le bon artisan
Texte Cécile Grandcour Photo Carré des Batignolles
Sophie de Courtis La céramique c’est fantastique ! Au 54 rue la Condamine, se niche, côté jardin, l’ate-
et il combinera peut-être les qualités de l’une et de
lier de Sophie de Courtis, céramiste membre de
l’autre…»
l’association Carré des Batignolles. Côté rue, c’est une galerie ouverte aux passants, aux voisins, aux
Cette passion, Sophie de Courtis a à coeur de la par-
amis. Un long établi, trois tours, deux fours électri-
tager ; d’ailleurs après avoir appris la céramique,
ques, des pains de terre et de porcelaine et quelques
certains élèves choisissent d’en faire leur métier.
seaux emplis d’émaux côtoient joyeusement les piè-
« Mon savoir-faire de céramiste, en tournage et en
ces tournées.
fabrication des émaux, j’ai le désir de le transmettre. C’est un enseignement délicat car la céramique place
Après avoir participé à la création d’expositions
ces élèves déjà avancés en âge dans des attitudes
scientifiques à la Cité des Sciences, avoir fait de la
nouvelles, éventuellement bouleversantes, par rap-
poterie son métier, « une passion autant qu’un art
port à leur vie quotidienne. Il n’y a pas d’immédiateté
de vivre », Sophie de Courtis se prend d’amour aussi
dans la réalisation d’une pièce, mais au contraire un
pour la céramique. « Créer des céramiques revient à
apprentissage, des étapes successives, où le temps
mener des expériences, à chercher avec patience et
joue, et ce n’est pas toujours facile à accepter. Abor-
détermination, à explorer et travailler beaucoup mais
der la céramique signifie cesser d’être dans la per-
cela implique, au-delà ou en deçà de la céramique à
formance, et surtout être dans le ressenti, et c’est un
proprement parler, d’inventer aussi des manières de
peu contraire à l’époque… Revenir au toucher, tout
faire, et sans doute d’être », confie-t-elle.
simplement, est la chose que j’ai parfois à faire réap-
La terre que Sophie travaille le plus ? La porcelaine
prendre, tout comme retrouver des formes de pré-
tendre, pour sa blancheur, sa translucidité, et la
sence, d’intensité de présence. La terre est vivante,
douceur du kaolin (argile blanche à la base de la
la relation avec elle l’est aussi, on ne peut pas faire
fabrication de la porcelaine), qui caresse les mains
semblant d’être là : corps, sens et esprit sont enga-
pendant l’étape du tournage. C’est aussi la plus diffi-
gés ». Bref, Sophie nous offre d’apprendre bien plus
cile à travailler : « C’est une pâte très exigeante, sans
qu’un simple passe-temps artistique, un retour
beaucoup de plasticité, ce qui suppose un geste sûr.
nécessaire aux fondamentaux, et une possibilité de
La porcelaine a d’ailleurs une forme de mémoire du
se retrouver soi-même.
geste : après la cuisson, elle peut exprimer un état du tournage antérieur à l’état final, dont elle aura gardé
Sophie des Courtis
la trace. Pour les très grosses pièces, j’utilise le grès,
54, rue la Condamine.
en particulier un grès de Saint-Amand. Le grès por-
Tél. 01 74 30 07 92
celainique est arrivé aussi depuis peu sur mon tour,
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