Artéfact #2

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pouvoir (potestas) du pater familias. Elle règne sans partage dans la maison du Maître en assurant la bonne tenue du lit conjugal et du comportement des domestiques. Sa légitimité est entourée d’un véritable culte. Sa situation de femme légitime est placée sous la protection de Junon, car elle protège sa dignité et les valeurs du foyer conjugal la familia. Elle est le plus souvent dispensé de toute tâche servile au dépend d’esclaves mis à disposition par l’époux. En revanche, elle se réserve les activités de filage et de tissage pour confectionner les toges et les tuniques de son mari. Son autorité concoure à garantir la bonne moralité de son époux. Parallèlement à cette idéalisation du couple pudibond, il se développe une hypersexualisation de l’art. L’aristocratie semble particulièrement apprécier la présence d’images indécentes qui révèlent l’intimité de l’amour. Insidieusement, la banalisation fait son œuvre dans l’espace privé ou public en s’affichant aux yeux de tous. Fondamentalement phallocratique, l’art et la société dénoncent un paradoxe.

Quand l’Art ébranle les consensus

La société romaine est partagée entre deux aspirations contradictoires : le droit à la jouissance de l’homme et la volonté d’imposer des limites à ce droit en punissant les «pervers» qui en abusent. Pourtant, l’art révèle une iconographie particulièrement explicite, où tous les genres se confondent. De la classique scène du missionnaire aux déviances les plus extrêmes, l’art n’a aucun tabou. Parmi ces représentations, il est notable de constater la présence d’ébats amoureux avec des animaux. Ces unions montrent une femme couverte par un cygne, un âne, un crocodile ou un monstre.

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Cette perversion sexuelle relève de la zoophilie. Pourtant, ce terme ne nous satisfait pas, car il n’est pas inadéquat au regard de la culture romaine. Un second examen révèle que la réalité est attachée à une symbolique mythologique. Les Dieux ayant la faculté de se muer en animal, ils manifestent de l'amour pour ceux­ci où se métamorphose pour duper leur victime. Parmi les aventures chimériques qui ont été le plus souvent évoquées figurent celle du viol de la belle Léda. Pour la posséder Zeus prend la forme d’un cygne et vient nager à ses côtés. Léda se laisse charmer par la présence de ce bel oiseau blanc, qui en profite pour la couvrir. En conséquence, cette sexualité bestiale représente une union symbolique et immaté­ rielle. Dans cette étude, une autre priorité est donnée aux images des célèbres orgies. Pourtant, malgré tous nos efforts aucune collection archéologique européenne et méditer­ ranéenne n’a livré de telles œuvres. L’investigation a révélé uniquement des scènes de triolisme. L’Oscillum du Musée Rolin reste un témoignage évocateur. Le premier plan est occupé par un homme alité dont la barbe et les traits du visage attestent d’une longue souffrance. Il reçoit une caresse d’une jeune femme, dont la robe est relevée jusqu'au bas du dos révélant son postérieur. Un troisième personnage habillé en serviteur en profite pour s’emparer de cette ouverture. L’examen de cette scène est fondamental, car elle ne relève pas de l’érotisme ou de la partouze mais du Vaudeville. En effet, l’observation du rôle secondaire accordé à la présence d’un tiers dans le rapport du couple est une évocation du célèbre trio du mari, de l’épouse et de l’amant. Pourtant, d’autres représentations évoquent les relations


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