NOVO N°7

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par nicolas querci photo : stéphane lempereur

par nicolas querci photo : anémone du roy de blicquy

La Maladie de la mort, du 27 au 29 avril au Taps Gare, à Strasbourg 03 88 34 10 36

Les giboulées de la marionnette, du 19 au 27 mars au TJP et autres lieux à Strasbourg et dans la CUS 03 88 35 70 10 – www.theatre-jeune-public.com

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Les âmes mortes Un homme paye une prostituée pour qu’elle passe plusieurs nuits avec lui (« Peut-être pendant plusieurs semaines. / Peut-être même pendant toute [votre] vie. »), nue, allongée dans un lit. Il lui impose silence et soumission. Il dit vouloir essayer d’aimer. Il voudrait apprendre. Il la regarde dormir, il la touche, il dormira, il pleurera contre elle. Ils se parlent peu. Il s’apitoie sur lui-même. Elle lui apprend qu’il est atteint de la maladie de la mort. Elle lui apprend que c’est une maladie incurable. Il pleure encore plus. Il n’aime pas. Il est forcé d’admettre qu’il n’aime pas. Peut-être qu’il ne s’adresse pas à la bonne personne. Elle prend le contrôle. Un jour elle ne revient plus. Sandrine Gironde, directrice de la compagnie L’Escalier (Nancy), adapte à la scène le court roman de Marguerite Duras, paru en 1982. Au lieu d’un narrateur unique elle choisit d’opposer un homme et une femme sans jamais établir de dialogue (le texte n’en prévoit pas : « Elle demande… » « Vous dites… » « Elle sourit… » « Vous lui demandez … »). Dans une mise en scène minimaliste comme l’était l’écriture de Duras, c’est la voix des acteurs, traitée, amplifiée, qui est chargée de rendre palpable le mystère et la tension de cette rencontre désespérée, habillée par la composition sonore de Jean-Marc Weber. Les personnages, eux, ne sont déjà plus que des ombres qui se frôlent quand elles devraient s’enlacer, comme tous ceux qui passent leurs nuits à chercher l’âme sœur sur Internet. D

Les ficelles du métier Pour cette 21e édition, Les giboulées de la marionnette accueillent une vingtaine de compagnies venant de toute l’Europe, et font plus que jamais la part belle à un théâtre exigeant. Exigeant du point de vue artistique, avec des mises en scène belles à couper le souffle. Exigeant du point de vue technique, avec des mécanismes toujours plus habiles. Exigeant du point de vue du discours, avec des textes forts et des thématiques pointues, illustrant la volonté des organisateurs de proposer des spectacles « engagés ». Il est ainsi question de guerre, d’Histoire, d’identité, de femmes, d’environnement, du travail des enfants, de l’amour et de la mort. La marionnette se prête idéalement à toutes ces formes de récits parce qu’elle symbolise le destin de l’homme, jouet de puissances qu’il ne contrôle pas, et qu’elle permet de simplifier les rapports qui unissent tous ces courants contraires. Les spectacles proposés s’adressent aux enfants, certains aux tout petits (Grand-père, du Théâtre des Marionnettes de Genève, Ernest et Célestine, du Figurentheater Margrit Gysin), d’autres aux adolescents (Avec des Ailes immenses, du Figuren Theater Tübingen, Histoires de crevettes, de la compagnie Hotel Modern), sans jamais sacrifier le fond au plaisir, à l’étrange, au rêve, au fantastique, à la féérie. Les plus endurants pourront assister à l’intégrale de la Petite Odyssée, qui regroupe les trois épisodes des aventures de Bernie et Odyssée (Trois Odyssée… à demain), signées Grégoire Callies, directeur du TJP : trois heures de spectacle qui prouvent que l’on peut tout dire aux enfants. D

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