme toutes les «jeunes» entreprises viticoles, la Cave du Courset a dû se créer une clientèle. «Nous sommes présents au Comptoir suisse ainsi qu’aux Wyschiff (des salons de dégustation qui ont lieu sur des bateaux dans différentes villes alémaniques) de Lucerne, Bâle et Thoune. Nous avons aussi développé l’œnotourisme, principalement des dégustations à la cave, qui fonctionnent de mieux en mieux», conclut Marie-Laure Cheseaux. Cave du Courset Rte des Bains 12, 1892 Lavey-Village Tél. +41 24 485 33 05 www.lacaveducourset.ch

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Nos régions sont des perles rares

Avec sa Réserve des Moines et son Sacristain, Bernard Huber perpétue la mémoire des moines qui ont occupé l'Abbaye de Salaz pendant sept siècles. 

Abbaye de Salaz: vieilles pierres et jeunes entrepreneurs Créée par un abbé de Saint-Maurice au XIIe siècle, l’abbaye de Salaz passe en mains privées en 1851, peu après la guerre du Sonderbund. Un siècle et demi plus tard, la troisième génération des familles Huber et Kropf gère le domaine. Bernard s'occupe des 4 hectares de vigne et de l'élaboration des vins. Sa sœur Janine et son cousin Michel se chargent de la restauration et de l'organisation des événements. Enfin, Philippe, le cadet des cousins, cuisinier de formation, s’affaire aux fourneaux. Sans oublier le soutien de leurs parents, toujours actifs. «L’œnotourisme est devenu le principal vecteur de commercialisation de nos vins, explique Bernard Huber. Nous organisons de plus en plus d’événements et accueillons plusieurs milliers de convives par an. En cinq ans, l’activité événementielle, a connu un développement considérable. Soirées d’entreprise, banquets de mariage, fêtes de famille, anniversaires… nous

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pouvons tout organiser, car nous disposons de deux salles (de 45 et 50 places) ainsi que d'un bel espace dans les jardins.» Les menus sont élaborés avec des produits locaux et les vins – inclus de l’apéritif jusqu’au café – sont bien entendus étiquetés Abbaye de Salaz. «Cette formule constitue une magnifique occasion de faire découvrir nos cuvées au domaine sans passer par un marketing anonyme. Ce qui nous permet de créer un lien sincère avec notre clientèle», souligne le jeune producteur, réputé pour ses spécialités rouges comme la Réserve des Moines (un merlot élevé en barrique, dont le millésime 2009 a terminé deuxième du Grand Prix du vin suisse 2011), la Mondeuse, la Syrah ou le Sacristain, un vin dont la composition change chaque année (en 2012, c’était un cabernet franc) et qui n’apparaît pas sur la carte de commande. Offrant un excellent rapport qualité-prix, ces cuvées précises n’ont qu’un défaut, elles sont épuisées après six mois.

Abbaye de Salaz Familles Huber & Kropf 1867 Ollon Tél. + 41 24 499 10 48 www.abbaye-de-salaz.ch

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Bex and Ollon, the red and white Chablais communes Although not among the most well-known appellations, some of the winegrowers are inventively exploiting the region’s rich potential.

Artisans Vignerons d’Ollon: a winery renaissance The Ollon vineyards produce 70% white wine (mainly Chasselas) and 30% red (especially Pinot Noir and Gamay). Founded in 1906, the winery is now run by Riccardo Mattei (manager) and Marcel Crolla (president). They are about to launch a new label for their flagship wine, a distinctly floral and harmonious Chasselas called le Caviste. The old label dating back to 1925, distinctly trendy at the time, had lost its appeal with today’s consumers. The winery’s metamorphosis has also included an extension of the number and range of wines as well as quality enhancement. In 2013, this culminated in four different awards for their Chasselas. In the future, vinification will be carried out at the Aigle cooperative, les Celliers du Chablais SA, also run by Mattei. Administrative offices and sales point will remain in Ollon. Artisans Vignerons d’Ollon – Société coopérative – www.avollon.ch

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Domaine du Luissalet: Willy Deladoëy’s kingdom Back in the 1850s, the Danish author Hans Christian Andersen was overwhelmed with the region’s abundantly opulent natural beauty. The cypress and pomegranate trees, and the temperate climate of Bex, made one feel “as if one had already reached Italy”. Today, the vineyards and chestnut trees continue to attract visitors who come to stay in Deladoëy’s holiday accomodation, which is always fully booked from June to October. His next project is to convert the barn into 3 or 4 chambres d’hôtes. On his 5-hectare estate, Willy Deladoëy produces a dozen or so wines. His Chasselas, which is planted in the only granite soil found in the Vaud canton, is certainly important; but the lord of Luissalet is the Gamay Vieilles Vignes. Traditionally, Bex is a land of reds, and the Gamay is very much appreciated in the Chablais region. Willy Deladoëy – Domaine du Luissalet – www.luissalet.ch The Rapaz brothers: jacks of all trades The wine-grower/producer-brothers, Fabien and Yvan, have been innovating, planting new varieties and changing the cultivation techniques on their vineyards in the Bex and Lavey communes. Contrary to the general trend, they are replacing red with Chasselas as they consider that there is more than enough Gamaret and Garanoir on the market. They produce three versions of Chasselas: Belenos, Violet des Galèches and Bélénos Gâtion. Besides the Chardonnay, Pinot Gris and Gamay classics, their range of twenty or so wines includes specialities such as Casta Néa, an assemblage wine stored in chestnut barrels made from local wood, and Plant-Basile produced from a mysterious grape. Another idiosyncrasy of theirs is that they leave their best wines to mature for 4-5 years in the famous Bex salt mines nearby. Rapaz Frères – Vignerons-encaveurs – www.rapazfreres.ch Cave du Courset: the Far East of Vaud This estate, founded in 2001 by the oenologist Richard Bonvin and Maurice Cheseaux, stands astride the cantonal border and stretches across the Lavey, Bex and Saint-Maurice communes. The winery is situated in Lavey-les-Bains, very close to the thermal baths. As it is the only wine cellar in the village, it benefits from the custom of the local restaurants, including Grand Hôtel des Bains. One of their straightforward, lively and structured wines that should be mentioned is the Chasselas 2012, a gold winner at the Swiss wine Grand Prix and selected at the Mondial du chasselas. Most of their wine is vinified in a traditional way to preserve the specific characteristics of the soil. This new enterprise has built up a clientele by attending the Comptoir Suisse and different Wyschiff tasting salons, and organising wine-tasting events in their cellar. Cave du Courset – www.lacaveducourset.ch Abbaye de Salaz: old stones and young entrepreneurs The estate was founded by a Saint Maurice abbot in the 12th century and passed into private hands in 1851. Today, the third generation of the Huber and Kropf families run the 4-hectare domain - a genuine family business. Wine tourism is their principal marketing tool. They organise events such as business dinners, wedding banquets, and family and birthday celebrations, welcoming thousands of visitors annually. The menus are based on local produce and accompanied throughout by their own wines. Among their red specialities feature a barrel-matured Merlot, Réserve des Moines (the 2009 vintage came 2nd in the Swiss wine Grand Prix, 2011), a Mondeuse, a Syrah, and a Sacristain whose composition changes each year. These wines are excellent value for money - and sell out very fast! Abbaye de Salaz – Familles Huber & Kropf – www.abbaye-de-salaz.ch

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Nos terroirs ont du talent

La truffe suisse pointe le bout de son nez Ce diamant noir pousse depuis toujours dans les forêts suisses, où il a fait le bonheur des sangliers, des mulots, des écureuils, des chevreuils et de rares amateurs encore plus friands d’anonymat que de champignons. Tout change en 2009, lorsqu’un caveur du Nord vaudois, Frank Siffert, fonde, avec quelques passionnés, le Marché aux truffes de Bonvillars. Alexandre Truffer – Photos: Sandra Culand «Avec la truffe, on a un tout vieux produit du terroir qui a toujours été présent dans le sol suisse et qui est plus authentique que les patates ou les tomates arrivées en Europe il y a trois ou quatre siècles», s’enthousiasme Frank Siffert, vigneron, agriculteur et instigateur du Marché aux truffes de Bonvillars. «On trouve de plus en plus de truffes en Suisse, car le nombre de personnes qui en cherchent augmente régulièrement», précise ce professionnel, qui appréciait la truffe française bien avant de la chercher dans les forêts romandes. «Mon père était un épicurien et m’emmenait souvent dans la Drôme

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pour manger des truffes. Un jour, dans un restaurant de Champagne, j’ai croisé un copain bernois accompagné de son chien et d’un sac de 4 kilos de truffes. Il m’a expliqué qu’elles avaient été cavées (trouvées) dans les alentours. Cela a éveillé mon intérêt, j’ai découvert un monde discret que j’ai eu envie de faire connaître par un petit marché et tout s’est embrayé très vite…» poursuit Frank Siffert en brossant une dizaine de tubercules fraîchement sortis de terre. Président de l’Association du Marché aux truffes de Bonvillars, Pierre-Yves Masson confirme que la discrétion était de mise avant le lancement de la mani-

festation. Ce garde forestier connaît mieux que personnes les forêts avoisinantes, mais même lui ne savait pas qu’elles abondaient en Tuber de tout type. «En 2004, je suis tombé sur un livre qui mentionnait les truffes suisses et j’ai décidé d’étudier le sujet.» Le Nord vaudois, centre suisse de la truffe «La truffe possède un énorme potentiel. En Italie, seul pays qui délivre des permis pour le ramassage de la truffe sauvage en forêt, on compte 100 000 autorisations accordées chaque année. Un chiffre qui n’inclut ni les profession-

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Ce diamant noir se cache quelques centimètres sous terre. Pas assez profond pour les truffes sensibles de Lulu (la Lagotto blanche de Frank Siffert, ci-dessus) et de Liana (la Lagotto grise de Pierre-Yves Masson, en bas à g.). nels, qui cultivent le champignon dans des truffières privées, ni la cueillette en douce. Cela génère un chiffre d’affaires énorme», explique Frank Siffert, qui a parfois l’impression d’avoir ouvert la boîte de Pandore. «C’est un monde particulier et complexe. Je ne pensais pas qu’il y aurait autant d’engouement en Suisse. Je me suis senti un peu responsable et j’ai voulu encadrer autant que possible cet intérêt.» En peu de temps ont vu le jour des associations romandes, tessinoises et alémaniques, bientôt regroupées dans une Fédération suisse de la trufficulture. Depuis cette année, celle-ci fait désormais partie du Groupement européen Truffe et trufficulture. «Le nombre de caveurs augmente chaque année, et nous aimerions regrouper ces électrons libres pour leur enseigner une éthique», poursuit Pierre-Yves Masson, qui ajoute: «Il n’est pas question d’élargir le Marché aux truffes de Bonvillars. Nous accueillons 17 caveurs et une dizaine d’exposants liés à l’alimentation mais, pour qu’un nouveau puisse venir, il faut qu’un ancien décide d’arrêter. En revanche, nous nous engageons pour le développement de la truffe par le biais d’associations dédiées à la promotion de ce produit du terroir.» L’Association Première Région truffière de Suisse se

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veut le fer de lance de ce développement raisonné. Soutenu par l’Association de développement du Nord vaudois et l’Office du tourisme local, ce groupement a pour ambition de créer une Maison de la truffe dotée d’un musée, d’une plantation parcourue par un sentier didactique et d’un magasin qui permette aux caveurs ainsi qu’aux trufficulteurs de vendre leur récolte et aux amateurs de trouver truffes de qualité et conseils. Un avenir fondé sur l’éducation AOP ou IGP sont aussi dans la ligne de mire des trufficulteurs suisses. «Il y a un problème majeur, la question de la tradition, précise Frank Siffert. Nous savons que la truffe se plaît en Suisse depuis des millénaires, mais il n’y a pas de textes décrivant une tradition du cavage dans nos régions. Ou, plutôt, ces textes existent, mais ils n’ont pas encore été découverts.» De fait, l’histoire de la truffe suisse reste encore à écrire. Tout comme celle de la truffe, qui garde une large part de mystère. Personne n’a pu expliquer pourquoi ce champignon connu durant l’Antiquité disparaît des menus du haut Moyen Age (la thèse répandue sur l’internet qui soutient qu’elle aurait été interdite par l’Inquisition ne résiste pas à l’analyse),

comment fonctionne la reproduction de ce champignon, que l’on sait sexué depuis quelques années seulement, ou encore pourquoi certaines régions traditionnellement productrices voient leurs récoltes diminuer d’année en année. «Nous avons envoyé un courrier présentant le cahier des charges de notre Maison de la truffe à une cinquantaine de communes du district. Bonvillars, Suchy et Rances sont déjà sur les rangs. Une fois que nous aurons trouvé le lieu adéquat, tout va aller très vite», confirme Pierre-Yves Masson, pour qui il est essentiel d’assurer un débouché commercial aux plantations en cours. «Aujourd’hui, il n’y a que 2 hectares de truffières en production dans le canton de Vaud, mais une dizaine sont déjà plantées (il faut entre cinq et sept ans pour que les arbres mycorhizés commencent à donner des truffes). Le but est d’atteindre 30 à 40 hectares dans les deux ans», poursuit Frank Siffert. Trouver l’accord idéal Ultime défi, faire découvrir le produit aux restaurateurs. «La truffe de Bourgogne est un produit oublié. Les cuisiniers savent travailler la noire du Périgord ou la blanche, mais ils connaissent peu ce tubercule au goût

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Nos terroirs ont du talent

de noisette qui supporte mal la cuisson et s’allie très bien avec le sucre», souligne Frank Siffert. Un avis que partage Dominique Bovet, chef de l’Auberge de la Couronne, à Fiez, et partenaire de la première heure. «Les cuisiniers apprennent à travailler la melanosporum, mais pas l’uncinatum. C’est dom-

mage, car c’est un produit délicat, qui a besoin d’être plongé dans un corps gras comme du beurre ou de la crème pour conserver ses arômes. Nous en écoulons 2 à 3 kilos pendant la saison, qui commence en décembre, après la chasse, et dure deux mois.» Et les accords mets et vin? Nos interlocuteurs

ont mentionné le chardonnay et le pinot noir, tout en insistant sur le fait que l’accord dépendait surtout du plat (viande, poisson, œuf) auquel était associé la truffe. Dominique Bovet conclut même que «l’accord parfait reste à trouver». Un autre défi pour la Maison de la truffe!

La truffe suisse pour les nuls La truffe est un champignon souterrain qui vit en symbiose avec un arbre (chêne, noisetier, hêtre, tilleul, etc.) et produit des fruits en forme de tubercule. Naissant à une dizaine de centimètres du sol, à une température de 6°C environ, la truffe va atteindre un poids moyen de 30 à 50 grammes. Les chercheurs de truffes, appelés caveurs, disposent de plusieurs techniques de recherche, comme le cavage à la mouche (qui pond ses œufs dans les truffes mûres), grâce à un cochon ou à un chien spécialement dressé. Il est possible de créer des truffières cultivées dans lesquelles sont plantés des arbres dits mycorhizés, lesquels sont associés au mycélium de Tuber uncinatum ou melanosporum. En Suisse, on trouve les types de truffes suivantes:

Truffe d’été (Tuber aestivum): truffe au léger goût de champignon et de sousbois, qui arrive à maturité de début juin à mi-septembre. Commune en Suisse. Prix au kilo: 200 à 300 francs. Truffe de Bourgogne (Tuber uncinatum): ressemble à la truffe d’été, mais avec une couleur et un goût plus prononcés. Arrive à maturité de mi-septembre à fin mars. La plus courante en Suisse. Prix au kilo: entre 600 et 800 francs. Truffe noire du Périgord (Tuber melanosporum): elle possède un parfum alliacé typique, arrive à maturité de décembre à fin mars et s’adapte bien au climat helvétique, même si elle y est plus rare que ses cousines d’été et de Bourgogne. Prix au kilo: 2000 francs. Truffe blanche (Tuber magnatum Pico): son parfum très alliacé et sa couleur claire sont caractéristiques. Elle se ren-

contre en Italie, mais aussi en Grèce, sur le territoire de l’ex-Yougoslavie, en France ainsi qu'en Suisse (Tessin et plateau de Genève à Bienne). Période de maturation: de décembre à janvier. Prix au kilo: prix variant en fonction du poids de la truffe, mais pouvant dépasser les 5000 francs le kilo pour les plus grosses. Truffe blanchette (Tuber borchii albidum): similaire à la truffe blanche, mais dotée d’un parfum moins intense, cette truffe se rencontre en Suisse. Période de maturation: d’octobre à mars. Prix au kilo: 1500 francs en Italie. Pour compléter ce panorama, il faut encore ajouter des espèces plus ou moins intéressantes d’un point de vue gastronomique, comme la truffe brumale ou la truffe de Lorraine, qui sont communes dans tous les sols truffiers.

Terre Vaudoise Nouvelle marque et nouvelle enseigne à Pully Sur la lancée de leur succès, les Produits du terroir vaudois et la Halle vaudoise, pilotés par Prométerre, ont fusionné en novembre dernier pour donner naissance à la nouvelle marque Terre Vaudoise qui réunit désormais leurs activités, produits et services. Qu’il s’agisse de légumes et de fruits frais, de fromages, de viande, de charcuterie, de poissons du Léman, de vins ou d’autres produits transformés, Terre vaudoise soutient les producteurs locaux, considérés comme de véritables partenaires, grâce à une mise sur le marché exempts d’intermédiaires et dans des circuits courts propices aux consommateurs. La Halle romande poursuit son activité à la rue de Genève 100 (voir Le Guillon n° 42) alors qu’une nouvelle enseigne de 100 m2 dans la veine d’une épicerie fine s’est ouverte à la Grand-Rue 9 à Pully. www.terre-vaudoise.ch

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The Swiss truffle has emerged from obscurity 2015. AOP and IGP classifications are amongst the truffle-growers’ objectives. A major challenge will be to ensure that restaurant chefs learn more about this hazelnut-flavoured fungus. Dominique Bovet of the Auberge de la Couronne in Fiez uses 2-3 kg during the December/ January season and points out that this delicate fungus needs to be immersed in butter or cream to preserve its aroma. The ideal wine match has yet to be discovered, although Chardonnay and Pinot Noir pair well, depending on the dish.

This is thanks to Frank Siffert, a winegrower and farmer, who in 2009 founded the Bonvillars Truffle Market. It all started when Siffert bumped into a friend, at a restaurant in Champagne, with his dog and a bag of 4 kilos of truffles. Even Pierre-Yves Masson, a forest warden and president of the Bonvillars Association, had not been aware of the abundance of different species of ‘black diamonds’ in the Vaud forests. The Swiss proved extremely enthusiastic and soon associations sprung up in the different language zones, which were brought together in a Swiss Truffle Federation which in turn, in 2013, became a member of the Groupement européen truffe et trufficulture. The number of truffle hunters increases each year and the associations are concerned with ethics and promotion. The Bonvillars Association, which embraces Switzerland’s premier truffle region, has the support of the North Vaud Development Association and the local

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Tourist Office. Plans are afoot for the creation of a Maison de la truffe with a museum, a plantation with an educational trail, and a shop where hunters and truffle growers can sell their produce and truffle lovers can get information and purchase quality truffles. Some 40 hectares of groves have been planted and should be ready for harvesting by

Swiss Truffles for Dummies Truffles are the fruiting body of subterranean fungi which grow symbiotically with several tree species. They may weigh 30 to 50 grams. Specially trained pigs or dogs are used for sniffing them out. The following species are found in Switzerland: Summer (200-300 fr/kg); Bourgogne (600800 fr/kg); Black Périgord (2,000 fr/kg); White (5,000+ fr/kg); and Blanchette (1,500 fr/kg, in Italy).

Local produce from the Vaud canton – A new brand name and a new shop in Pully Produits du terroir vaudois and la Halle vaudoise have merged under a new brand name, Terre Vaudoise, to promote local produce such as vegetables, fruit, cheese, meat, butchers’ products, Lake Geneva fish, wine, and other products sold directly to the consumer, without any intermediaries. The Halle romande store will continue its activities on rue de Genève 100, and a new 100 m2 delicatessen-style shop has opened at Grand-Rue 9 in Pully. www.terre-vaudoise.ch

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Publireportage

Du soleil de Lavaux au soleil de l’Andalousie Jean & Pierre Testuz SA cultive ses atouts

La tradition bientôt quinquacentenaire de la maison Testuz se fond avec celle du vignoble vaudois. Au fil du temps, toujours sensible à l’innovation et à la qualité de ses produits, sa notoriété s’étend rapidement aux vins suisses et à ceux du monde. Tour d’horizon d’une authentique réussite. Aujourd’hui encore, avec son arbalète et ses étoiles dorées sur fond bleu, la maison Testuz est une marque aisément reconnaissable à des lieues à la ronde. A l’origine, la famille fondatrice fuit la France en 1538, sans doute à la suite des conflits religieux qui secouent alors le royaume. Profondément acclimatés ensuite à Lavaux, deux de ses représentants, Louis Gerber-Testuz et son neveu Charles, créent en 1845 le commerce de vins actuel, amorçant par là une formidable saga qui accompagne la tradition vitivinicole vaudoise. Au cours des années, grâce à son parti pris d’excellence et à sa production de vins de qualité, Testuz gagne encore en notoriété et en croissance. Et ce n’est pas Tobias Mathier (37 ans), le patron actuel, qui s’en plaindra. Quand ce fils d’une famille de viticulteurs de Salquenen reprend les rênes de l’entreprise en 2007, à 30 ans à peine, il comprend avec une fulgurante détermination l’enjeu que représente cet héritage vitivinicole: une fabuleuse pépite qu’il convient de faire fructifier pour qu’elle s’affranchisse rapidement des tensions d’un marché devenu particulièrement agressif. Cultiver le patrimoine Il perçoit tout aussi vite les atouts qu’il peut tirer de ce patrimoine. Avant tout une situation exceptionnelle, en plein cœur du Dézaley, l’appellation phare du Pays de Vaud. Et un vignoble d’une prodigieuse richesse et diversité qui, de Lavaux au Nord vaudois, s’étend aussi à

la région de Vevey-Montreux, à la Côte, et au Chablais avec un domaine à Aigle. Propriétaire de 8 hectares de vignes, Testuz en loue 32 et achète la récolte de nombreux viticulteurs. Une heureuse formule représentant au total 60 hectares de vignes et 18 appellations qui génèrent une palette de vins de sa production hors du commun. En particulier le Dézaley Grand Cru AOC L’Arbalète, le vin emblématique de la maison, un chasselas fin et pourtant ample, aux arômes minéraux et de fleurs subtiles ou, dans la même veine, La Borne, qui représente la maison Testuz au sein de la Baronnie du Dézaley, un Dézaley Grand Cru AOC à la fraîcheur typique du chasselas et à l’agréable arôme de vanille, avec un beau gras et une superbe longueur

en bouche. Trois autres Dézaley complètent cette déclinaison, car, affirme Tobias Mathier, «l’avenir du Dézaley, ce sont nos clients et il convient de satisfaire leurs exigences». Lui-même en est convaincu: le Dézaley Grand Cru AOC mérite une vraie ambition, «celle d’oser le vendre comme de l’or, comme un bien précieux». Et de conclure: «Dans l’écrin exceptionnel de son paysage, vertigineux panorama de lac et de montagnes, le Dézaley, c’est notre Monaco à nous, la Rolex du Pays de Vaud.» Ce qui fait la différence Testuz, c’est aussi une formidable variété de domaines, de châteaux, de clos, de réserves et de spécialités comme la gamme Les Œnocrates, éle-


Jean & Pierre Testuz SA CP 32, Le Treytorrens 1096 Cully Tél. 021 799 99 11 Fax 021 799 99 22

vés en barriques, en blanc comme en rouge. Sans compter les vins d’autres cantons. Ainsi ceux de la société Tobias Mathier SA, à Salquenen (VS). En décembre 2013, le Fendant du Valais AOC 2012 de cette dernière remporte avec éclat, dans sa catégorie, l’une des huit Etoiles du Valais, la plus haute distinction des vins valaisans. Un Fendant 2012 se signalant par sa fraîcheur et son harmonie, sa puissance et sa longueur en bouche. Et un charme qui séduit aussi bien les néophytes que les amateurs déclarés de fendant. Actuellement, ce ne sont pas moins de 350 produits (vins étrangers compris) qui sont mis sur le marché par les différentes sociétés de la maison, dont près de 120 d’entre eux sont issus de sa propre production. Des vins aussi qui se confrontent volontiers à leurs concurrents et remportent de nombreuses médailles dans les concours qui émaillent l’année viticole en Suisse et à l’étranger.

«production intégrée», qui privilégie le respect de l’environnement et accorde un rôle déterminant au travail du vigneron. Chaque région viticole vaudoise est attentivement suivie par un chef de culture, même deux à Lavaux. La vinification et la cave sont confiées à un chef œnologue et à un responsable de production, garants de l’excellence des produits. Pour les spécialités, des barriques de chêne assurent un épanouissement parfait à l’élevage des vins.

La qualité pour ultime choix Mais encore faut-il maîtriser la qualité. Pour ce faire, Testuz s’appuie sur une équipe de professionnels compétents et engagés. La vigne est travaillée selon le mode de culture désigné sous le nom de

Un bon réseau Pour faire connaître ses produits aux clients professionnels de toute la Suisse, Testuz peut compter sur une force de vente de quinze représentants ainsi que sur ses partenaires dans certains can-

Le service à la clientèle Il en est de même pour la qualité du service, qui revêt une valeur importante au sein de la société. De la commande au service du vin dans les deux points de vente, la vinothèque de Treytorrens ou celle plus spécialement dédiée à la clientèle de Suisse alémanique, la vinothèque Voser Wines & Spirit, tout est mis en œuvre pour valoriser les crus quels qu’ils soient et accompagner les clients dans leur décision d’achat.

tons. Quant à la livraison de ses produits, elle est assurée quotidiennement par la société TGV Distribution SA. Last but not least, l’ouverture au monde Et parce que le monde change, que les goûts des passionnés de vins se modifient constamment et qu’il faut toujours rester à leur écoute, Testuz propose depuis très longtemps une gamme de vins du monde (France, Allemagne, Italie, Portugal, Californie et Australie), qu’elle gère avec ses partenaires internationaux. Dernier domaine en date dont Tobias Mathier est tout particulièrement fier et dont il assume la gestion, la Bodega Conrad, à Ronda, petite ville située entre Málaga et Séville. Fondée en 1999 par le couple suisse Theo et Annemarie Conrad Stauffer, cette bodega propose non seulement de magnifiques créations grâce à sa situation exceptionnelle et aux conditions idéales pour une viticulture de qualité, mais la conception architecturale du domaine et la beauté de ses chais apportent l’indispensable glamour et la modernité à ses vins.


Alongside the Chart, the Brotherhood Prayer is another fundamental text of the Guillon Brotherhood. It is recited by the governor at the beginning of every harvest banquet and listened to in silence.

The Brotherhood Prayer Let us pray to find joy. When the vines sing out Inebriated by the sun, When the blackbirds warble, And we see the vineyard slopes afar, When nature dons the beauty of her seasons, Then God enters through our eyes And our prayer reaches to the skies, And full of jubilation we turn to you. We know your kindness and forgiveness, We greet you in the smiling dawn, We celebrate you in the harvest, In the holy union of vine and earth We venerate the mystery of your immanence.

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We praise you by honouring our traditions, Breaking bread in communion with our brothers. May the goodness of the wine, the bread and the meal We receive here this evening be like a prayer. For we glorify your name and believe you are present In Earth’s gifts and in our sensual pleasures. Thanks to the miracle of wine our Easter bells ring out, May our hearts open with love and divine élan, To give us the strength to act and live in truth In the spirit of those who bequeathed to us Their faith in the vines and noblesse of our wines. With your divine breath, O Lord, infuse our wine with excellence. Amen

Saint-Sulpice, 9th August 2003

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Message du gouverneur Jean-Claude Vaucher

Les dégâts collatéraux de la cupidité L’année 2013 aura été marquée par quelques épisodes affligeants de tricherie et de mensonges mémorables, servant principalement à assouvir une soif extrême de cupidité. Pensez au délire Cahuzac, ce ministre français du Budget chargé de la lutte impitoyable contre l’évasion fiscale, qui planque son fric en Suisse et ment comme un arracheur de dents. Pris la main dans le «Cahuzac», il plonge toute la classe politique de l’Hexagone dans la fange. Lance Armstrong, le «génie» de la petite reine, dont le dopage intensif lui a permis de gagner consécutivement sept fois le tour de France, a fini par avouer la plus grande tricherie sportive de tous les temps après des années de dénégations. Il jette un discrédit incalculable sur le cyclisme et le sport en général. Ou encore ces professionnels de l’agroalimentaire qui conditionnent des lasagnes à la viande de cheval en la faisant passer pour du bœuf. Moins à cheval, en revanche, sur les principes élémentaires de traçabi-

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lité des produits, ces acrobates avides d’argent facile sèment la panique sur l’ensemble de la filière alimentaire. Le secteur du vin, malheureusement, n’échappe pas à la tricherie. Encaveur valaisan très en vue, golden boy du vin, voilà plusieurs années que Dominique Giroud surfe de «succès en succès» en sponsorisant généreusement de nombreuses manifestations sportives tout en construisant un palais et en développant en un temps record un superbe domaine viticole. Admiré, voire adulé, il arrose tous azimuts mais fausse la concurrence avec l’argent des autres, en particulier avec celui qui appartient à la collectivité, en devenant le champion de l’évasion fiscale. Et puis, le grain de raisin qui bloque le fouloir, celui qu’il n’aurait pas dû encaver et qui pousse un vigneron de Saint-Saphorin à porter plainte pour usurpation d’identité. Fendant ou Saint-Saphorin, la justice n’a pas encore tranché. Mais ce qui est certain, et qui va plus vite que la

justice, c’est la perte d’image et de confiance induite par les agissements de Giroud. Ses détournements fiscaux avoués jettent par analogie un terrible discrédit sur l’origine et la qualité des vins qu’il a commercialisés. Dernier cas en date, ce couple de vigneron de Tartegnin qui trouve le moyen d’arrondir généreusement ses fins de mois en vendant illégalement du moût hors quota. Ce comportement ternit toute l'appellation pour assouvir la cupidité d'un vigneron indélicat. Il suffit donc de quelques rares brebis galeuses pour éclabousser toute une profession et fustiger le travail quotidien et sérieux des vignerons et encaveurs qui produisent un vin authentique, de très haute qualité et à la traçabilité indiscutable. En d’autres termes, la notion d’image, synonyme de prestige et de valeur collective si importante et si chèrement acquise dans les métiers de la vigne et du vin, n’a pas le droit d’être bafouée par des tricheurs et des menteurs.

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Ressats

Ressats des du ou le retour du Pascal Besnard, échotier Photos: Edouard Curchod Chillon et la Savoie, c’est une vieille histoire. Le site officiel du château révèle qu’un texte de 1150 mentionne la forteresse et précise que la famille de Savoie contrôle alors le passage le long du lac Léman. Le comte Thomas Ier de Savoie, dit l’Ami des communes, initiera la modernisation du château. Ses quatre fils poursuivront les travaux du chantier du siècle (à Chillon, pas à Glion!). L’un des fistons, Pierre II, dit le Petit Charlemagne, s’offrira dans la foulée tout le Pays de Vaud. Lui succéderont: une brochette d’Amédée et quelques autres (Philippe, Edouard, Aymon). En 1416, la Savoie réussira sa promotion de Challenge League en Super League et les comtes deviendront ducs. La présence, somme toute plutôt sereine, de la maison de Savoie à Chillon ne prendra fin qu’en 1536, avec l’arrivée de LL. EE. de Berne, avec leurs bombardes, leurs hallebardes et leurs ours, Colargol, Maturin et Winnie. RAS (ou presque) à signaler jusqu’à l’année 2012, celle du retour des Savoyards à Chillon. Un retour du proprio, progressif, gentiment vaudois, avec l’intronisation, le 27 avril de la même année, de Bernard Vioud, avec le titre envié de préfet (comte ou duc, ça devenait lassant). Puis avec la constitution, le 7 septembre, outre-Léman, à Ripaille, du cotterd de Savoie. Enfin, avec dix ressats en 2013, pas moins (le temps de s’habituer), à la gloire de la maison de Savoie. Sans rancune, évidemment, mais avec tambour et trompettes, comme d’hab!

Toutes les photos des ressats sont disponibles sous www.guillon.ch

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cs de Savoie… propriétaire!

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Vendredi 1er novembre Compagnon d’honneur Monica Bonfanti Cheffe de la police du canton de Genève Compagnon Yan Borboën Denges John Fraser Casson Londres Françoise de Craecker Mont-sur-Rolle Didier Debay Mont-sur-Rolle Roland Dumas La Conversion Francine Dupuis Féchy David Escher Berne Rachel Genoud Sion Max Mooser Lausanne

Samedi 2 novembre Compagnon d’honneur Susanne Ruoff Directrice de la Poste suisse Compagnon juré

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Tania Gfeller Œnologue, responsable des domaines de la Ville de Lausanne Compagnon majoral Urs Leber Commandeur de la Chaîne des rôtisseurs Compagnon Christophe Chappuis Rivaz Nicolas Ecoffey Avry-sur-Matran Mathias Huber Etoy Matteo Huber Sorengo Stéphane Pilloud Echichens Patrick Porret Chavornay Reto Ramseyer Corcelles-près-Payerne

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1. Les trompettes (et tambour) du Guillon dans leur nouvelle livrée. 2. Quand le chef du Guillon reçoit la cheffe de la police: Jean-Claude Vaucher adoube Monica Bonfanti. 3. La majesté des lieux. 4. La confrérie le dit aussi avec des fleurs. 5. Les promus du 1er novembre et leurs admirateurs.

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Vendredi 8 novembre Compagnon d’honneur Nuria Gorrite Conseillère d’Etat vaudoise Compagnon majoral Christophe Leyvraz Initiateur du Mur du son, responsable marketing à l’EPFL Compagnon Etienne Beuret Delémont Heidi Böckli Vucherens Alexandre Bornand Léchelles Vincent Claivaz Martigny Cédric Dupuis Forel (Lavaux) David Genolet Uvrier Georges Humard Châtillon (Jura) Laurent Savoy Granges (Veveyse)

Samedi 9 novembre Compagnon d’honneur Yves Rossier Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères Compagnon

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Eric Berthoud Pailly Betty Berthoud Pailly Pascal Bonnabry Féchy Jean-Marie Gothuey Bulle Hans Peter Hirt Bâle Stefan Kilchenmann Schlieren bei Köniz Juan Rosa Lavigny André Sollberger Bussigny-sur-Oron 1. Une brochette de conseillers et un duo de compagnons d’honneur, Ueli Maurer et Nuria Gorrite. 2. Du mur du son (de Beaulieu) aux murailles du château (de Chillon): Christophe Leyvraz.

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Vendredi 15 novembre Compagnon majoral Philippe Becquelin Dessinateur de presse, Mix et Remix Compagnon Nicolas Barthe Salavaux Dominique Fournier Sion Maurice-Pierre Lehmann Genève Bertrand de Senepart Pully Sven Ulmer Lausanne

Samedi 16 novembre Compagnon d’honneur Urs Schwaller Conseiller aux Etats fribourgeois, président de la fondation Contrôle suisse des vins Châtelaine d’un soir Danielle Gagnaux-Morel Chancelière d’Etat fribourgeoise Compagnon Vincent Ackermann Monnaz César Antognini Fribourg Romain Bally Aclens Vincent Barbone Monthey Augustin Dayer Forel (Lavaux) Philippe Ducommun Lausanne Claude Jaquerod Yvorne Sébastien Muller Le Mont-sur-Lausanne Marc Pfister Berne Joël Phelippot Montherod Sébastien Progin Fribourg Marianne Tharin Lausanne Christian Vorlet Chésopelloz

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Vendredi 22 novembre Compagnon majoral Gaston Lacroix Maire de Publier-Amphion et conseiller général, Evian Compagnon

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Mary-Claire Beley Lausanne Josiane Cavé Ollon (Vaud) Roger Corbaz Le Mont-sur-Lausanne Yann Escher Renens Jérôme Escher Perroy Pierre Guignard Rances Henri Klunge Lausanne Nicolas Legein Linkebeek Bernard Lei Evian-les-Bains Jean-François Mollien L’Etivaz Romain Monnard Rolle Fabrice Monod Yvorne Anne Müller Yvorne Jacques Pittet Les Diablerets

1. Une belle volée de compagnons, celle du 15 novembre. 2. Jeux de robes et de lumières à Chillon. 3. La chancelière n’a pas chancelé: Danielle Gagnaux-Morel, châtelaine d’un soir. 4. Le gouverneur hésite (pour de semblant)… mais Urs Schwaller est prêt à subir un nouveau trait d’humour!

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5. Mais que dessine donc Philippe Becquelin, alias Mix et Remix? Réponse en page 53.

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Samedi 23 novembre Châtelaine d’un soir Esther Gaillard Présidente du Conseil synodal de l’Eglise évangélique réformée vaudoise Compagnon Olivier Barras Rolle Frédéric Bubloz Luins Bernard Chalon Villeneuve Christophe Dupertuis Crans-près-Céligny Maurice Giraud Carouge Lionel Mages Unterägeri Stéphane Rothen Moudon Olivier Schlienger Lausanne

Vendredi 29 novembre

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Compagnon d’honneur Corina Casanova Chancelière de la Confédération Jean-Luc Moner-Banet Directeur général de la Loterie Romande Compagnon ministérial Olivier Eugster Trompette, professeur de musique Compagnon Corinne Barraud Saint-Saphorin Alain Bornet Chernex Pascal Echernier Evian-les-Bains Christian Michoud Cugy (VD) Gil Reichen Pully Didier Rouge Epesses Domenica Wälti Caviezel Reverolle Christian Weiss Perrefitte Maxim Wuersch Vich

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Samedi 30 novembre Compagnon d’honneur Franco Knie Directeur technique du Cirque national suisse Compagnon juré Elisabeth Pasquier Directrice de Vinea Pietro Scotton Sommelier du restaurant La Roseraie, Yvorne Compagnon Caroline Ambrosi de Magistris Villeneuve Florian Barras Grandvaux François Faiveley Lutry

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Jérôme Félicité Tannay Alexandre Fricker Lausanne Richard Pfister Semsales Claude-Alain Stettler Noville Nino Vitale Puidoux Quentin Vontobel Allaman Gaëtan Vontobel Allaman Christian Wanner Nyon

1. Le maître de cave (Raoul Cruchon) explique, la classe (du 30 novembre) écoute attentivement.

3. Quel Barnum! se dit peut-être Franco Knie, sous les salves oratoires du clown jaune du Guillon, Edouard Chollet.

2. Elisabeth Pasquier, «Madame Vins Suisses», promue compagnon juré.

4. Adoubement en tandem: Quentin et Gaëtan Vontobel, nouveaux compagnons.

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Propos de Clavende

Le filet de féra du lac Léman poêlé et le tortillon de crevette Michel Logoz, clavendier Alors, comment Savoie? Pour moi, autant vous l’avouer, Savoie coucicouça! Ce grand plongeon dans l’histoire en l’honneur des ducs de Savoie me fout le bourdon. Car, même si l’on n’en parle pas, on connaît la suite du feuilleton. Souvenez-vous! Après cinq siècles de règne des princes de la maison de Savoie, voilà que nous, les Vaudois, on écope encore, avec les Bernois, de deux autres siècles de domination. Adieu les comtes et les ducs! Bonjour ces messieurs de Berne! Avec plein de baillis peu portés sur la rigolade, toujours prêts à rappeler à l’ordre et à la vertu ces mécréants de Vaudois. Pas des mauvais types, ces Vaudois, qu’ils pensent, mais des gens qui passent leurs jours et leurs nuits à pinter et à godailler. Also, Schluss! Fertig mit diesen folichonneries! Jetzt, zur Arbeit! Et pan dans les gencives! On en prend pour deux cent cinquante ans! Au total, les Vaudois ont vécu durant plus de sept cents ans comme sujets de Leurs Altesses savoyardes et de Leurs Excellences bernoises. Et ce n’est que depuis à peine deux petits siècles qu’ils sont libres et indépendants. (…) Pour tout oublier, partons à la pêche à la féra! On a beau se passionner pour le Mondial du Chasselas, le Mondial de

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foot, le Master de tennis, rien n’interdit de s’intéresser à la course au vedettariat de nos poissons du Léman. Vous connaissez la nouvelle: la féra a déboulonné la perche. Deux fois plus de féras que de perches dans les filets de nos pêcheurs lémaniques! Serions-nous devenus perchophobes? Consulté, notre toubib, le Dr Anken, m’a dit que la perche souffrait d’amnésie. Neuf fois sur dix, elle ne se souvient plus de son pays d’origine... Raison de plus pour ne pas bouder notre plaisir de fêter notre féra pur Léman. Une fille tranquille, que personne n’a jamais entendu aboyer ou rugir. Mais alors comment cette diablesse a-t-elle fait pour se placer au top dans les assiettes des grands chefs? Tout simplement parce qu’elle joue le rôle de fairevaloir, pour le meilleur comme pour le pire. Bonne fille, la féra se prête aussi bien aux mains des gargotiers qui la farcissent de lard et cochonnailles comme une vulgaire pouffiasse, qu’aux mains expertes de chefs au sommet de leur art qui la pomponnent comme une princesse. A condition que la féra soit fraîche comme l’aurore et que l’on chronomètre sa cuisson à la seconde, sa chair délicate et moelleuse fait des miracles.

Tout l’enchante, un rien l’égaie! Nos amis savoyards ont largement contribué à son succès. Marc Veyrat – vous savez l’homme au grand chapeau noir – lui offre les senteurs de la livèche. Emmanuel Renaut, à Megève, la fait chanter sur une purée de blancs de poireaux aromatisée au thé vert. Pour nos ressats d’automne, Claude Joseph a choisi les dés de petits légumes et d’olives, la tomate, un brin d’aneth et une crevette qui danse sur le ventre de la féra. Et si vous aimez la féra, vous pouvez chanter avec Jean Ferrat, le bien-nommé:

«Ma môme, c’est pas une starlette Elle s’parfume pas à l’eau d’toilette Non, elle préfère un brin d’aneth Pour vous mettre plaisir en tête!»

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Soixante ans au service du vin vaudois Claude-Alain Mayor, tabellion La Confrérie du Guillon fête en 2014 ses soixante ans d'existence. C'est en effet en l'an de grâce 1954 que furent constitués les Conseils, proclamée la Charte de Glérolles et célébré le premier ressat du Provignage. Soixante printemps: sonnez clairons, mais surtout pas la retraite! Car non seulement la Confrérie est en pleine forme, mais elle déborde d'activités, pour votre plus grand bonheur. Vous êtes en effet près de cinq mille chaque année à savourer la magie d'un ressat à Chillon, à succomber aux charmes champêtres des Quatre heures, ou à partager l'amitié confédérale au détour d'un guillonneur. Et ni votre ferveur, ni l'abattage enthousiaste des conseillers ne donnent à ce jour le moindre signe avant-coureur d'une quelconque baisse de régime. La raison d'être originelle et le fil rouge de nos réjouissances, il convient de le rappeler, c'est la défense et l'illustration des nobles crus vaudois, délectation du nez et du palais, compagnons

irremplaçables des mets les plus simples comme des compositions les plus raffinées, incomparables catalyseurs d'ambiance. Le vin, source d'inspiration et moteur d'action? Je vois les abstinents invétérés, les philistins et les affidés du BPA dresser l'oreille et hérisser le poil. Sans raison toutefois. Beuveries et godailles sont aussi incongrues au Guillon qu'une bâfrée dans un trois macarons Michelin. La Confrérie révère le vin dans sa dimension culturelle, voire cultuelle, emblématique d'un terroir, de son esprit et de son savoir-vivre.

Un soir, l'âme du vin, chantait dans les bouteilles: «Homme, vers toi je pousse, ô cher déshérité, 
 Sous ma prison de verre et mes cires vermeilles, Un chant plein de lumière et de fraternité!»

Dès lors, dans le sillage du quatrain des Fleurs du Mal de Baudelaire, le prévôt célèbre l'âme du vin dans chacune de ses harangues en les concluant par la formule «Dans le vin vit le pays!». Des noces de diamant se fêtent. Notre Confrérie marquera donc cet événement par une triple salve. Une plaquette de 60 pages tout d'abord, richement illustrée, à la fois instantané des rituels, us et coutumes du Guillon et retour sur les vingt dernières années, qui parviendra en juin à tous les membres de la Confrérie1. Une exposition au Musée de la Vigne et du Vin au Château d'Aigle, ensuite, qui sera inaugurée le 5 juillet 2014 dans le cadre de la Fête du Mondial du Chasselas dont le Guillon sera l'hôte d'honneur. Et enfin des ressats d'automne placés sous le signe des Douze Lustres, au cours desquels chantres et clavendiers ne manqueront pas de piqueter cet anniversaire de jalons moins solennels, plus malicieux, voire franchement impertinents.

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Des exemplaires supplémentaires seront en vente à la boutique des Quatre heures ou pourront être commandés au Secrétariat de la Confrérie du Guillon, chemin de la Côte-à-Deux-Sous 6, 1052 Le Mont-sur-Lausanne, au prix de 35.-, frais de port en sus. Le Guillon

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Cotterd

Un guillonneur aussi chaleureux que savoureux Gilbert Folly, prévôt – Photos: Edouard Curchod

A l’œil et au nez, toutes les promesses gourmandes sont déjà tenues. 

Une fois encore, le dynamique préfet du cotterd du Tessin, Pierre Schulthess, et sa charmante épouse, Christiane, ont concocté, le 12 avril 2013, le traditionnel guillonneur, réunissant les plus fidèles compagnons d’outre-Gothard et, il ne faut pas le négliger, un bon nombre de tifosi venu du Pays de Vaud et d’ailleurs. Pour eux, une belle occasion de s’offrir un petit séjour printanier au Tessin, ce qui n’est jamais désagréable. C’est vers l'Osteria  dell'  Enoteca, à Muralto, qu’ont convergé une quarantaine de convives pour vivre les deux actes d’une pièce parfaitement mise en scène. Traditionnellement, la dégustation commentée par notre légat André Linherr en constituait le premier acte. En l’occurrence, ce sont les vins de notre conseiller Alain Parisod, issus de

son Domaine de la Grille, à Grandvaux, qui furent offerts aux papilles de convives toujours curieux et avides de mieux connaître les vins vaudois. Comme toujours, les dégustateurs et dégustatrices obtinrent des résultats contrastés, mais l’essentiel fut sauf: chacune et chacun y trouva son plaisir, les fins connaisseurs comme les néophytes. Après l’apéritif qui suivit, les convives passèrent à table pour partager un excellent dîner préparé par Matthias Althof et sa brigade, dîner composé d’un premier et d’un deuxième plat, suivis d’un dessert. Fait peu courant lors d’un guillonneur, les dîneurs eurent le loisir de choisir à chaque étape du repas entre deux options. Nous ne résistons pas à reproduire ici la carte proposée, cela en version originale!

Primi piatti Ravioli caserecci agli asparagi verdi Risottino alla scamorza affumicata Secondi piatti Lombatina di vittello al merlot bianco Filetto di manzo al pepe della valle Maggia Desserts Semifreddo al nocino Sorbetto uva americana

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Le compagnon Sacha de Micheli au tirer au guillon.

 Le

légat et le préfet à l'apéro avec le compagnon d'honneur et conseiller national Ignazio Cassis accompagné de son épouse.

Naturellement, ce petit cortège appétissant fut suivi du café et des digestifs de rigueur. Ah! La grappa! La soirée achevée, un certain nombre de convives, dont les conseillers présents et leurs conjointes, passèrent la nuit sur place pour se retrouver le lendemain matin au départ d’une excursion qui les conduisit d’abord à la visite de la maison DELEA SA , à Losone, où ils eurent le loisir de visiter sa cave, son musée et ses installations de produc-

tion de vinaigre balsamique de grande qualité, qu’il dégustèrent avec beaucoup de curiosité avant de s’en retourner flâner à Ascona, histoire d’aérer les cartes de crédit comme il se doit dans une station si riche en boutiques! En soirée, une petite cohorte de rescapés entreprit, le long des rives du lac Majeur, une petite balade qui les conduisit sur la terrasse de l’Osteria Chiara. Après un généreux apéritif offert par le patron des lieux, Luciano

Puspan, ils partagèrent un ultime repas, empreint d’amitié. En conclusion, ce fut comme toujours une succession de plaisirs et de découvertes que nous devons à notre préfet Pierre Schulthess et à Madame, qui recueillirent, comme il se doit, les propos de gratitude exprimés à leur égard. Longue vie à nos amis tessinois, fidèles au vin vaudois et à la Confrérie du Guillon.

Le compagnon juré Claudio Matasci et la première dame compagnon du cotterd du Tessin Kristina Greco au tirer au guillon. 

Le compagnon Sigi Greis commente le résultat du guillonneur. 

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Les Quatre heures du vigneron

Les bons vins de Bonvillars Pascal Besnard, échotier – Photos: Edouard Curchod

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Le syndic Payot souhaite la bienvenue aux hôtes des Quatre heures. 

La Confrérie du Guillon aime les châteaux: Chillon, bien sûr, Glérolles évidemment, où la confrérie fut portée sur les fonts baptismaux, Aigle aussi, sanctuaire de l’étiquette. C’est donc très naturellement que Grandson fut choisi pour accueillir les Quatre heures du millésime 2013. Le château de Grandson, mille ans d’histoire et 60 000 visiteurs par an, ce qui place le vénérable édifice au quatrième rang des musées cantonaux, comme le précisa judicieuse-

ment le syndic du lieu, François Payot. Echauguettes, mâchicoulis, barbacanes, créneaux, chemins de ronde, armures et arbalètes… un décor médiéval de rêve pour célébrer les vins de l’appellation Bonvillars, et ses producteurs talentueux: Sylvie Mayland, Didier Bourgeois, Eric Schopfer, Daniel Burdet, Stéphane Sandoz, Jacques Blösch, Jean-Marc Correvon, Boris Keller, Philippe Dyens, Guy Cousin, Eric et Martial Pasquier. 

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C'est le nord... et la canicule aussi.

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Quatres heures du vigneron

Evidemment, les esprits chagrins diront: «Bonvillars, c’est le nord», à la manière de Michel Galabru dans le film Les Chti’s. Mais ce nord-là, voisin du lac de Neuchâtel, a des allures de Riviera. Et les vins vont avec: ils sont gouleyants, chaleureux, harmonieux, bref ils rede-

mandent. A l’image de la cuisine allègre de Nicolas Schenk et de sa brigade du restaurant Les Quais, celle-là même que les compagnons dégustèrent dans le prolongement de la… dégustation. Il n’y a plus le moindre doute: nord rime avec «bonhor»!

Le nom du vin est sur l'étiquette. Sa vérité est dans le verre. 

 Des

vins gouleyants et des visages souriants.

Le salut du prévôt Gilbert Folly

(extrait) Salut à vous, qui n’avez pas craint de vous réunir ici, à Grandson, là où Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, fut défait au match aller contre la Suisse le 2 mars 1476 avant de se faire rétamer au match retour le 22 juin de la même année à Morat. Entre parenthèses, cette seconde défaite en terres fribourgeoises, Charles aurait pu l’éviter si, à l’instar de Constantin 1er, empereur de Sion, il avait eu la sagesse de limoger son entraîneur! Mais non! Il s’entêta à tout faire lui-même et, avec une équipe à moitié pourrie, il prit une décoction en

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Coupe d’Europe à Nancy, le 5 janvier de l’année suivante contre l’équipe de Lorraine emmenée par son buteur, le duc René II. […] L’art de la dégustation! Un art que maîtrise parfaitement Tapolet, un gaillard de mon village, un bon type plein de bon sens. Visitant Arvinis, la grande foire aux vins que Morges abrite chaque année, il alignait les ballons de vaudois aux ballons de côtes-du-Rhône, les ballons de chiliens aux ballons de napa valley. Rentrant chez lui pour le moins fatigué, à sa femme qui lui demandait par où il avait traîné, il eut cette réponse pleine

de solennité: «Femme, tu as devant toi un héros! Comme Bertrand Piccard, j’ai fait le tour du monde en ballon!» Aujourd’hui, plus sédentaires si ce n’est plus sages, nous faisons le tour des crus de Bonvillars. Et quand s’y ajoute la gaieté, la convivialité et la bonne humeur, c’est qu’alors l’esprit de la Confrérie du Guillon souffle sur Grandson, sur les vignobles de l’appellation Bonvillars, sur tout le vignoble vaudois et, avec le prévôt de la Confrérie du Guillon, vous proclamerez que… Loué soit le vin!

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Hommage

Hommage à Jacques Perrenoud C’est dans ses œuvres que notre imagier Jacques Perrenoud se perpétue... De lui, on voyait d’abord sa haute silhouette, sa forte carrure, sa tête de Père Noël, de capucin gourmand, de montreur d’ours, ses yeux malicieux et fureteurs dans lesquels brillait un formidable appétit de vie. Il était né sous une bonne étoile. Dans son berceau, les fées l’avaient abondamment gâté. Il irradiait de tous ses feux, dans son dialogue avec ses hôtes, dans les gags et les calembredaines qu’il alignait sous les fous rires des convives des ressats de la Confrérie du Guillon au château de Chillon. Aux yeux du monde, tout chez lui paraissait facile, naturel. Mais c’est bien dans son atelier d’artiste, peintre, lithographe et graveur, comme il se plaisait à se nommer, qu’il aimait à se révéler. C’était là, au milieu des lourdes presses lithographiques qui lui avaient labouré les vertèbres, parmi les pierres au grain fin qu’il avait amassées et qu’il chérissait tendrement, qu’il parlait de son métier avec les mots d’un troubadour pour sa bien-aimée. Si ces dernières années l’avaient un peu cabossé, il aura pu quasiment jusqu’à 80 berges bien sonnées faire passer sa verve, ses rêveries, ses folies dans ses bois gravés, ses lithographies, ses dessins au crayon, ses encres de Chine, ses aquarelles, ses céramiques. Prolifique dans ses œuvres, Jacques Perrenoud était généreux de sa personne. Ses amis, les conseillers de la Confrérie du Guillon, l’ont vu au travail. Durant des décennies, avec une veine intarissable, il a illustré, animé, illuminé les invitations festives adressées trois ou quatre fois l’an aux milliers de compagnons de la confrérie. Et les flâneurs qui, au fil de son trait jovial et mali-

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cieux, vagabonderont dans les pages d’anciennes livraisons de la Revue du Guillon ou dans celles du livre mémoriel des Riches Heures de la Confrérie du Guillon auront droit à une pinte de bon sang. Au total, Jacques Perrenoud aura peint sur des dizaines de kilomètres les scènes mémorables de dignitaires

célébrant la gloire des vignobles et des vins vaudois. Oui, notre légendaire imagier a largement contribué à enrichir le style et l’expression sous lesquels la Confrérie du Guillon se flatte de se distinguer. Honneur à lui! Avec une amicale pensée pour Mona, son égérie de cœur et d’esprit! (M. L.)

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Soulevons le couvercle

L’escale chablaisienne Christophe Rod, La Roseraie, Yvorne Pascal Besnard, échotier Photos: Edouard Curchod

«L’étincelle, c’est le client qui me la donne. Je l’accueille au restaurant comme s’il venait manger chez moi, à domicile.»

Si Christophe Rod est devenu cuisinier, ce n’est pas par tradition familiale. C’est tout simplement parce que sa mère lui suggéra de le devenir… parce qu’il était gourmand! La suite relève de l’Histoire (avec un grand H) de la gastronomie helvétique: l’apprentissage chez Denis Martin, puis, à l’âge de 18 ans, Christophe débarque chez Fredy Girardet. «Il y avait 20 cuisiniers, mais c’était une vraie équipe. En restant humble, on pouvait facilement s’y intégrer», se souvient Christophe Rod. Girardet, puis Rochat et Rabaey L’expérience durera neuf ans! Et une année de plus avec le successeur de Girardet à Crissier, Philippe Rochat, avant de jeter l’ancre dans un autre sanctuaire de l’excellence culinaire: le Pont de Brent de Gérard Rabaey. Christophe Rod prend du galon, il est second de cuisine. Dès son arrivée sur les hauts de Montreux, il informe son patron qu’il ne partira de chez lui qu’au moment de se mettre à son compte. Le moment en question survient quatre ans plus tard, lorsque la banque de Christophe lui propose de reprendre la Roseraie, à Yvorne, qui fut l’enseigne de Denis

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Martin, mais dont les fourneaux ne chauffent plus depuis quatre ans. Qu’importe, Christophe et Nadine Rod redonnent vie à l’établissement endormi le 2 mai 2002. «Le travail en couple est fondamental: ma femme, ce sont mes yeux en salle», commente le chef. 17 sur 20 au Gault&Millau Au bout de six mois, la Roseraie obtient 15 points au Gault&Millau. Aujourd’hui, la cote est montée à 17 sur 20. «Franchement, mon parcours chez de grands chefs m’a servi. Ça a été mon fonds de commerce», admet Christophe Rod. Des moments de doute? «Si… Le chantier du tunnel de Glion m’a fait perdre 30% de ma clientèle pendant deux ans. On a dû faire le dos rond. Les fournisseurs ont compris la situation.» Une fois les travaux achevés, la clientèle est revenue en nombre et les doutes ont disparu. «L’étincelle, c’est le client qui me la donne. Je l’accueille au restaurant comme s’il venait manger chez moi, à domicile.» Et, dans la foulée, Christophe Rod de livrer sa définition de la bonne cuisine: «C’est celle qui te fait dire: j’en remangerais bien demain!»

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Photo: Régis Colombo/diapo.ch

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Soulevons le couvercle

Le pressé de sot-l’y-laisse et légumes à l’estragon Recette pour dix à douze personnes

Ingrédients 300 g de sot-l’y-laisse 30 g d’estragon 10 g de persil 60 g de carottes coupées en dés 60 g de choux-raves coupés en dés 6 dl de gelée de volaille (collée à 40 g au litre)

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Préparation • Faites cuire les légumes avec une partie de la gelée et faites de même avec les sot-l’y-laisse • Egouttez le tout • Laissez refroidir un moment et mélangez ces ingrédients avec les herbes. Complétez avec le reste de la gelée (pas celle de la cuisson). Assaisonnez, puis moulez le tout dans une terrine • Bien laisser prendre au réfrigérateur pendant vingt-quatre heures • Coupez des tranches d’environ 1,5 cm d’épaisseur et accompagnez la terrine, par exemple, d’une salade à l’huile de noisette.

Le vin Yvorne 2012, Domaine Dillet, Eric Minod C’est le vin choisi par Christophe Rod, pour accompagner son plat. «C’est un tout beau chasselas, pas un vin pour l’apéro, mais un chasselas de gastronomie. Je trouve que, grâce à son caractère minéral, il se marie très bien avec la terrine aromatisée à l’estragon.» Christophe Rod aime travailler avec les vignerons de sa région: «Nous sommes une vitrine les uns pour les autres.»

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Guillon d'Or

Brelan d'as pour le Guillon d'Or 2013 Claude-Alain Mayor, tabellion – Photos: Edouard Curchod Pour sa troisième édition, le prix Guillon d'Or – Clos, Domaines & Châteaux a de nouveau frappé un grand coup. En effet le jury, présidé par le gouverneur Jean-Claude Vaucher et composé de Jean-Jacques Gauer, hôtelier, Philippe Gex, gouverneur d'honneur, Pierre Keller, directeur honoraire de l'ECAL et président de l'OVV, Chandra Kurt, journaliste et écrivaine du vin, Peter Rothenbühler, membre de la direction d'Edipresse,

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et Claude-Alain Mayor, secrétaire, a choisi de couronner le travail remarquable et la réussite éclatante d'une prestigieuse et quasi mythique institution vaudoise, le Restaurant de l'Hôtel de Ville, à Crissier, après avoir distingué en 2011 et 2012 le président de l'EPFL, Patrick Aebischer, et l'actrice suisse de renommée mondiale Marthe Keller. Qui peut plus légitimement incarner l'enseigne phare de la gastronomie

vaudoise que les trois chefs qui s'y sont succédé depuis son entrée au firmament du Michelin? Frédy Girardet, Philippe Rochat et Benoît Violier ont donc été invités pour une cérémonie exceptionnelle qui a rassemblé, le 30 septembre dernier, plus d'une centaine de personnalités du monde culturel, politique, économique et de la presse dans la Salle Richemont du Lausanne Palace. Pareille affluence exprime avec éloquence l'estime dévo-

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Séquence nostalgie, mais passion intacte: Frédy Girardet.

Quand le brelan se fait carré: Philippe Rochat, Frédy Girardet, Edgard Bovier et Benoît Violier. 

lue aux trois récipiendaires et l'engouement qu'ils suscitent. Il appartient en préambule à JeanClaude Vaucher de souhaiter la bienvenue aux lauréats et à l'assemblée, au premier rang de laquelle il salue notre ministre de l'Economie, le conseiller d'Etat Philippe Leuba. Au travers de propos bien enlevés, le gouverneur rappelle l'histoire et la vocation du prix Guillon d'Or – Clos, Domaines et Châteaux, destiné à associer à notre confrérie et à la promotion des vins vaudois une personnalité de premier plan, internationalement reconnue, qui contribue à la renommée de ce pays. Il souligne la singularité de la démarche du jury, qui a cette fois préféré honorer une institution dans sa pérennité et se félicite de voir réunis pour la circonstance trois grands noms de la cuisine internationale. Enchaînant avec la traditionnelle laudatio, le conseiller Claude-Alain Mayor se plaît tout d'abord à relever le rôle de pionnier et l'immense talent des trois magiciens de Crissier, capables de sublimer les ingrédients les plus nobles pour les transformer en chefs-d'œuvre

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du goût qui ravissent l'œil, flattent le palais et attirent les passionnés loin à la ronde. La cuisine de l'Hôtel de Ville se caractérise par une recherche sans compromis des meilleurs produits au gré des saisons, une créativité jamais en défaut et une quête permanente de perfection. Depuis bientôt quarante ans, les trois chefs sont demeurés à l'écart des modes éphémères et des tendances du moment, évitant l'aventurisme culinaire et la sophistication poussée jusqu'au travestissement, voire à la dénaturation. Ce faisant, ils sont constamment restés à la pointe de leur art. Mais la cuisine n'est pas tout, et l'orateur tient à établir un parallèle entre les coryphées de Crissier et les conseillers du Guillon, mettant en avant leur intérêt constant pour le travail de nos vignerons et leur attachement indéfectible aux crus de nos terroirs. L'Hôtel de Ville a joué à cet égard un rôle majeur dans la révélation et la promotion des vins suisses auprès d'un public international. Le secrétaire du Guillon d'Or insiste ensuite sur le petit miracle de longé-

vité et de continuité qui s'est opéré à Crissier, surtout si l'on pense que la transmission s'est déroulée en dehors de tout lien parental. Il rend donc hommage au flair hors du commun qui a permis à deux reprises de discerner le successeur idéal et au courage dont il a fallu faire preuve pour passer la main au moment opportun au lieu de s'accrocher, même en pleine possession de ses moyens. Il souligne encore la sagesse qui a permis de résister à la tentation de l'ouverture d'enseignes tous azimuts et de la dispersion géographique des activités. Il termine par une pensée reconnaissante pour tous les autres acteurs de cette éblouissante épopée, aux travailleurs de l'ombre comme aux épouses et compagnes qui ont joué un rôle de premier plan, avec une mention particulière pour Louis Villeneuve, âme et mémoire de la maison depuis plus de trente-sept ans et toujours aux commandes en salle. Il souhaite, en guise de conclusion, longue vie au vaisseau amiral de la restauration vaudoise. Le moment est enfin arrivé pour le gouverneur et le président de Clos,

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Guillon d'Or

Domaines et Châteaux, André Fuchs, d'appeler les trois cuisiniers sur le devant de la scène et de leur remettre les trophées à l'intention de l'institution lauréate: un guillon de cristal gravé au nom du restaurant et la carafe à chasselas qui l'accompagne. De surcroît, la promesse de 36 cartons de nobles flacons vaudois offerts par Clos, Domaines & Châteaux, généreux sponsor du prix. Prenant la parole au nom de ses confrères, Frédy Girardet, très en verve, adresse quelques propos chargés d'émotion à l'assemblée. Survolant brièvement l'histoire de l'Hôtel de Ville, il réaffirme sa foi dans une cuisine simple, que rien ne détourne de l'essentiel, réitère son amour des vins vaudois

et remercie les initiateurs du prix pour leur inspiration, tout en se réjouissant du combat commun mené au nom du goût et de l'excellence. A l'issue de la cérémonie, un apéritif réunit tous les participants dans le Salon Delamuraz, où les trois héros du jour évoluent en pays de connaissances. Accolades cordiales, serrements de mains chaleureux et verres joyeusement entrechoqués témoignent, si besoin est, de l'intime complicité, voire de l'amitié qui rassemble tous les acteurs de cette soirée éblouissante. Une importante présence médiatique et le bonheur d'un public aux anges confirment définitivement la pertinence du choix du jury de cette troisième édition. Lauréats et premières dames: Muriel Girardet, Brigitte Violier et Laurence Rochat. 

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PATRICK FONJALLAZ Au Clos de la République RUELLE DU PETIT-CRÊT – EPESSES (LAVAUX) TÉL. 021 799 14 44 • FAX 021 799 21 71 E-MAIL: info@patrick-fonjallaz.ch • www.fonjallaz.info

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La colonne de Michel Logoz

Et si le vin s’invitait dans la mise en scène de la FĂŞte des Vignerons 2019...

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ZZZ GRPDLQHEDULFKHW FK Depuis l’annonce de la FĂŞte des Vignerons 2019, quelques fervents de cette grandiose cĂŠlĂŠbration tentent d’ima giner Ă quoi elle ressemblera. Dans quelles mĂŠmoires vivent encore les souvenirs des ĂŠditions de 1955 et 1977 marquĂŠes par une tradition hĂŠritĂŠe des Morax et Doret? Il faudra attendre 1999 pour que François Rochaix s’empare de la totalitĂŠ du spectacle et lui dicte un langage unitaire. En conjuguant tous les arts de la scène, en utilisant avec Barichet irl.indd 1 une folle inventivitĂŠ les astuces de la vidĂŠo, du son, du cinĂŠma, du numĂŠrique, le thÊâtre contemporain s’est enrichi de nouvelles dimensions. En ce sens, nul doute que Daniele Finzi Pasca, dĂŠsignĂŠ comme metteur en scène de la FĂŞte des Vignerons 2019, est l’homme de la 1412 – 2012 TĂŠl. 021 799 48 15 e situation. Nous permettra-t-on d’exprimer un espoir? Si, 600 anniversaire Fax 021 799 48 16 dans sa proclamation, le Conseil de la ConfrĂŠrie ĂŠvoque 25 gĂŠnĂŠrations de tradition Natel 079 607 44 20 les lignes directrices qui devront inspirer la manifesE-mail : alain.parisod@parisod.ch tation (tradition, patrimoine, ancrage dans la rĂŠalitĂŠ www.parisod.ch professionnelle, ĂŠconomique et culturelle du moment), le vin en tant que tel n’est pas explicitement nommĂŠ. Or, nous avons toujours ĂŠprouvĂŠ une vraie frustration Ă constater que, tout au long des FĂŞtes, le miracle du vin n’a jamais ĂŠtĂŠ sublimĂŠ et transcendĂŠ, alors qu’il est le but ultime du travail du vigneron, son apogĂŠe. Nous connaissons les rĂŠticences de nos vertueux notables, qui redoutent que l’exaltation du vin soit perçue comme un signe d’incitation Ă l’ivrognerie. Avec le talent et les ressources qu’on lui connaĂŽt, nous sommes persuadĂŠs que Daniele Finzi Pasca est le magicien capable de relever le dĂŠfi en nous faisant entrer dans l’univers mythique du vin au grĂŠ d’une fĂŠerie dĂŠpourvue de toute Epesses ambiguĂŻtĂŠ.

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