DH Magazine 149 - 2eme trimestre 2014

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L E MAGAZ INE DU DECIDEUR HOSPITALIER

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S’adapter et inventer © Photo portrait : Marc Guillochon

Richard Bousiges,

directeur du CH de Blois LES REPORTAGES DH CHU de Nice - CHR de Metz-Thionville, CH : Bischwiller, Blois, Lens et Sète (Bassin de Thau)

www.dhmagazine.fr

2 e trimestre 2014


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DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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L E M AG A Z I N E D U D E C I D E U R H O S P I TA L I E R

DH n°149 - 2 e trimestre 2014 DH MAGAZINE Trimestriel : 4 000 ex. INPI : 1716-633 - ISSN : 1277-4383 w w w. d h m a g a z i n e . f r Marc Guillochon, Fondateur de DH Magazine, Directeur d’hôpital EHESP marc.guillochon@dhmagazine.fr

O N T p a r t i c i p é à c e N U M ÉR O : Véronique Anatole-Touzet, directeur général, CHR Metz-Thionville Marina André, Directrice des EHPAD de Pontvallain et de Mansigné, Sarthe Jean-Luc Annazo, responsable du service central bionettoyage, CH de Blois Camille Apffel, directrice adjointe CH de BISCHWILLER Hélène Avisse, dir. géné. adj. chargée des coopérations et de la stratégie, CH Lens Dr Stanislas Bagnols, Président de la CME, Hôpitaux du Bassin de Thau Patricia Barreau, directeur des soins, Hôpitaux du Bassin de Thau Dr Patrice Bastian, président de CME, CH de Lens Dr Christoph Berna, médecine USLD, projet télémédecine CH de Bischwiller Dr Jérôme Bohatier, Chef du service, Géronto-Pôle CHU de Clermont-Ferrand Florence Boizard, élève directeur d’hôpital 2014-2016, membre d’EHESP Jean-Marie Bolliet, Directeur général, Hôpitaux du Bassin de Thau Édouard Bourdon, élève-directeur d'hôpital, membre d’EHESP Richard Bousiges, Directeur général, CH de Blois Emmanuel Bouvier Muller, directeur général, CHU de Nice Dr François Braun, chef de service urgences Hôpital Mercy, CHR Metz-Thionville BVM communication Sophie Carli-Bacher, Dir. Marketing Produits, McKesson France et Pays-Bas Marie-France Carsin, Cadre supérieure de santé, CHR Metz-Thionville Martine Cassagne, cadre sup. de santé du pôle médecine, Bassin de Thau Nathalie Chave, cadre sup. de santé, assistante pôle, Bassin de Thau Dr Dominique Clairet, Chef de pôle de Gériatrie, CHI Toulon la Seyne/mer Olivier Colin, dir. des travaux et du patrimoine, Hôpitaux du Bassin de Thau Claude Cotterlaz, dir. action médico-sociale et des établissements, Bassin de Thau François Decourcelle, Expert ENOVACOM Julien Depret, ingénieur en charge des services techniques, CH de Lens Ahmed El Bahri, DAF, CHRU Montpellier Patrick Expert, dir. évaluation et à la stratégie, CH de Blois Xavier Garret, ingénieur en chef, CHU de Nice Mireille Gasquet, cadre médicotechnique en Imag. médicale, Bassin de Thau Jérôme Geffray, responsable de la restauration, CH de Blois Gilles Gollet, Directeur des travaux, CHR Metz-Thionville Lân Guichot, Directeur Marketing, AGFA Healthcare Magaly Haeffele, Directrice générale CH de Bischwiller Pr Xavier Hébuterne, chef de pôle, CHU de Nice Patrice Hersant, responsable de la fonction linge, CH de Blois Gerog Hoffmann, Prof. Dr. med.

Dr Khalifé Khalifé, chef de service et Prés. de la CME, CHR Metz-Thionville Manuela Klapouszczak, élève directeur d’hôpital 2014-2016 (EHESP) Patricia Krill, Directrice des soins CH de Bischwiller David Lahille, Co fondateur, Directeur Général, Crop and co Daniel Lemestre, directeur achats, équipements, CH de Blois Philippine Letang, membre d'EHESP Elsa Livonnet-Moncelon, dir. des finances, dir délégué pôle, CH de Blois Dr Lise Lorentz, médecin court séjour, CH de Bischwiller Edmond Mackowiak, directeur général, CH de Lens Michel Madar, Consultant senior et expert en achat public, Crop and co Pauline Maisonneuve, ancienne élève attaché d'admi. hospitalier, AAH Dr Marie-Agnès Manciaux, Chef du pôle, CHRU Nancy Jean-Marc Massias, Directeur Général de Computer Engineering Dr François Mounier-Vehier, président de la CACNP, CH de Lens Dr Frédéric Munsch, Médecin Chef du Pôle EHPAD/USLD, CHU de Reims Josiane Nègre, cadre supérieur, CHU de Nice Pr Philippe Paquis, président de la CME, CHU de Nice Stéphane Pic-Paris, directeur général délégué de PG promotion Dr Philippe Pinel, chef de pôle Urgences, Hôpitaux du Bassin de Thau Dr Claude Pioch, resp. unité fonctionnelle des urgences, du Bassin de Thau Anne Postulka, M.D. Director of Medical and Economic Value Europe. Cepheid Dr Philippe Quetin, chef du pôle cancéro, hémato, pneumo, CHR Metz-Thionville Martine Rajzman, dir. de la comm, culture et documentation, CHU de Nice Dr Jacques Ribière, Chef du pôle Gériatrie et Gérontologie, CH de Grasse Mike Schenker, DRG-Berater, München Pr Stéphane Sweertvaeghe, dir. recherche clinique et de l'innovation, CHU de Nice Marc Tochon, Secrétaire général, Dir. délégué du centre hospitalier de Briey Olivier Toma, président du C2DS Vincent Trély, Président de l’APSSIS Pr Emmanuel Van Obberghen, vice-président recherche, CHU de Nice Dr Danièle Vaschalde, Chef du Pôle à orientation gériatrique au GH du Havre Francis Venchiarutti, cadre de supérieur santé, CHR Metz-Thionville Dr Éric Welter, Vice-Président de la CME et chef pôle, CHR Metz-Thionville Sébastien Wetter, Expert ENOVACOM Michael Wilke, Dr. med., inspiring.health, München

Jacques Hubert, Directeur des systèmes d’information, CHR Metz-Thionville

Omar YAHIA, Avocat au barreau de Paris

Adeline Jenner, resp. pôle - ARS Alsace

Laurent Zaderatzky, dir. adjoint, chargé des ressources physiques, CH de Lens

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ZI Les Franchises 52200 Langres DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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Jossigny 77 nouvel hôpital

de

Marne-la-Vallée

Le nouveau hôpital de Marne-la-Vallée a élu domicile à

des techniques médicales. Malgré son ampleur, le centre

quelques encablures d’Euro Disney.

hospitalier réussit à s’inscrire sur son site, en toute dis-

Pour se démarquer et s’imposer sans ambiguïté comme

crétion, par des façades blanches presque immatérielles.

un établissement public du 21e siècle, à l’échelle régionale,

Des façades « anonymes » faisant disparaître la répétiti-

il développe une image emblématique à la peau mono-

vité des ouvertures comme le moindre élément technique.

chrome. Ici, le monospace a, sans conteste, trouvé sa plus

Des façades voulues, conçues et dessinées pour exprimer

juste application. Le terrain est vaste (12 hectares), parfai-

qu’ici rien n’est figé.

tement plat et se prête donc sans restriction au jeu de ta-

Si tout bavardage onirique a pu être évité en première

quin qu’induit le concept hospitalier. Son strict quadrillage

approche des lieux, une note chaleureuse vous invite à

a dicté l’implantation de tous les équipements – le MCO

pénétrer les lieux par une série de verres colorés en fa-

(médecine, chirurgie, obstétrique), le logipôle, les parkings

çade et au droit du parvis. Avec ensuite des patios qui se

et même les possibles extensions permettant ainsi d’envi-

déclinent en rouge, vert ou bleu. Ces teintes pigmentées

sager, en toute sérénité, l’évolutivité des lieux.

variant au gré de la luminosité extérieure comme de son

Cette maille se poursuit à l’intérieur du MCO, fédérant

propre déplacement, sont aussi supports de signalétique

toute son organisation, celle d’aujourd’hui comme celle

puisqu’elles permettent de se repérer dans les lieux.

de demain, pour garantir une évolutivité des services et

Maîtrise d’œuvre : Architecte mandataire BRUNET SAUNIER ARCHITECTURE Architecte consultant hospitalier : Gerold Zimmerli BET Structure : TERRELL BET Façades : ARCOBA BET Fluides : ARTELIA BET HQE : S’PACE ENVIRONNEMENT Maîtrise d’ouvrage : Centre hospitalier de Lagny / Marne-la-Vallée Économiste de la construction : TALBOT Acousticien : CIAL Paysagiste : PÉNA & PEÑA Concepteur signalétique : LOCOMOTION (Laurence Guichard) BRUNET SAUNIER ARCHITECTURE / Jérôme BRUNET Contact : Régine Le Couteur - 17 rue Dupetit-Thouars 75003 Paris Téléphone : 01 44 61 88 00 - courriel : rlecouteur@brunet-saunier.com


Éditorial

Évolutions ou Constantes ? « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gen-

Le monde, le « système », hospitalier ou non, évo-

til ! » Faut-il prendre au pied de la lettre cette affirma-

lue de plus en plus vite. Il est difficile de s’adapter

tion1 de Jean Yanne, acteur, réalisateur, humoriste et

en permanence : une réforme ou une technologie à

« grosse tête » chez Philippe Bouvard sur RTL ? On

peine maîtrisée se voit déjà obsolète et il faut pas-

peut, bien sûr, passer son chemin sur une affirmation

ser à la suivante... Évolution chirurgicale, médicale,

aussi sotte. D’autres souriront, condescendants ou

soignante, sanitaire, évolution des organisations, des

pas. Quelques-uns remarqueront, peut-être, en leur

systèmes d’information, tout va très vite, parfois trop

for intérieur : « Il y a du vrai là-dedans ».

vite. C’est vrai, aujourd’hui, nous sommes dans le 3ème millénaire...

Ne disposons-nous pas d’une bonne médecine, moderne et efficace ? Sommes-nous mal soignés à

À l’opposé, il y a des constantes. Plus sûres à dé-

l’hôpital ? Les soignants ne sont-ils pas « gentils »

faut d’être toujours rassurantes. La vie et la mort

et efficaces ? Quelles cases cocher à la fin de votre

ne changent pas : on ne choisit ni l’une, ni l’autre.

hospitalisation ? Personnellement, à quelques minus-

L’angoisse, la peur, la souffrance qui n’est pas tou-

cules exceptions, j’ai toujours constaté un résultat de

jours « gommée » par les produits anesthésiques,

qualité !

sont au cœur des préoccupations du patient, comme le premier étage de la pyramide de Maslow : nourrir,

Vous allez dire : la restauration, à l’hôpital, quand

manger, se vêtir, se laver... Et à l’hôpital, les actes

même... Admettons pour ceux qui sont de vrais cor-

de la vie hospitalière sont bien toujours les mêmes :

dons bleus. Mais, quand on y pense : horaires régu-

rencontrer les malades, leur parler, s’assurer de leur

liers, produits diététiques, adaptation complexe aux

confort, les soigner…

multiples régimes, quantités nécessaires et suffisantes... Ce n’est pas si mal, non ? Vous râlez en-

Faut-il, pour parodier Lampedusa, dans Il Gattopardo2,

core... Allons, vous n’allez pas dîner au Procope tous

« que tout change pour que rien ne change ». Sous le

les soirs !

cynisme de la sentence, rien n’interdit qu’on y réfléchisse. Modernité et stabilité ne seraient-elles que

Et notre « meilleur système de santé du monde » qui

les deux faces d’une même pièce. Le jour est la main

pourrait coûter moins cher tout en restant aussi effi-

gauche de la nuit...

1 Comédie satirique réalisée par Jean Yanne en 1972 2 Le guépard, roman de l'écrivain et aristocrate italien Giuseppe Tomasi di Lampedusa, paru en 1958

cace ? Économistes comme simples citoyens, tout le monde est d’accord : y a qu’à, faut qu’on... Sauf que, quand on est malade, là, rien n’est assez beau, assez efficace, assez tout... et plus si nécessaire ! C’est peu logique mais humain !

Marc Guillochon

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ÉDITORIAL - Évolutions ou Constantes ? Marc Guillochon

Articles DH 10

SOMMAIRE 86

Formation d'attachés d'administration hospitalière Pour être un expert dans un service, une personne ressource, ou au contraire être généraliste…

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Les groupes homogènes de séjours : Source d'information précieuse Anne Postulka

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la fonction achat David lahille & michel madar

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ch de bischwiller expertise : gérontologie Plaque tournante d'innovation. Magaly Haeffele, DG Mécanique des fluides Le défi alsacien Le 22 à Asnières Souffler n'est pas jouer !

rubriques DH 22

CHR de Metz-thionville Mobilisation générale Sans réserve Véronique Anatole-Touzet, DG Force majeur Mercy 2.0 Pôle Femme-Mère-Enfant, une maternité à la pointe de la modernité Le service des urgences de Mercy L'excellence ou rien ! Connexion

Salon santé automonie Seconde édition pour l'incontournable rendez-vous !

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développement durable Haro au gaspillage alimentaire ! Une cercle vertueux appétissant Olivier Toma Un combat prioritaire Pour lutter contre le gaspillage alimentaire, il faut redonner du sens et du goût ! Personnels de santé : la qualité et la justesse de l'alimentation sont intimement liées à la réduction du gaspillage alimentaire

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feu vert Une visite Promenade des Anglais Retour à l'équilibre et instauration de la confiance Emmanuel Bouvier Muller, DG Un deuxième projet médical pour le président de la CME Un formidable outil de travail : Pasteur 2 La recherche : fer de lance pour un CHU de pointe ! Le CHU, un acteur majeur dans l'économie de la région

Les hôpitaux du bassin de thau L'enjeu de l'hôpital de demain : la qualité du séjour du patient. Jean-Marie Bolliet, DG La gestion des lits : les HBT accompagnés par l'ANAP Les initiatives innovantes afin de mieux réguler l'amont et l'aval d'une filière gériatrique Un nouveau plateau technique : accueil et orientation du patient dans des locaux et selon un circuit adapté Amener la spécialité jusqu'au lit du malade Portrait du président de la CME : motivations et conception

Les gériatres et la gériatrie

CHU de nice

CH de lens échéance 2020 La renaissance du CH de Lens. Edmond Mackowiak, DG Bons derniers ? Tous ensembles Le grand jeu Sortir de terre L'atout maître

Année 2043 La parole aux chefs de pôles ! « Un directeur d’EHPAD est un généraliste à qui on demande de plus en plus de technicité »

Centres hospitaliers

CH de blois un hôpital innovant Les symptômes de la dynamique du CH de Blois. Richard Bousiges, DG Coopération et certification, l'hôpital de Blois dans tous ces états L'investissement soutenable comme traitement L'hôpital sublimé par ses fonctions hôtelières

Informatique de santé 2014 : Pragmatisme et réalisme Vincent trély Les EAI : un support indispensable à l'intéropérabilité Gestion des identités et annuaires : socle de base d'un SI urbanisé Les progiciels médicaux : avenir et prospective Quel cap pour les systèmes d'information hospitalier ? Les progiciels financiers : les outils concrets pour les finances de l'Hôpital Stratèges pragmatiques

60

118

IN FINE 160

LE CLASSEUR juridique Lutter contre l'absentéisme : quelques pistes de réflexions. Omar Yahia

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article DH

Article DH : formation attaché d'administration hospitalière

Formation

d'attachés d’Administration Hospitalière Pour être un expert dans un service, une personne ressource, ou au contraire être généraliste…

Les fonctions de l’AAH

Le grade d’Attaché d’Administration Hospitalière permet à l’agent d’exercer différents métiers. Selon celui exercé, l’AAH peut être un expert dans un service, une personne ressource, ou au contraire être généraliste et être compétent dans plusieurs directions fonctionnelles. Il peut encadrer une équipe, ou travailler de manière plus individuelle. Ainsi, l’AAH peut être responsable de différents services : • Responsable des ressources humaines (personnel médical comme non-médical), • Responsable des finances,

La formation des attachés

d'administration hospitalière issus du concours national

Les attachés d'administration hospitalière (AAH) issus du concours national suivent une formation de 12 mois à l'École de Hautes Études en Santé Publique (EHESP) à Rennes. Il s'agit d'une formation à but professionnalisant où les cours théoriques sont complétés par des stages en établissements publics de santé. En immersion dans un service de soins, dans un premier temps, et en direction fonctionnelle, dans un deuxième temps, cela permet aux élèves AAH d'être sensibilisés au quotidien d'un établissement de santé avant la prise de poste

• Responsable des achats-logistiques,

effective. Ces stages donnent lieu à un mémoire, sou-

• Responsable du bureau des entrées (comprenant les

tenu en fin de formation devant un jury.

facturations, les relations avec les usagers), • Responsable des affaires générales et de la communication, • Responsable des affaires médicales, • Responsable des affaires juridiques et des droits des patients • Responsable de la qualité et de la gestion des risques à l’hôpital, • Responsable des systèmes d’information.

Les AAH issus du concours national suivent une formation de 12 mois à l'École de Hautes Études en Santé Publique (EHESP) à Rennes.

Aussi, l’AAH peut être amené à exercer le métier de contrôleur de gestion, ou encore de cadre administratif

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de pôle.

Sur le campus, les élèves attachés d'administration hos-

Enfin, il est possible pour un AAH d’exercer les fonc-

pitalière suivent des enseignements qui leur apportent

tions d’adjoint de direction dans les établissements et

les éléments nécessaires pour appréhender le fonc-

services sociaux et médico-sociaux, ayant alors des

tionnement du monde hospitalier et plus généralement

fonctions à caractère généraliste.

sanitaire, social et médico-social.

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Article DH : formation attaché d'administration hospitalière

École des Hautes Études en Santé Publique (EHESP) Avenue du Professeur Léon-Bernard CS 74312 - 35043 Rennes cedex - Tel : +33 (0) 2 99 02 22 00 www.ehesp.fr

Cela les prépare à répondre aux changements du monde sanitaire d'aujourd'hui au travers des cours de management de ressources humaines, de la qualité et de la gestion des risques, d’achats, logistique et patrimoine et de gestion budgétaire et financière. Ces matières abordées et approfondies tout au long de l'année sont enseignées par des professionnels exerçant ou ayant exercé dans la fonction publique hospitalière. C'est un atout qui permet aux attachés un accès direct à des expériences concrètes et très variées de par leur nature. Ces enseignements sont complétés par les projets menés en commun avec les autres filières de la fonction publique hospitalière : les directeurs d'hôpital et les directeurs d'établissement sanitaire social et médico-social. Des échanges se mettent ainsi en place et facilitent la connaissance des métiers de chacun, tissant les bases de collaborations futures sur le terrain. La finalité de la formation est de former un corps de qualité, à la fois généraliste et ayant une expertise particulière. Les attachés sont des collaborateurs privilégiés du directeur, qui les recrute directement et selon ses attentes. Ce processus est facilité par la disparition du classement à l'issue de la formation.

La procédure

de recrutement des AAH

La richesse des enseignements et des expériences En juin 2014, le CNG interroge les établissements pour

tration hospitalière d'exercer à la fois dans les structures

connaître les postes vacants que ces établissements

sanitaire et dans les établissements sociaux et médico

souhaitent proposer à la promotion des 58 élèves AAH

sociaux.

en cours de formation.

fournies par cette filière permet à l'attaché d'adminis-

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Article DH : formation attaché d'administration hospitalière

Promotion 2013 de la formation d'Attachés d'Administration Hospitalière

Portrait choisi ▲

Les postes proposés doivent être des postes vacants et sont réservés aux élèves AAH. Pour s’en assurer, le CNG demande aux établissements de produire un état des effectifs des attachés de l’établissement et une fiche de poste détaillant les missions qui seront confiées au nouvel attaché. Seuls les attachés en cours de formation pourront postuler sur ces postes. Les réponses des établissements devront parvenir pour la fin du mois d’août au CNG. Le respect de ce délai est important pour que début septembre, le CNG publie la liste des postes au Journal Officiel et la mette en ligne sur son site internet. Dès la publication des postes offerts, les élèves attachés postuleront directement auprès des établissements. La sélection des candidats est effectuée par le directeur de l’établissement, qui doit faire connaître son choix au CNG début octobre en classant les postulants par ordre de préférence. Le CNG régule le processus d’affectation avec les élèves AAH et, mi-octobre les élèves intégreront la session de 6 semaines de spécialisation. Le jury de fin de formation se réunira le 12 décembre 2014 pour se prononcer sur la validation de l’année de formation. Le CNG informera l’établissement de l’installation de l’élève AAH sélectionné et transmettra une copie de l’engagement de servir 5 ans signé par l’élève en début de formation. Après validation de cette année de formation constituant l’année de stage statutaire, l’élève AAH pourra être titularisé dans son nouveau grade lors de sa prise de fonction dans son établissement d’accueil, dès le 1er janvier 2015. n

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 Interview de Pauline Maisonneuve,

ancienne élève attaché d'administration hospitalier, ancien membre du jury plénier concours AAH Quel est votre parcours ? Je suis titulaire d'un Master 2 de droit au terme duquel j'ai intégré un cycle préparatoire aux concours administratifs. Lauréate du concours AAH (promotion 2008), j'ai occupé un premier poste de cadre administratif de pôles durant un an. J'ai ensuite pris la responsabilité des affaires médicales, de la recherche, et des partenariats au sein d'un groupe hospitalier de l'AP-HP (Assistance Publique Hôpitaux de Paris). Vous avez été élève AAH au sein de l'EHESP, de manière générale, comment avez-vous vécu ces 12 mois de formation, quel(s) souvenir(s) en avezvous gardé(s) ? En tant qu'élève issue du concours externe, j'ai le souvenir d'avoir éprouvé une certaine impatience, empressée de prendre mes nouvelles fonctions. Toutefois ma méconnaissance du milieu hospitalier, ainsi que ma courte expérience professionnelle, ont été de relatives sources d'inquiétudes quant à mon positionnement de cadre, et de questionnements quant à l'adéquation de la formation avec mes futures responsabilités. La formation dispensée pendant 12 mois à l'EHESP permet-elle une prise de poste réussie ? Il faut avant tout saluer le travail qui a été réalisé par les responsables pédagogiques de l'EHESP


© DR

Article DH : formation attaché d'administration hospitalière

tiques (à l'exemple du stage "blouse blanche" réalisé par les élèves directeurs d'hôpitaux) pour comprendre les besoins des patients et les attentes des personnels ; - renforcer la connaissance des organisations sociales et médico-sociales pour donner à l'élève AAH une vision macroscopique et complète du parcours de soins ; - instituer des temps d'échange avec des directeurs d’hôpitaux afin de permettre à l'AAH de se projeter dans ce binôme vertueux qui repose sur une relation de confiance et de soutien mutuel (cette projection pouvant être transposée au binôme chef de pôle/cadre administratif de pôle) ; - prévoir des modules d'enseignements dédiés à la formation des AAH aux gardes administratives.

depuis plusieurs années. Ils ont impulsé une nouvelle dynamique et ont permis à la formation d'AAH d'être reconnue, comme en témoigne l'excellent niveau des candidats qui présentent le concours. La formation d'AAH a donc gagné en crédibilité et légitimité, qualités sur lesquelles peuvent s'appuyer les élèves lors de leur prise de fonction. Selon moi, cette démarche doit être prolongée afin d'adapter la formation aux enjeux liés à la "montée en charge" des AAH nécessitant des outils managériaux opérationnels solides. Après quelques années d'exercice en qualité d'AAH, que diriez-vous de l'adéquation entre la formation dispensée à l'EHESP et les missions et les responsabilités qui vous ont été confiées ? La formation dispensée à l'EHESP donne accès à une vision transversale des différents champs de compétences de l'AAH. La complémentarité entre enseignements théoriques et mise en situation professionnelle lors du stage se révèle particulièrement pertinente. Le défi à venir pour la formation AAH est sans doute de renforcer la place accordée à l'enseignement managérial (management de projets et management de personnes). Il s'agit notamment d'inciter l'élève AAH à se questionner sur son positionnement dans un contexte économique contraint, à trouver dans l'exercice de ses missions, un équilibre entre soutien des projets et arbitrage, entre faciliter et administrer. Au regard de votre expérience en tant qu'AAH, apporteriez-vous à la formation des modifications tant sur le fond que sur la forme ? Les pistes de réflexion sont à mon sens les suivantes : - renforcer le travail en "ateliers" autour de la mise en situation et de la posture managériale (exemples : comment mener un entretien individuel d'évaluation ? comment conduire une réunion ? etc...) ; - permettre à l'élève AAH de faire un stage au sein de services de soins, de services techniques et logis-

Pourquoi vouliez-vous devenir AAH ? Que retenezvous de votre expérience professionnelle en qualité d'AAH ? Le parcours de l'AAH est d'une très grande richesse de par son dynamisme, la multiplicité des échanges et des projets, mais aussi pour les perspectives de carrière qui sont ouvertes. J'ai pu, pour ma part, développer une véritable expertise, tout en ayant une posture de décisionnaire pour les affaires courantes du service dans le respect de la stratégie fixée par mon directeur. J'ai surtout apprécié mettre en œuvre les projets institutionnels en créant du lien avec les équipes soignantes. Le métier d'AAH est un métier de proximité, de terrain, et c'est sans doute ce qui le rend si passionnant. Aujourd'hui, vous êtes élève directrice, pourquoi ce changement de métier ? En tant que future directrice, engageriez-vous des AAH issus du concours national ? Mon expérience professionnelle d'AAH m'a confortée dans mon attachement aux valeurs du service public et dans mon souhait de faire évoluer mon projet professionnel autour de la prise en charge de l'usager. Par ailleurs le positionnement d'AAH m'a donné la confiance nécessaire pour me projeter dans une posture plus stratégique que je perçois, bien évidemment, comme indissociable d'une étroite collaboration avec les AAH. Quel conseil donneriez-vous à un élève AAH lors de sa prise de poste ? Définir son identité professionnelle individuelle ! L'AAH doit développer sa propre expertise dans des domaines de compétences identifiés selon ses appétences, et au travers de formations individuelles, congrès, ou encore d'échanges avec d'autres structures. L'AAH doit oser investir des secteurs "hyper technicisés" ou innovants, tels que l'organisation des blocs opératoires et de la chirurgie ambulatoire, ou encore la recherche clinique. Attention toutefois à ne pas s'enfermer et à rester polyvalent, l'AAH a vocation à avoir plusieurs métiers au cours de sa carrière.

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article DH

Article DH : Séjours GHS

Par Georg Hoffmann Prof. Dr. med. Georg Hoffmann, Verlag Trillium GmbH, D-82284 Grafrath, www.trillium.de Mike Schenker Mike Schenker, DRGBerater, München Michael Wilke Dr. med. Michael Wilke, inspiring.health, München Dossier préparé par Anne Postulka, M.D. Director of Medical and Economic Value Europe. Cepheid cepheidinternational.com German DiagnosisRelated Groups - Groupes de Diagnostics allemands 1

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Les Groupes homogènes de séjours (GHS) : Source d’information précieuse Depuis la mise en place des Groupes homogènes de séjours, GHS ou DRG (Diagnostic Related Groups), tous les cas d’hospitalisation comptabilisés sont répertoriés et répartis en catégories sur le plan économique. Une immense base de données est ainsi constituée et suscite évidemment l’intérêt : peut-on y trouver plus d’informations que les seules tarifications à l’activité pour les cas individuels des patients ? Comment les données économiques peuvent-elles être agrégées de façon intelligible ? Que peut-on en apprendre, si on les associe aux informations médicales également enregistrées ?

La figure 1 présente à titre d’exemple une base de données à accès gratuit, et consultable sur internet, de l’Institut Allemand sur le Système Prospectif de Tarification Hospitalier (dénommé InEK-Browser www.g-drg.de). Il y a aussi d’autres dispositifs gratuits sur internet, comme par exemple en Allemagne le DRG Watchdog (www.watchdog-online.de), qui publie tous les DRG avec tarification à l’activité disponible à partir de requêtes sur les diagnostics principaux et secondaires.

La codification des diagnostics secondaires a-t-elle un impact positif sur la tarification à l’activité des cas d’hospitalisation ?

Une autre question, très fréquemment soulevée par les experts en diagnostic de laboratoire et par les fabricants de tests et systèmes diagnostics : la codification des diagnostics secondaires a-t-elle un impact positif sur la tarification à l’activité des cas d’hospitalisation ? Pour le système allemand G-DRG1, nous pouvions répondre à cette question dès 2004. Nous avons découvert qu’environ deux tiers de tous les diagnostics secondaires significatifs sont étayés par un recours au laboratoire. Cette découverte a été d’une importance cruciale pour l’autopromotion des laboratoires de diagnostic médical en tant que « Centres de Profit ». En effet, lorsque la co-

Un regard au-delà des frontières nationales peut s’avérer

dification de diagnostics secondaires, établie au moyen

riche d’enseignements, lorsque les pays voisins ont déjà

de tests réalisés par le laboratoire, conduit à des gains

une certaine expérience. L’Allemagne et la France ont

financiers pour l’hôpital, cela renforce la valeur médicale

accumulé au fil des années un nombre impressionnant

du laboratoire.

de données, qui peuvent aujourd’hui être dépouillées et exploitées par les hôpitaux et les caisses d’assurances maladie, mais aussi par les économistes, les épidémiologistes, les représentants des pouvoirs publics et les médias, sous des angles divers.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

Ce domaine est plutôt défavorisé du point de vue économique dans le système DRG, en comparaison avec la tarification antérieure individualisée, parce que les tests de laboratoire sont inclus dans les forfaits par activité et sont pour cette raison fréquemment perçus comme des « facteurs de coût », qu’il serait préférable d’éviter.


Article DH : SÉJOURS GHS

Nous présentons ici une étude réalisée récemment qui compare le système allemand G-DRG avec le système français GHM2. Nous avons choisi à titre d’exemple, du fait de leur importance actuelle dans la politique de santé, les infections nosocomiales avec agents pathogènes

Figure 1 : Interrogation d’une base de données provenant du système G-DRG. Dans les deux champs surlignés en jaune on peut sélectionner une classe de maladie et une classe de DRG, comme ici par exemple le Diabète et le diagnostic de complication (MDC 10, DRG K 60B). Plus bas, les deux zones d’écran présentent des données statistiques sélectionnées respectivement sur le plan économique et sur le plan médical. Ainsi, en Allemagne, 80,68 % des patients atteignent dans ce DRG les plus hauts niveaux de sévérité du point de vue économique (PCCL 4), alors qu’un diagnostic secondaire est le plus souvent codifié comme une bénigne hypertension artérielle essentielle.

multi-résistants comme le SARM3, les ERV4 et le C. difficile5. Tous trois, fréquemment rencontrés en Allemagne et en France, présentent un enjeu médical élevé et génèrent des surcoûts considérables. Nous nous sommes demandé si la codification des germes dans les deux systèmes de DRG conduisait à un supplément dans la tarification et si celui-ci couvrait le surcoût associé. Les réponses sont : oui pour le supplément dans la tarification, non pour la couverture des surcoûts. Mais un travail méthodique a été nécessaire avant d’en arriver à cette réponse simple.

Les systèmes sont très comparables en Allemagne et en France eu égard à ces variables, ce qui permet d’obtenir des comparaisons fiables entre les résultats. Le système G-DRG revêt dans ce contexte une particularité, puisque les diagnostics secondaires sont pondérés selon leur importance économique (dite CCL6) et synthétisés à un niveau de sévérité globale PCCL7 à

Élaboration de cas types

l’aide d’une méthode de calcul éprouvée. Il est difficile de prévoir pour un cas individuel à quel PCCL aboutit une combinaison donnée de diagnostics secondaires.

2 Groupes Homogènes de Malades

Methicillin-resistenter Staphylococcus aureus - Staphylocoque doré multi résistant à la méticilline 3

4 Vancomycin-Resistente Enterokokken - Entérocoques résistants à la Vancomycine

Face à des systèmes de tarification des hôpitaux basés

On trouve également différents niveaux de sévérité glo-

en Europe sur des modalités de calcul très différentes,

bale (niveau 1 à niveau 4) dans le système français GHM.

nous avons eu recours à une méthode qui a fait ses

Lorsque se produit une complication particulière réperto-

preuves dans de nombreuses études comparatives au

riée dans une liste, ou qu’une durée de séjour définie est

plan international, parmi lesquelles en dernier lieu le

dépassée, le niveau s’élève alors sensiblement. Dans le

Projet 2012-EURO-DRG. Nous avons, dans un premier

cas des germes considérés, l’écart a conduit comme

Complication and Comorbidity Level - Complexité et Niveau de Comorbidité

temps, défini des situations cliniques types, dans les-

on pouvait presque le prévoir avec certitude, au niveau 4,

7

quelles les infections nosocomiales sont fréquentes.

le plus élevé.

5

Clostridium difficile

6

théoriques qui comprennent toutes les variables indis-

Pour l’élaboration des cas allemands, nous avons utilisé

Patient Clinical Complexity Level - Niveau de Complexité Clinique du Patient

pensables dans le calcul des tarifications d’activités,

une base de données de référence comportant environ

8

comme l’âge et le sexe, les diagnostics principaux et

300 000 cas réels d’hospitalisation tandis que pour la

secondaires, les procédures spécifiques (par exemple :

France, nous avons exploité des données issues d’un

salle d’opération) ou la durée d’hospitalisation.

rapport de l’ENCC8 sur les hôpitaux français.

Nous avons ensuite construit sur cette base des cas

Échelle nationale des coûts communes

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

15


Article DH : SÉJOURS GHS

Allemagne

France

Cas

Brève description

Tarification de base

Facteur

Tarification de base

Facteur

A B C D E

Pneumonie

2.237 €

1,6

1.929 €

3,5

Fracture

5.103 €

1,3

3.788 €

3,1

Diabète

2.786 €

1,7

3.002 €

2,7

Hypertension

2.752 €

1,7

2.093 €

6,6

Hémodialyse

6.198 €

1,0

1.366 €

11,9

Tableau 1 : tarification de base pour les cinq cas types et supplément de tarification (facteur d’augmentation) par codification additionnelle d’une infection nosocomiale avec agents pathogènes multi-résistants. On observe des excédents en Allemagne (à une exception près), aux environs de 2 000 €, mais ils sont nettement plus élevés en France avec environ 5 000 € à 10 000 €. Pour les détails, en partie complexes, du calcul de la tarification. Cas A : patient souffrant de maladie chronique avec pneumonie, insuffisance cardiaque et diabète de type II Cas B : opération d’une fracture du fémur, bronchopneumopathie chronique obstructive (ci-après « COPD »), insuffisance cardiaque, diabète de type II Cas C : pied diabétique, occlusion artérielle périphérique, insuffisance cardiaque. Cas D : cardiopathie hypertensive et insuffisance rénale Cas E : hémodialyse due à une insuffisance rénale au stade terminal, insuffisance cardiaque par hypertension, COPD

Allemagne avec 6 198 € (tableau 1). Il est généralement constaté qu’en France, les cas avant infection sont, à une exception près (pied diabétique), tarifés des centaines ou même des milliers d’euros en dessous de leur tarification en Allemagne.

Des coûts réels non couverts

Il est intéressant de noter qu’en France, les coûts qui s’opposent aux recettes sont pour partie bien plus élevés que celles-ci. Dans les deux systèmes DRG, les infections nosocomiales conduisent à une sous-couver-

Des revenus supplémentaires de plusieurs milliers

d’euros

Dans le système allemand G-DRG, la codification des infections nosocomiales précitées a conduit, pour quatre

ture financière importante (Figure 2). Il n’est pas à exclure que de tels déficits soient voulus au plan politique ; la tarification à l’activité des DRG ne devant au final pas inciter à « la culture de germes hospitaliers ». En Allemagne, cet effet incitatif est sans aucun doute nettement plus faible qu’en France.

des cinq cas élaborés, à un supplément modéré dans la tarification, d’un facteur de 1,3 à 1,7 ; tandis qu’elle n’a pas généré de tarification supplémentaire dans le cinquième cas, celui d’un patient sous dialyse sévèrement atteint. En France au contraire, cette codification a donné lieu

En Allemagne, l'effet incitatif de la tarification à l’activité des DRG est sans aucun doute nettement plus faible qu’en France.

pour l’ensemble des cinq cas à une multiplication du tarif par activité, d’un facteur de 2,7 à 11,9. Curieusement, le cas qui n’a conduit à aucun supplément de tarification

Une analyse détaillée a montré – ce qui n’est pas sur-

dans le système allemand a généré en France le facteur

prenant – que la durée d’hospitalisation est le principal

d’augmentation le plus élevé.

facteur de coûts : plus un patient est hospitalisé longtemps, plus coûteux est son cas. Les antibiotiques et la

16

Il est vrai que le taux de tarification du cas E (patient

chambre individuelle (pour isolement prophylactique) y

sous hémodialyse) se trouvait, avec 1 366 €, au bas de

contribuent naturellement aussi, mais sont d’une impor-

l’échelle en France et au contraire, à son sommet en

tance moindre.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Article DH : SÉJOURS GHS

Figure 2 : Coûts (en rouge) et Tarifications DRG (en vert) par patient atteint d’infections nosocomiales.

Intérêt

pour le diagnostic Le point de vue des laboratoires médicaux, à partir des résultats de l’étude, est que le facteur temps est donc déterminant et qu’un diagnostic rapide et ciblé peut permettre de gagner plusieurs jours et diminue ainsi le risque soit de prescrire une thérapie de façon inappropriée, soit de la mettre en place trop tardivement. L’exemple des infections nosocomiales a été choisi à dessein, parce qu’il prend fait et cause pour les techniques d’analyse innovantes. Avec les Techniques d’Amplification des acides Nucléiques (NAT), on peut aujourd’hui fréquemment déterminer directement non seulement le germe mais également les résistances en

Bilan

Bibliographie

moins de deux heures, alors que l’utilisation de culture traditionnelle peut demander jusqu’à trois jours.

À partir des données des DRG, qui

Pour de telles différences, les coûts, souvent critiqués,

s’accumulent depuis des années dans

passent dans le bilan global de 20 à 100 € pour la biolo-

les bases de données, il est possible

gie moléculaire, contre 1 à 50 € pour la culture en milieu

de trouver, par des techniques cou-

sélectif (prix approximatifs en Allemagne) ; ceci est éga-

rantes d’interrogation, un grand nombre

lement valable lorsque le test de biologie moléculaire né-

d’informations précieuses (figure 1). On

cessite pour confirmation une étape de mise en culture.

apprend encore davantage, grâce à la

Mais le bénéfice du point de vue médical dû au gain de temps évoqué plus haut, est bien plus déterminant que toutes les considérations économiques : moins de risques de contagion du fait d’infections découvertes tardivement, moins d’isolements prophylactiques pour des suspicions de cas éventuels de staphylocoque doré, moins d’administrations non ciblées d’antibiotiques, et par conséquent, in fine, moins de germes résistants dans les hôpitaux ; tout ceci constituant un plaidoyer évident contre les fausses économies et en faveur du recours aux techniques innovantes disponibles pour le laboratoire.

combinaison d’interrogations croisées avec des cas types, comme le montre ici l’exemple des infections nosocomiales (tableau 1, figure 2). C’est pourquoi, une expertise dans la recherche à partir des bases de données DRG et de la modélisation des cas de DRG peut être très utile et révéler des problèmes de financement, mais aussi aider à trouver des solutions.

n

Hoffmann Georg, DRG und Labor: Erfahrungen aus Deutschland. pipette, Swiss Laboratory Medicine, 2011;Heft 6:7-8 Hoffmann Georg, Schenker M, Kamann M, Meyer-Lüerßen D, Wilke, M: The Significance of laboratory testing for the german diagnosis-related group system. Clin. Lab. 2004;50:599-607 Wilke M, Schenker M, Hoffmann G: The Impact of diagnostics in hospital reimbursement of complicated infections. Zur Publikation eingereicht. Quentin W, Scheller-Kreinsen G, Geissler A et al: Appendectomy and diagnosis-related groups (DRGs): patient classification and hospital reimbursement in 11 European countries. Langenbeck’s Arch Surg 2012;397:317-26

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

17


article DH

Article DH : la fonction achat

La fonction achat

Directeurs généraux, la gestion de la relation fournisseurs ne répond pas seulement à un objectif économique mais participe à l’excellence clinique, le saviez-vous ? Fini les fonctions achats limitées à la satisfaction des obligations réglementaires ou recluses dans les directions des services économiques, place à une fonction achats efficiente... mais pourquoi ? Dans un contexte en mouvement, les enjeux de nos centres hospitaliers sont dynamiques et de plusieurs ordres, entre autres : • Améliorer l’excellence clinique : les palDavid Lahille − La loi HPST (Hôpital, Patients, Santé

Par David Lahille, Co fondateur, Directeur Général

et Territoires) et ses textes d’application visent à ajuster

david.lahille@cropandco.com

& Michel Madar, Consultant senior et expert en achat public au sein du cabinet Crop and co. Il intervient notamment auprès de grands donneurs d’ordres publics et privés en matière d’achat de travaux.

les meilleures combinaisons pour satisfaire les besoins

marès des hôpitaux publiés chaque année dans des journaux majeurs de la presse nationale influent les comportements de plus en plus consuméristes de nos

de notre pays en matière d’offre de soins.

concitoyens et de leur famille en matière de soins. Parmi

La Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS) pro-

ont créé et développé une organisation achats perfor-

meut avec vigueur la professionnalisation de la fonction achats dans les établissements de santé via le programme PHARE. Les lumières de ce programme et l’impulsion donnée par les directions générales font éclore des organisations achats performantes qui s’évadent de la cellule des marchés ou de la direction logistique, incluant au passage les achats médicaux. Cette fonction achats est positionnée comme véritable culture d’établissement et contribue à l’excellence clinique dans son sens le plus large.

les mieux classés figurent notamment des hôpitaux qui mante (CHU de Montpellier, CHU de Nantes, CHU de Toulouse…). • Gérer l’expertise médicale : la compétence technique se raréfie et les organisations doivent restructurer leur processus pour recentrer les experts sur le beau geste et confier les activités économiques à d’autres personnels, les acheteurs, et aux outils à leur disposition (système d’information achats). • Piloter la recherche : rien de plus complexe qu’un dispositif de recherche... et pourtant il est au cœur des préoccupations de nos centres hospitaliers universi-

« La fonction achats d’un hôpital n’a pas qu’un rôle économique »

taires qui doivent satisfaire le double objectif de préparer les personnels de santé de demain et participer activement aux avancées de la médecine. Cet enjeu s’inscrit dans un contexte particulièrement difficile présentant de multiples contraintes : financières, comportements et attentes des patients, souhaits des soignants et des praticiens, etc …

18

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Article DH : la fonction achat

Dans ce contexte, la fonction achats d’un hôpital n’a pas qu’un rôle économique. En effet, les achats doivent permettre à l’hôpital de trouver, pour partie, les meilleures réponses à ces enjeux d’innovation et de recherche grâce au concours massif

Médicaments :

la recherche au cœur de la relation hôpital / laboratoires pharmaceutiques

des fournisseurs. Comment parler de la dimension efficiente de l’achat À titre d’exemple, en matière de développement HAD

sans évoquer le pilotage de la relation entre l’hôpital et

(Hospitalisation A Domicile), ce sont les acheteurs qui,

les laboratoires pharmaceutiques. Nous sommes trop

en très étroite collaboration avec les professionnels

souvent dans une relation en silo partagée par les ex-

chargés de ce dispositif, doivent identifier les nouveaux

perts médicaux, les pharmaciens, les acheteurs, les soi-

fournisseurs et prestataires, contributeurs externes et

gnants. L’hôpital doit franchir un pas pour mieux piloter

les installer dans une dynamique de performance clinico-

ses relations avec les créateurs et producteurs de médi-

économique indispensable à l’hôpital pour évoluer dans

caments dans une dynamique stratégique qui dépasse

son environnement contraint.

le rythme des innovations unilatérales des laboratoires et le rythme mécanisé du renouvellement des marchés.

Équipements et dispositifs médicaux :

l’innovation au cœur de la relation hôpital / fournisseurs Dans le cadre de la « mécanisation » de l’hôpital liée à la raréfaction de l’expertise, les fournisseurs d’équipements biomédicaux (imagerie, robots, etc...) et de dispositifs médicaux tendent à prendre une place plus importante. Il devient indispensable pour nos hôpitaux de se projeter et décider dans un horizon synchronisé aux rythmes des innovations technologiques de ces fournisseurs

C’est sur le terrain de la recherche que se trouve une partie de la réponse, et dans ce domaine, les modalités de relations avec les fournisseurs restent pour partie à inventer.

Nous parlons ici d’une expertise fondamentale en matière d’achats, l’acheteur étant un acteur majeur pour sécuriser les travaux de recherche menés conjointement par l’hôpital et ses fournisseurs. Il est également un facilitateur pour le chercheur en l’aidant à disposer des moyens nécessaires pour conduire sa recherche, prenant en compte les contraintes inhérentes à cette activité : dimension internationale, travail dans l’urgence, imprévisibilité, etc…

(actuels et potentiels). La nature des accords avec les Au même titre que les organisations en pôles ont pu

le potentiel de création dans une coopération nouvelle

le faire en leur temps, la mise en place d’une fonction

des acteurs.

achats développe de manière active la transversalité

Pour partie, cette coopération reste encore à inventer

entre les secteurs administratif et clinique vers une per-

(mise à disposition, coût à l’acte,…) afin de passer d’une

formance aux vertus multiples :

obligation de moyens à une obligation de résultats.

• La pertinence des solutions et la compétitivité écono-

Les acteurs majeurs de ce marché sont des groupes de

mique des choix de fournisseurs sur le long terme.

puissance significative. Le management de la relation

• La meilleure satisfaction des attentes des personnels

avec ce type d’acteurs demande le savoir-faire d’ache-

par l’amélioration de la relation professionnelle entre les

teurs aguerris travaillant en étroite collaboration avec les

acteurs hospitaliers qui, grâce à des processus achats

experts et les directions générales. Nous notons dès à

formalisés et communiqués, améliorent leur fonctionne-

présent que certains directeurs généraux veulent aller

ment et appréhendent beaucoup mieux la contribution

plus loin et vite. Les acheteurs doivent se préparer.

de l’autre et de l’acheteur.

fournisseurs de ces domaines doit évoluer pour libérer

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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Article DH : la fonction achat

Directeurs généraux, face à ces enjeux, comment positionnerez-vous votre fonction achats dans le dispositif managérial de votre établissement ? ▲

Michel Madar − La fonction achats est en cours de

D’où une nouvelle approche de l’achat de ces presta-

professionnalisation au sein des structures hospitalières.

tions intellectuelles qui doivent dépasser le seul point de

Mais les personnels en charge des travaux disent sou-

vue des compétences techniques pour intégrer progres-

vent : « Mais nous, vous savez, ce n’est pas pareil ! ».

sivement une demande de compétences achats.

Avec pour croyance – sincère – que les méthodes et techniques d’achats professionnalisées s’appliquent

• Ils s’inscrivent dans une réglementation extrêmement

très bien à l’informatique, à la pharmacie, à la blanchis-

complexe (CMP ; CCAG ; Loi MOP ; Lois relatives à l’ar-

serie, mais pas aux travaux.

chitecture ; Lois sur l’environnement ; …). • Ils mettent en jeu des montants financiers élevés et

Ces achats de construction neuve ou réhabilitation sont effectivement des achats singuliers, mais cette singularité ne permet pas, bien au contraire, de se dédouaner de la mise en œuvre de méthodes et d’outils d’achats professionnels.

Les spécificités

des achats de travaux

intègrent de plus souvent une forte dimension politique. • Ils sont enfin, du fait de leur logique séquentielle, instruits en mode projet.

Les actions de l’acheteur

L’acheteur travaux est intégré dès l’origine du projet et • Ce sont des achats séquentiels. Il est fréquent que

intervient par l’apport de méthodes et d’outils lors des

dans un premier temps soient achetées des prestations

6 phases classiques d’un projet de construction : Mon-

d’un assistant technique à maîtrise d’ouvrage, d’un pro-

tage / Études / Conception / Marchés de travaux / Exé-

grammiste, voire d’une conduite d’opération. Ensuite

cution / Réception.

vient le temps de l’achat de la maîtrise d’œuvre et des différents AMO (SPS, OPC, contrôle technique, SSI,…).

Pour que cette intégration soit efficiente, les ingénieurs

Puis, sont opérés les achats de travaux proprement dits.

travaux doivent prendre conscience que la technicité

Des achats de fournitures et de services viennent clore

BTP n’est pas tout. L’approche économique, fonda-

ce scénario.

mentale dans un secteur public qui passe d’une culture d’administration à une culture de gestion, n’est pas anti-

• Ils mobilisent une multitude d’intervenants. De facto,

nomique de la qualité des prestations achetées.

c’est une équipe qui est in fine en charge de la bonne

Les principales actions de l’acheteur tout au long de

fin de l’opération. L’acheteur, gestionnaire de ressources

l’opération seront les suivantes :

externes, a pour mission d’optimiser les plus-values de

• L’élaboration de stratégies d’achat sur les principales

ces différents acteurs avant et pendant la réalisation de

familles d’achat

l’ouvrage.

• La validation de la planification du projet intégrant les temps d’achat

20

• Ce sont – souvent sans réelle prise de conscience –

• La définition d’objectifs d'achat (notamment les calculs

des achats délégués. Les décisions prises par exemple

de gains)

par la maîtrise d’œuvre dans la passation des contrats de

• La validation de la correcte définition du besoin

travaux ont de très fortes conséquences économiques.

• La production d’analyses en coût complet

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Article DH : la fonction achat

• La production d’études de marché

l’acheteur dans le processus d’une conduite d’opération

• L’optimisation de l’exploitation de la réglementation

semble désormais incontournable.

permettant de sortir des DCE copier / coller • L’analyse des risques contractuels

L’intégration d’un acheteur à l’équipe travaux se traduit

• L’analyse des candidatures et des offres

par :

• La tenue de négociations professionnalisées (notam-

• Une meilleure maîtrise des plannings

ment en MAPA)

• Un plus grand respect des programmes de maîtrise

• Un suivi formalisé et optimisé des fournisseurs (no-

d’œuvre

tamment leur évaluation permanente)

• Une meilleure satisfaction du besoin

• L’évaluation des projets d’achat

• Une diminution des sur-spécifications

• L’analyse de gains sur achats

• Une meilleure maîtrise des enveloppes financières

•…

• La diminution des arrêts et reprises de projet, d’avenants litigieux, des bordereaux de prix supplémentaires sans fin, de réceptions interminables

Le rôle de l’acheteur, de par ses compétences multiples

• Etc…

(économiques, techniques, contractuelles, commerciales) est de garantir l’optimisation du rapport qualité

L’intégration d’un acheteur travaux est un véritable

prix de la chose achetée et la bonne relation avec le

atout dans les établissements engagés dans une dé-

fournisseur. Vu l’envergure des enjeux techniques et

marche de progrès et de professionnalisation de leurs

financiers des opérations de travaux, l’implication de

achats. n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Rubrique DH

© Faust Favart - PG Promotion

Salon Santé Autonomie

Seconde édition pour l'incontournable rendez-vous ! DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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© Faust Favart - PG Promotion

rubrique DH : Salon Santé autonomie

Entretien avec Stéphane Pic-Paris, directeur général délégué de PG promotion, organisateur du salon

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DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


rubrique DH : Salon Santé autonomie

Décontracté mais affuté, concentré mais chaleureux, Stéphane Pic-Paris, directeur général délégué de PG promotion, nous accueille dans ses locaux parisiens. Entouré de sa dream team, il nous propose un café et des boissons fraîches avant de commencer l’interview. Le chef d’orchestre des Salons de la Santé et de l’Autonomie apprécie peu d’être sur le devant de la scène car, pour lui, « Les stars du salon, ce sont les milliers de personnes qui participent à sa réussite ». Pour DH Magazine, il a toutefois accepté de se prêter au jeu de l’interview.

© Faust Favart - PG Promotion

Un salon de presque 60 ans !

La convergence des marchés nous a poussés à réunir les 3 événements (HopitalExpo, GerontHandicapExpo et Hit Paris, rebaptisé Health-ITExpo) de façon annuelle sur une même plateforme. L’augmentation de plus de 14% du nombre de visiteurs en 2013 par rapport aux années précédentes nous conforte dans ce choix ! Mis à part des produits bien spécifiques, axés sur les besoins des maisons de retraite ou sur des outils purement hospitaliers, le marché est transversal.

DH MAGAZINE – Le salon est une « vieille dame » qui fêtera bientôt ses 60 ans, n’est-ce

Quels ont été les retours des visiteurs et des

pas ?

exposants sur cette première édition des Salons de la Santé et de l’Autonomie ? C’était un challenge ambitieux, car les 3 événements

toutes premières « Assises nationales de l’hospitalisa-

possédaient une identité forte. Notre mot d’ordre

tion publique » organisées chaque année par PG Pro-

était : « Un salon pour tous, un secteur pour chacun,

motion remontent aux années 50. Nous avons ensuite

un contenu pour chaque secteur» et les retours ont été

développé et mis en place HopitalExpo pour le compte

très encourageants ! L’organisation des Salons en sept

de la FHF - car HopitalExpo appartient à la FHF. Pour faire

secteurs distincts semble avoir parfaitement répondu

simple, le congrès plus centré sur le « management de

aux attentes des visiteurs qui y ont trouvé un contenu

direction » est organisé par la Fédération et la partie

riche et adapté à leurs besoins professionnels. 90% des

salon plus « opérationnelle » par PG. Le mariage dure

visiteurs ont déclaré être satisfaits de leur visite et 90%

donc depuis plusieurs années avec une bonne réparti-

ont également estimé que le regroupement des 3 salons

tion des rôles. Enfin, GerontExpo a vu le jour dans les

en une grande manifestation annuelle était pertinent et

années 90 et notre dernier né « HIT Paris » en 2007.

correspondait à la réalité du marché.

Stéphane Pic-Paris − Oui ! Même si ces dernières décennies, il a subi quelques transformations ! Les

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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rubrique DH : Salon SantĂŠ autonomie

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DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


rubrique DH : Salon Santé autonomie

Plus de 550 exposants et partenaires, des agoras et des conférences quotidiennes, quelque 20 000 visiteurs attendus ▲

Mai : est-ce le bon mois pour ce type de manifestation ? Ce n’est pas une période facile mais traditionnellement, la plupart des congrès médicaux se déroule aux alentours des mois de mai/juin. Ensuite, il faut prendre en compte tous les autres congrès, salons nationaux et internationaux mais aussi les « ponts » pour réussir à trouver les meilleures dates !

Le bloc opératoire de demain… Deux salles intégrées seront présentées par Dräger / Olympus et HT Labor / Hospitaltechnik AG / Karl Storz

Nous sommes une quinzaine de personnes à travailler sur le salon à temps plein toute l’année. Nous mettons plus d’un an pour l’organiser et le commercialiser. L’année

dernière,

les

visiteurs

avaient

pu

s’immerger dans le service ambulatoire de

et

quelque

demain « grandeur nature » (Clubster santé /

20 000 visiteurs attendus : Comment se prépare,

CHRU de Lille) et visiter des showrooms de blocs

en amont, un tel salon ?

opératoires. Et cette année ?

Nous sommes une quinzaine de personnes à travailler

Malheureusement, le Clubster Santé ne sera là qu’en

sur le salon à temps plein toute l’année. Nous mettons

2015, car il est en train de développer son opus 3 ! Mais

plus d’un an pour l’organiser et le commercialiser. Au-

que les visiteurs se rassurent, les animations ne man-

jourd’hui, nous travaillons déjà à l’organisation de la troi-

queront pas comme « L’animation m-santé / Pavillon

sième édition : plans, répartition des secteurs, stratégie,

e-santé ». Et je pense également à ces 2 blocs opé-

développement des produits, prise de contact… Dès

ratoires reconstitués qui réunissent l’expertise et les

juin-juillet, nous commençons à prévoir notre stratégie

toutes dernières innovations de plusieurs industriels qui

marketing et visiteurs et à partir du mois de septembre,

ont travaillé en partenariat sur ce projet.

le service communication prend le relais !

Nos visiteurs pourront aussi se promener pour la pre-

L’organisation est basée sur 3 groupes : la partie com-

mière fois dans le Village de la « Silver Economie »

merciale, celle logistique et celle marketing / communi-

– plus d’une vingtaine d’exposants – ou bien découvrir

cation. Ce sont les 3 piliers de l’organisation de l'événe-

notre nouvel univers : « Le Village des Architectes »

ment qui travaillent avec un planning bien défini et un

avec ses 14 cabinets d’architectes. Le marché bouge,

process simple. En revanche, travailler sur le « conte-

évolue et il est indispensable de s’y adapter pour être

nu » est plus compliqué ! Il faut créer des partenariats

à la pointe de l’innovation d’où la présence d’une qua-

et intéresser les institutionnels, les associations ou les

rantaine d’entreprises nouvelles sur des secteurs qui

fédérations pour les faire venir.

n’existaient pas avant.

des

conférences

quotidiennes,

Plus de 550 exposants et partenaires, des agoras

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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rubrique DH : Salon Santé autonomie

Y

verrons-nous,

comme

l’année

dernière,

quelques-uns de nos Ministres ? C’est une plateforme importante pour la FHF, un lieu où ils reçoivent tous les institutionnels présents dans le secteur dont, bien entendu, les Ministres. Vu les secteurs en évolution, nous espérons vivement avoir la visite du Ministre en charge du numérique ! Nous comptons aussi sur la présence du Ministre du développement économique. Nous l’invitons à venir voir les entreprises étrangères qui possèdent des unités de production en France et nos entreprises françaises qui développent sans cesse des innovations. C’est un secteur économique considérable avec un fort potentiel de développement en France ! D’ici quelques jours, nous aurons également les noms des délégations étrangères présentes sur l'événement, car notre modèle de santé est très apprécié et très regardé au niveau international.

À ce propos, quel est le pourcentage de visiteurs étrangers ? Lors de la première édition, il était d’environ 7 %. 63 pays étaient représentés. Nous avons accueilli des délégations danoises, marocaines, allemandes ou encore sénégalaises. Le modèle de santé français s’exporte et notre savoir-faire industriel séduit énormément !

Sur les aspects pratiques, y a t-il des nouveautés mises en place cette année ? Oui ! Par le biais des nouvelles technologies, on essaie de faciliter au maximum la découverte du salon qui, rappelons-le, s’étend sur plus de 14 800 m² de surface nette d’exposition ! Notre application « SanteAutonomie », téléchargeable sur tous les supports mobiles, s’est encore étoffée. Elle permet de trouver son chemin, de suivre les actualités en temps réel, de partager ses impressions, de préparer des rendez-vous clients… La 1ère année, nous avons enregistré 300 téléchargements, l’année dernière, ce chiffre a été multiplié par 3 et cette année, on s’attend à encore plus ! Parallèlement, nous proposons nos supports papier traditionnels : catalogues, plans de poche ou guides visiteurs. Autre nouveauté : le « Networking ». Les salons sont avant tout des lieux de rencontre. Notre rôle est de favoriser les rencontres acheteur / fournisseur. C’est pourquoi cette année, nous avons développé les Rendezvous d’Affaires entre un acheteur ou un prescripteur qui a des projets d’investissement et des exposants qui ont

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rubrique DH : Salon Santé autonomie

On essaie de faciliter au maximum la découverte du salon qui, rappelons-le, s’étend sur plus de 14 800 m² de surface nette d’exposition ! Notre application « SanteAutonomie », téléchargeable sur tous les supports mobiles, s’est encore étoffée. Elle permet de trouver son chemin, de suivre les actualités en temps réel, de partager ses impressions, de préparer des rendezvous clients… des outils/services par le biais d’un « Networking ». Ce

Application smartphone SanteAutonomie disponible en téléchargement

concept semble avoir trouvé son public, car il nous reste très peu de places disponibles !

Quelle sera la place donnée aux conférences, animations, agoras ? Sont-elles prisées des visiteurs ? 1300 congressistes, une moyenne de 10 conférences FHF / jour, des retours d’expériences sur les agoras qui sont en libre accès (Agora Health-It, Agora Grand Âge et Handicap, Agora Hôpital et Bloc opératoire, Agora Architecture Hospitalière et Agora Hôpital Durable), les Trophées de l’Innovation rythment le salon et favorisent le débat sur les grands thèmes d’actualité. Ces animations sont partie prenante du salon et sans doute une des clés du succès de l'événement !

Autre nouveauté : le « Networking » : Nous avons développé les Rendez-vous d’Affaires entre un acheteur ou un prescripteur qui a des projets d’investissement et des exposants qui ont des outils / services par le biais d’un « Networking ».

Village regroupant les entreprises adhérentes Asipag ou Silver Valley ayant des produits, solutions ou services dédiés à la Silver Economie

cessité économique pour les hôpitaux. C’est pourquoi,

tiques ?

sur le salon, nous creusons ces orientations pour pou-

Nous centrons le salon sur les besoins et les demandes

voir proposer toutes les solutions possibles à un direc-

du visitorat, sur les grandes orientations stratégiques ou

teur hospitalier qui souhaite promouvoir l’ambulatoire

sur les directives du ministère. À titre d’exemple, cela

dans son établissement. Par exemple, avec l’animation

fait quelques années que le gouvernement et la FHF

« m-santé / pavillon e-santé », on a en place le parcours

souhaitent améliorer le parcours de soins du patient,

du patient opéré en ambulatoire avec tout le suivi, y

notamment en favorisant la chirurgie ambulatoire – né-

compris la problématique de gestion des données.

Comment définissez-vous les grandes théma-

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© Faust Favart - PG Promotion

rubrique DH : Salon Santé autonomie

La M-santé, à savoir tout ce qui va simplifier la vie des patients, le Développement durable qui englobe non seulement le traitement des déchets mais aussi une gestion du personnel efficiente, enfin, le traitement, la confidentialité, la propriété, la transversalité des données… seront les grands thèmes qui feront le buzz.

conférences sur le sujet remportent un grand succès. En 2013, les salles étaient pleines, signe de l’engouement pour cette thématique ! Enfin, le traitement, la confidentialité, la propriété, la transversalité des données : Comment faire pour organiser tout cela ? Quels sont les risques ? On n’en est encore qu’au début…

Le mot de la fin ? Nous vous donnons rendez-vous le 20 mai !

n

santé émergentes ? Celles qui vont faire le buzz ? La m-santé, à savoir tout ce qui va simplifier la vie des © Faust Favart - PG Promotion

Et selon vous, quelles sont les thématiques de

patients, permettre à terme d’avoir une hospitalisation à domicile plus simple car le patient sera connecté avec l’hôpital, son médecin, l’ambulance, la pharmacie… Ce sont les outils de demain ! Ensuite le Développement Durable qui englobe non seulement le traitement des déchets mais aussi une gestion du personnel efficiente, des bâtiments intelligents, bien conçus… Nous avons créé un baromètre du développement durable en établissement hospitalier il y a quelques années. Les établissements de santé qui le souhaitent remplissent un questionnaire et cette année, 640 établissements y ont répondu soit 35 % de plus par rapport à l’année dernière. À partir de là, nous avons aussi créé les Trophées du développement durable et les

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DANS

l’éclairage hospitalier

L’expertise lumineuse

Philippe Laheux, « concepteur lumière » au sein du cabinet A.I.A. (Architectes Ingénieurs Associés)

DH MAGAZINE – Vous êtes « concepteur lumière » au sein du cabinet A.I.A. (Architectes Ingénieurs Associés). Quelles sont vos missions ? Philippe Laheux − Je suis en charge de la recherche, de l’application et de l’intégration des produits d’éclairage dans l’architecture. En ce qui concerne la conception de l’éclairage, mon rôle est également d’assurer une interaction entre l’architecture et l’ingénierie, de faire la « passerelle » entre ces 2 métiers qui, pour A.I.A., doivent fusionner. Avec 25 ans d’expertise au sein du groupe, je connais le fonctionnement des établissements, les habitudes des patients et des soignants. Je réfléchis à donner un caractère « hôtelier », agréable, « design » tout en respectant les contraintes techniques et la qualité de l’éclairage qui doit intégrer les exigences des normes françaises et européennes. L’éclairage est différent d’un établissement à un autre ? Bien entendu ! Il faut prendre en compte l’identité de nos clients, la spécificité des lieux (chambres, blocs opératoires, zones de circulation…), la couleur des murs, le budget, les moyens techniques… Plusieurs solutions peuvent répondre aux besoins des directeurs hospitaliers et nous sommes là pour leur apporter un résultat architectural homogène, esthétique en tenant compte du coût d’investissement et de maintenance. Essayez-vous de privilégier des produits étudiés et fabriqués en France ? Dans la mesure du possible, oui ! Après étude des caractéristiques photométriques, du rapport qualité/prix et des aspects esthétiques, si le produit français satisfait à tous ces critères, il est évident qu’il est plus logique de travailler avec une entreprise française qui, par ailleurs, maîtrisera parfaitement les normes françaises draconiennes ! Tout en conservant votre indépendance vis-à-vis des constructeurs, il vous arrive de faire appel à un savoir-faire externe spécialisé. Je pense notamment à TLV Healthcare, fabricant français de gaines têtes de lit, bras et poutres pour les Plateaux techniques et luminaires étanches. Il est parfois important de partager les compétences et de faire converger les expertises – le savoir-faire technique de TLV Healthcare et la touche architecturale d’A.I.A. TLV Healthcare, appuyé par le Groupe Trato-TLV (spécialiste de l’éclairage), répondait à nos attentes fortes sur les aspects techniques, professionnels et qualitatifs.

Une lumière bien positionnée, douce et tamisée favorise le bien-être, l’apaisement et diminue le stress. Mais comment l’intégrer dans l’architecture hospitalière tout en gardant à l’esprit les contraintes réglementaires, la nécessité d’un éclairage optimal dans les blocs opératoires et les besoins pratiques des patients dans les chambres ? Réponses avec Philippe Laheux. © Guillaume Satre

l e s pr o s en par l ent

Dire d’expert

Hôpital Privé Robert Schuman

C’est pourquoi nous leur avions demandé, entre autres, de développer un luminaire étanche doté d’une tranche rétro-éclairée : le STAGNO AEC, luminaire qui allie qualité d’éclairage, esthétisme, matériaux haut de gamme, simplicité de pose et de maintenance. Ce luminaire est aujourd’hui largement utilisé dans de nombreux établissements de santé. La LED prend-elle de l’ampleur sur le marché hospitalier ? Dans quelle mesure vos prescriptions s’appuient-elles sur les nouvelles technologies d’éclairage comme la LED et la gestion d’éclairage ? Face aux exigences environnementales, la question de l’utilisation de la LED ne se pose plus ! Cette technologie est aujourd’hui maîtrisée. Durée de vie, maintenance, miniaturisation, qualité : les bâtiments de demain seront « tout LED ». Le seul frein reste le coût d’achat mais il est possible de l’introduire progressivement. La gestion de l’éclairage est un domaine tout aussi important. À juste titre, les détecteurs de présence ont fait leur entrée dans les établissements de santé et les détecteurs de luminosité qui adaptent la puissance de l’éclairage en fonction de la lumière naturelle déjà présente, suivent le même n chemin !

Frank Chantelot

Directeur Commercial TLV

« TLV propose à ses partenaires de nouvelles technologies apportant toujours plus de confort aux patients et aux professionnels de santé. À ce titre, notre dernière innovation participera à procurer sérénité et énergie aux patients grâce à son système d’éclairage basé sur le cycle circadien et permettant leur pré réveil, allégeant ainsi les tâches des équipes soignantes. » DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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DANS

la blanchisserie

Danube est le spécialiste français

de la machine aseptique depuis plus de 15 ans et des sécheuses repasseurs depuis plus d’un demi siècle. Qualité & savoir-faire Fort de plus de 65 ans d’expérience dans le domaine de la blanchisserie industrielle, DANUBE INTERNATIONAL est reconnu comme l’un des leaders de la profession. Position justifiée par la qualité et les performances des équipements mais aussi par les solutions très complètes proposées aux utilisateurs. Dans le cadre de la mise en place d’une blanchisserie, DANUBE INTERNATIONAL vous guide vers les solutions les plus adaptées à vos besoins et souhaits (nombreuses références en hôpitaux, EHPAD, ESAT, Établissements Sanitaires et Sociaux, hôtels et restaurants français).

Hygiène & innovation Pour lutter contre la recontamination du linge à l’hôpital, dans les salles blanches, maisons de retraite, centre de soins, industries pharmaceutiques, DANUBE INTERNATIONAL a mis au point dès 1984, une gamme de laveuses essoreuses type « ASEP » appelées aussi « Barrière » destinées à être placées à travers une cloison. Ce procédé est une aide considérable pour l’application de la norme RABC (NF EN 14065), et apporte au personnel utilisateur : sécurité, hygiène, ergonomie et productivité.

Les centres hospitaliers de Poitiers, Orléans, Rennes, Avignon, Rumilly et autres ont fait le choix d’utiliser les machines aseptiques DANUBE de la gamme ASEP afin de traiter le linge « à part » qui ne peut passer dans les tunnels et nécessite un traitement particulier plus soigné. De nombreux autres hôpitaux ont également opté pour une blanchisserie DANUBE : Vendôme, Le Vigan, Montargis… En choisissant DANUBE INTERNATIONAL, vous faites le choix d’offrir au personnel utilisateur : sécurité, confort, ergonomie et productivité très appréciée. - les EHPAD Nous accompagnons les projets qui visent une prestation de qualité professionnelle. C’est grâce à cela que nous avons pu aider la maison de retraite de Vieillevigne (44) à recréer une blanchisserie moderne tout en améliorant l’hébergement et l’accueil des résidents dans un ensemble architectural fortement repensé. Au service des EHPAD depuis la création de notre gamme de machines compactes MED. © DR

l e s pr o s en par l ent

Dire d’expert

Économie & énergie Danube International respecte l’environnement et toutes les exigences légales et réglementaires en la matière. En tant qu’entreprise ECO-citoyenne, Danube s’engage à : • INNOVER pour toujours optimiser les consommations d’énergie, réduire la consommation énergétique en utilisant des ressources appropriées, garantir autant que possible le recyclage et l’élimination des matériaux résiduels en fin de vie des machines. • AMÉLIORER ses procédures environnementales par une étroite collaboration avec ses fournisseurs. • FORMER et SENSIBILISER son personnel aux problèmes environnementaux. La garantie d’un industriel fiable et performant. DANUBE est référencé dans de nombreux secteurs d’activité comme : - le domaine hospitalier Danube International a réalisé la première blanchisserie interhospitalière HQE (Haute Qualité Environnementale) à Plaisir-Grignon (78). Parce que l’hygiène doit rester votre priorité absolue, nous avons la solution idéale pour éviter tout croisement linge sale – linge propre dans les blanchisseries et éviter, à ce stade, sa recontamination.

Installés dans toutes les régions de France, un très grand nombre d’EHPAD sont équipés de machines aseptiques compactes DANUBE pour traiter le linge des résidents en assurant la garantie d’hygiène. Danube International accompagne tous vos projets pour réaliser une blanchisserie intégrée RABC. Nous vous proposerons une gamme de machines adaptée à vos besoins et respectant scrupuleusement vos exigences de volume, de normes, de qualité et d’environnement.. Les établissements de Favergues et Chevaline nous ont fait confiance, « Nous voulions obtenir un bon rapport qualité-prix… Le but de cette blanchisserie est à terme de supprimer totalement les petites machines fonctionnant sur les autres sites et la sous-traitance, et de centraliser le traitement du linge sur Faverges. » expliquait Michel Beziat, directeur des deux établissements. Avec également une large gamme de séchoirs jusqu’à 75 kg pour une finition complète, offrez-vous la tranquillité n “Made in France”.

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DANS

Dire d’expert l’assistance médicale Le bon spécialiste... ...au bon moment Le recrutement médical se sophistique. Alors que les difficultés de recrutement se font grandissantes dans certaines spécialités, certains proposent des solutions d’accompagnement adaptées à l’exigence de résultats des hôpitaux. C’est le cas de MédiOffice, « la bourse du remplacement » pour les professionnels de la santé, qui a étendu son champ d’activités au recrutement en qualité de chasseur de tête et même au conseil. Comment se comporte la demande actuelle en termes de recrutements et de remplacements ? Le marché français n’est pas au mieux, mais nous rencontrons beaucoup de demandes dans certaines filières. Ainsi, l’anesthésie représente 33,5 % de ces demandes. Viennent ensuite les urgentistes et smuristes (23 %), la radiologie, qu’il s’agisse d’IRM ou de scanners (11 %), puis la gynécologie obstétrique (5,8 %), la cardiologie (4,3 %) et la pédiatrie (4,25 %). Le reste se répartit entre pneumologues, généralistes ou orthopédie. Aujourd’hui, les hôpitaux ont donc un grand besoin en anesthésistes. Mais les besoins et la demande évoluent de façon exponentielle. Le recrutement reste problématique pour la plupart des hôpitaux français dans les filières que vous évoquez. Ne l’est-il pas aussi pour vous ? Nous rencontrons bien sûr des difficultés nous aussi, mais présentons l’avantage de regrouper beaucoup de praticiens qui ont souhaité sortir un peu du cadre hospitalier pour gagner en liberté ou mener à bien des projets personnels, et ce tout en conservant leur activité. Notre démarche présente également un intérêt financier. La négociation est immédiate et, après étude de coût lissé sur une année, nous ne sommes guère plus chers qu’un praticien travaillant sur le mode classique. Sur le contexte, il est vrai que le numerus clausus du début des années 1980 contribue désormais aux difficultés de recrutement, alors que nous traversons une période de « papy boom » la relève a du mal à être assurée sur les spécialités qui requièrent des Bac + 12 voire 14. Vous proposez également des prestations de conseil. Que recouvrent-elles ? Il s’agit essentiellement de missions au coup par coup, d’audits réalisés par des médecins spécialisés dans l’évaluation interne du coût d’une structure. Nous avons mené ce genre de démarche avec succès, et éclairé certains établissements avec un regard extérieur et nouveau. Car dans l’hôpital, les choses sont bien pensées, mais certains virages n’ont pas toujours été pris au bon moment : le regard extérieur s’avère alors pertinent pour proposer des recommandations sur la réorganisation ou le recentrage d’un bloc afin d’en améliorer l’efficacité voire la rentabilité. Bien que les regards extérieurs ne soient pas toujours bien perçus en France, les hôpitaux de proximité, voire les CHG avec lesquels nous avons travaillé, nous remercient souvent pour cet apport. Comment vous distinguez-vous des concurrents qui interviennent sur le marché du recrutement ? À travers notre activité de chasseurs de têtes, nous installons des médecins pour un certain temps dans les hôpitaux par le biais du remplacement. Si tout se passe bien, l’expé-

rience se conclut plus facilement sur un recrutement. Les chasseurs de têtes classiques peuvent manquer de reculs et recrutent la plupart du temps des médecins à l’étranger, ces derniers ne restant pas toujours en poste et n’ayant pas forcément le niveau d’études de leurs homologues dans l’Hexagone. Et leur offre n’incorpore pas toujours cet aspect « remplacement », qui permet de jauger de l’adéquation entre le besoin et le praticien proposé. Les cabinets de recrutement sont astreints à une obligation de moyens. Comment garantir le résultat dont ont besoin les hôpitaux et assurer en même temps votre juste rémunération ? Les chasseurs de tête ont toujours tendance à « jouer au poker », à se faire rémunérer un acompte très conséquent d’abord et à lancer la mission ensuite. Notre vision est différente : le médecin candidats que nous missionnons pour des remplacements peut être tenté par un hôpital. Nous le perdons alors comme remplaçant, mais laissons un résultat durable pour la structure cliente, lorsque la période d’essai et la satisfaction sont réciproques entre celle-ci et le praticien, comme cela arrive dans 95 % des cas. Concernant nos honoraires, ils sont perçus toujours en fin de mission, et ou au prorata temporis. Nous avons souhaité innover par rapport à ce qui se pratique et instaurer un partenariat gagnant-gagnant, sans que le client soit obligé d’avancer des sommes conséquentes sans garanties. Certains hôpitaux moins attractifs ne rendent-ils pas la tâche plus ardue ? Certains établissements nous demandent des spécialités pour lesquelles il est parfois difficile de leur répondre. Dans ce cas, nous menons la recherche et les sollicitons ensuite lorsque nous trouvons un profil adapté.

Quelques chiffres 18 + de 5 500 2 500 300

Comment va l’activité de MédiOffice ? Quelles ans d’expérience sont les perspectives de croissance pour vous ? Missions/An Nous constatons que la demande progresse. Candidats actifs Nous avons davantage de établissements clients clients mais nos marges Site interactif : www.medioffice.com diminuent. Notre métier demande une réactivité appuyée d’une logistique et d’un outil informatique performant et évolutif. Depuis peu, nous voyons apparaître sur le marché, des pseudos sociétés d’intérim, qui, en fait, déclarent le salaire minimum imposable du médecin et réalisent par les frais de déplacement fantaisistes ou primes diverses non réglementaires des artifices pour échapper aux charges patronales et salariales. Par ces moyens détournés, ces sociétés peuvent en effet être concurrentes et proposer des tarifs avantageux non tenables compte tenu des conséquences fiscales. Nous sommes d’autre part satisfaits de la volonté actuelle du ministère de la santé d’ouvrir le numerus clausus pour pérenniser la notion de Service Public, à lan quelle nous sommes tous très attachés. med i o f f ce

l e s pr o s en par l ent

Questions à Xavier Brion, Directeur commercial de la société MédiOffice

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Rubrique DH

Rubrique DH : Développement durable

Développement durable Haro au gaspillage alimentaire ! Des assiettes trop pleines pour certains, des textures alimentaires inadaptées pour d'autres, des plats sans goût, autant de raisons de jeter à la poubelle. L'hôpital est le grand restaurant de France qui nourrit, déjà en court séjour plus de 12 millions de patients par an. De quoi s'interroger sur les gaspillages alimentaires ! Entre éducation en santé et réduction des déchets, la restauration à l'hôpital est au cœur d'une démarche de développement durable.

Ce dossier a été réalisé par le C2DS – Comité pour le développement durable en santé. Chef de rubrique : Olivier Toma, président du C2DS. Le dossier a été coordonné et écrit par BVM communication. Le C2DS est une association de loi 1901 à but non lucratif créée en 2006 et qui compte aujourd’hui plus de 400 établissements adhérents – publics, privés, ESPIC – mobilisés par le développement durable. L’objectif du C2DS est d’informer, de sensibiliser et d’accompagner les acteurs de la Santé aux avantages des bonnes pratiques du Développement durable afin de mieux maîtriser l’impact humain, environnemental et économique de leur activité. Contact : contact@c2ds.eu - Tel/fax : 02 47 30 60 34 - www.c2ds.eu

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Rubrique DH : Développement durable

Un cercle vertueux appétissant

Olivier Toma président du C2DS Chef de rubrique

Les établissements de santé sont le plus grand restaurant de France et servent des millions de repas et de collations chaque année. Produite par une équipe en interne ou en prestation externalisée, une bonne restauration est un point majeur du bien-être des patients. Les repas rythment la journée et constituent un moment de réconfort. Au-delà, en établissement de soin, l'alimentation est un premier geste de santé. Le gaspillage alimentaire concerne chacun d'entre nous mais prioritairement la restauration collective. Les établissements peuvent jeter jusqu'à 10 % des repas confectionnés ce qui génère des tonnes de biodéchets coûteux à gérer et à éliminer. Imaginons que les établissements poursuivent leur politique de développement durable jusqu'à recycler ces déchets auprès de producteurs agricoles locaux, achètent en retour leur production et ainsi bâtissent une véritable économie circulaire. Un rêve ? Non une réalité, par exemple à la clinique du Parc à Toulouse. Pour limiter le gaspillage alimentaire, trois impératifs : analyser précisément le gas-

Journée de pesée du C2DS

pillage [cf. encadré] ; changer les mentalités des professionnels et des usagers ; faire évoluer les pratiques. Qualité et réduction du gaspillage sont liées : plus les repas sont savoureux, plus ils sont consommés, moindres sont les retours plateaux, et enfin plus importante est la satisfaction de l'équipe de restauration ! Un cercle vertueux appétissant, non ?

Le C2DS lance un appel de collecte de données de biodéchets sur 24h d'activité normale. Les biodéchets pesés sont issus de la production des cuisines et des plateaux repas servis aux résidents et salariés (consommés ou non). Pour les établissements non adhérents au C2DS qui souhaitent participer à cette photographie nationale, merci de contacter : christine.belhomme@c2ds

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Rubrique DH : Développement durable

Un combat prioritaire Le rapport « Pertes et gaspillages alimentaires » du ministère de l'Agriculture dont la dernière version a été publiée en novembre 2011 pose le postulat de départ : « de tous les métiers de la restauration collective, la restauration collective en établissements de santé et médico-sociaux enregistre le plus gros volume de pertes et gaspillages ». Les pertes et gaspillages alimentaires moyens sont en effet évalués à 264 g par personne et par repas, et atteignent même 362 g pour un court séjour à l’hôpital contre 166 g pour un séjour long ou au sein d’une maison de retraite. Si c’est un constat amer, ce n’est pas pour autant une fatalité. Des solutions existent pour lutter contre cette gabegie, tour d’horizon…

sionnement, la taille des portions et la possibilité d’acheter des portions adaptées aux convives, la sensibilisation des clients, équipes et convives, les processus de préparation des repas. • La lutte contre le gaspillage alimentaire dans les plans relatifs à la prévention des déchets. C’est devenu depuis un axe d’action spécifique du Plan national de la production des déchets 2014-2020 assortis d’une série d’indicateurs pour son suivi. • Les entreprises qui ont à rendre des comptes en matière de RSE (Responsabilité sociétale des entreprises) mentionnent dans leurs rapports les mesures de prévention des déchets, notamment celles concernant le gaspillage alimentaire. Le gaspillage alimentaire est un dossier qui semble être pris à bras le corps par le gouvernement français et les dispositions prises semblent aller dans le bon sens. Il est à noter qu’au niveau européen, 2014 est l’année eu-

Du côté

ropéenne de la lutte contre le gaspillage alimentaire et que de nombreuses initiatives y sont soutenues à cette

du gouvernement

occasion.

Le gouvernement Hollande, par le biais du ministre

Du côté

délégué à l’agroalimentaire, Guillaume Garrot, a lancé mi-2013 le Pacte national de lutte contre le gaspillage

des établissements de santé

alimentaire. L’objectif est ambitieux : diminuer par

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deux le gaspillage alimentaire en France d’ici à 2025.

Didier Girard, chef du service restauration au centre

La démarche est globale et concerne tout un chacun :

hospitalier du Mans, est à l’origine d’une initiative géné-

producteurs, grandes surfaces, restaurateurs, associa-

reuse pour lutter contre le gaspillage alimentaire : redis-

tions, consommateurs. Sur les 11 grandes mesures de

tribuer des repas aux personnes en situation de grande

ce pacte, 3 concernent plus directement les établisse-

précarité. Partant du constat que 4,2 millions de tonnes

ments de santé :

de nourriture finissent chaque année à la poubelle, il a

• Mise en place de clauses relatives à la lutte contre

mené une étude sur plusieurs mois pour évaluer préci-

le gaspillage dans les marchés publics de la restauration

sément le gaspillage. Il est arrivé à la conclusion que 25 à

collective, ces clauses pourront concerner : l’approvi-

30 repas complets pouvaient être récupérés chaque soir

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Rubrique DH : Développement durable

Le gaspillage alimentaire est un dossier qui semble être pris à bras le corps par le gouvernement français et les dispositions prises semblent aller dans le bon sens. et offerts à des personnes en situation de précarité. La redistribution mise en place en octobre 2013 est assurée par l’association de l’Ordre de Malte et c’est à terme plus de 7 000 repas qui pourront être distribués chaque

tion sont compostés puis utilisés par l’ESAT du Razès

année. Cette initiative est une première en France et ne

à Nailloux (un Établissement et Service d’Aide par le

demande qu’à être reproduite…

Travail spécialisé dans le maraîchage) qui accompagne

Au CHRU de Lille, on sert 2,5 millions de repas par an et

professionnellement des personnes en situation de han-

la lutte contre le gaspillage alimentaire est une priorité.

dicap. Les fruits et légumes produits par l’ESAT en agri-

D’un côté, on privilégie les contenants alimentaires réu-

culture biologique reviendront par la suite dans l’assiette

tilisables (utilisation d’assiettes en porcelaines, de bacs

des patients et du personnel de la clinique Pasteur. Un

gastronomiques en inox, etc.) et de l’autre on récupère

cercle vertueux donc, qui fait appel aux trois compo-

les reliefs des déchets alimentaires pour les transformer

santes du développement durable : économique, sociale

en biogaz. Le circuit est simple, les déchets alimentaires

et environnementale !

provenant des chambres des patients, du self et des cuisines sont collectés et centralisés, puis stockés et séchés dans un tank de récupération. Chaque semaine, les déchets sont enlevés par un camion citerne et transportés dans un centre de valorisation pour être trans-

Des initiatives décalées

formés en biogaz. C’est 95 % des reliefs des déchets alimentaires du CHRU de Lille qui sont collectés et qui

Certaines pratiques de lutte contre le gaspillage alimen-

sont transformés en biogaz pour faire rouler les bus de

taire, qui sortent certes du cadre hospitalier, sont remar-

la métropole lilloise !

quables de par leur ingéniosité. Ainsi, le collectif « Disco Soupe », concept venu d’Allemagne et désormais présent dans une soixantaine de pays, veut sensibiliser le

économie

public aux problèmes du gaspillage alimentaire. L’idée est

circulaire

du marché et la distribuer aux passants au son d’une

simple : cuisiner une soupe populaire grâce aux déchets musique endiablée. Notons encore zero-gachis.com,

Notion relativement récente, l’économie circulaire dé-

un site internet innovant qui recense les produits démar-

signe un concept économique qui s’inscrit dans le cadre

qués approchant de leurs dates limite de consomma-

du développement durable. Elle a pour objectif d’opti-

tion, dans les supermarchés partenaires du site.

miser les flux de matières et d’énergie, tout en limitant fortement la consommation et le gaspillage, le tout dans

Des initiatives de lutte contre le développement durable

un mode de fonctionnement quasi-cyclique inspiré de

éclosent un peu partout : dans la sphère politique, éco-

celui des écosystèmes.

nomique, citoyenne. Il est essentiel que les établisse-

À Toulouse, la clinique Pasteur, avec l’appui de la plate-

ments de santé qui n’ont pas encore pris les devants

forme de compostage « Cler Verts », a mis en place

s'attellent à ce combat. Les formes sont nombreuses,

un tri des déchets organiques issus de son service de

il ne reste plus qu’à choisir celle qui convienne le mieux

restauration. Les déchets organiques de la restaura-

à sa structure et laisser cours à son inventivité.

n

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Rubrique DH : Développement durable

Pour lutter contre le gaspillage alimentaire, il faut redonner du sens et du goût ! À l'Oregon Health and Science University, le CHU de

ger ni sur la fraîcheur et le goût, ni sur les besoins de

Portland aux États-Unis, le service de restauration sert

santé. Nous servons par exemple du pain sans sodium

3 200 commandes par jour. Il est un élément essentiel

mais qui a bon goût ! Nous achetons le plus possible "lo-

d'une démarche de développement durable audacieuse.

cal", même si l'essentiel de l'approvisionnement passe

L'approche est simple : pour faire évoluer les mentalités, les pratiques et lutter contre le gaspillage alimentaire, il faut redonner du sens et du goût. Filet de flétan poché à l'huile d'olive et aux pommes de terre nouvelles, luigine aux fruits de mer... Le menu de la cafétéria s'éloigne du hamburger-frites-coca. « La café-

L'établissement du CHU de Portland aux USA a développé un programme de formation graduée de son personnel qui permet aux employés de se qualifier par étape, cook 1, cook 2, etc., avec une augmentation de salaire.

téria accueille le personnel, les familles de patients et tous ceux qui ont compris que l'on y mangeait bien, à

par des centrales. Nous avons essayé d'éliminer tous les

des prix raisonnables » explique Steve Hiatt, directeur

produits laitiers provenant de vaches qui prennent des

du service restauration. « Il y a dix ans, la majorité de

hormones de croissance. Tous les ans, OHSU achète

la nourriture provenait de boîtes de conserve, ou de

pour un demi-million de dollars de fromage. Cela fait de

plats tout prêts en grande quantité. Nous sommes reve-

nous un interlocuteur pertinent sur ce thème ».

nus aux fondamentaux de notre métier, la cuisine. Tout

Au final, le chef a composé 120 menus différents car

ce qui arrive dans les assiettes doit être préparé ici ».

cette diversité est importante pour les patients souvent en perte d'appétit. OHSU a également réfléchi à la ma-

L'approche est simple : pour faire évoluer les mentalités, les pratiques et lutter contre le gaspillage alimentaire, il faut redonner du sens et du goût.

nière de consommer. Ainsi les enfants qui ont l'habitude de manger avec leurs amis sont rétifs à manger seuls dans leur chambre. « Nous avons trouvé des salles où ils mangent ensemble ; cela a eu un effet immédiat sur les quantités qu'ils consomment. En recréant une atmosphère sociale, on rend à la nourriture sa dimension

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Pour cela, l'établissement a développé un programme

d'hospitalité ».

de formation graduée de son personnel qui permet aux

Le service de restauration de OHSU, qui a replacé l'ali-

employés de se qualifier par étape, cook 1, cook 2, etc.,

mentation au cœur de la santé, est un vrai succès écono-

avec une augmentation de salaire. Par ailleurs, un room

mique puisque la cafétéria dégage des profits. La qualité

service a été mis en place. Les patients prennent leurs

des prestations a par ailleurs permis de réduire sensible-

téléphones et commandent leur nourriture, n'importe

ment le gaspillage alimentaire. De plus, les déchets sont

quand entre 6 heures du matin et 8 heures le soir, et la

récupérés par une entreprise spécialisée qui les trans-

livraison est garantie au maximum une demi-heure plus

forme en compost, engrais naturel utilisé pour fertiliser

tard. Les menus de l'hôpital sont élaborés par le chef

les jardins de l'hôpital.

cuisinier, en étroite collaboration avec les médecins et

Dans la même optique, l’Hôpital Saint Joseph Mercy à

nutritionnistes. « Faire de la nourriture délicieuse, qui

Ann Arbor dans le Michigan est l’un des quelques hôpi-

soit aussi bonne pour la santé est parfaitement possible.

taux américains à disposer de son propre jardin équipé

Cela demande juste beaucoup de travail et de réflexion

de grandes serres pour approvisionner l’hôpital en fruits

et surtout pas de compromis. Nous ne pouvons transi-

et légumes frais. Un marché hebdomadaire pour les pa-

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Rubrique DH : Développement durable

Les 9 points de la charte Healthy Food in Health Care La charte "Healthy Food in Health Care" a été lancée en 2006, signée depuis par des centaines d'hôpitaux américains qui marquent ainsi leur engagement pour la production et la délivrance d'une médecine préventive. Ils s'engagent sur 9 points : • travailler avec des producteurs et fournisseurs locaux ; • encourager les produits sans pesticides, hormones ni antibiotiques ; • favoriser les fruits et légumes ; • réduire les produits gras et sucrés ; • mettre en œuvre une démarche d'achats responsables ; • communiquer vers l'extérieur et en direction des patients sur la démarche et les actions ; • produire un reporting annuel ; • réduire leurs déchets ; • favoriser les producteurs et fournisseurs qui développent une démarche RSE.

En revanche, le Royaume-Uni fait figure de mauvais élève. Un article du Guardian de juillet 2013 révélait que les hôpitaux britanniques jettent près de 82 000 repas par jour et certains hôpitaux jusqu'à 30 % de leur nourriture.

Zéro déchet organique

tients et riverains est même organisé ! Ces hôpitaux ont tous deux signé la charte de Health Care without Harm sur la restauration, garant d’une nourriture saine dans les hôpitaux américains (voir encadré 1). En revanche, le Royaume-Uni fait figure de mauvais élève. Malgré une nouvelle campagne menée par 98 or-

L’hôpital Universitaire de Cleveland a choisi d’adopter la « pyramide de solutions » proposée par l’Agence américaine de protection de l’environnement pour réduire et réutiliser les déchets alimentaires. • Évaluer et ajuster les besoins en nourriture à transformer ou stocker en amont • Donner le surplus de nourriture à des structures caritatives • L’utiliser pour d’autres fins : nourriture pour animaux, carburant et autres transformations pour l’industrie, compostage, engrais.

ganisations en faveur de l’introduction de critères qualité, environnementaux et éthiques dans l'alimentation

Pyramide de revalorisation des surplus alimentaires

servie dans les hôpitaux du système de santé public britannique, les résultats sont extrêmement décevants. Un sondage révèle que deux tiers des personnels des

ier

lég

fois parrainées par des chefs étoilés, pour améliorer la

i riv

de leur nourriture. Près de 21 initiatives volontaires, par-

àp

82 000 repas par jour et certains hôpitaux jusqu'à 30 %

ion

révélait que les hôpitaux britanniques jettent près de

lut

à leurs patients ! Un article du Guardian de juillet 2013

So

hôpitaux ne mangeraient pas la nourriture qu’ils servent

qualité de la nourriture à l’hôpital ont été tentées depuis 1992, sans grand succès. Tous s’accordent à dire que les problèmes sont multiples : logistique, appel à des prestataires, prise en compte des régimes et quanti-

n

er

taux, à l’instar de ce qui se fait déjà dans les écoles.

vit

pose des standards qualité obligatoires à tous les hôpi-

àé

et dans le Pays de Galle, il est temps que Londres im-

ion

celle de l’hôpital, et malgré de bons élèves en Écosse

lut

la nourriture servie en prison a meilleure presse que

So

tés adaptées à chaque patient, etc. Dans un pays où

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

43


Rubrique DH : Développement durable

Personnels de santé : la qualité et la justesse de l'alimentation sont intimement liées à la réduction du gaspillage alimentaire. Environ un tiers du million deux cent mille des professionnels de santé se restaurent sur leur lieu de travail. Comment veiller à l'adéquation entre les besoins des salariés et les prestations offertes en particulier lorsqu'il s'agit de travail à horaires décalés ? D'abord mesurer. En 2008, dans le cadre du Plan national nutrition santé, le CHU de Brest lançait une enquête : « nous avons mis en place un programme de nutrition santé, sur la base d'une étude de comportement alimentaire de 200 salariés de l'hôpital, un échantillon représentatif de la sociologie de l'établissement. Nous avons observé leurs habitudes alimentaires avec un souci particulier porté aux personnes qui travaillent en horaires décalés. Et il y avait beaucoup à faire ! » déclare Chris-

« Les travailleurs de nuit se posent quasiment tous la question de leur alimentation. Fautil manger le soir, ou vaut-il mieux attendre minuit, faut-il prendre un petit déjeuner avant d'aller se coucher le matin ? » lère la perturbation du cycle. Les plages horaires des prises de repas sont larges et parfois déstructurées. Elles sont rythmées par l'heure de réveil en journée et la nuit par la charge de travail. Les établissements de soins ont un formidable challenge à relever : veiller à la justesse et la qualité de l'alimentation de leurs personnels, qui avertis, ne sauront à leur tour que mieux impulser une éducation en santé auprès des patients.

n

telle Collec, directrice adjointe du CHU de Brest. « Les travailleurs de nuit se posent quasiment tous la question de leur alimentation. Faut-il manger le soir, ou vaut-il mieux attendre minuit, faut-il prendre un petit déjeuner

44 %

avant d'aller se coucher le matin ? » Une brochure, un quizz et un programme d'actions étaient mis en place, déclenchant une réelle prise de conscience et d’intérêt du personnel pour une alimentation saine et équilibrée... pour eux-mêmes !

41 %

estiment ne pas avoir une alimentation équilibrée

souhaitent disposer d'informations complémentaires sur l’alimentation durant la nuit

À partir du questionnaire de référence du CHU de Brest, Source : enquête C2DS, 709 répondants, 14 établissements adhérents participants 2010

le C2DS lançait une enquête similaire : 709 questionnaires renseignés recueillis par les 14 établissements adhérents participants. Les résultats confirment que le travail de nuit influence la qualité des repas. Ainsi, le grignotage remplace parfois un vrai repas. Le pain, les gâteaux secs, thé) et les sodas « light » font partie du grignotage de nuit. La consommation d’excitants (café, thé, soda avec caféine) est fortement présente auprès des professionnels travaillant la nuit. Or, cette consommation entraîne un retard dans la phase de sommeil qui accé-

44

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

54 %

des répondants souhaitent que l’établissement propose un plateau repas

© B. Courcot

les barres chocolatées, les boissons chaudes (café ou


Rubrique DH : Développement durable

Définition

du gaspillage alimentaire Toute nourriture destinée à la consommation humaine qui, à une étape de la chaîne alimentaire, est perdue, jetée, dégradée.

Le gaspillage alimentaire en Europe

CHIFFRES CLEFS alimentation & environnement Il faut aujourd’hui environ 5 fois plus d’énergie pour produire une calorie alimentaire que dans les années 40.

Gaspillage alimentaire dans l’UE des 27 :

89 millions de tonnes par an

(soit 179 kg par habitant) Prévisions pour 2020 (à défaut de mesures) :

126 millions de tonnes

(soit une hausse de 40 %)

L’alimentation représente aujourd’hui plus d’un tiers de nos émissions de gaz à effet de serre. Plus de 70 % de l’eau consommée dans le monde, l’est par l’agriculture.

alimentation & maladie Réduire la consommation de sel d’environ 3 grammes par jour aux États-Unis permettrait de prévenir la survenue de 100 000 crises cardiaques et 92 000 morts.

14 %

39 % industrie agroalimentaire

secteur de la restauration Source : Commission européenne

© B. Courcot

CHIFFRES CLEFS

5%

détaillants

42 % ménages

L’OMS estime que les facteurs alimentaires sont responsables de 30 % des cancers en Occident.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

45


2014 : Pragmatisme et réalisme Le plan HÔPITAL NUMÉRIQUE, doté de 430 millions d’euros, a pour objectif de faire passer un nouveau cap aux systèmes d’information de santé. L’atteinte d’un certain nombre de prérequis techniques et organisationnels conditionne l’obtention de Un dossier coordonné par subventions, axées sur des Vincent Trély, Président de l’APSSIS domaines fonctionnels définis. Urbaniser le système d’information est un enjeu fort, tant en terme de qualité d’usage qu’en terme économique. Les premières briques de cette urbanisation sont constituées par l’annuaire, la gestion des identités et la mise en condition d’interopérabilité. À l’heure de l’ouverture des SI vers les partenaires extérieurs concourant au parcours de soins, ces éléments sont essentiels, tout comme la sécurité de l’ensemble, qui doit apporter fiabilité et confiance. Enfin, les grands progiciels médicaux ou médico-économiques, déjà installés ou en cours de déploiement, évoluent et doivent s’adapter à ce besoin d’ouverture. L’hospitalo-centrisme explose pour ouvrir la porte aux territoires numériques de santé. DH magazine fait le point. 46

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Rubrique DH : informatique

Informatique de Santé

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48

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Rubrique DH : informatique

Les EAI : un support indispensable à l’interopérabilité L’usage primaire de l’EAI est souvent perçu comme l’outil de distribution de l’identité et mouvements du patient, mais il peut et devrait couvrir tout le champ des échanges, qu’ils soient administratifs ou médicaux.

Les systèmes d'information hospitaliers sont

convient d’être vigilant sur la mise en œuvre de celles-

constitués de "briques" fonctionnelles, ce qui

ci. L’orchestration et la supervision des flux doivent être

les rend complexes et nécessite de nombreuses

considérées comme des vecteurs d’urbanisation du SIH.

interfaces spécifiques. Comment analysez-vous

Malgré tout, l’évolution de la sphère géoéconomique

cette complexité ? Les normes sont-elles insuffisantes ? L’atomisation des briques fonctionnelles du SIH est historique et liée à la complexité même de l’activité hospitalière. Celle-ci, associée à l’hyper spécialisation des plateaux techniques, comporte des challenges délicats

Entretien avec François Decourcelle Expert ENOVACOM

impose d’autres réflexions et l’adoption de nouvelles normes. L’évolution vers la mutualisation des moyens et l’hôpital étendu devront prendre en compte de nouveaux mécanismes d’interopérabilité sémantiques. La mise en œuvre de référentiels communs permettra de mieux se comprendre.

à maîtriser pour un même industriel avec une vision unifiée. Les plateaux techniques vivent dans leurs propres écosystèmes techniques et normatifs comme la radiologie :

L'EAI, dans cette configuration, est un composant essentiel du système d'information. En quoi

interfaçage fin des modalités d’acquisition d’images,

apporte-t-il une réponse opérationnelle à ces

de worklow du diagnostic et d’archivage des images et

besoins d'échanges inter applicatifs ?

comptes-rendus. Ces interfaces sont principalement re-

L’EAI est conçu pour répondre aux besoins d’échanges

layées en termes d’interopérabilité par la norme DICOM.

inter applicatifs. Pour peu qu’il soit nativement positionné sur le domaine médical en embarquant de manière

La logique de facturation à l’acte engendre également

exhaustive les normes et protocoles usuels, cet outil

la mise en œuvre d’un écheveau de couches fonction-

devient la clé de voûte des échanges.

nelles plus ou moins intégrées. Elle nécessite aussi la L’usage primaire de l’EAI est souvent perçu comme

acteurs administratifs externes (CPAM, Trésor public,

l’outil de distribution de l’identité et mouvements du

mutuelles). Ces mécanismes impliquent une interac-

patient, mais il peut et devrait couvrir tout le champ des

tion forte entre les outils du domaine médical (pour la

échanges, qu’ils soient administratifs ou médicaux (pres-

remontée des actes), les outils de gestion administratifs

criptions et résultats d’examens, remontée d’actes, cir-

et financiers (pour la facturation et le recouvrement).

cuit du médicament, mouvements de stock).

Si les normes sont satisfaisantes pour permettre

Le rôle de l’EAI est également de fluidifier les échanges, en

une bonne compréhension mutuelle des systèmes, il

permettant l’adaptation des formats entre les applications,

communication des informations produites vers les

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49


50

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Rubrique DH : informatique

Le rôle de l’EAI est également de fluidifier les échanges, en permettant l’adaptation des formats entre les applications, propriétaires ou normées. Sa mission prendra également tout son sens s’il parvient aisément à transposer une norme vers une autre. ▲

propriétaires ou normées. Sa mission prendra égale-

ci n’a pas à investir sur un langage de programmation

ment tout son sens s’il parvient aisément à transposer

propriétaire.

une norme vers une autre.

Comment voyez-vous l'avenir des systèmes d'in-

Les services à valeur ajoutée d’un EAI sont également

formation de santé, dans un contexte d'ouver-

de donner, outre une bonne supervision globale en temps réel des échanges, une vision des informations échangées à l’ensemble des acteurs du SIH, tels que les exploitants informatiques ou fonctionnels métier. Enfin, l’EAI doit permettre d’appréhender facilement de nouveaux usages sans remise en cause de l’existant (envoi de SMS de confirmation de RDV, supervision de l’identitovigilance, alimentation des entrepôts décisionnel, dématérialisation des factures fournisseurs…)

ture vers le monde extérieur, d'interopérabilité et de sécurité ? Indéniablement le SI de santé se doit d’être à la foi hyper communiquant et plus intégré. Les référentiels communs et l’interopérabilité sémantique doivent permettre, dans un avenir proche, une meilleure harmonisation des échanges internes et surtout externes du SIH. Les normes existent, les cadres d’interopérabilité sont clairement définis au niveau national et bientôt au niveau Européen (tel que le projet européen ANTILOP). Il

Quelles sont les principales caractéristiques d'un bon EAI ? Un bon EAI se doit avant tout d’être polyglotte et polymorphe afin de répondre à l’ensemble des cas d’usages. Ce qui le rendra indispensable à l’ensemble des acteurs sera de pouvoir gérer également les échanges externes comme le DMP, la MSSanté, la médecine de ville, les laboratoires extérieurs, les échanges avec les acteurs institutionnels comme la CPAM, le Trésor Public. On ne

reste malgré tout un effort important de la part de l’ensemble des industriels pour faire converger les solutions vers ces nouveaux environnements. L’EAI sera, sans conteste, la pierre angulaire des échanges grâce à sa capacité d’adaptation et sa rigueur dans l’implémentation des logiques de traitement et de sécurisation des échanges. Les projets régionaux ou nationaux de référentiels de données centralisées (Maladies rares, observatoire

parle déjà plus d’EAI, mais de bus applicatif englobant

régional des urgences, Banque de données médi-

nativement les aspects de flux internes et externes.

cales…) pourront également bénéficier de l’apport des

Sur le plan purement technique, pouvoir réaliser les

EAI des établissements supportant entre autre les

interfaces graphiquement est indéniablement un plus.

futures normes structurantes comme HL7 Fihr. L’EAI

L’utilisation d’environnements normés pour les moteurs

doit permettre de relever les challenges de la conver-

de traitement (comme XML, XSD, XST, BPM2) rendent

gence de l’information et permettre la diffusion de

plus facile l’adoption de l’outil EAI par la DSI. Ainsi celle-

celle-ci dans le respect et au service du patient.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

51


l e s pr o s en par l ent 52

DANS

Dire d’expert

l’informatisation de la pharmacie

Du « circuit du médicament »

à la « prise en charge médicamenteuse »

Mathilde Emonet, Pharmacien au Centre Hospitalier de Blois

DH MAGAZINE – Qu’est-ce qui a poussé l’établissement à se lancer dans ce projet ? Mathilde Emonet − Le processus d’informatisation nous a été initialement imposé par décret et nous avons signé des engagements. C’était donc une volonté forte des instances ! Est-ce une bonne chose ? Oui, le principe de base de l’informatisation était de sup-

Dans le cadre d’un financement « hôpital 2012 » et d’un suivi par l’ANAP, le centre hospitalier de Blois se lance en 2008 dans l’informatisation du circuit du médicament. 6 ans après la mise en place des premiers groupes de pilotage, l’objectif est atteint : le Centre Hospitalier et les structures adjacentes (EHPAD, CAMSP…), soit plus de 1300 lits, vivent pleinement les bénéfices de cette informatisation. Entretien avec Mathilde Emonet – Pharmacien au Centre Hospitalier de Blois.

primer les retranscriptions. Les études de risques, notamment l’étude ENEIS, ayant démontré que la retranscription était une des principales sources d’erreurs. L’informatisation permet donc sur l’ensemble des étapes de la prise en charge médicamenteuse – prescription, dispensation, transport, administration – de disposer d’un support unique informatisé, partagé par tous les acteurs. Votre choix s’est porté sur le logiciel Pharma de Computer Engineering. En quoi correspondait-il à vos attentes ? Après un appel d’offres au cahier des charges détaillé, le choix a été fait en pluridisciplinarité (informaticiens, directeurs, pharmaciens, médecins et soignants), avec une convergence de vues en termes d’ergonomie, de fonctionnalités et de coût. Et aujourd’hui, quel est votre retour ? Pharma est un logiciel plutôt simple et intuitif avec des spécificités fines, caractéristique des logiciels dits « métiers ». De la prescription à la cueillette robotisée, il n’y a

Interface du logiciel Pharma de Computer Engineering

que toutes les erreurs soient déclarées et listées avant. Sans historique, il n’est pas possible de faire des comparaisons ! Le fait d’avoir un outil unique favorise la communication et le partage entre les différents acteurs ? Certains médecins nous disent : « On ne communique plus

plus aucune intervention humaine. On est dans un pro-

car on écrit des mots sur un logiciel ». Mais pour moi, peu im-

cess complet. Toutes les étapes de retranscription chro-

porte le support. La communication signifie échanger autour

nophages et sources d’erreurs n’existent plus. Le méde-

d’un même patient et en ce sens, le partage d’information est

cin prescrit, le robot tourne. Je contrôle juste que c’est

évident ! Un des autres aspects fondamentaux est la disponi-

bien le bon médicament ! La prescription est informatisée

bilité du support qui est accessible depuis tous les postes de

à 100 %, la validation des administrations, quant à elle,

l’établissement. Où que je sois, je peux me connecter.

n’atteint pas 100 % des lits, les EHPAD n’ayant pas les capacités techniques et humaines pour valider les admi-

Un conseil pour vos homologues ?

nistrations.

La question qui se pose aujourd’hui aux établissements est celle des « droits d’accès » : Les verrous actuels peuvent

On tend donc vers le « Zéro erreur » ?

perturber la fluidité des consultations et donc des prises en

Il est évident qu’en termes de lecture, de cueillette et d’admi-

charge. Une réflexion doit se porter autour de ces verrous :

nistration, on est dans un circuit sécurisé. La réduction des

doivent-ils sauter ? Faut-il étendre les « droits d’accès » et

erreurs est évidente sauf que pour l’objectiver, il aurait fallu

garantir en parallèle contrôle et traçabilité ?

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

n


Rubrique DH : informatique

Gestion des identités et annuaires :

socle de base d’un SI urbanisé Dans le monde des établissements de santé, le mouvement permanent des agents et le nombre important d’applications à gérer impose de facto une solution de gestion des identités plutôt qu'une solution de gestion des accès. Maîtriser un système d'information, c'est maîtriser ses accès. En quoi un annuaire central et une gestion des identités concourent à cette maîtrise ? Avant de gérer les accès au système d’information, il faut

comme plus facile à mettre en place et beaucoup plus

Votre expérience sur le sujet doit vous permettre un certain recul. Quels sont les gains observés sur les Établissements qui ont réussi ces projets ?

visible par les utilisateurs qu’un projet de gestion des

Les gains sont multiples tant en terme de sécurité que

identités ; il est ainsi souvent priorisé par le service infor-

de satisfaction utilisateur. Ces projets permettent de maî-

matique. Ces deux projets sont évidemment très liés et

triser et de contrôler les accès au Système d’Information

souvent regroupés sous un projet global appelé « Projet

tout en fiabilisant et en optimisant le temps passé à la

IAM » (Identity and Acces Management). Cependant,

mise en œuvre des habilitations. Les gains qualitatifs sont

pour maîtriser et contrôler les accès, il faut notamment

nombreux : tout d’abord pour l’administrateur, il s’agira

que ceux-ci soient nominatifs. Dans certains secteurs

d’avoir un référentiel centralisé exhaustif et à jour, une au-

d’activité et tailles d’entreprise, ceci ne pose pas de pro-

thentification personnalisée avec toute la traçabilité asso-

blème. En revanche dans le monde des établissements

ciée, une réduction des risques d’erreurs, une automati-

de santé, le mouvement permanent des agents (entrées/

sation des tâches et une réduction des délais de création

sorties, mouvements internes, changements d’affecta-

des comptes. Pour les utilisateurs cela concernera leurs

tion) et le nombre important d’applications à gérer rend

accès applicatifs obtenus plus rapidement et une simplifi-

l’affectation de compte nominatif impossible, sans une

cation de leurs phases d’authentification.

vraie solution de gestion des identités. Cette solution

Dans les gains quantitatifs, nous pouvons aborder les

permet de fédérer les identités via un annuaire centra-

gains de productivité pour les utilisateurs, le temps gagné

lisé, d’automatiser l’affectation d’habilitations ou de res-

d’administration et d’exploitation et les coûts associés.

d’abord savoir à qui nous allons donner ces accès, qui est présent et qui intervient au sein du Système d’Information. Un projet de gestion des accès est souvent perçu

Entretien avec Sébastien Wetter, Expert ENOVACOM

sources via un moteur de règles (sur les attributs des personnes : profession ou lieu d’exercice…)

Un projet d'IAM n'est souvent pas un projet informatique, mais un projet d'Établissement, nécessitant une remise à plat du qui fait quoi. Quels sont les principaux acteurs clés d'un tel projet ?

À votre avis, quelles sont les principales failles des SI de Santé ? Et quelles solutions pragmatiques et opérationnelles recommandez-vous pour une meilleure urbanisation et une meilleure productivité ? L’une des principales failles est le manque de visibilité

Effectivement, un projet IAM est avant tout un projet

et de contrôle sur ce qui se passe au sein du Système

organisationnel. Il nécessite de revoir les process d’en-

d’Information. Pour répondre à cette problématique,

trées/sorties du personnel, celui des changements d’af-

je pense que les briques IAM représentent le socle pri-

fectations, et tous ceux hors périmètre d’une gestion RH

mordial permettant de reprendre le contrôle sur les réfé-

(Prestataires, Intérim, médecins en formation). La DSI est

rentiels utilisateurs des différents applicatifs. La notion

un acteur prépondérant, qui est souvent à l’initiative de ce

d’interopérabilité reste très importante, notamment pour

type de projet. Mais attention, il ne doit surtout pas être le

la propagation des identités et des droits au sein du Sys-

seul acteur impliqué. Il faut que la direction générale soit

tème d’Information, ainsi que pour l’automatisation des

le sponsor du projet et il faut bien sûr impliquer la DRH

flux. Afin de rendre possible une vision en temps réel des

le plus tôt possible. Le DIM doit participer au projet ainsi

actions effectuées sur le SI, arrive alors le projet d’audit

que les référents métiers et applicatifs. Le service com-

et de traçabilité.

munication doit également être intégré dans les acteurs

Pour concrétiser la démarche de sécurisation, il faut im-

clés, notamment sur la partie publication des informations

pérativement s’appuyer sur une bonne communication in-

de l’annuaire.

terne, pour sensibiliser et former les acteurs du SIH.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

53


Rubrique DH : informatique

Les progiciels médicaux : avenir et prospective

L’introduction massive de la technologie dans tous les aspects de la vie quotidienne fait qu’aujourd’hui, le numérique n’est plus affaire de spécialistes : il imprègne chacun de nous et à chaque instant, sans forcément qu’on en ait toujours bien conscience. Entretien avec Lân Guichot, Directeur Marketing, Communication & Business Développement - AGFA Healthcare & Jean-Marc Massias, Directeur Général de Computer Engineering

Lân GUICHOT − Agfa HealthCare est présent sur l’en-

qu’on en ait toujours bien conscience. De nouvelles en-

semble des principaux marchés européens de l’infor-

vies, créent de nouveaux besoins qui créent eux-mêmes

matique de santé. Pour adresser efficacement chaque

de nouveaux usages, adressant de nouveaux acteurs.

marché, nous sommes tenus de comprendre, analyser

Ces derniers se sont transformés en « usagers » exi-

et développer des solutions répondant aux spécifici-

geant des fonctionnalités toujours plus abouties, mais

tés culturelles, médicales et réglementaires de chacun

réclamant maintenant des « Services ». Ces usagers

d’entre eux. C’est une véritable richesse nous permet-

sont tout autant le professionnel que le patient lui-même.

tant d’alimenter le système avec le meilleur de ce que

Ainsi cette révolution des TIC Santé pourrait par exemple

l’on trouve dans les différents pays. Cette réflexion

bientôt fournir :

paneuropéenne permet à nos solutions de mieux appré-

• Des messages au patient avant et/ou pendant son

hender les révolutions en cours du système de santé

parcours de soins, comme des guidages pour se dépla-

français.

cer d’examen en examen, • Des recommandations administratives et de bonne réalisation de l’examen pour une éducation thérapeu-

Ainsi parler de mutation ne suffit plus, la révolution a sonné : sans doute faut-il changer de paradigme pour mieux répondre aux nouveaux usages en Santé ?

tique adaptée, • Des services aux patients ou aux aidants comme la gestion de l’accueil du patient en mode « Self Service », à l’image des kiosques d’accueils dans les aéroports, • Des services de confirmation et rappel de RDV pour un meilleur suivi des patients,

Les systèmes d’information de santé ont combiné, et

• Des services de « rappel de facture » permettant à

continuent à combiner, entre autres : l’orientation do-

l’hôpital de mieux gérer ses impayés et son contentieux

cumentaire, médico administrative et la culture de la

de facturation, via une notion de compte patient global

performance avec la capacité d’assurer des workflows

avec « paiement en ligne »,

fluides requis par les organisations efficientes et respec-

• Le rappel d’informations manquantes ou de docu-

tant les pratiques médicales et les sécurités associées.

ments manquants permettant de fluidifier les prises en

Cette vision favorise les solutions « hospitalo centrées »

charge pour réduire les files d’attentes.

alors que les enjeux du vieillissement de la population,

54

de l'accroissement des maladies chroniques et multi-pa-

Les organisations de soins ont réduit la Durée Moyenne

thologies poussent les systèmes d’information à briser

de leurs Séjours, ce qui renvoie les patients plus tôt vers

les frontières, pour des solutions plus « domicilo cen-

leur domicile. Les gains générés peuvent alors servir

trées ». Les systèmes d’information doivent rajouter à

à d’autres mesures sociétales ou libérer des capacités

leur contenu sanitaire du contenu médico-social pour

nouvelles pour les établissements soucieux de l’optimi-

constituer un nécessaire continuum de soins de l’hôpital

sation et de l’efficience de leur activité tarifiée.

vers le domicile.

Ainsi le « malade » devient « client » vis-à-vis de l’offre

L’introduction massive de la technologie dans tous les

de soins quand il est « patient » et consommateur de

aspects de la vie quotidienne fait qu’aujourd’hui, le nu-

services à la personne lorsqu’il n’est pas dans la phase

mérique n’est plus affaire de spécialistes : il imprègne

aigüe de son parcours de soins temporaire ou chronique.

chacun de nous et à chaque instant, sans forcément

Quand elle est dans son parcours de vie, cette personne

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Rubrique DH : informatique

est en recherche du meilleur « bien être ». Dans cette quête, on vise à préserver son « capital santé » que l’on soit jeune, plus âgé ou en perte d’autonomie. Cette révolution impacte tout autant la Société que les sociétés, fournisseurs de solutions SI mais aussi de services aux patients. Les éditeurs voient leur modèle totalement bouleversé à la fois sur le plan technologique et économique. Ils sont en effet face à un double challenge : réussir le virage technologique du cloud, tout en réinventant un modèle économique à la fois viable et acceptable pour adresser le monde sanitaire mais aussi dorénavant le monde médico-social, avant de retrouver le patient à son domicile.

L’évolution actuelle très significative des outils d’aide

Ce formidable gisement d’opportunités doit pousser

à la prescription va permettre de les faire évoluer vers

notre Société et nos organisations de santé à changer

des outils d’aide à la décision. Les apports actuels de

de paradigme. Les projets LICORNE (Liaison et Coordi-

ces outils basés principalement sur des contrôles de

nation par un Réseau NumériquE de santé) et PELICAN

la prescription vont être complétés par des systèmes

(Patient Entouré et Liaison entre Intervenants en Cancé-

experts permettant de mettre à la disposition des pro-

rologie) ambitionnent de transformer le soin en Bien-être

fessionnels de santé des bases de connaissances pour

et le Patient en Patient-citoyen. Ces projets utilisent les

améliorer la prise en charge thérapeutique des patients.

concepts des réseaux sociaux, connus de tous, où les «

Ces évolutions porteront sur l’intégration de bases de

amis des amis » sont remplacés par des professionnels

connaissances, de recommandations de prise en charge

autour du patient. Au-dessus de ce groupe d’amis un « chef des amis » a été positionné pour la coordination et la coopération du cercle de soins (nouveau métier de

par pathologies et sur l’ajout d’outils de modélisation de la connaissance interne à l’établissement.

Case Manager ?)

Les évolutions actuelles portent sur la mutualisation de moyens entre établissements et le parcours du patient entre plusieurs établissements d’un même territoire de santé.

Jean-Marc MASSIAS − Les évolutions des outils réalisés ces dernières années avaient pour objectif de sécuriser et d’optimiser la prise en charge thérapeutique du patient dans l’établissement de soins avec des solutions intégrant les processus de soins dans leur ensemble : circuit du médicament, dossier de soins, parcours du patient opéré, parcours du patient en oncologie. Les évolutions actuelles portent sur la mutualisation de moyens entre établissements et le parcours du patient entre plusieurs établissements d’un même territoire de santé. Cela va de solutions d’échanges de données

Un autre domaine où les évolutions vont être importantes est la communication avec l’extérieur de l’hôpital. Le lien entre le circuit du médicament à l’hôpital et la ville s’étend avec le Dossier Pharmaceutique. Le partage d’informations avec la médecine de ville s’étend afin d’assurer un meilleur suivi de la prise en charge des patients. Le dernier aspect non négligeable est l’information du

entre sites dans le cadre de sous-traitances pour la pré-

patient concernant son traitement tant à l’hôpital que

paration des chimiothérapies, à la création de GCS pour

lors de sa sortie. Ceci permettra de répondre à l’attente

mutualiser une pharmacie à usage intérieur entre plu-

de plus en plus grande des patients sur la connaissance

sieurs établissements, en passant par le regroupement

de leur pathologie et de leur traitement et d’améliorer

d’établissements au sein de Communauté Hospitalière

l’observance des traitements prescrits et de mener ainsi

de Territoire.

à une véritable éducation thérapeutique du patient.

n

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Rubrique DH : informatique

Quel cap

pour les systèmes d’information hospitalier ? Aujourd’hui le système d’information ne doit plus être perçu comme un « outil » mais comme un véritable levier de performance, à une place stratégique pour le fonctionnement de l’hôpital et du système de santé Dans le contexte des réformes nationales où le Entretien avec Sophie Carli-Bacher, Directrice Marketing Produits McKesson France et Pays-Bas

paradoxe vise à réduire les dépenses de santé tout en améliorant la qualité des soins, le système d’information devient un levier indispensable, pour assurer les enjeux d’efficience et de sécurité. Les programmes Hôpital et Territoires de Soins Numérique, les certifications des LAP, des comptes, les projets FIDES et PES entraînent leurs exigences en matière de décloisonnement, de dématérialisation, de contrôles et de traçabilité. Pour Christophe Boutin, Président de McKesson France, « l’expérience utilisateur sera le point central de la version 2015, pour une prise en main la plus efficace possible de nos appli-

Les 3 axes d’évolution des SIH

cations arrivées à ce jour à maturité fonctionnelle. Nous continuons également à améliorer les fonctions CHT et multi-entités juridiques de nos plates-formes afin d’adresser les projets territoriaux dont le nombre va

• Un SIH plus efficace, avec des fonctions de planifi-

fortement s’accroître dans les prochains trimestres ».

cation et de gestion des ressources pour améliorer la productivité, des fonctions de pilotage et de supervision pour maîtriser et contrôler l’atteinte des objectifs

Le système d’information doit s’orienter vers la médecine personnalisée et prédictive, avec la capacité de traiter, corréler et transporter de plus en plus de données sensibles.

de l’établissement, • Un SIH plus ouvert sur l’amont et l’aval de l’hôpital en impliquant les professionnels de santé libéraux, en supportant la coopération entre ces professionnels, en dématérialisant les protocoles de prise en charge qui unissent les soignants et les patients. Aujourd’hui le système d’information ne doit plus être

McKesson, avec ses solutions qui supportent l’en-

perçu comme un « outil » mais comme un véritable

semble du SIH, dont l’axe patient complet, de la pro-

levier de performance, à une place stratégique pour le

duction de soins à la gestion administrative et au PMSI,

fonctionnement de l’hôpital et du système de santé.

a défini sa stratégie produit en mettant le « cap vers le

À terme, il doit s’orienter vers la médecine personnali-

futur » selon trois axes :

sée et prédictive, avec la capacité de traiter, corréler et

• Un SIH plus complet, plus centré patient en res-

transporter de plus en plus de données sensibles.

pectant les exigences croissantes de sécurité, avec de nouvelles fonctions métier pour faciliter l’adoption par les utilisateurs, la recherche et l’accès à l’information, et répondre aux situations de mobilité,

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Rubrique DH : informatique

Les progiciels financiers : des outils concrets pour les finances de l’Hôpital L’outil informatique est désormais le soutien incontournable pour que l’établissement public de santé puisse disposer et traiter en temps réel les informations lui permettant d'optimiser et de sécuriser les flux financiers. L’informatique est-elle devenue stratégique dans la gestion financière d’un Hôpital ?

Quelles sont les principales attentes d’un DAF vis-à-vis du SI ?

Comme dans le secteur privé, les systèmes d’information

Le Système d’Information doit être un le-

de gestion sont au cœur du développement des struc-

vier de la performance et de l’amélioration de la qualité

tures hospitalières. Ils constituent un facteur clé de leur

de la prise en charge des patients par l’industrialisation,

efficience et de leur performance. En cela, ils ne sont pas

l’amélioration continue des processus. Il doit permettre

seulement devenus stratégiques mais incontournables.

au DAF de gérer les risques et les coûts liés à l’évolution

La prise en charge des patients, mission essentielle des

du contexte réglementaire, financier et organisationnel.

établissements publics de santé, repose sur des critères

À ce titre, les solutions de gestion financière sont indis-

de qualité, de sécurité, de confiance et de transparence.

sociables des solutions métiers.

Entretien avec Ahmed El Bahri, Directeur Administratif et Financier du CHU de Montpellier

Cette prise en charge doit toutefois tenir compte des fortes contraintes budgétaires actuelles, des évolutions réglementaires fréquentes et des évolutions techniques et technologiques toutes aussi rapides. Le pilotage financier des établissements publics de santé doit être plus réactif, plus flexible et plus robuste pour répondre à ces exigences. L’outil informatique est désormais le soutien incontournable pour que l’établissement

Le DAF, en lien avec le DSI, doit s’assurer de la maîtrise des risques inhérents à la mise en place de systèmes d’information de plus en plus performants mais de plus en plus complexes

public de santé puisse disposer et traiter en temps réel les informations lui permettant, notamment pour ce qui

C’est également sur le SI que la démarche de certifica-

est de la gestion financière, d'optimiser et de sécuriser

tion des comptes s’appuie pour valider annuellement les

les flux financiers.

comptes des établissements concernés. Les logiciels de gestion financière doivent désormais intégrer des

Quelles sont les forces et faiblesses des logiciels financiers actuels ?

automatismes de contrôles financiers, des fonctions

D’une façon générale, les logiciels actuels répondent

à même de vérifier l'intégrité et l'accessibilité des don-

plutôt bien aux besoins de gestion financière de l’éta-

nées gérées. Le SI doit être capable, en quasi temps

blissement public de santé. Ils deviennent également

réel, de visualiser, avec précision, les sources d'informa-

de plus en plus performants pour assurer une fonction

tions multiples qui ont une incidence sur nos opérations

de pilotage. Il reste en revanche beaucoup à faire pour

financières et permettre de gérer le risque sur les flux

assurer une meilleure intégration et communication

financiers.

avec les autres briques du système d’information hos-

En synthèse, le DAF, en lien avec le DSI, doit s’assu-

pitalier (systèmes d’information clinique, achat, stock,

rer de la maîtrise des risques inhérents à la mise en

logistique, GMAO). De même, les travaux liés à la cer-

place de systèmes d’information de plus en plus per-

tification et à la fiabilisation des comptes ont montré

formants mais de plus en plus complexes : coûts

que les outils étaient encore largement perfectibles en

financiers de projets informatiques qui s’éternisent,

termes de contrôles automatiques embarqués, véritable

problème de sécurité et d’accès à des informa-

enjeu du contrôle interne. Nombre d’éditeurs ont pris au-

tions confidentielles, risques de fraudes, indisponi-

jourd’hui conscience de ces enjeux et se sont engagés

bilité des systèmes d’information faisant peser un

dans une démarche d’amélioration de leurs solutions

risque sur la poursuite de l’activité de la structure,

logicielles.

enjeux de la qualité des données comptables.

d'optimisation de la performance et des outils d'audit

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« Clinicom nous permet d’avoir un système d’information totalement intégré, où les données administratives et médicales de nos patients sont centralisées au sein d’une plateforme unique. » Chantal Tiran, Responsable du Pôle applicatif au sein de la DSI du CGFL

L’ENJEU Vers une gestion centralisée des dossiers patients… Le Centre Georges-François Leclerc (CGFL), situé à Dijon, est un Établissement de Santé Privé d’Intérêt Collectif (ESPIC) spécialisé en cancérologie. Pôle d’excellence reconnu pour la qualité de la prise en charge des patients, il assure depuis 40 ans des missions à la fois de prévention, de dépistage, de soins, d’enseignement, de recherche et d’accompagnement. Le CGFL accueille aujourd’hui plus de 19 000 patients par an, traités par une soixantaine de médecins. L’expertise, l’innovation et la multidisciplinarité sont au cœur des valeurs motrices

© Droits Réservés

l e s pr o s en par l ent 58

Déploiement de Clinicom au CGFL de Dijon : Au plus près des besoins métiers pour des évolutions adaptées et pérennes

du Centre, dont la vocation consiste à offrir aux patients une prise en charge globale et de qualité tout au long de leur parcours de soin. Dans ce cadre, le CGFL a très tôt compris l’importance de se doter d’un système d’information efficace et performant pour permettre aux professionnels de santé, quelle que soit leur spécialité, de mener à bien leurs missions dans les meilleures conditions possibles. « Notre objectif était de fournir à nos personnels soignants un seul point de connexion au dossier patient pour gérer à la fois la partie administrative et la partie médicale de leur activité. » explique Chantal Tiran, Responsable du Pôle applicatif au sein de la DSI du CGFL.

… par l’informatisation progressive de l’activité

tème d’information complètement intégré, faisant figure de précurseur vis-à-vis d’autres établissements de santé. En 2009, tandis que germe le projet d’informatisation des prescriptions (dossier de soin, circuit du médicament), le CGFL entreprend la migration de son SI, alors sous AS400, vers la plateforme de gestion Clinicom. « Tout l’enjeu de cette migration résidait dans notre capacité à conserver le niveau d’intégration de notre SI existant, poursuit Chantal Tiran, tout en nous permettant de développer le volet dédié à l’informatisation de la prescription, pour laquelle le CGFL était un établissement pilote ».

Dès 1985, le CGFL a entrepris un vaste chantier d’informatisation de son activité, d’abord administrative : gestion administrative du patient, facturation, PMSI, gestion économique de l’établissement. Puis à partir de 1994, le

LA SOLUTION

Informatisé, traçabilité des produits sanguins, ainsi qu’un

Un accompagnement centré sur le besoin métier

module supplémentaire dédié à la prescription de chimio-

Hasard ou coïncidence, en 2011, le jour de la mise en pro-

thérapie. En quelques années, le CGFL a construit un sys-

duction de la prescription informatisée dans le premier

chantier s’est élargi à la partie médicale : Dossier Médical

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Dire d’expert service de soins, la direction du CGFL est informée du rachat de SHS et donc de Clinicom. Malgré la garantie de maintenance de la solution, le CGFL s’est inquiété quant à l’avenir de la plateforme. « Nous avons été en partie rassurés en apprenant qu’il s’agissait d’InterSystems que nous connaissions au travers de sa base de données Caché. Mais même si InterSystems s’engageait à poursuivre la maintenance de la solution, nous nous posions des questions quant à la pérennité de notre système et sa capacité à évoluer » explique Chantal Tiran. Des craintes légitimes qu’InterSystems a tôt fait d’apaiser. D’abord en restructurant le helpdesk pour en améliorer la réactivité et la qualité. Ensuite en organisant des réunions de travail régulières pour mieux cerner les besoins du CGFL et de son personnel soignant, et définir les évolutions fonctionnelles les plus à même d’y répondre. « Nous avons finalement eu beaucoup plus d’évolutions au cours des trois ans de collaboration avec InterSystems qu’au cours des 3 ans qui l’ont précédée » précise Chan© Droits Réservés

tal Tiran. Bien que la totalité de la migration ne soit pas encore terminée et que nos professionnels de santé attendent encore des améliorations, nous approchons de l’objectif fixé initialement par le CGFL. Fournir au personnel soigant un seul point de connexion aux dossiers patients

Clinicom : un système totalement intégré, centralisé et transparent Au-delà de la gestion de l’activité administrative (gestion administrative du patient, facturation, PMSI), Clinicom permet en effet d’intégrer l’ensemble des modules et des logiciels tiers qui composent le système d’information du CGFL. Du module de prescription médicale pour l’ensemble des unités de soin au module de dictée numérique, en passant par les logiciels d’imagerie médicale, de radiothérapie ou encore des laboratoires de biologie et d’anatomocytopathologie : tous ces systèmes sont, soit des modules propres à Clinicom, soit intégrés par le biais d’interfaces ou d’appels contextuels. Tout dossier patient créé et mis à jour dans Clinicom est accessible depuis un logiciel tiers de l’établissement – sous réserve que son utilisateur dispose des droits d’accès correspondants – de même qu’un compte-rendu saisi dans un logiciel tiers est automatiquement poussé vers Clinicom.

patient ». Un point qui s’avère primordial dans le cadre du projet de facturation individuelle (FIDES) : tous les actes, qu’ils soient faits directement dans Clinicom ou dans un logiciel tiers, sont centralisés dans Clinicom. Ce qui facilite considérablement la gestion de la facturation à l’acte. De même, en réponse aux obligations règlementaires relatives au circuit du médicament, le CGFL a mis en place le module pharmaceutique de Clinicom permettant aux pharmaciens de valider une prescription et de l’intégrer automatiquement au dossier patient.

Initier de nouveaux projets en toute confiance Le CGFL a retrouvé la confiance qui lui a fait un temps défaut quant à la pérennité de la plateforme Clinicom. Les retours des utilisateurs et les demandes régulières d’évolutions montrent la capacité de la solution non seulement à s’adapter aux besoins métiers, mais aussi à

LES BÉNÉFICES Une meilleure prise en compte des évolutions règlementaires « Le niveau de centralisation des données s’est ren-

intégrer de nouvelles briques logicielles sans que cela impacte son intégrité. Et le CGFL travaille d’ores et déjà sur nombre de modules complémentaires : reconnaissance vocale, prescription d’examens, informatisation de l’anesthésie et des blocs opératoires, gestion des rendez-vous…

forcé, constate Chantal Tiran. En terme d’intégration, nous nous approchons véritablement d’un dossier

« Le fait d’avoir une solution suffisamment souple

”médico-administratif”, qui permet, en se connectant

et robuste pour supporter toutes ces évolutions

sur une seule application, de consulter et mettre à jour

nous permet d’initier des projets avec davantage

les données à la fois médicales et administratives d’un

de confiance. » conclut Chantal Tiran.

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Rubrique DH : gériatrie

Les gériatres et la Gériatrie

© Fotolia

Pôle « Autonomie », « Personnes Agées », « Gérontologie », « Gériatrie », « orientation gériatrique », « Prise en charge du Vieillissement » ou encore « Géronto-Pôle », la dénomination du pôle varie mais pas l’objectif : offrir à nos seniors un cadre et un environnement adaptés !

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Dr Jérôme Bohatier Praticien Hospitalier, Chef du service Médecine Gérontologie Clinique, Responsable de l’Unité Court Séjour Gériatrique C, Géronto-Pôle CHU de Clermont-Ferrand

Dr Frédéric Munsch Médecin Chef du Pôle EHPAD/USLD, Gériatre, qualifié en Psycho Gériatrie, CHU de Reims

Dr Dominique Clairet Chef de pôle de Gériatrie, Centre Hospitalier Intercommunal Toulon la Seyne/mer

Dr Marie-Agnès Manciaux Chef du pôle Gérontologie, Soins Palliatifs, CHRU Nancy

Dr Jacques Ribière Médecine Interne Gériatrique-Rhumatologie, Chef du pôle de Gériatrie et de Gérontologie, CH de Grasse

Dr Danièle Vaschalde Chef du Pôle à orientation gériatrique au Groupe Hospitalier du Havre

&

Marina André, Directrice des EHPAD de Pontvallain et de Mansigné, dans la Sarthe

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Rubrique DH : gériatrie

Année 2043

Le GéroCenter, c’est l’établissement dernier cri pour super séniors de catégorie 1 en matière de nouvelles technologies : biocapteurs, systèmes de surveillance non-intrusifs, salle de bains ultra-sécurisée, reconnaissance vocale… Enfin, c’est ce que disait la plaquette tactile. J’ai eu droit à une place car j’étais DG au sein d’un établissement de santé de 2002 à 2030. Quand je pense que je bataillais au déploiement du numérique dans la santé… si j’avais su qu’aujourd’hui, les docteurs, on ne les verrait plus qu’à travers des écrans dans des sas ultrasophistiqués, et que même les fourchettes seraient électroniques et calculeraient la dose de sel présente dans mon plat… « Où est smarty ? ». C’est le surnom que mes arrières petits-enfants ont donné à ma smartcanne. Enfin, si on peut appeler ça une canne. De mon temps, un bout de bois suffisait pour aider à marcher. Aujourd’hui, c’est un tube truffé d’intelligence, capable de prévenir en cas de chute ou de vibrer quand je dois changer de direction. J’aurais préféré qu’elle puisse répondre quand je l’appelle… Ah et puis ça m’énerve ces bracelets qui grattent. Celui du bras gauche envoie comme par magie, ou plutôt grâce aux nuages, mon rythme cardiaque, ma tension et même mon humeur aux docteurs. Entre copines du centre, il nous arrive de nous les échanger ou de les mettre au chat pour se marrer… forcément ça bipe et après on a droit à la totale : IRM, scanner, prise de sang ! Celui du bras droit, par contre, c’est pour prévenir des UV. Comme si à 80 ans, on se mettait encore au soleil mais le traumatisme d’une canicule d’il y a 40 ans est encore très présente dans les esprits. Ah ! J’allais oublier les capteurs dans mes semelles qui indiquent comment le poids se répartit sur chacune de mes jambes et mesurent le nombre de pas que je parcours chaque jour. Toutes ces données sont bien entendu enregistrées et transmises au cockpit et côtoient celles sur ma consommation d’eau et d’électricité. Je prononce distinctement : « Téléphoner Valentine ». Ça sonne mais, comme d’habitude, je tombe sur le répondeur hologrammique de ma fille. Tant pis, je lui dirai plus tard que je me suis enfin décidée sur le choix du site qui enregistrera mon testament numérique et s’occupera de mettre dans un coffre-fort sécurisé mes mots de passe Facebook, Twitter et Google, coffre-fort qu’elle pourra utiliser pour faciliter la fermeture de mes comptes après ma mort. « Allumer TV, chaine 45 ». En 2043, bonne nouvelle : les télécommandes ont disparu. Tout se fait désormais par reconnaissance vocale, même la fermeture des volets et le réglage de la clim – sous contrôle du centre, bien sûr. Le système central reprend la main quand il l’estime nécessaire. On est libre mais pas trop ! « Chaine 72… Chaine 4… ». Je zappe tout en jouant sur ma tablette aux applications préconisées par l’OMS pour retarder la perte de mémoire quand l’horloge vocale me fait sursauter : « Cher pensionnaire. Il est 11h 45. Le déjeuner sera servi dans 15 minutes en salle de repas ». Il faudra que je pense à personnaliser cette horloge vocale avec la voix de mon petit-fils. Un « coucou mamie, c’est l’heure du dèj ! » sera plus drôle et me redonnerait peut-être l’appétit que ce monde 3.0 m’a un peu coupé…

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Rubrique DH : gériatrie

La parole aux chefs de pôles ! Cohésion Avec Dr Jérôme Bohatier, Praticien Hospitalier, Chef du service Médecine Gérontologie Clinique, Responsable de l’Unité Court Séjour Gériatrique C, Géronto-Pôle CHU de Clermont-Ferrand

Le Géronto-Pôle est le seul pôle médical du CHU de ClermontFerrand à être constitué autour d’une seule et même thématique, la personne âgée, aussi bien dans sa prise en charge que dans son parcours de soins, qu’il soit intra-, pré- ou post-hospitalier. Le rôle du chef de pôle Il aide à la cohésion de l’ensemble des équipes intervenant en son sein. Il coordonne également l’ensemble des projets dans le cadre d’un contrat d’objectifs et de moyens déclinés du projet médical du pôle et de l’établissement. Il favorise la mise en place des politiques de qualité, sans oublier le volet enseignement et recherche clinique lié à la personne âgée.

Enjeux particuliers relatifs à ce pôle L’optimisation de la filière de soins fait partie de nos préoccupations quotidiennes. Nous avons mis en place au cours de l’année 2013 le COGERT (Coordination Gérontologique) qui nous a permis notamment de créer une

Les particularités Du fait de son positionnement inter-hospitalier, et présent sur 4 sites différents, il est impératif d’avoir un fonctionnement commun, tout en gardant les spécificités de chacun. La présence d’un seul cadre supérieur de pôle va également participer à cela. Enfin, le projet de Téléconsultations mis en place avec les Ehpad du territoire va améliorer la coordination de la filière et rendre accessibles certaines spécialités sur toutes les EHPAD.

Réflexion Avec Dr Frédéric Munsch, Médecin Chef du Pôle EHPAD/USLD du CHU de Reims, Gériatre, qualifié en Psycho Gériatrie

L’élaboration d’un projet de pôle gérontologique peut-elle représenter une opportunité pour initier des projets de soins et de vie, fondés sur des relations humaines et collégiales bienveillantes ? Dans un contexte socio-économique peu propice à l’émergence d’une vision partagée solidaire et équitable, l’afflux de vieillards vulnérables, dépendants, aux aptitudes cognitives altérées, et dont les comportements sont perturbés et perturbants, représente un véritable défi à la raison.

interface entre la médecine de ville et les services de

Cependant, cette prévalence elle-même ne devrait-elle

gériatrie (favorisant les hospitalisations directes sans

pas nous conduire à réinterroger les valeurs existen-

passage par les urgences).

tielles qui fondent nos parcours de vie et lui confèrent

De plus, la révolution démographique qui est en marche

un sens ?

va également nous obliger à trouver de nouveaux modes Être présent aux côtés des patients, de leurs proches et

nombreux qu’ils soient, ne pourront absorber l’activité

prendre soin d’eux, interpelle la qualité de nos organi-

gériatrique d’un hôpital. Il faut donc continuer à diffu-

sations, nos modes d’interaction, nos comportements,

ser cette culture gérontologique pour adapter la prise en

capacités, valeurs et croyances, jusqu’au sens même de

soin au grand âge.

notre engagement.

de fonctionnement. Les services de gériatrie, aussi

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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Rubrique DH : gériatrie

Cette invitation pragmatique à fonder le soin sur l’éthique, la communication et l’empathie doit s’inscrire dans le cadre d’un projet institutionnel avec ses missions, ses objectifs et ses ressources, orienté selon une vision stratégique soucieuse de la qualité du parcours du patient et animé par une politique managériale participative.

environ 60 % de mon temps. Je me suis également souvent porté volontaire pour remplacer un collègue. Ainsi j’ai pu comprendre et vivre les difficultés des uns ou des autres. Je connais la plupart des personnels para

Toute utopique qu’elle paraisse, une telle approche pro-

médicaux et tous les cadres. Cette disponibilité m’a

cède d’un réalisme positif ancré dans une appréhension

parfois coûté mais elle m’a donné une légitimité et une

lucide des contraintes et injonctions qu’elle s’emploie à

connaissance « intime » du pôle. Lorsqu’on aborde des

transformer, pour accompagner un changement voué au

difficultés, je peux parfaitement les appréhender et les

service public et générateur de valeur humaine ajoutée.

comprendre. Ensemble, nous nous sommes beaucoup investis dans

Alzheimer fait ainsi office de paradigme mobilisateur, qui

la « Qualité », domaine plutôt nouveau pour des méde-

invite à une présence bienveillante, attentive à l’autre,

cins de ma génération et qui demande énormément de

animée par l’intention créative de transformer crises ou

temps : Certification de l’établissement hospitalier, de

contraintes en opportunités et capable de créer du sens

l’EHPAD, EPP, gestion des risques, commissions de la

par-delà l’apparent non-sens pour (re)susciter l’envie de

CME... Alors que nous ne sommes que 13 médecins au

prendre soin les uns des autres et de la vie en soi.

sein du pôle ! Nous avons pu obtenir, dans le cadre du « Plan Alzheimer », l’ouverture de 2 nouveaux services : Unité Cognitivo Comportementale (Mars 2012) et une Unité d’Hébergement Renforcé (Avril 2013) (Plan Alzheimer). Le montage de tels dossiers et la réalisation de ces projets

Vision

sont lourds et longs et le chef de pôle se doit d’être par-

Avec Dr Dominique Clairet, Chef de pôle de Gériatrie, Centre Hospitalier Intercommunal Toulon la Seyne/mer

yeux la partie la plus pénible peut-être parce que les

tie prenante à toutes les étapes. La partie « gestion financière » ne représente pas à mes résultats du pôle ont toujours été très largement bénéficiaires. Pourtant les promesses faites au moment de

En 2007, année de ma nomination à la tête du pôle de gériatrie, personne ne connaissait vraiment les règles du jeu dans lequel nous nous embarquions, mais j’avais des idées assez claires quant à ma vision de la gériatrie à Toulon !

l’instauration des pôles n’ont pas été suivi d’effet. Un pôle n’est pas isolé et la gestion de ses finances quels que soient les résultats n’est qu’une partie du budget de tout un hôpital. Ce travail de chef de pôle a été un très grand bonheur, mais est un travail extrêmement lourd en temps sur site et en réflexions qui nous occupent bien au-delà de notre temps de travail réel ! Bien sûr le chef de pôle s’appuie sur l’encadrement, les différentes directions mais le montage de projets et le suivi reposent sur nous : c’est donc une vigilance permanente pour ne pas oublier des

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Le Centre hospitalier est intercommunal. Il y a 7 ans, il y

dossiers, pour les relancer, pour les mener à bien et tout

avait des sites dispersés où des médecins « faisaient »

cela en plus de notre charge médicale. Nous sommes

de la gériatrie. Nous nous connaissions tous, mais à mes

également sollicités pour toute sorte de problèmes qui

yeux, il manquait une cohérence. Je voulais donc bâtir

ne trouvent pas de solutions simples et parfois dans

un maillage qui nous unirait.

des domaines étonnants et bien au-delà de nos compé-

J’ai toujours gardé une activité clinique qui représente

tences habituelles !

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Rubrique DH : gériatrie

Missions Avec Dr Marie-Agnès Manciaux, Chef du pôle Gérontologie, Soins Palliatifs - CHRU Nancy

Quelques aspects de la mission du chef de pôle en gériatrie : • Faciliter les projets des acteurs du pôle, en faisant les liens nécessaires avec l’institution et ses axes d’organisation et de priorités : les projets (unité d’entrées directes, organisation de l’UCC,…) sont travaillés en groupe, en lien avec le quatuor de pôle et suivis • Veiller à un fonctionnement d’ensemble dans le pôle cohérent et harmonieux : diffusion aux médecins, cadres et psychologues des comptes rendus mensuels des comités directeurs de pôle, journal de pôle trois fois par an distribué à chaque professionnel, réunions d’échanges et d’informations ouvertes à tous au moins une fois par an, organisation annuelle d’une journée d’éthique ouverte à tous les soignants du pôle (8 journées réalisées) • Soutenir les projets de recherche très nombreux à Nancy, le CHRU ayant retenu un axe autour du vieillissement • Aider à améliorer les prises en charges gériatriques dans l’établissement : équipe mobile, commission « personnes âgées » auprès de la CME • Articuler la filière interne à l’établissement avec l’offre de soins locale et régionale en lien avec l’ARS (filière sanitaire avec les établissements voisins, participation au réseau, élaboration des parcours patients, conventions avec les SSR, les EHPAD, expérimentation d’une consultation de télémédecine…)

Stratégies Avec Dr Jacques Ribière, Médecine Interne Gériatrique-Rhumatologie, Chef du pôle de Gériatrie et de Gérontologie, CH de Grasse

Le rôle de Chef de pôle de gériatrie me paraît être, d’abord et avant tout, l’organisation d’une véritable filière gériatrique intra mais aussi extra hospitalière, pouvant offrir à l’ensemble de la population âgée, fragile, poly-pathologique, et/ou dépendante, d’un bassin de population, une prise en charge de qualité. Les enjeux sont nombreux, car ces populations représentent un volume important, souvent disproportionné

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avec les moyens mis à notre disposition. De mon point de vue, le centre stratégique doit rester l’hôpital et l’ensemble des services de sa filière (court séjour, équipe mobile hospitalière, consultations, consultation mémoire, hôpital de jour, soins de suite, soins de longue durée), à la condition de coordonner avec conviction et volontarisme, avec les acteurs libéraux, les nombreuses structures extra-hospitalières maintenant disponibles : M.A.I.A., réseaux de soins, plate-forme gérontologique et même projet Passerelle émanant de la récente circulaire, article 70 du PLFSS. L’ensemble de ces structures gère la prise en charge à domicile et la fluidification des circuits de prise en charge et des professionnels de terrain, en symbiose aussi complète que possible, avec la filière hospitalière.

À Grasse, nous avons mis en place depuis dix ans, une

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Rubrique DH : gériatrie

Attractivité Avec Dr Danièle Vaschalde, Chef du Pôle à orientation gériatrique au Groupe Hospitalier du Havre

Le Groupe Hospitalier du Havre, établissement public de santé de recours du Territoire de santé de l’estuaire de la Seine (450 000 habitants), a défini l’offre de soins auprès des personnes âgées comme l’un de ses axes stratégiques et a réuni dans le « pôle à orientation gériatrique » – hors service de Court Séjour Gériatrique regroupé dans cet établissement multi-sites avec les autres services MCO – les ressources de la discipline gériatrique. Le versant sanitaire du pôle regroupe, sur un site unique, une consultation mémoire labellisée, une consultation d’évaluation gérontologique, la télémédecine, l’équipe mobile d’évaluation gérontologique à domicile, 70 lits

▲ * PASA : Pôle d’Activités et de Soins Adaptés dédié à la prise en charge de la maladie d’Alzheimer et des démences apparentées

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de « Soins de Suite et de Réadaptation Gériatrique », Plate-forme gérontologique associant réseaux de soins

154 lits de « Soins de Longue Durée », incluant deux

et CLIC. Avec elle, se sont récemment ajoutés une

« Unités d’Hébergement Renforcé » de chacune 14 lits.

M.A.I.A. et un projet Passerelle. Nous n’avons qu’à nous

Le versant médico-social du pôle inclut, sur 3 sites dif-

féliciter des possibilités offertes par ces dispositifs pour

férents, 3 pavillons d’« Hébergement pour Personnes

le bon fonctionnement intra-hospitalier de la filière gé-

Âgées Dépendantes », réunissant 413 lits, dont un

riatrique.

PASA*.

La mise en place d’instruments de communication entre

L’objectif de cette coordination en un pôle unique et

professionnels de santé libéraux, et entre ceux-ci et l’hô-

homogène est de garantir un projet médical cohérent

pital, est un facteur déterminant du bon fonctionnement

pour l’ensemble de la filière visant une prise en charge

de l’ensemble. La mise en place de ces instruments doit

globale, individualisée et personnalisée de la personne

être progressive et en ce qui nous concerne, s’associer

âgée. Il en résulte une cohésion de groupe au sein d’une

à un dispositif d’alarme dans le dossier des urgences et

équipe pluridisciplinaire formée à la gériatrie, cruciale en

du SMUR (travail commun avec l’observatoire régional

une période régionalement peu propice au recrutement

des urgences PACA).

médical, pour favoriser une attractivité médicale dans la

La difficulté, en dehors des problèmes bassement

discipline. Le chef de pôle acquiert une légitimité dans

financiers, est de garder toujours à l’esprit une vision

sa mission par sa qualification gériatrique, et sa connais-

d’ensemble du dispositif, et de mettre en place les

sance, expérience et maîtrise du fonctionnement de

choses progressivement, en gardant une bonne vision

chacune de ces différentes unités. Légitimité et crédibi-

d’ensemble.

lité, tant auprès des équipes que des interlocuteurs ins-

Les stratégies à employer sont multiples :

titutionnels, permettent la mise en œuvre des missions :

• Il faut continuer à donner une vision moderne et dyna-

encouragement d’une culture commune en matière de

mique de la gériatrie à l’intérieur de l’hôpital, par le travail

soins aux personnes âgées ; optimisation des pratiques

notamment de l’équipe mobile ;

professionnelles dans une démarche d’amélioration

• Il faut motiver et intéresser les vocations ;

continue de la qualité des soins ; promotion du main-

• Il faut tisser des liens étroits avec les responsables so-

tien de l’autonomie et de la santé du patient dans sa

ciaux, les soignants libéraux du bassin et les politiques

globalité ; information, orientation et éducation visant au

qui en ont la charge ;

retour de l’autonomie ; promotion et vérification de la

• Il faut recruter des collaborateurs de qualité ;

qualité des soins.

• Bien sûr, il faut avoir, à la tête de l’hôpital, un binôme

Les deux travaux prioritaires actuels du pôle à orien-

directeur/président de CME qui accompagne une telle

tation gériatrique sont de permettre au Groupe Hos-

démarche, pas toujours facile à bien appréhender.

pitalier du Havre de disposer d’une filière gériatrique

Quoi qu’il en soit, m’occupant de ces choses depuis

labellisée, c’est-à-dire garantissant l’amélioration de

30 ans, je peux mesurer le chemin parcouru qui sur une

l’accès du patient gériatrique à un soin approprié à ses

telle échelle de temps, est tout à fait considérable. Mais,

besoins et d’améliorer encore la coordination ville-hô-

il reste du travail, notamment dans les nouveaux axes de

pital, facilitant ainsi le parcours de soin des patients

développement onco-gériatrie, géronto-technologie…

âgés et limitant les situations de crise à domicile.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

n


Rubrique DH : gériatrie

Diriger un EHPAD de province est à la fois passionnant et contraignant. Management, gestion financière, inscription dans les stratégies territoriales mais aussi organisation, logistique, achats, relations privilégiées avec les résidents et leurs familles, gestion des conflits constituent le quotidien des Directeurs d’EHPAD, « moutons à cinq pattes » au cœur de l’humain. DH a rencontré Marina André, Directrice des EHPAD de Pontvallain et de Mansigné, dans la Sarthe.

© Fotolia

« Un directeur d’EHPAD est un généraliste à qui on demande de plus en plus de technicité »

Que peut-on mutualiser ? La mutualisation peut se traduire de différentes façons : partage d'expériences entre collègues, groupements de commandes, formations en commun, personnel spécialisé mutualisé de type ergothérapeute, diététi-

Avec Marina André, Directrice des EHPAD de Pontvallain et de Mansigné, dans la Sarthe.

cienne, ide hygiéniste ou ingénieur qualité, procédures qualité en commun pour les procédures types, réalisation d'audit et d'EPP en commun, comparaison entre établissements pour progresser, travail collégial sur des

DH MAGAZINE – Quel sont les enjeux futurs

offres complémentaires (Accueil de Jour, Hébergement

d'un EHPAD de province ?

Temporaire, PASA, UPAD, SSR, USLD, UHR…), logiciels

Marina André − Je ne voudrais pas avoir l’impression de jouer sur les mots mais, pour moi, « EHPAD de province » ne signifie pas grand-chose ! Je parlerai plutôt d’EHPAD en milieu « très » rural qui n’ont pas les mêmes problématiques que ceux situés dans les grandes villes. Dans les campagnes, l’enjeu tourne principalement autour de la démographie médicale. Les médecins généralistes ont peu de temps pour intervenir. Il faudrait des médecins « attachés » pour une meilleure implication dans le projet de soins de l'établissement.

Vous sentez-vous parfois isolés ? Il est important de ne pas rester seul et les EHPAD s’ouvrent naturellement vers l'extérieur – famille, médecins, spécialistes… Je pense également aux PAERPA – le parcours pour les personnes âgées en risque de perte d’au-

communs (Dossier de Soins Informatisé et logiciel qualité)… Cela peut aller jusqu’à des directions communes, à condition de garder une certaine qualité de travail pour les structures importantes, en conservant les postes de directeur adjoint, par exemple.

Quelle est votre vision du métier ? Un directeur d’EHPAD est un généraliste à qui on demande de plus en plus de « technicité ». Le métier se complexifie : démarche-qualité, nouvelles technologies, système d’information, contrôle de gestion, achats publics… autant de domaines pour lesquels nous devons développer de l’expertise tout en gardant une approche terrain et humaine, indispensable dans des lieux d'hébergement, de vie et de soins. La proximité des équipes fait que nous avons accès à des informations concrètes et sommes beaucoup plus vite dans la recherche de solu-

tonomie – dont l'objectif est de créer des partenariats

tions et dans le management participatif. Nous sommes

importants entre acteurs (avec les CH par exemple).

aussi le garant de la maîtrise des coûts et parallèlement

Ensuite, nous sommes incités fortement à mutualiser

alertons en cas de baisse des qualités de prestations

des fonctions entre établissements. C’est une dyna-

dues à des restrictions budgétaires intenables face à

mique positive s’il y a derrière une logique territoriale,

des injonctions paradoxales en ce moment ! Il est donc

la volonté des établissements concernés de travailler

important d’être bien entouré au niveau des équipes

ensemble et si l’objectif n'est pas seulement financier :

administratives et logistiques, ce qui est à développer

économies, suppressions de postes…

dans l'avenir. Je pense par exemple à des postes d’informaticien ou de secrétaire médicale.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

67


Centre Hospitalier Universitaire de Nice

Photos du reportage fournies par le CHU de Nice

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DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


CHU de NICE

Photos © G. Robiquet, S. Demailly, Laurent Guiraud, J.P. Deya, Sophie Boulet, DR - CHU de Nice - Montage : B. Courcot

Feu vert Six ans pour passer du rouge au vert... C’est sensiblement plus long que pour traverser Nice sur toute sa longueur, même aux heures de pointe ! C’était pourtant le temps nécessaire pour rétablir une situation hospitalière critique. Les moyens à mettre en œuvre relèvent autant des dispositions financières, médicales, sociales ou logistiques... Il fallait de toute façon faire feu de tout bois ! Mais, peut-être cela n’aurait-il pas suffit. Le petit plus, le supplément d’âme c’est le message de simplicité, de vérité, de franchise et de courage qui a tracé la route vers la réussite !

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

Photos © G. Robiquet, S. Boulet, DR - CHU Nice

Une visite Promenade des Anglais

N

70

ous nous intéressons aujourd’hui au CHU de

Pour que ce plan réussisse, Emmanuel Bouvier Muller

Nice qui a été classé 16e, parmi les 50 meil-

a jugé indispensable de s’entourer d’une équipe solide

leurs hôpitaux français, selon le palmarès

pour démultiplier son action et, deuxième point, d’ins-

du magazine Le Point réalisé en août 2013.

taurer une union sacrée avec le corps médical.

L’établissement recense 1 757 lits et places. L’année

La réussite de ce plan est passée également par la mise

2014 est importante pour le CHU de Nice puisque l’éta-

en place d’une vraie synergie médicale, administrative

blissement ouvre 2 sites : Institut Claude Pompidou

et universitaire : Emmanuel Bouvier Muller a ancré cette

(inauguré en mars) et Pasteur 2, 81 000 m2 prévu pour

synergie en parfaite osmose avec le président de la

la fin d’année.

CME, le Pr Philippe Paquis, et le Doyen de la Faculté de

Nous avons demandé aux dirigeants de cet hôpital uni-

Médecine, le Pr Daniel Benchimol auquel a succédé le

versitaire de nous parler des projets de développement.

Pr Patrick Baqué.

Emmanuel Bouvier Muller, Directeur Général, a rappelé

Toutefois, revenir à l’équilibre ne doit pas se traduire par

que le budget d’exploitation du CHU de Nice avait re-

le sacrifice des investissements prévus et, par consé-

trouvé l’équilibre en 2013 et avait même affiché un ex-

quent, les investissements majeurs ont été mainte-

cédent de 600 000 e. Pour atteindre ce résultat, à savoir

nus tout au long de ces 6 ans : Pasteur 2 (320 millions

un budget équilibré et un bilan sain, un plan de retour

d’euros), l’Institut universitaire Face et Cou (25 millions

à l’équilibre structurel a été mis en place en 2007 et a

d’euros) le projet Institut Claude Pompidou (21 millions

donc nécessité six ans d’efforts pour rattraper l’impor-

d’euros) ; enfin, l’acquisition d’équipements biomédi-

tant déficit de l’établissement.

caux (5 millions d’euros par an).

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

Retour à l’équilibre et instauration de la confiance

DH MAGAZINE – Le CHU de Nice avait engagé un Plan de Retour à l’équilibre fin 2007, a-t-il porté ses fruits ? Emmanuel

BOUVIER

MULLER

Le

budget

d’exploitation du CHU de Nice est à l’équilibre en 2013, et même en excédent de 600 000 €. Cet équilibre est structurel. Il a été retrouvé difficilement après six années de plan de retour à l’équilibre. C’est-à-dire que notre budget est équilibré, toutes provisions faites, provisions réglementées, ce qui signifie que le bilan est sain.

© DR - CHU de Nice

Emmanuel Bouvier Muller, directeur général du CHU de Nice

Cette envie de jouer collectif, c’était pour moi, la première des sauvegardes. Un homme seul ne peut rien faire. Il n'y a pas de recette miracle et les hommes providentiels n'existent pas.

Je peux dire qu’avant, cet hôpital avait peut-être une dotation qui était supérieure à ce que lui octroyait la T2A, puisque le déficit s’est révélé, une fois le passage en T2A, à 50 %. L’établissement avait approché le

un ensemble de touches, un ensemble de choses à faire.

déséquilibre et s’est retrouvé en déficit de façon très

La première de ces choses, c’est de faire un bi-

forte et brutale fin 2007. Les recettes n’étaient pas du

lan et de savoir pourquoi : pourquoi ça ne marche

tout à la hauteur des dépenses. Après, c’est l’éternel

pas, pourquoi on se trouve dans cette situation.

débat : est-ce qu’il n’y avait pas assez de patients ou

La seconde, c’est évidemment d’apporter des remèdes

est-ce qu’il y avait trop de charges ?

à ce qui ne fonctionnait pas. La première chose qui a été faite, après le bilan, c’est de créer une « équipe de combat ». Derrière ce mot un peu barbare, un peu guerrier,

Comment avez-vous fait basculer la situation au vert ?

se cache la recréation d’une équipe avec un esprit, avec

En fait, c’est un ensemble. Quand on est dans un éta-

c’était pour moi, la première des sauvegardes. Un homme

blissement qui est à ce point déficitaire, on n’a pas une

seul ne peut rien faire. Il n’y a pas de recette miracle et les

touche sur laquelle on appuie, ça n’existe pas. Il y a tout

hommes providentiels n’existent pas. Il y a, me semble-

une envie de vrai collectif. Cette envie de jouer collectif,

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

Nous devions obligatoirement ne pas dépenser plus que la collectivité pouvait nous donner. C’était le cœur du sujet : si la collectivité nous donnait 100, il fallait dépenser 100 et pas plus.

t-il, des circonstances, et puis après des hommes et des femmes qui agissent au sein de ces circonstances. Deuxième chose : il fallait créer avec le corps médical, une union sacrée. Ce sont toujours des termes guerriers malheureusement, mais cette union sacrée était nécessaire. Toujours pour la même raison, c’est que l’union fait la force et que la désunion fait la faiblesse. Si on est divisé, on ne peut pas surmonter ces difficultés. Donc, il fallait créer un noyau inséparable, indéfectible. Ce n’est pas toujours facile, car on ne décrète pas d’un seul coup que l'on va faire quelque chose avec des gens contre leur avis. Il faut obtenir leur avis, gagner leur confiance. Il faut savoir exposer son rôle, savoir respecter le rôle des autres. Ensuite, il faut savoir faire fonctionner l’ensemble avec harmonie. C’est en respectant les gens que l’on arrive à avancer.

création de la Sécurité Sociale en 1946 et finalement la prise de pouvoir par les grands groupes financiers internationaux, il fallait choisir. Moi je ne suis pas pour que dans notre pays, il y ait des hôpitaux qui soient réservés à ceux qui ont de l’argent. Je suis pour un service public ouvert à tous et financé par tous. Et, à ce moment-là, cela voulait dire que nous devions obligatoirement ne pas dépenser plus que la collectivité pouvait nous don-

Je pense que dans la manière dont cette opération a

ner. C’était le cœur du sujet : si la collectivité nous don-

été menée, la chance a joué. Je me suis bien entendu

nait 100, il fallait dépenser 100 et pas plus.

avec mon président de CME, car c’est quelqu’un qui

Voilà le message que j’ai défini au début, c’est un mes-

a beaucoup de valeur, qui a envie que cela évolue. Je

sage de simplicité, de vérité, de franchise et de courage.

me suis bien entendu également avec le Doyen, parce que c’est quelqu’un qui a une forte implication niçoise.

Après il fallait la confiance de l’ensemble des acteurs,

Et à trois, même si nous n’avons pas toujours été

c’est-à-dire la municipalité, le conseil général, les collec-

d’accord, au moins nous avons débattu des vrais pro-

tivités territoriales, mais également la confiance du corps

blèmes. Et nous avons réussi à mettre en place une

social de l’hôpital, à savoir l’ensemble des 8 000 agents

vraie synergie médicale, administrative et universitaire.

de l’établissement. Et pour arriver là, cela a été, comme je le disais tout à l’heure, énormément de communication dans laquelle

Financiarisation, retour à l’équilibre… ce vocabulaire est-il rentré dans les mœurs auprès des médecins ?

je me suis beaucoup investi de façon à ce que chacun connaisse la trajectoire prévue. Et enfin, une fois que l’on a fait tout cela, c’est un plan qu’il faut suivre, un plan de retour à l’équilibre. Pour dire : « Voilà le chemin que

vingtaine de réunions avec les personnels, les médecins

l’on va parcourir », j’ai donné les raisons du chemin, j’ai

pour expliquer et je suis parti de très loin. Je suis parti de

créé les conditions de la bonne avancée sur le chemin

la création de la Sécurité Sociale pour faire comprendre

et, ensuite, je mesure l’avancement sur ce chemin tout

sur quel chemin on était et vers où on allait. Et, entre la

au long du temps.

Au début, pas du tout. J’ai fait une quinzaine ou une

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© Sophie Boulet - CHU de Nice

reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

La confiance est-elle arrivée dès la première année ? Dès la première année, les premiers résultats ont montré que c’était possible. Nous ne savions pas si nous irions tout au bout de la démarche, mais c’était possible, car les résultats étaient encourageants. Donc, cela renforce la confiance. Et puis, si on ne fait pas de la langue de bois, tout ce que l’on a annoncé devient de plus en plus crédible. C’est pour cela aussi que je parlais

Patio de l'hôpital Pasteur 2

tout à l’heure d’ego et, quand il y a quelque chose qui ne marche pas, il faut avoir l’humilité de reconnaître : « Ça ne marche pas, on change ! » On modifie. Et cela

bon moment, on prend les bonnes décisions. Et cela va

renforce la crédibilité de celui qui reconnaît que cela ne

de pair avec la délégation : il faut laisser les gens faire

fonctionne pas. Et cela renforce la confiance.

leur métier et avoir confiance.

Je pense que les hôpitaux sont en difficulté aujourd'hui pour assurer une politique de renouvellement de leurs actions. Ils ne peuvent pas le faire seuls. Les tarifs ne comprennent pas les à-coups d’investissements comme la création d’un hôpital.

Quels ont été vos choix financiers structurants ? À mon arrivée, Il y avait plusieurs projets en discussion. J’ai dû faire des choix pour ne conserver que ceux dont on entendait qu’ils participent à un moment donné au retour à l’équilibre, c’est-à-dire des investissements qui allaient être productifs. Le grand projet Pasteur 2 qui était amorcé et qui doit permettre de restructurer les plateaux techniques est et

74

J’ai cherché à faire en sorte que les personnes

ouest du CHU ; l’Institut Universitaire Face et Cou mené

nécessaires à l’action soient bien informées et au bon

conjointement avec le Centre Antoine Lacassagne ;

moment. Les chefs de pôles, les cadres supérieurs

l’institut Claude Pompidou pour Alzheimer, pour lequel

de pôles et leurs assistants de gestion, l’équipe de

nous avions un engagement très fort de la Fondation

direction, la délégation à la recherche clinique, la Faculté

Claude Pompidou qui apportait au départ 4 millions, puis

de Médecine sont des professionnels auxquels il fallait

10 millions d’euros sur les 21 millions d’investissement.

apporter toutes les informations systématiquement,

Son inauguration a eu lieu le 10 mars cette année.

en temps réel, de façon à ce que les équipes ne se

Bien entendu, nous n’avons pas sacrifié l’équipement,

sentent jamais déconnectées de l’avancement et de la

parce qu’un CHU se doit d’être à la pointe en termes

dynamique en cours. Avec les bonnes informations au

d’équipements biomédicaux de pointe.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

« Comment faire, avec les finances disponibles, pour obtenir le meilleur et rester le plus haut possible dans la prestation médicale ? » Cela signifie faire des restructurations, fermer les structures qui ne rendent pas les services attendus, mettre un frein à la non pertinence des actes, éviter les abus, favoriser les conditions générales de bonne santé pour éviter la maladie…

Cela veut-il dire que désormais vous n’allez plus investir beaucoup ?

fessionnels de la planification et de la stratégie, de dire :

Je vais investir modestement, mais je pense, à titre

obtenir le meilleur et rester le plus haut possible dans

personnel, que les hôpitaux aujourd’hui sont en difficulté

la prestation médicale ? » Cela signifie faire des restruc-

pour assurer une politique de renouvellement de leurs

turations, fermer les structures qui ne rendent pas les

actions. Ils ne peuvent pas le faire seuls. Les tarifs

services attendus, mettre un frein à la non pertinence

ne comprennent pas les à-coups d’investissements

des actes, éviter les abus, favoriser les conditions géné-

comme la création d’un hôpital. Aujourd’hui, même un

rales de bonne santé pour éviter la maladie… en un mot,

hôpital qui fait 550 millions de budget est incapable de

mener toutes ces actions pour dégager les ressources

pouvoir assumer seul la construction d’un bâtiment de

permettant de réaliser ce qui coûte beaucoup, la haute

400 millions. On ne peut pas dégager ces sommes.

technologie et la médecine de pointe.

La santé française est-elle trop chère ? Non ! Mais on prend le problème par le bout qui me

Quels sont les points forts et les points faibles du CHU ?

semble ne pas être le bon : je veux tout, je ne veux

Nous n’avons pas de chirurgie cardiaque. Nous avons

jamais être malade, je veux être à moins de 50 km ou

une pédiatrie unifiée, bicéphale avec le privé, c’est un

30 min d’un centre hospitalier, je veux des hélicoptères

point faible pour lequel il y a des perspectives d’avenir

pour me transporter, je veux avoir des hôpitaux hauts

qui sont meilleures. Nous avons sans doute une réforme

de gamme, je veux vivre vieux, je veux être vieux et en

à faire de la psychiatrie universitaire qui est petite dans

bonne santé, et quand je suis dépendant, je ne veux pas

cet établissement, et c’est un autre point faible.

payer. Je ne veux pas qu’on augmente mes cotisations

S’agissant des points forts, toujours en santé, nous

de Sécurité Sociale, je ne veux pas qu’on fiscalise l’aide

avons des pôles forts, structurés qui fonctionnent

sociale, je ne veux pas payer pour tout cela.

très bien. Nous avons une maternité de niveau 3.

C’est contraire au bon sens, cela s’appelle le paradoxe,

Nous avons une structuration de la recherche qui est

et ce n’est pas le regard que l’on doit jeter sur la santé

bonne : par contre, dans ce domaine, nous nous

quand on est responsable d’une haute institution. Il faut

apercevons que nous nous situons dans les CHU

avoir des ambitions mais en périodes difficiles, cela

moyennement chercheurs. Or, aujourd’hui, on sent

passe obligatoirement par des choix et des sacrifices

bien que pour être présent en recherche, il faut

pour que les ambitions restent soutenables.

avoir une taille critique et cette taille critique n’est

Donc, je raisonne de la manière suivante : combien la

pas atteinte à Nice. Je ne suis pas certain que l’on

collectivité peut-elle mettre sur la table ? C’est le bud-

puisse y parvenir. Et enfin, nous sommes isolés

get de la Sécurité Sociale et le budget de l’assurance

entre frontière, mer et montagne,

maladie. Et, à partir de ce moment-là, on dit : « On ne

dans une région où il y a deux CHU, Marseille et

dépensera pas plus que ça. » Charge ensuite aux pro-

Nice et à l’extrême sud est du territoire national.

« Comment faire, avec les finances disponibles, pour

Nous sommes

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

75


reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

Un deuxième projet médical pour le président de la cme

Le président de CME doit harmoniser tous les pôles de l’établissement et faire en sorte que chaque pôle ne soit pas un État dans l'État DH MAGAZINE – Quel est le pro-

des projets qui pouvaient être communs comme en

jet médical du CHU de Nice ?

microbiologie. Tous ces groupes ont donc travaillé avec

Philippe Paquis − Le projet médical

le consultant Kurt Salmon. Cela a permis de décliner le

du CHU de Nice est finalisé pour les cinq

projet médical des spécialités composant le CHU.

prochaines années, sachant que pour

Certaines orientations restent en discussion, en particu-

ma part, ce sera mon deuxième projet

lier la chirurgie cardiaque qui nécessite une collaboration

médical. Le bilan des précédents est mi-

avec l’Institut Arnaud Tzanck dans la mesure où l’auto-

tigé puisque nous avons pris un retard Entretien avec Pr Philippe Paquis, Président de la CME

considérable sur la restructuration du CHU en raison de problèmes liés au chantier du nouvel hôpital Pasteur 2. Les objectifs du précédent projet médical n'ont donc pas pu être finalisés, ainsi le nouveau projet reprend un certain nombre de points et en particulier toute l'organisation du nouvel hôpital Pasteur 2. C'est déjà un grand défi. Pasteur 2 impacte les urgences, la réanimation,

risation n’est donnée que sur un seul site dans l’est PACA.

Le projet médical des cinq prochaines années est donc extrêmement lié, en tout cas sur ses grandes lignes, au projet structure du CHU qui, lui, a été retardé.

le pôle locomoteur, le pôle neurosciences, le pôle uronephrologie et bien entendu tout le plateau technique. Après, il faudra définir également comment vont se décliner les opérations de restructuration à l'hôpital L’Archet, qui est le deuxième site important du CHU. Nous avons des impératifs liés au CPOM, en réanimation en particulier, où il nous faut réunir sur ce site la réanimation médicale et la réanimation chirurgicale. Parallèlement, il y a le devenir de la gynécologie obstétrique, puisque nous poursuivons le projet du centre femme - mère - enfant sur le site de Lenval. Évidemment, l'organisation structurelle de L’Archet va dépendre de la vitesse et de la manière dont va s’élaborer le départ du service de gynécologie-obstétrique. Le projet médical des cinq prochaines années est donc extrêmement lié, en tout cas sur ses grandes lignes, au

Combien escomptez-vous accueillir d'urgences à Pasteur 2 ? 80 000 par an… Le nouveau service des urgences permettra d’améliorer la prise en charge des patients : qualité d’accueil, circulation des brancards et des personnels, logique de fonctionnement, etc… Les disciplines essentielles à la prise en charge des polytraumatisés comme la neurochirurgie, la chirurgie thoracique et l'urologie qui étaient avant, situées sur des sites distincts, générant des problématiques de prises en charge de certains malades, seront présentes sur le site. L’organisation générale n’était pas harmonieuse. Tout cela va être solutionné par le regroupement sur Pasteur 2.

projet structure du CHU qui, lui, a été retardé. Ensuite, il y a bien évidemment tous les éléments qui

76

construisent un projet médical, c'est-à-dire un projet de

Il y a combien de pôles au CHU de Nice ?

disciplines et de filières : nous avons organisé à peu près

Aujourd'hui, il y a 15 pôles dont 5 transversaux sans

80 interviews de groupes. Certaines disciplines avaient

compter la pédiatrie. En ce qui concerne celle-ci, nous

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


avions d’abord un GCS et maintenant un ESPIC, qui représente la réunion de la pédiatrie du CHU et de la pédiatrie de la fondation Lenval.

Cela n’a pas été simple, ce rapprochement avec le privé ?

© Laurent Guiraud - CHU de Nice

reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

C'est un secteur privé à but non lucratif. Le premier hôpital pédiatrique à Nice a été établi Promenade des Anglais, c'était l'hôpital Lenval, du nom du baron polonais Lenval, qui fait un legs important pour construire un hôpital pour enfants. Donc, pendant près de 150 ans tous les enfants de Nice étaient soignés là-bas, jusqu'à ce que le CHU soit créé en 1973. Il a donc fallu organiser la pédiatrie universitaire au CHU qui s'est retrouvé, ipso facto, en compétition avec Lenval. Pendant 40 ans, on a eu une dualité avec une activité de pédiatrie sur deux sites qui étaient très proches. Il y avait 50 % d'activité à Lenval et 50 % d'activité au CHU. Compte tenu de la tarification à l’activité (T2A) et des problèmes financiers,

L'hôpital Pasteur 2

le mariage forcé a eu lieu. Même les plus réticents se rendaient bien compte qu'il fallait arriver à cette action.

Vous êtes vous-même chef de pôle ? Non, ce n’est pas possible. On ne peut pas être chef de

Avec la T2A, chaque pôle pourrait se sentir en compétition. Ce n'est pas le but. La compétition se situe vis à vis de l'extérieur.

pôle sur le plan législatif en même temps que président de la CME dans un CHU. Dans ma fonction, je traite préférentiellement avec les chefs de pôle et, si un problème général éclate dans un service, on le règle en communauté : président de CME et chef de pôle.

Quel bilan tirez-vous de cette collaboration ? Pour l'instant, le bilan est plutôt favorable puisque nous avons réussi à poursuivre la restructuration du CHU et

Comment vivez-vous votre fonction de président de la CME ?

à le ramener à l’équilibre financier et ceci surtout grâce

Le président de CME doit harmoniser tous les pôles de

dernières années, à créer l’ESPIC Lenval qui structure

l’établissement et faire en sorte que chaque pôle ne

la pédiatrie niçoise, et une collaboration avec le Centre

soit pas un État dans l'État. Avec la T2A, chaque pôle

Antoine Lacassagne qui a permis la création de l'Insti-

pourrait se sentir en compétition. Ce n'est pas le but.

tut Universitaire de la Face et du Cou. L’Institut Claude

La compétition se situe vis à vis de l'extérieur. Le prési-

Pompidou a également été créé.

à une augmentation significative de l’activité durant ces

dent de CME organise des réunions de chefs de pôle et essaie d’apporter une réflexion commune à tous les responsables, de leur proposer des objectifs clairs. L’idée

Qu’en est-il de la certification ?

est de présenter les contraintes générales aux chefs de

La certification 2010 a été très positive avec simple-

pôle et de donner une dimension institutionnelle à leurs

ment 2 recommandations qui ont pu être levées. De

actions.

nombreux groupes de travail sont mis en place pour

Tout ce travail de fond se fait en binôme avec le Direc-

établir un diagnostic sur nos process de soins pour

teur Général, depuis 6 ans.

la prochaine certification qui aura lieu en 2015.

n

DH DHMagazine Magazine148 149// 12ere trimestre 2014

77


reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

Un formidable outil de travail : Pasteur 2

DH MAGAZINE – Pouvez-vous

les moyens mis à disposition des professionnels pour

nous éclairer sur la manière

prendre en charge ce patient. Cela veut dire qu’il faut

de mettre en œuvre un tel

réfléchir à tout ce qui est, ce qu’on appelle dans notre

projet ? Structure, logistique,

jargon, les fonctions support, la logistique générale et

organisation, conduite de pro-

hospitalière ; c'est-à-dire, la stérilisation, la pharmacie,

jet… Quels sont vos rôles res-

le matériel médical, le linge, la restauration, les consom-

pectifs ? Josiane Nègre − La mission Entretien avec Xavier Garret, ingénieur en chef & Josiane Nègre, cadre supérieure

Pasteur 2 couvre d’une part les organisations des process de prise en charge, les opérations de transfert et de déménagement, et d’autre part, les fonctions de

mables…. C’est donc toute cette structuration des circuits et des dynamiques des flux, aussi bien individus que matières qui ont fait l’objet de « chantiers » auxquels ont participé, au sein des groupes de travail, de nombreux acteurs de terrains.

maîtrise de l’opération de construction. Au sein de cette mission, je m'occupe, avec Cécile Tagliana, de la partie organisation des process et Xavier Garret de la partie construction. Il y a une volonté de traduire, dans un lan-

Elle a le regard « utilisateurs » et, moi, j'ai le regard « constructions ».

gage compréhensible par tous, la dimension « architecture» et la partie prise en charge, tant du point de vue des patients que de celui des professionnels. Xavier Garret − Elle a le regard « utilisateurs » et, moi, j'ai le regard « constructions ».

Nous allons ouvrir la première tranche de Pasteur 2 en 2014. Au départ, le programme technique détaillé a été élaboré à partir du projet médical de l’établissement. Ensuite, des réponses architecturales qui ont été apportées en 2003, dans le cadre d’un concours d'architecture inter-

78

J.N. − Pour ce qui est de l’architecture, Xavier vous en

national. C’est le projet de l’architecte Bernard Reichen

parlera sans doute mieux que moi. Pour ma part, le tra-

qui a été retenu par le CHU de Nice. La réponse archi-

vail consiste à garantir la cohérence entre les organisa-

tecturale a fait l'objet d'un travail interactif entre les

tions liées aux différentes prises en charge et l’architec-

équipes médicales et les architectes, de 2003 jusqu'à

ture du bâtiment avec la distribution des locaux. Pour

2006. Ensuite, il y a eu une phase de consultation des

cela, dès l’origine du projet, des principes structurants,

entreprises, qui a duré de 2006 à 2007. Le chantier de

concernant les flux et les relations fonctionnelles, ont

construction a pu démarrer à la fin de l’année 2007. En

été définis. Pour le dire simplement, considérons une

2010, durant la phase de construction, est intervenue

hospitalisation quelconque, quelle que soit la spécia-

une « densification » du projet. Nous avons intégré no-

lité ; la démarche de travail consiste à prévoir l’itinéraire

tamment un quatrième pôle clinique, le pôle uro-néphro-

du patient jusqu’au lieu d’hospitalisation et à organiser

logie, les trois premiers étant : le pôle neurosciences, le

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© Geneviève Robiquet - CHU de Nice

reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

pôle locomoteur et le pôle cardio-vasculaire-thoracique. Ces quatre pôles cliniques sont complétés par le pôle urgences, le pôle anesthésie-réanimation et le pôle blocs opératoires. L’intégration de ce quatrième pôle clinique a nécessité de revoir la disposition et l’implantation de certaines unités. Il s’agit là du premier point. La deuxième modification majeure a été d’intégrer également dans Pasteur 2 des fonctions centrales telles que la pharmacie et la stérilisation. Ce sont les deux secteurs logistiques qui ont fait l’objet de modifications importantes.

Un projet qui a donc beaucoup évolué et des marchés à revoir ? X.G. − Nous avons adapté les marchés, passé des avenants importants avec les entreprises et le maître d'œuvre, pour prendre en compte toutes les modifications importantes. J.N. − Avec des projets phares qui sont liés aux évolutions actuelles de notre système de santé. Comme, par exemple, le développement de la chirurgie ambulatoire, que nous avons voulue à la hauteur des ambitions territoriales ; cela implique également de repenser un certain nombre de projets médicaux, en particulier au niveau des technologies (nouvelle IRM...), avec cet aller-

Patio de l'hôpital Pasteur 2

retour permanent sur la gestion d'un chantier et l'évolution attendue. Là encore, nous nous sommes appuyés sur les utilisateurs au travers de groupes de travail médicaux. X.G. − On vit aussi avec l'évolution de la réglementation et l'évolution des pratiques. L'évolution du matériel éga-

Un neurochirurgien pourra passer un examen d'IRM avant et pendant l'opération pour vérifier si le geste opératoire a été satisfaisant. Il s’agit d’un dispositif rare en France.

lement. Par exemple, à Pasteur 2, nous allons avoir, et c'est relativement unique en France, une salle de neurochirurgie qui va être connectée à une IRM. C'est-à-dire qu'un neurochirurgien pourra, avant l'opération, passer un examen d'IRM à son patient, commencer l'opération, revenir à l'IRM, pour vérifier si le geste opératoire a été satisfaisant, s'il a atteint le résultat attendu, revenir au

Vous évoquez justement, dans ce document, un équilibre entre l'est et l'ouest de la ville, est-ce que vous pouvez nous en dire un petit peu plus ? X.G. − Il s'agit d’un des principes du plan directeur qui

d’un dispositif rare en France.

a été validé en 2002. Aujourd'hui, le CHU de Nice est

bloc pour terminer l'opération ou la poursuivre. Il s’agit

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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© Laurent Guiraud - CHU de Nice

reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

réparti sur plusieurs sites : l'Archet, Pasteur, Saint Roch, Cimiez, nous avons également un site annexe à Tende. L’objectif du plan directeur est de réunir les hôpitaux de Pasteur et Saint Roch pour créer Pasteur 2, Archet est maintenu et doit faire l’objet d’une restructuration en profondeur, tant fonctionnelle que technique. Donc l'offre médicale de court séjour va être répartie, 50 % à l’Archet, à l'ouest de la ville, et 50 % à l'est de la ville, avec Pasteur 2. L'hôpital Pasteur 2

Le trauma-center est un des objectifs de la réorganisation médicale des urgences mise en œuvre par l’équipe du Pr Jacques Levraut. cette hélistation pour également lui associer une aire de garage. L'hélicoptère pourra donc se poser et se dépla-

Qu'est-ce que le trauma-center ? J.N. − Le trauma-center est un des objectifs de la réorganisation médicale des urgences mise en œuvre par

cer ensuite en le tractant vers cette aire de garage, pour laisser la place à un autre hélicoptère qui pourra atterrir en toute sécurité. C'est également un projet que l'on est en train d'étudier.

l’équipe du Professeur Jacques Levraut. Un centre d'urgences est qualifié de trauma-center – niveau 1, 2, ou

J.N. − Cette hélistation, est l'un des critères néces-

3 – s’il répond à certains critères médicaux de présence,

saires pour avoir une labellisation du « trauma-center »,

en termes de compétences et de moyens mobilisables

puisque tout le plateau d'urgences est situé dans ce

en permanence et 24 h / 24 pour une prise en charge de

bâtiment.

traumatisés sévères. C’est un « label » qui est donné à un plateau d'urgences quand il répond à tous ces critères.

D’une manière générale et avec recul, que pouvez-vous ajouter ? X.G. − En tant que maître d'ouvrage, le CHU de Nice

Quelles sont les contraintes physiques réglementaires pour les déplacements héliportés, car j'ai vu que vous aviez une hélistation ?

respecte l'œuvre architecturale de ceux qui ont conçu

X.G. − Il s’agit d’une question complexe dans la me-

à nos contraintes et nos attentes. Cela n'a pas été tou-

sure où on intègre des contraintes environnementales

jours facile, notamment compte tenu du site particulière-

par rapport aux perturbations que l’équipement peut

ment complexe sur le plan urbain et géologique. Malgré

générer pour les populations situées autour de ce site,

certaines difficultés, la volonté du maître d'ouvrage a

puisque nous sommes en ville. Nous avons donc réalisé

été de respecter au maximum le parti pris architectural

des études d'impact et nous avons obtenu l'autorisation

initial.

le projet. Après, il y a toujours une part de subjectivité, mais, d’un point de vue fonctionnel, ce projet a répondu

de créer cette hélistation. Nous sommes actuellement

80

en cours de réalisation et très bientôt, nous allons dépo-

J.N. − Que, pour une fin de carrière, c'est un très beau

ser une demande d'exploitation de cette hélistation. Il

projet, difficile, mais très intéressant ; Pasteur 2 sera

existe aussi un projet d'extension et d'aménagement de

un formidable outil de travail.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

n


© AP-HM

reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

La Recherche :

fer de lance pour un CHU de pointe !

DH MAGAZINE – Quelles sont les données « de base » matérialisant la recherche au CHU ? Stéphane Sweertvaegher − Pour vous donner un ordre d'idée globale sur le CHU de Nice et l'activité de recherche clinique, nous avions en 2013, 1079 études cliniques en cours. Ces études se répartissent en : • 483 études académiques, donc promues par des établissements de santé autres que le CHU ou des sociétés savantes, des organismes de recherche, • 484 études industrielles, dont le promoteur est un industriel, la plupart du temps pharmaceutique,

Entretien avec Pr Emmanuel Van Obberghen, PU-PH en biochimie, Viceprésident Recherche du Directoire et président du Comité de la Recherche Biomédicale et en Santé Publique (CRBSP), Pr Xavier Hébuterne, PU-PH en nutrition, chef du pôle digestif, gynécologie, obstétrique et président de la délégation à la recherche clinique et de l'innovation (DRCI) du CHU de Nice & Stéphane Sweertvaegher, Directeur de la recherche clinique et de l’innovation

• et 145 études qui sont promues par le CHU de Nice. Il convient d’ajouter à ces études cliniques 12 projets

chaque année via les MERRI. Le CHU de Nice est le

xavier Hébuterne − Ce qu'il faut bien comprendre,

14 établissement de santé en France en termes de

dans la recherche clinique, c'est qu'il s'agit d'expérimen-

scores SIGAPS, c'est-à-dire en termes de publications

tation chez l'homme, de médicaments ou de pratiques

scientifiques. Il est classé 25e en score SIGREC, c'est-

médicales. Alors, qu'est-ce que cela apporte aux ma-

à-dire en fonction du nombre d'études et d'inclusions

lades ? Cela apporte plusieurs choses : premièrement,

dans des études cliniques interventionnelles.

cela va permettre d'aboutir à une meilleure connais-

Ces chiffres représentent et démontrent le dynamisme

sance de la pratique médicale et donc cela va en faire

des équipes du CHU en termes de publications et donc

bénéficier le plus grand nombre. Pour ma part, je tra-

d'activité scientifique, puisque le CHU n’est pas classé

vaille beaucoup dans le domaine des maladies inflam-

14 en effectifs hospitalo-universitaires ou même hospi-

matoires intestinales et une équipe française a démon-

taliers. Ce bon classement, nous le devons aux coopé-

tré que, dans certaines circonstances, associer deux

rations étroites qui ont été nouées par les équipes du

médicaments permettait d'améliorer la cicatrisation des

CHU avec des organismes de recherche puisque, sur

lésions, cela a même fait l'objet d'une publication dans

le site même du CHU, nous avons des grands centres

le New England Journal of Medecine, l'un des meilleurs

de recherche dans lesquels plusieurs hospitalo-universi-

journaux. Ce travail a profondément modifié la prise en

taires jouent un rôle important.

charge des malades.

Fonds unique interministériel - FUI - PACA Labs…). On peut mesurer la position du CHU de Nice à tra-

e

e

vers différents scores que la DGOS nous communique

Mais que reste-t-il de ces chiffres in fine pour le malade ? C'est-à-dire, quelle recherche a-t-on obtenue ? A-t-on une molécule nouvelle ? Est-ce qu'on a une nouvelle pratique sur un produit ? Estce qu'on a une façon d'expérimenter des choses ?

dits « innovants » en cours (programmes européens,

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reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

Lorsque l’on compare des études où le CHU est promoteur, avec des études internationales pilotées par des grands groupes industriels, nous ne sommes pas encore tout en fait au niveau par manque de moyens, mais on s'en approche, nous n'avons vraiment pas à rougir d'une rigueur scientifique qui permet de croire dans les résultats. ▲

ponibles avant leur mise sur le marché. Alors certes, il

Le Général de Gaulle s’était un jour exclamé : « Des chercheurs qui cherchent, on en trouve. Mais des chercheurs qui trouvent, on en cherche. » Qu’en pensez-vous ?

n'est pas certain du résultat puisqu'il s'agit de molécules

E.V.O. − Je pense que la recherche en amont est beau-

encore en expérimentation, mais bien souvent, il bénéfi-

coup plus ingrate, il y a des chercheurs qui vont chercher

cie du traitement et, la plupart du temps, les premières

à faire des efforts importants pendant des années pour

semaines de ces essais se font en placebo et ensuite,

arriver peut-être à quelque chose qui va aboutir. Nous

en cas d'échec, le patient passe en période ouverte et

n'avons pas toujours les résultats escomptés.

La frontière entre la recherche et les soins courants, dans un CHU, est floue. Aujourd'hui, lorsqu’un malade est en échec thérapeutique des molécules innovantes sont dis-

reçoit le médicament. Cela permet donc au malade qui participe à l'essai de bénéficier de l'innovation cinq ans

S.S. − Et justement, pour venir en support de la re-

ou quatre ans avant sa commercialisation. Ce sont des

cherche clinique appliquée stricto sensu à l'homme

choses que l'on essaie d'expliquer aux patients pour les

directement au CHU de Nice, nous avons différentes

inciter à participer.

plates-formes de recherche clinique : • La tumorothèque qui est commune avec le Centre Antoine Lacassagne et est dirigée par le professeur Paul

Un malade qui entre dans un essai clinique est comme sous un microscope. Il a toute l'attention que nécessite la recherche.

Hofman qui collecte et conserve des échantillons biologiques, mais qui fait aussi plus que ça, puisqu'il les valorise par les travaux académiques qu'il mène pour son propre compte sur ses thématiques de recherche et en lien avec d'autres équipes académiques. Il travaille notamment sur les cellules tumorales circulantes. • Le CHU de Nice dispose également d’un Centre de Re-

Lorsqu'un malade entre dans un essai clinique, je suis

cherche Clinique coordonné par le Pr Philippe Bahadoran

convaincu qu'il est mieux pris en charge. Il y a beaucoup

qui est lui aussi commun avec le Centre Antoine Lacas-

plus d'attention qui est donnée à ce patient, on va faire

sagne et est situé dans les locaux de l’Archet. Il s’agit

attention à tout, la moindre chose doit être décortiquée,

d’un endroit dévolu à la recherche clinique avec du

parce qu'il est comme sous un microscope, la prise en

personnel dédié, pour que la recherche se fasse dans

charge est donc meilleure qu'avec des soins courants.

des lieux identifiés avec du personnel formé. Un des

Nous avons eu le cas avec le natalizumab pour la mala-

éléments complexes s’explique par le fait que, si vous

die de Crohn.

donnez plus d'attention à un patient, si vous suivez son

Emmanuel Van Obberghen − Il y a aussi des

les équipes hospitalières des différents services qui ont

patients très motivés, dans le contexte du diabète par

besoin d'aide. Ce centre de recherche clinique a été

exemple, le placebo a en général des actions béné-

labellisé par la DGOS fin 2011.

fiques sur l’équilibre du diabète, parce que ces patients

• Nous avons aussi d'autres unités comme une Unité de

se suivent beaucoup mieux et font très attention aux

Thérapie Cellulaire, dirigée par le Dr Alain Doglio.

consignes.

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respect du protocole, c'est aussi très chronophage pour

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© Fotolia

reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

X.H. − L'objectif du CHU de Nice est d’essayer d'aider

connaissons par notre pratique hospitalière. Demandez

les praticiens à développer leur activité de recherche.

à un chirurgien qui est à 6 h au bloc de faire de la re-

Pour cela, il faut avoir, sur le terrain, dans les services,

cherche, je crois que c'est tout de même un peu plus

du personnel de qualité, afin de les aider. Nous avons

compliqué. En fonction des disciplines, on peut avoir ou

une cinquantaine d'attachés de recherche clinique, tra-

pas plus de facilité.

vaillant sur le côté promotion et investigation au niveau du CHU.

X.H. − Le médecin dit souvent : « Je n'ai pas le temps, j'ai trop de charges… ». Donc il faut l'inciter et l’aider,

E.V.O. − Par ailleurs, le CHU bénéficie d’un environ-

après, il va y prendre goût. Aujourd'hui, nous avons l'im-

nement favorable avec la présence d’équipes d’EPST

pression qu'il y a quelques grosses équipes qui font de

de renommée internationale qui développent une re-

la recherche et puis, pour certains, le niveau est faible

cherche « fondamentale » de haut niveau… Il s’agit donc

alors qu'il y a quand même du potentiel. Le but est d'es-

d’établir des passerelles efficaces pour que l'on fasse

sayer d'amener là où il y a du potentiel, où il y a des

de la recherche translationnelle, c'est-à-dire que l'on va

questions pour essayer d'aider les gens.

partir de l'idée jusqu'à l'amélioration visible dans la prise

Si l'on prend les trois acteurs, il y a le patient, le praticien

en charge du patient.

et l'institution. • Le patient : il s'agit d'une demande de la part des associations de malades de pouvoir être inclus dans des pro-

Les médecins sont-ils spontanément demandeurs, ou est-ce qu'au contraire, il faut les « pousser » un peu ?

tocoles, car il y a beaucoup de communication autour de

E.V.O. − Les deux, cela dépend des disciplines. Je suis

être un patient inclus dans un protocole. Le temps de la

diabétologue de formation, mais maintenant je suis bio-

recherche où il n'y avait pas de règle est terminé. Ces

chimiste et c'est clair que l'on ne voit pas le malade,

préjugés restent très présent dans l'inconscient collectif,

donc on est un peu plus disponible et les technologies

mais nous ne faisons pas de la recherche sur un coin de

que l'on utilise pour la recherche en amont, nous les

table. Nous sommes très encadrés par des normes, des

la recherche clinique pour expliquer qu’être inclus dans des protocoles, cela n'est pas être cobaye, mais c'est

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reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

Un responsable d’équipe doit être un manager de la recherche qui non seulement mène le projet et anime l’équipe mais est aussi capable de récolter les fonds nécessaires. Enfin être clinicien-chercheur, cela ne s’improvise pas. Il faut donc motiver et former les jeunes dès leur début dans leur parcours hospitalier. ▲

bonnes pratiques cliniques, nous sommes responsables

tives, des charges organisationnelles dans le service,

pénalement, aussi bien le praticien que l'établissement.

nous avons beaucoup de charges et la recherche, c'est

• Le praticien, qui est motivé par l'intérêt scientifique et

quelque chose que nous faisons en plus.

par la recherche clinique peut même être motivé par le fait d'améliorer sa pratique professionnelle. • L'institution se situe derrière tout cela, c’est la mission d’un CHU.

Qu'avez-vous encore à dire pour promouvoir la recherche ?

Il y a en effet la triple mission et notamment la mission

X.H. − J'ai l'avantage d'avoir un petit peu d'expérience

recherche, c'est donc à nous de faire en sorte de motiver un peu tout le monde, toutes les équipes, pour faire vivre cette dimension recherche. Pour la faire vivre, il faut aider les praticiens, c'est le rôle de la DRCI. S.S. − Et pour motiver, il faut également montrer qu’un CHU est aussi financé en fonction du dynamisme de sa recherche. Les MERRI sont à la recherche ce que la T2A est aux soins. Donc, un hôpital qui ne fait pas de recherche a désormais moins de moyens.

Quelles sont les coopérations internationales que vous avez en cours ? X.H. − Beaucoup d'études sont maintenant multicentriques et internationales, il y a donc beaucoup de coopération internationale. Au plus proche de chez nous, il y a les projets européens, les projets transfrontaliers, et il y a aussi beaucoup d'études sur l'international et donc

et je trouve que cela est fascinant de voir cette évolution vers un vrai professionnalisme, même s’il y encore des progrès à faire. Et lorsque l’on compare des études où le CHU est promoteur, avec des études internationales pilotées par des grands groupes industriels, nous ne sommes pas encore tout à fait au niveau par manque de moyens, mais on s'en approche, nous n'avons vraiment pas à rougir d'une rigueur scientifique qui permet de croire dans les résultats. E.V.O. − Une recherche clinique de qualité dépend de plusieurs choses. Il faut tout d’abord avoir une « bonne » idée, il faut écrire le protocole, et enfin il faut le soumettre à des appels à projet…. En effet, la recherche quelle qu'elle soit, a besoin de moyens financiers. Un élément important est la durée car un projet se fait en général sur plusieurs années. Il faut donc des moyens fi-

des relations quotidiennes avec différents organismes,

nanciers appropriés et une équipe de qualité et motivée.

des structures de recherche qu'elles soient aux États-

Pour qu'une équipe de recherches se construise, il

Unis, en Angleterre, en Allemagne…

faut que les gens s'entendent, et qu’ils aient envie de travailler ensemble, mais il faut aussi qu’ils obtiennent des financements sur quelques années. Un respon-

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Les médecins chercheurs sont donc systématiquement des passionnés ?

sable d’équipe doit être un manager de la recherche qui non seulement mène le projet et anime l’équipe

E.V.O. − Il faut être passionné parce que, que vous le

mais est aussi capable de récolter les fonds néces-

vouliez ou non, cela va venir en plus de votre travail

saires. Enfin être clinicien-chercheur cela ne s’impro-

hospitalier et d’enseignant. Nous avons des charges

vise pas . Il faut donc motiver et former les jeunes dès

de soins, d'enseignement, des charges administra-

leur début dans leur parcours hospitalier.

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n


reportage DH : CHU de Nice (alpes maritimes)

LE CHU, UN ACTEUR MAJEUR DANS L'ÉCONOMIE DE LA RÉGION Étude de la Chambre de Commerce et d'Industrie Nice Côte d'Azur à l'appui DH MAGAZINE – Vous avez mené, une Étude avec l’Observatoire Économique Sirius de la Chambre de Commerce et d’Industrie Nice Côte d’Azur, sur l’impact économique du CHU dans son Département. C’est la première fois qu’un Établissement de santé entreprend une telle étude en France. Pourquoi ? Martine Rajzman − L’objectif de cette investigation est de déterminer le poids économique et social d’un établissement comme le CHU de Nice sur son environnement et d’apporter des éléments de connaissance supplémentaires utilisables en politique générale. C’est aussi un moyen de sensibiliser la population, les entreprises et les média au rôle majeur du CHU de Nice dans l’économie locale. On connaît les investissements ou dépenses directs, et on entend généralement que la santé « coûte ». Elle coûte, certes par choix de société. Mais elle ne fait pas que coûter. On oublie qu’elle crée de l’activité et des emplois dans le secteur privé, en faisant travailler des entreprises. Un CHU, est un acteur et un partenaire économique à part entière qui ne fonctionne pas en vase clos. Mon souhait était de pouvoir communiquer sur des éléments tangibles dans ce registre et aussi de proposer un autre regard sur le CHU : à la fois pour ses propres salariés et pour son environnement.

Combien de temps a duré cette étude et quelle méthodologie Sirius a-t-il développé ?

Les résultats permettent d’asseoir des politiques de dé-

Entretien avec Martine Rajzman, veloppement régional et confirment que les activités de Directrice de la santé jouent un rôle dans l'investissement local et dans Communication-Culturela qualité de vie. Elles contribuent au développement Documentation

économique et à l’attractivité du territoire.

Munie de cet outil, qu’allez-vous en faire ? Les résultats ont défini qu’avec un budget de 570 millions d’euros, et près de 8 000 salariés, le CHU de Nice génère 1,456 milliard d’euros dans l’économie locale ainsi que 16 397 emplois équivalent temps plein en impact global (impact direct + impact indirect + impact induit). Dans un premier temps, cela nous a permis de présenter l’étude aux établissements financiers qui ont été surpris des résultats et sont aujourd’hui en mesure de considérer différemment leur engagement. Elle a été également

Ce travail a duré 18 mois et a inclus des enquêtes auprès

diffusée à l’équipe de direction, aux chefs de pôles ; elle

des patients, des patients étrangers, des étudiants, des

a fait l’objet d’une communication dans le journal interne

médecins organisateurs de congrès ou formations de

pour que chacun se sente fier de ce que représente le

dimension nationale ou internationale à Nice. Pour la

CHU. L’étude a également fait l’objet d’une présentation

mener, j’ai sollicité l’aide de toutes les directions pou-

aux DAF des autres CHU de France.

vant être concernées et des médecins. La direction des

Peut-être que ce type d’étude pourra se développer

finances a été très impliquée et je remercie ma collègue

par des partenariats similaires entre les CHU ou les

Bénédicte Soilly.

CHR et les CCI concernées. À terme, on peut imaginer

Cette étude fait ressortir la place majeure du CHU à Nice

avoir une connaissance plus large et nationale du poids

comme acteur économique de la ville et des Alpes-Ma-

de ces structures, de leur impact, de leur rôle structu-

ritimes en général. La CCI Côte d’Azur avait déjà réalisé

rant pour l’économie, au-delà des missions essentielles

des études similaires dans d’autres secteurs d’activité.

de Soin, Enseignement et Recherche.

n

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Centre Hospitalier Régional

Metz-Thionville

Reportage de Philippine Letang, membre d'EHESP Conseil, association des élèves de l'École des Hautes Études en Santé Publique (EHESP) Photos du reportage fournies par le CHR Metz-Thionville

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CHR de Metz-Thionville Mobilisation générale

© CHR Metz-Thionville

Ce n’est pas par hasard si la « performance » a été – et est toujours – l’un des axes prioritaires du CHR. Pas plus qu’une offre médicale diversifiée et compétente... Encore moins celle d’une politique immobilière mobilisatrice dont l’un des fleurons est le nouvel hôpital de Mercy. C’est le résultat du travail, aussi opiniâtre que patient, d’un CHR et de ses salariés.

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Sans © Philippe Gisselbrecht - CHR Metz-Thionville

réserve

Véronique Anatole-Touzet, directeur général du CHR Metz-Thionville

Le CHR se répartit sur 8 sites : le nouvel hôpital de Mercy, l’hôpital Femme-Mère-Enfant rattaché à celui de Mercy, l’hôpital Félix Maréchal, l’hôpital d’Hayange, l’hôpital Beauregard, l’hôpital Bel-Air, la maison de retraite Saint Jean et la maison de retraite Le Parc. La structure offre 2 031 lits sur l’ensemble de ses sites, dispose de 5 760 personnels, forme des étudiants et se situe au 17ème rang en terme d’activité parmi les CHRU. Le CHR de Metz-Thionville est donc un établissement de référence pour un bassin de population de 600 000 habitants. L’inauguration de l’Hôpital de Mercy et de l’Hôpital

Depuis 2007, l’amélioration de l’efficience et de la performance de l’organisation de ses services sont des axes prioritaires pour le CHR. C’est ainsi que le déficit est passé de 13,7 millions en 2007 à 7,5 millions en 2010 pour arriver presque en équilibre en 2012

Femme-Mère-Enfant du 11 décembre 2013 et la rénovation de l’hôpital Bel-Air à Thionville donnent le coup d’envoi d’une nouvelle dimension pour le CHR de MetzThionville. Depuis 2007, l’amélioration de l’efficience et de la performance de l’organisation de ses services sont

Perspectives 2014 du CHR :

des axes prioritaires pour le CHR. C’est ainsi que le défi-

- poursuite de l’adaptation de l’offre de soins territoriale ;

cit est passé de 13,7 millions en 2007 à 7,5 millions en

- préparation de la visite de la HAS en septembre 2014 ;

2010. Il aurait pratiquement pu parvenir à l’équilibre s’il

- poursuite d’une politique de retour à l’équilibre

n’avait dû assumer la reprise de l’ESPIC d’Hayange en

budgétaire ;

2012... Pour autant, avec tous ces progrès constants,

- reconstruction de la maternité de Thionville ;

le CHR renforce sa position sur le territoire et la qualité

- élaboration d’un nouveau projet d’établissement qui

de ses prestations. Il est par ailleurs certifié par la HAS

- poursuite des coopérations hospitalières et territoriales.

sans réserve depuis 2007.

donnera lieu à de nouveaux contrats de pôle ;

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Politique immobilière et de travaux

L’hôpital de Mercy est avant tout un hôpital de recours. Il comporte toutes les technologies médicales (sauf celles de la neurochirurgie). L’aspect technologique est donc particulièrement important. L’architecture du nouvel hôpital a surtout mis en évidence une gestion brillante des flux de patients, logistiques (linge, repas aux malades,…), et ceux du personnel. En effet, la conception architecturale a parfaitement intégré cette gestion des flux tout en facilitant l’accès aux pôles très différents et en assurant la sécurité des visiteurs. L’hôpital de Mercy est construit sur 6 étages Entretien poursuivi avec Gilles Gollet, Directeur des travaux, du biomédical, de la maintenance, de l’environnement et de la sécurité

avec un hall d’entrée très moderne et spacieux et une entrée à part pour l’hôpital Femme-Mère-Enfant. L’hôpital centralise un plateau technique important avec l’ensemble des services d’hospitalisation organisés tout autour de celui-ci. Ainsi, il n’existe qu’un seul ensemble de plateaux techniques dont l’accès est suffisamment

L’hôpital Mercy a fait le choix de conserver des grands axes auxquels de potentielles extensions pourront se rattacher facilement. La maternité est la première structure à se greffer ainsi sur l’établissement principal.

rapide pour l’ensemble des activités. L’organisation autour de ces plateaux techniques permet ainsi de garantir un accès différencié entre les services. Par ailleurs, le confort des patients est amélioré : le

TIS, nouveau transport en commun sur la ville. On peut constater aujourd’hui la réussite de ce projet immobi-

nouvel hôpital est composé de 85 % de chambres indi-

lier qui a nécessité de très faibles travaux « d’ajuste-

viduelles sur l’hôpital adulte et de 96 % dans l’hôpital

ment ». Cette réussite réside, selon le Directeur des

Femme-Mère-Enfant. L’ingéniosité réside également

travaux Monsieur Gollet, dans le fait que cet hôpital « a

dans la faculté pour l’établissement de se projeter dans

été conçu par des hospitaliers » de la première réunion

l’avenir. L’hôpital Mercy a fait le choix de conserver des

de conception à la dernière.

grands axes auxquels de potentielles extensions pourront se rattacher facilement. La maternité est la première structure à se greffer ainsi sur l’établissement principal. L’établissement a également fait le choix d’une standardisation totale des locaux permettant éventuellement de fermer certains lits d’un service pour en ouvrir

90

Le système de pilotage

automatisé des chariots logistiques par wifi

dans un autre. Son architecture permet donc une réelle

Le nouvel hôpital a prévu un système de pilotage auto-

souplesse de gestion de l’activité.

matisé de ses chariots. Le trajet est en mémoire dans la

Le choix de l’implantation de la nouvelle structure n’est

machine et des capteurs sont placés au sol afin de per-

pas neutre. Il se situe au sein d’une ZAC innovation de

mettre le « recadrage » de la machine en cas de dérive

santé qui va accueillir des entreprises en lien avec le

ou d’évitement d’obstacles. Les chariots arrivent « en

secteur médical. La zone qui est éloignée du centre-ville

gare » et le personnel est aussitôt averti par SMS ou

est toutefois très facile d’accès par le biais du MET-

par email. Ce dispositif a permis la création d’un nou-

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© CHR Metz-Thionville

reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Dans l’ensemble du bâtiment, a été mis en place un contrôle énergétique des pièces veau métier : celui des postes d’aides hôteliers et logistiques. Cela permet ainsi de réduire considérablement les TMS et de recentrer les compétences des soignants sur le domaine médical. L’hôpital de Metz compte ainsi 12 machines qui parcourent au total 48 000 km par an, 700 mouvements/jour.

Le contrôle énergétique du nouvel hôpital

Dans l’ensemble du bâtiment, a été mis en place un contrôle énergétique des pièces (allumage de certaines lumières uniquement en cas de passage, baisse de l’intensité lumineuse à certaines heures, © Philippe Chagnon - CHR Metz-Thionville

contrôle de température, production du chauffage au bois par le biais de la chaufferie (du chauffage urbain de la ville de Metz). Les deux chaudières de secours de l’établissement fonctionnent seulement lors des phases de tests. Ainsi, l’établissement a été reconnu qualité HQE et correspond aux normes de 2005.

n Couloir de l'hôpital de Mercy

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

force majeure

Une implication majeure dans les coopérations hospitalières et territoriales L’établissement de Briey,

Les ARS proposent de plus en plus la mise en place de directions communes afin de mieux prendre en compte les établissements de proximité dans l’organisation des soins. Pour l’établissement de Briey, la direction

© CHR Metz-Thionville

une gestion partagée par le CHR de Metz-Thionville

commune a débuté en 2007. Ainsi, le site conserve son autonomie juridique et possède un budget propre, mais l’équipe de direction n’est pas distincte de celle du CHR. Chaque directeur et directeur adjoint gèrent leurs dossiers au CHR et à Briey. Le choix d’une direction commune s’est avérée nécessaire. Le site de Briey connaissait des tensions institutionnelles importantes. La reprise Entretien avec Marc Tochon, Secrétaire général, Directeur délégué du centre hospitalier de Briey

d’un établissement d’un département voisin, à savoir la Meurthe et Moselle est due à la proximité géographique. Briey est beaucoup plus proche de Metz que de Nancy. La ville de Briey est située en Meurthe et Moselle pour des raisons historiques. Sous la responsabilité de l’équipe de direction commune de nombreuses actions de réorganisation ont été lancées :

D’un point de vue budgétaire, cette politique ambitieuse s’est traduite par une diminution du déficit du site avec le soutien de l’ARS de Lorraine.

• Création d’un nouveau service de chirurgie orthopédique et de chirurgie viscérale par regroupement de

92

deux services sous occupés.

Briey a vu son activité augmenter et on ne dénombre

• Réorganisation du bloc opératoire.

pas moins de 1000 accouchements pratiqués par an.

• Mise aux normes de son équipement d’endoscopie.

D’un point de vue budgétaire, cette politique ambitieuse

• Rapatriement des soins de suite sur le site principal

s’est traduite par une diminution du déficit du site avec

permettant d’engager la cession d’un bâtiment vétuste.

le soutien de l’ARS de Lorraine. Il est passé ainsi de 3,8

9 fédérations médicales inter-hospitalières ont été

millions d’euros en 2007 à 0.5 millions d’euros en 2012.

créées avec le CHR, ce qui permet de créer des syner-

Le centre hospitalier a pu ainsi préserver sa place de

gies et de préserver les compétences et l’attractivité du

deuxième établissement de Meurthe et Moselle après

site de Briey pour le corps médical. La maternité de

le CHU de Nancy.

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© CHR Metz-Thionville

reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

L’hôpital d’Hayange,

l’exemple d’une intégration réussie Le CHR a préservé l’activité de l’hôpital d’Hayange, cet établissement était détenu par le groupe Alpha Santé. Il était en grande difficulté, confronté à une situation financière catastrophique. L’enjeu consistait non seulement à préserver l’activité de soins mais également à conserver des emplois dans une zone déjà très sinistrée, notamment par la fermeture des entreprises Arcelor Mittal à Florange. La cession de l’hôpital d’Hayange au CHR a eu lieu en août 2012 avec l’accord de la Ministre des Affaires Sociales et de la Santé qui a apporté une aide de 5 millions d’euros d’aide pour la reprise du site. En moins d’un an, un nouveau projet médical était en place et déjà largement réalisé. Le but de ce projet est de préserver une activité de proximité pour les habitants et de renforcer son positionnement sur le territoire. Ainsi, le CHR a mis en place un nouveau service de SSR de 22 lits, un plateau technique de réadaptation, une unité de soins palliatifs de 10 lits. Il a transféré sur le site l’équipe mobile de soins palliatifs et l’HAD du territoire de Thionville. Le rapatriement du service de psychiatrie du site Beauregard devenu obsolète sur l’hôpital d’Hayange est prévu pour le mois de juin prochain. Les activités déjà exis-

sement de soins mais également d’accélérer la mise en

tantes ont été maintenues (rééducation cardiaque, acti-

œuvre du schéma directeur du CHR notamment du site

vité de cardiologie, de pneumologie) et certaines activi-

de Thionville.

tés ont été développées comme c’est le cas de l’activité ambulatoire. Enfin, une maison d’accueil spécialisée va se mettre en place à la demande de l’ARS de Lorraine, pour prendre en charge les patients trachéotomisés. L’ensemble du projet doit permettre à l’établissement

Toutefois, ces réorganisations ne se font pas sans difficulté : il a fallu notamment harmoniser les pratiques médicales entre le CHR et le site de Hayange. L’intégration est finalement un véritable succès grâce, comme

de revenir à l’équilibre économique. Cette opération est

le souligne la Directrice générale Madame Anatole-Tou-

particulièrement exemplaire dans le sens où il a été pos-

zet, « à l’implication du personnel d’encadrement qui a

sible de préserver la mission de proximité d’un établis-

permis un dialogue social permanent ».

n

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Mercy 2.0 Du SIH (système d’information hospitalière) au SIS (système d’information de santé) Pendant longtemps, l’hôpital s’envisageait comme un bâtiment bétonné ayant le rôle de prestataire de services. Ce n’est définitivement plus le cas aujourd’hui. La définition d’un établissement hospitalier ne se limite plus à ses murs mais englobe bien ce qui le compose. Le phénomène a participé à l’accroissement de l’importance de la place du numérique au sein des établissements, le numérique prenant une réelle place en tant que composante caractéristique d’un établissement. Ainsi, même les fournisseurs souhaitant répondre aux appels d’offre hospitaliers Entretien avec Jacques Hubert, Directeur des systèmes d’information

doivent s’adapter et prendre ce phénomène en compte en ne se limitant plus aux aspects « matériels », mais

Management de l’innovation

Selon Jacques Hubert, la réalisation de ce projet a été mise en œuvre le plus rapidement possible. C’est un élément nécessaire à la réussite d’une opération de changement. Surtout, la culture du changement ne doit pas être ressentie par ses acteurs comme une fatalité mais bien comme une opportunité leur permettant d’assurer un service toujours plus performant. La politique de communication, aussi bien interne à l’établissement, qu’extérieur à celui-ci, a dû être développée. Selon son Directeur, il faut évidemment développer un « savoirfaire » mais aussi un « faire savoir ».

en engageant dorénavant leurs compétences en matière « immatérielle ».

Vision managériale :

l’avènement d’une nouvelle vision des systèmes d’information

L’établissement met ainsi en évidence le passage d’une médecine de séjour à une médecine de parcours recentrée sur l’usager. Ce glissement est l’illustration d’une réelle ouverture du secteur hospitalier sur la médecine de ville et sur le secteur médico-social.

Le précédent schéma directeur parlait de SI hospitalier, le prochain parlera bien désormais de SI de santé. L’établissement met ainsi en évidence le passage d’une mé-

Marketing

decine de séjour à une médecine de parcours recentrée

94

sur l’usager. Ce glissement est l’illustration d’une réelle

C’est une évidence, l’hôpital public prend place sur un

ouverture du secteur hospitalier sur la médecine de ville

marché concurrentiel de l’offre de soins et indéniable-

et sur le secteur médico-social. L’Hôpital 2.0 est alors

ment il a été nécessaire de s’ouvrir aux stratégies mar-

un écosystème qui permet au patient d’être acteur de

keting, initialement réservées au secteur privé. Au CHR

son parcours de soins et qui ne se limite plus au secteur

de Metz-Thionville, le marketing consiste à se différen-

hospitalier.

cier au maximum de ses voisins et à offrir un service de

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

pointe afin d’assurer une offre de soins performante sur un espace concurrentiel. Pour ce faire, le CHR a choisi de réaliser des partenariats afin d’assurer une coopération et une prise en charge efficace du patient. Mais il a aussi choisi de se distinguer en développant des services « haut de gamme ». Il peut ainsi démontrer toute sa performance et renforcer son attractivité sur son champ territorial.

Gouvernance Le CHR de Metz-Thionville est un acteur participatif dans de grands projets nationaux. C’est notamment le cas des projets FIDES (facturation individuelle des établissements de santé) et PES V2 qui est obligatoire dès le 1er janvier 2015 et qui impose la dématérialisation des flux comptables avec la Trésorerie Générale.

© CHR Metz-Thionville

Aux bornes dans le hall d'accueil, le patient entre les données indiquant le service qu’il souhaite rejoindre et la borne lui indiquera sur son téléphone portable la direction à suivre.

L’hôpital numérique au quotidien Dès son arrivée, le patient a le choix pour trouver son che-

Le CHR participe également au Pacte Lorraine, un pro-

min entre se renseigner à l’accueil du hall principal ou bien

jet ambitieux issue d’une convention entre l’État et la

accéder à des bornes. Il entre alors les données indiquant

région Lorraine qui a pour volonté de faire du territoire

le service qu’il souhaite rejoindre et la borne lui indiquera

une région plus attractive et dynamique. Le secteur de

sur son téléphone portable la direction à suivre.

la santé est en effet aujourd’hui considéré comme un

L’hôpital a également prévu un système de rappel de

levier de l’économie nationale. L’hôpital devient alors

rendez-vous par SMS. Ce service est une source de

une vitrine technologique qui profite à son territoire.

réussite et facilite l’organisation des équipes d’admission. Cela permet en aval de mettre en place l’équipe nécessaire dans les services concernés au plus proche du besoin. Ce dispositif offre l'opportunité d'une gestion beaucoup plus souple des ressources humaines.

L’hôpital numérique et ses échecs L’instauration d’un environnement numérique n’est pas

La place du CHR

un projet sans difficulté. Ce fût le cas avec le DMP (dos-

au sein de la région

s’est soldé par un échec. Mais le Directeur, Jacques

sier médical personnel). Le dossier médical informatisé Hubert, tient à rappeler que cet échec n’est pas dû aux

Le CHR participe à de nombreux projets régionaux par

faibles performances technologiques, mais à la façon

le biais d’une coopération avec le GCS Télésanté Lor-

dont on a choisi de le mettre en place.

raine comme le projet Médial, l’entrepôt régional pour

Toutefois, les projets numériques peuvent s’avérer une

l’échange et le partage d’Imagerie médicale qui va per-

véritable source de dynamisme et de performance.

mettre d’éviter la réalisation d’examens déjà effectués

Au CHR, le concept d’hôpital numérique se traduit

par un autre praticien.

comme une forte présence auprès des patients.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Pôle Femme-Mère-Enfant,

une maternité à la pointe de la modernité La maternité résulte de la fusion d’un établissement PSPH et d’une maternité publique et a été intégrée au CHR de Metz-Thionville depuis le 1er janvier 2009. Le projet de renouvellement n’était pas initialement prévu sur le site de Mercy, mais il y fut finalement intégré secondairement. un service d’excellence

avec des activités innovantes et un plateau technique performant

choriales) ainsi qu’une consultation de génétique anténatale, l’ensemble étant coordonné par un staff régulier de médecine fœtale. Un service maternité comprenant 90 % de chambres

Entretien avec Dr Éric Welter, Vice-Président de la CME et chef de service du pôle HFME

Un centre de procréation médicalement assistée

individuelles équipées d’un espace bébé dédié. Mise

(dernier classement FIVNAT : 16ème au niveau natio-

en place d’un bracelet sécurisé pour les bébés sur la

nal) et cette position va sûrement s’améliorer lors

base du volontariat permettant de connaître leurs posi-

du prochain classement. La particularité d’as-

tions. Mise à disposition également d’une tablette nu-

socier la médecine de la reproduction avec

mérique multimédia avec laquelle il est possible pour

une unité de chirurgie gynécologique

la patiente de téléphoner, de regarder la télévision, de

dédiée à la chirurgie de la fertilité. Selon

communiquer par webcam et dans un proche avenir de

le Docteur Welter, le succès de ce

pouvoir accéder à son dossier médical par le biais d’un

centre de PMA découle probablement

code. La présence du père est encouragée et facilitée

de cette association performante. Ce

par la mise en place de fauteuils transformables en lits

centre est accrédité ISO9001 depuis juin 2012.

permettant au papa d’accompagner leurs épouses H-24.

Un institut public de cancérologie gynécologique

7 salles de naissance classiques et une salle de

et sénologique permettant une meilleure coordina-

naissance physiologique démédicalisée dite « salle

tion entre les différentes spécialités concernées

nature » où la femme peut accoucher le plus natu-

(radiodiagnostic, anatomopathologie, chirurgie, méde-

rellement possible. La salle contient un lit d’accou-

cine nucléaire, radiothérapie, oncologie médicale). Cette

chement spécifique permettant à la patiente d’adopter

coordination optimisée permet un diagnostic rapide en 24

des positions antalgiques ainsi qu’une baignoire, des

heures, favorise la prise en charge globale des patientes,

ballons, une écharpe de suspension… Selon le Docteur

permet les soins de support, tout cela dans une même

Welter, cette pièce est un véritable appartement de nais-

unité de lieu. Il est également développé au sein de cet

sance très convivial mais néanmoins sécurisé dans la

institut la chirurgie ambulatoire des cancers du sein repré-

mesure où celui-ci se situe au sein du bloc obstétrical.

sentant donc une alternative intéressante à l’hospitalisa-

Des projets liés à la bien-traitance et au renforcement

tion classique pour certaines indications. Enfin, 10 % des

du lien mère-enfant sont mis en œuvre offrant ainsi au

cancers opérés étant d’origine génétique, les patientes

couple et à leur nouveau-né une dimension humaine et

ont un accès facilité sur site auprès d’un médecin généti-

relationnelle de la naissance : près de 90 % des nou-

cien réalisant les enquêtes oncogénétiques.

veau-nés ont bénéficié du « peau à peau » avec leur mère ou leur père et 85 % des bébés allaités ont été mis

96

Un service de médecine fœtale associant un pla-

au sein moins de 2 heures après leurs naissances. En

teau d’échographie anténatale très performant

l’absence de pathologie, l’examen neuromorphologique

de niveau 3, un laboratoire de cytogénétique dans l’éta-

du nouveau-né est réalisé auprès de ses parents grâce à

blissement (amniocentèse, prélèvement de villosités

l’installation de rampe chauffante en salle de naissance.

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© CHR Metz-Thionville

reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Une unité d’hospitalisation « kangourou » permet-

ayant accouché physiologiquement de quitter plus tôt

tant d’hospitaliser le nouveau-né pour des soins

la maternité. Participation au programme PRADO mené

dans le service de néonatologie accompagné de sa

par l’Assurance Maladie qui permet d’assurer la conti-

maman. Cette offre de soins a pour objectif de :

nuité de la prise en charge de la mère et du nouveau-né

• maintenir le lien mère-enfant après l’accouchement ;

à domicile en cas de sortie précoce. Cette organisation

• favoriser le processus d’attachement, le soutien à la

existe déjà depuis 2007, le PRADO a formalisé une

parentalité ; • assurer la prévention, la surveillance et les soins post• assurer la prévention, la surveillance et les soins en

de satisfaction des patientes ayant bénéficié de cette

partum de la mère ;

pratique déjà régulière au CHR. Le taux d’adhésion et approche est excellent.

lien avec la ou les pathologies néonatales de son nouveau-né. Une unité d’orthogénie et de planification familiale : cette unité de lieu respecte parfaitement l’anonymat et la confidentialité, éléments essentiels de la planification familiale. Celle-ci constate cependant une baisse de son activité certainement liée à l’éloignement de la structure par rapport au centre ville.

Descriptif du pôle HFME  RDC : consultation, plateau d’hospitalisation de jour, plateau d’échographie, unité de procréation médicale assistée (PMA), unité d’orthogénie et de planification familiale.

 1er étage : pédiatrie (hospitalisation traditionnelle,

Réorganisation de la prise en charge La prise en charge des grossesses physiologiques par les sages-femmes a été réorganisée tendant vers une approche globale de la grossesse et de la naissance : évaluation prénatale précoce, consultation prénatale, accouchement en secteur physiologique, développement d’alternatives thérapeutiques (acupuncture et homéopathie). Suite à une forte demande des patientes, une convention a été signée avec plusieurs sages-femmes libérales afin de permettre aux femmes qui le souhaitent

hospitalisation de jour et consultation), médecine de la psychologie de l’adolescent. Accueil pédiatrique de l’enfance en danger.

 2ème étage : maternité et unité de grossesses à risques. Néonatologie dont les soins intensifs et l’unité kangourou.

 3ème étage : Urgences gynécologie-obstétriques, bloc opératoire, salles de naissance dont un espace physiologique et des salles de pré-travail. Unité d’hospitalisation de gynécologie. Le pôle HFME est de type 2B et a conclu une convention avec le CHU de Nancy de type 3. L’activité comprend 2 700 accouchements. Le pôle pratique 1 350 IVG par an.

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© CHR Metz-Thionville

reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

UN ENSEIGNEMENT très développé

Le CHR de Metz-Thionville a également une mission d’enseignement très développée ainsi qu’une cellule de recherche clinique : • Participation

à

l’enseignement

des

étudiantes sages-femmes de l’École de Sages-Femmes de Metz, un obstétricien en assure la direction technique, • Formation des médecins internes en spé-

HFME Kangourou

cialité de gynécologie-obstétrique, • Validation des stages d’externes DCEM 3 et DCEM 4, • Formation de 2 assistants sur chaque site en post-internat, • Cellule de recherche clinique : le CHR est porteur de plusieurs protocoles d’études cliniques comme par exemple l’allaitement maternel et les infections néonatales, il participe à d’autres PHRC nationaux.

• Mise en place d’un service de prise en charge du handicap. Cette nouvelle structure permet un accueil totalement adapté aux patientes présentant un handicap moteur et sensoriel. • Création de staffs médico-psycho-sociaux depuis près de 10 ans : coordination et élaboration de l’ensemble

Le CHR est très impliqué dans le développement de

des acteurs de la périnatalité en faveur des familles pré-

l’éducation thérapeutique notamment en pédiatrie :

sentant des facteurs de vulnérabilité.

prise en charge de l’asthme et du diabète de l’enfant.

• Des soins de développement privilégiés en néonatologie : offre de soins personnalisés aux besoins du nouveau-né en respectant son rythme, instaurer un

Politique de Qualité

et de gestion des risques déployée Le CHR mène une politique de qualité et de gestion des risques qui est largement déployée au sein du pôle Mère-Enfant :

environnement calme évitant toutes sur-stimulations (diminution du bruit, du niveau lumineux, regroupement des soins), évaluation et prise en charge de la douleur. Ainsi la santé environnementale de l’enfant est prise en compte : l’équipe médico-soignante vise à obtenir une certification NIDCAP.

• Pour l’activité obstétrique, revue de mortalité et morbidité (RMM) à une fréquence de 6 fois par an, application de la procédure institutionnelle de gestion des de pratique professionnelle (EPP).

accouchements en ambulatoire, nouvelle maternité

Cette politique est novatrice dans la mesure où elle ne

La maternité de Thionville est structurée et organisée de

se situe plus sur le terrain de la recherche de la faute

la même manière que le pôle HFME. Le site de Thion-

mais sur celui de l’erreur apprenante, selon les propos

ville entend aller plus loin dans la démarche de sortie

du Docteur Welter.

précoce en s’ouvrant sur la possibilité d’organiser des

• Pour l’activité de néonatologie et de pédiatrie, mise en

accouchements en structure ambulatoire ce qui cor-

place de comité de retours d’expériences relatives à la

respond à une demande de certaines patientes. Cet

sécurisation de la prise en charge médicamenteuse.

accouchement ambulatoire devrait se réaliser dans le

événements indésirables, mise en œuvre d’évaluation

98

les projets :

• Pour l’activité de cancérologie : Réunion de Concerta-

cadre d’un suivi global par les sages-femmes libérales

tion Pluridisciplinaire hebdomadaire ainsi que RMM.

et hospitalières. Sur le site de Thionville, les hospitali-

• Des prises en charges adaptées et assurées par une

sations à domicile ante et post-partum sont possibles

équipe pluriprofessionnelle et pluridisciplinaire compé-

et existent depuis 2001. L’originalité de cette structure

tente s’inscrivant dans le dispositif national de dévelop-

est son origine hospitalière alors qu’elles sont habituel-

pement professionnel continu.

lement privées. Enfin nous devrions prochainement

• Mise en place d’un service de prise en charge des ad-

obtenir une réponse favorable concernant le finance-

dictions et du tabac lors de la grossesse et du suivi post-

ment d’une nouvelle maternité, une reconstruction

natal ; la maternité est labellisée maternité sans tabac.

qui s’impose du fait de la vétusté de l’hôtellerie.

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n


© CHR Metz-Thionville

reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Le service des Urgences

de Mercy

Une prise en charge rapide

Les Urgences de l’hôpital de Mercy s’étendent sur une superficie de 7000 m2, comptent 25 médecins et accueillent 54 000 passages chaque année. Cette importante structure s’est organisé par filière afin d’assurer une prise en charge relativement rapide pour la taille de ces urgences. L’établissement s’est organisé en filières : une filière courte pour les patients ne nécessitant a priori pas d’hospitalisation, une filière longue pour les patients qui vont nécessiter beaucoup d’examens, la filière spécifique des urgences vitales et la filière pédiatrique gérée par des pédiatres quand l’enfant ou l’adolescent ne fait

mis en place des filières de soins spécifiques, exemple, pour les AVC, les infarctus, et les brûlés. Ces patients ne passent pas par les urgences mais entrent directement dans le service correspondant à leur pathologie après

Entretien avec Dr François Braun, chef de service des urgences de l’Hôpital de Mercy & Francis Venchiarutti, cadre de supérieur santé.

régulation médicale du SAMU Centre 15. Afin que toute cette organisation soit possible, l’archi-

des flux s’articule autour de l’IOA qui « trie » les patients

tecture s’est adaptée. La zone d’accueil et de tri est

à leur arrivée en utilisant la classification infirmière des

différenciée selon que le patient est piéton ou sur bran-

malades des urgences (CIMU).

card. La zone de soins est également très structurée.

Il faut noter également que l’accueil des urgences a été

Deux couloirs distincts réservés aux familles et aux

conçu de façon « ouverte ». Le personnel a pu alors ob-

soignants mènent aux salles d’examen où se trouve le

server une diminution de la violence.

patient. Les familles et les soignants ne se croisent ainsi

Enfin, les urgences, pour désengorger leur service, ont

qu’au niveau des salles d’examens.

pas partie du flux des urgences vitales. Cette gestion

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© CHR Metz-Thionville

reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Une sortie facilitée la création d’une Unité de coordination et de Gestion des Lits Les urgentistes ont fait le choix depuis octobre 2013 de ne plus prendre en charge la recherche des lits d’aval. Le CHR Metz-Thionville avait déjà engagé une réflexion sur la gestion des lits d’aval depuis 2012 ce qui aboutit à la création d’une Unité de gestion des lits. L’unité est composée d’un cadre de santé, de trois IDE ainsi que d’une assistante sociale. L’unité est opérationnelle de 8h30 à 21h30 en semaine et de 11h à 18h30 le weekend. En marge de ces horaires, ces missions sont assurées par le cadre de santé de garde.

trois moments de la journée. Une fois ce seuil d’alerte déclenché, l’unité prévient la cellule d’ordonnancement stratégique qui s’apparente à une cellule de crise composée du Directeur général adjoint, du Président de la

Quand l’urgentiste fait le choix de l’hospitalisation, il

CME, du Directeur des soins, du Directeur des affaires

appelle le service concerné. L’Unité de gestion des lits

médicales, du Directeur du contrôle de gestion, du

n’interviendra que si le service d’accueil n’a plus de

Cadre de santé gestionnaire des lits et de praticiens qui

place et que la prise en charge est impossible tempo-

prend le relais. Elle a un rôle majeur dans le dispositif

rairement. L’unité va effectuer la recherche de lits sur le

« hôpital sous tension ».

site voire sur toute la CHT.

Toute la difficulté pour l’unité est d’articuler la recherche de lits pour les patients non programmés avec les pa-

Quand l’urgentiste fait le choix de l’hospitalisation, il appelle le service concerné. L’Unité de gestion des lits n’interviendra que si le service d’accueil n’a plus de place et que la prise en charge est impossible temporairement.

tients programmés. Les hospitalisations programmées sont très rarement repoussées afin de prendre en charge une hospitalisation non programmée. En effet, quand l’hospitalisation dans le service correspondant à la pathologie est impossible, un service « proche » accueille le patient en tant que service « d’attente » et le médecin se déplacera pour prodiguer les soins.

La cellule articule la sortie du patient avec une prise en charge sociale. Une assistante sociale s’assure que le retour au domicile soit bien préparé. L’unité de coordination et de gestion des lits reçoit chaque matin un état des lieux sur les lits disponibles, les hospitalisations à effectuer, le nombre de patients présents. Elle participe au staff quotidien des urgences pour connaître les patients en attente d’hospitalisation

100

D’autres mesures pour accélérer la sortie du patient : • Anticiper la sortie dès l’admission, en évaluant dès l’entrée du patient son niveau de risque social. • Intégrer dans le dossier de soins une check-list « préparation de la sortie du patient hospitalisé » • Prévoir systématiquement les sorties d’hospitalisation

qui sont présents en UHCD ou dans le service des ur-

en matinée en commençant par exemple la visite par

gences. L’unité recherche alors les lits disponibles dans

des patients sortants.

les services demandés. Il est possible pour l’unité de dé-

• Mettre à disposition des salons de sortie pour

clencher une alerte quand le seuil de patients en attente

les

est trop élevé. Le seuil de patient en attente est revu à

de retour à domicile.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

personnes

valides

en

attente

d’un

moyen

n


reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

L’excellence ou rien !

Des pôles et filières d’excellence Pôle cancérologie – hématologie – pneumologie

Le pôle est composé de l’hématologie, de l’oncologie,

La création des UMAC

de 3 services de pneumologie, d’un service de soins

Unité de médecine ambulatoire de chimiothérapie

palliatifs doté de 2 unités de 10 lits, l’une à Hayange et l’autre à Metz, d’une structure HAD polyvalente, d’un service de la douleur et d’un service de radiothérapie.

L’ouverture de l’UMAC s'est fait en juin 2012 sur le site

pose d’une unité 3 C (centre de coordination en cancé-

de Thionville et en 2010 sur le site de Metz.

rologie). Ce dispositif veille à la bonne application des di-

L’objectif est de structurer la filière chimiothérapie et

rectives du plan Cancer au sein de l’établissement. Cela

de décliner à ce niveau, le dispositif d’annonce. Si les

permet au patient d’être replacé au sein du dispositif

principes de fonctionnement restent les mêmes, l’acti-

et de bénéficier ainsi d’une prise en charge pluridiscipli-

vité hématologique domine sur le site messin alors que

naire concertée au travers de réunions de concertation

celle de l’oncologie médicale est prépondérante sur le

pluridisciplinaire (R. C. P.) et de lui permettre un accès

site thionvillois.

En application du plan Cancer 2003 - 2007, le CHR dis-

Entretien avec Dr Philippe Quetin, chef du pôle cancérologie – hématologie – pneumologie, & Marie-France Carsin, Cadre supérieure de santé

pée à l’échelon régional avec 6 autres établissements au sein du 3 C porté par le CHU de Nancy. Parmi les différentes mesures prévues par le plan Can-

© CHR Metz-Thionville

facilité aux soins de support. Cette unité 3 C est regrou-

cer, notamment dans son axe « vivre pendant et après un cancer », les consultations d’annonce offrent la possibilité pour le patient d’obtenir un entretien avec un soignant afin d’anticiper les difficultés sociales et psychologiques qui peuvent découler de la maladie. Une prise en charge par une assistante sociale, une onco-esthéticienne, un psychologue peut ainsi être proposée au malade. Ces entretiens permettent d’intégrer la dimension sociale tout au long de la prise en charge de la maladie. « Plus de 60 % des cancers sont curables », il est donc indispensable de préparer l’après cancer qui est l’une des grandes mesures du 3e Plan 2009 - 2013.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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© CHR Metz-Thionville

reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Coronarohraphie à l'hôpital Mercy

Le principe « novateur » de ces structures consiste à

La maîtrise organisationnelle se doit d’être parfaite avec

regrouper en un lieu commun les patients suivis par des

une activité le plus possible lissée quotidiennement et

médecins de spécialités différentes qui doivent bénéfi-

sur l’ensemble de la semaine. Une extrême rigueur de

cier d’une chimiothérapie anticancéreuse.

fonctionnement est nécessaire de la part des différents

Les malades disposent ainsi d’une équipe soignante performante hautement qualifiée. Cette unité de lieu au sein d’un cadre rassurant est fort appréciée des malades.

intervenants. Il a donc été prévu de réserver le matin en priorité aux activités d’hospitalisation ambulatoire et l’après-midi aux

La clé de la réussite d’une telle unité : « Patience et

consultations externes ; ceci « afin de ne pas entraver

longueur de temps font mieux que force et que rage » ;

le bon fonctionnement de l’hospitalisation ambulatoire

afin de vaincre la résistance au changement des équipes

dans le cas d’un seul médecin de la spécialité présent

médicales qui ne se verraient pas revenir en arrière une

sur le site ».

fois leur adhésion acquise.

Ces UMAC répondent à un soin d’efficience médicoéconomique. C’est également un véritable levier de performance pour

L’UMAC est également un véritable levier de performance pour les autres activités annexes. Ainsi, la mutualisation des spécialités pousse à trouver un juste équilibre dans l’organisation des soins

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les autres activités annexes. Ainsi, la mutualisation des spécialités pousse à trouver un juste équilibre dans l’organisation des soins et amène, par exemple, à améliorer le circuit des chimiothérapies. Le CHR de Metz - Thionville explore notamment une méthode d’anticipation des prescriptions et des préparations.

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reportage DH : CHR Metz-Thionville (lorraine)

Connexion Le service de Cardiologie Deuxième service le plus important de France dans la prise en charge de l’infarctus du myocarde Deuxième service le plus important de France dans la prise en charge de l’infarctus du myocarde, le service de cardiologie a consolidé la prise en charge des urgences cardiologiques dans la Lorraine Nord. Les activités coro-

Entretien avec Dr Khalifé Khalifé, chef de service et Président de la CME

nariennes sont en augmentation : 1 700 angioplasties coronariennes par an sont pratiquées. Le service a choisi également de renforcer son activité en matière de chirurgie vasculaire avec plus de 430 patients opérés en 2013.

makers, de défibrillateurs implantables, et par la pra-

La prise en charge des troubles du rythme cardiaque est

tique de l’ablation de la fibrillation auriculaire. Le ser-

actuellement complète avec la mise en place de pace-

vice pense débuter rapidement la mise en place par voie percutanée des prothèses valvulaire aortique. Par ailleurs, le nouvel hôpital Mercy possède une salle de cardiologie interventionnelle de dernière génération permettant de bénéficier de la technique de l’exploration et du traitement des maladies cardiovasculaires. Le service a également développé la télécardiologie par la surveillance à distance des dispositifs implantables. Le Docteur Khalifé précise que le service « profite d’hôpital numérique dans toutes ses applications ». Le service peut bénéficier de transfert d’image ou encore d’une connexion au dossier du patient quel que soit le lieu et le moment ce qui représente un véritable gain de temps pour les médecins.

n

Le service « profite d’hôpital numérique dans toutes ses applications ». Il peut bénéficier de transfert d’image ou encore d’une connexion au dossier du patient quel que soit le lieu et le moment ce qui représente un véritable gain de temps pour les médecins.

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Š Thales Architectures

Photos fournies par le centre hospitalier de Bischwiller

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reportage

Photos © Centre Hospitalier de Bischwiller

© Fotolia

Le

Centre Hospitalier départemental

de

Bischwiller

Expertise : Gérontologie

Le CHDB ne cache pas son jeu. La gérontologie est son expertise. Sa tactique est son engagement et sa stratégie le territoire. La filière gériatrique se construit progressivement d’un ensemble d’actions qui doivent se juxtaposer et se compléter. Chaque établissement ou institution a son rôle à jouer dans lequel le CHDB est un acteur majeur sinon central ! DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Plaque tournante d’innovation

Une organisation en filière pour une palette complète de prise en charges

Entretien avec Magaly Haeffele Directrice générale DH MAGAZINE – Le CH Départemental de Bis-

mais pas seulement, à des besoins de prises en charge

chwiller est un des plus grands centres de gériatrie de France... Quelles en sont les principales caractéristiques ?

liés à des épisodes aigus. À la différence d’un CH « clas-

Magaly HAEFFELE − Notre établissement présente

âgée... Cela dit, nous avons aussi un projet d’augmenta-

une palette importante de services autour de la personne âgée. Il y a l’hospitalisation complète ou à la journée (SSR, court séjour), l’accueil en hébergement (EHPAD, USLD, FAM, FAS) et des services qui œuvrent

sique », notre vocation gériatrique se concentre, bien évidemment, sur la prise en charge de la personne tion de la capacité des lits de notre pôle d’activités sanitaires : de 17 à 36 lits en court séjour et de 44 à 60 en SSR. Nous proposerons également une unité de soins

pour le maintien à domicile, tels que le SSIAD, l’accueil

palliatifs en lien étroit avec notre équipe mobile de soins

de jour ou la plateforme d’accompagnement et de répit.

palliatifs gériatrique.

L’établissement qui compte 833 lits et places se structure autour de trois pôles cliniques : un pôle médecine et réadaptation, un pôle hébergement et soins gériatriques et un pôle accompagnement handicaps.

Quelle est votre stratégie pour l’établissement ? L’établissement est identifié comme référent en gériatrie sur le territoire. La stratégie du CHDB est d’asseoir

On parle souvent d’une « logique de territoire ». Pour vous, au CHDB, qu’est-ce que cela veut dire ? Concrètement ? Cela signifie que le CHDB n’est qu’un des éléments, qu’un des outils, qui constitue le territoire sanitaire. Nous devons donc, comme tous les autres acteurs,

cette position et de développer l’expertise gériatrique de

nous assurer d’une coordination – je dirais « collec-

l’établissement en élargissant son offre de services et

tive » – la meilleure possible, afin d’assurer une fluidité

en renforçant ses partenariats.

du parcours de soins de la personne âgée. Il s’agit donc de développer des partenariats avec les structures exis-

Vous avez une toute petite frange de lits « actifs » (61 sur 773, soit 8 %), quel en est l’intérêt (les intérêts) ? Envisagez-vous de développer ces lits actifs ? SSR : Soins de Suite et de Réadaptation 1

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tantes, d’utiliser au mieux les compétences de chacun et d’éviter les « doublons » de prises en charge. La logique de territoire passe également par une offre de proximité. Les personnes âgées doivent pouvoir être accueillies et

L’intérêt de disposer de lits de court séjour gériatriques

prises en charge à proximité de leur domicile pour ne

et de SSR est de pouvoir répondre, essentiellement

pas rompre le lien social avec la famille ou les aidants.

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REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Vous êtes en train de « plancher » sur votre Projet d’établissement ? Comment avez-vous travaillé ? Quelles sont les finalités de ce travail ?

À quelles innovations pensez-vous ?

Nous avons débuté en septembre 2013 ce travail de re-

l’innovation passe également par le développement de

fonte du projet d’établissement. Il s’inscrit dans la suite

notre système d’information et des outils s’y rattachant,

logique du projet architectural amorcé il y a quelques an-

comme la télémédecine. Les Dr Lorentz et Berna vont

nées. La méthode d’élaboration est une coparticipation

vous en parler cet après-midi... Et au-delà d’innovation, il

avec l’ensemble des acteurs au travers de groupes de

y a aussi recherche...

L’innovation, c’est aussi accepter de se remettre en question et de modifier notre façon de penser. Au CHDB,

travail. Il en découle plusieurs finalités. D’abord de « projeter » l’organisation des services en vue des différents

lement la volonté d’instaurer une dynamique de chan-

Non, absolument pas ! La recherche, l’innovation c’est

gement portée par l’ensemble de nos professionnels.

déjà accepter de changer et nous recherchons bien des

Il s’agit enfin d’intégrer au projet de l’établissement «

alternatives à notre mode de fonctionnement actuel.

l’axe filière gériatrique » dans le cadre de la Commu-

D’ailleurs, nos médecins sont présents dans plusieurs

nauté Hospitalière de Territoire qui se met en place avec

groupes de réflexion sous l’égide de la Société de

les CH de Saverne, Wissembourg et Haguenau.

Gérontologie de l’Est, tels les groupes « REGAR »2 et « ASSEC »3.

3 Groupe ASSEC : Association d’étude pour l’incontinence

et de construction de nouveaux bâtiments. Il y a éga-

L’usage de ce mot « recherche » n’est-il pas un peu prétentieux ou, à tout le moins excessif ?

projets d’augmentation de capacité, de restructuration

2 Groupe REGAR : REéducation du Grand Age et Réadaptation. Ce groupe s’attache à évoquer les problèmes de rééducation en gériatrie et plus particulièrement autour des chutes.

Partenariat, expertise, « labéliser », autant de mots clés dans votre projet d’établissement : l’essentiel est dit ? Presque, mais pas tout à fait (rires). Je reprends vos trois points... Partenariat... Notre volonté est sans ambiguïté ! Nous allons continuer de renforcer nos partenariats existants et en développer de nouveaux. Nous avons la volonté d’apporter aux autres établissements qui n’en disposent pas encore une véritable expertise gériatrique. Notre équipe médicale et paramédicale en gériatrie dispose de compétences spécifiques au grand âge : trouble du comportement, douleur, chute, soins palliatifs… Le mot labellisation est plutôt utilisé pour parler des filières. Ce qui est important, c’est l’évolution du modèle hospitalier. On notera le passage de l’hospice vers l’hôpital gériatrique, premier pas de l’évolution, pour parvenir à un modèle plus actuel : la filière gériatrique.

En voilà deux autres : coordination, animation. Est-ce un plan d’action pour l’ensemble de la filière gériatrique ? Cela en est, à tout le moins, une première ébauche. Le maître mot parmi ceux que vous citez est celui de la coordination. La filière gériatrique étant constituée d’un nombre important d’acteurs : établissements, le réseau Alsace gérontologie, les MAIA (Maison pour l’Autonomie et l’Intégration des Malades Alzheimer), les équipes mobiles de gériatrie... Tout ceci doit fonctionner ensemble, harmonieusement. C’est l’élément clé de la réussite d’une bonne fluidité du parcours de soins.

Les mots clés du Projet d'Établissement du CHDB 

Organiser et « labéliser » la filière gériatrique intra hospitalière au CHDB

Développer le partenariat de la filière gériatrique du CHDB avec les établissements et structures associées à la filière gériatrique

Se rapprocher des services non-gériatriques accueillant des patients âgés qui ne sont pas des partenaires identifiés de la filière gériatrique pour leur apporter une expertise gériatrique dans les domaines de compétences du CHDB

Développer la coordination entre tous les partenaires de la filière gériatrique tout au long du parcours du patient

Disposer de professionels en nombre et en qualification pour animer la politique gérontologique sur notre territoire de santé

Développer la réflexion éthique en lien avec la pratique gériatrique

Participer à l’innovation et à la recherche en gériatrie et gérontologique

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© Thales Architectures - Centre Hospitalier de Bischwiller

REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Notre établissement a été créé en 1888 avec de nombreux bâtiments « historiques », ce qui n’a pas empêché la modernisation de son parc immobilier. ▲

Vous avez, je crois, un parc immobilier important et des projets...

en vigueur. Le bâtiment restructuré offrira aux personnes

Notre établissement a été créé en 1888 avec de nom-

construit en petites unités de vie pour leur permettre un

breux bâtiments « historiques », ce qui n’a pas empêché

épanouissement et un accompagnement adapté. Il accueil-

handicapées un environnement chaleureux et convivial,

la modernisation de son parc immobilier. Les dernières

lera ses premiers résidents en 2018.

constructions neuves datent de 2009. Après quelques

En parallèle de ces projets architecturaux, le CHDB pour-

années d’étude et de recherche de nouveaux finance-

suit les mises aux normes réglementaires des autres

ments, l’établissement reprend son programme ambi-

bâtiments, investit dans les aménagements et assure la

tieux de modernisation avec 4 nouveaux projets.

maintenance de son patrimoine pour offrir aux patients et résidents les meilleures conditions d’hébergement.

Le projet le plus attendu concerne la restructuration du

Ces travaux sont évalués à plus de 46 millions d'euros

pavillon sanitaire qui accueillera 30 lits de médecine, 60

pour les 5 années à venir.

en soins de suite et de réadaptation et 10 en Unité de soins palliatifs. Les premiers travaux ont démarré en janvier : déconstruction et désamiantage... Sa mise en 4 Le snoezelen est une stimulation multisensorielle. Lancé au Centre Hartenberg à Ede (Pays-Bas), le snoezelen vise à éveiller la « sensorialité » de la personne stimulée grâce à une relation privilégiée, sécurisante, réduisant les tensions tout en la motivant à l'action pour une réalisation de son bien-être. Le terme « snoezelen » du néerlandais : snuffelen « sentir » et doezelen « somnoler ».

service est attendue pour fin 2015. Avec « en prime » (rires), une toute nouvelle pharmacie équipée d’un automate de délivrance nominative des médicaments des patients et résidents de l’ensemble du CHDB. Toujours en 2014, la création d’un nouvel EHPAD – ré-

Vous n’oubliez pas, je crois, l’intendance...

pondant aux normes BBC – qui accueillera les 60 rési-

Nullement, nullement. Mais, vous avez raison notre

dents actuels du pavillon « Sainte Odile ». Les travaux

UCP – Unité Centrale de Production alimentaire – est,

débuteront en février 2014 et devraient prendre fin au

dans l’ordre, notre second projet. Il va remplacer les

printemps 2016. Le nouvel EHPAD accueillera les rési-

3 cuisines actuelles hors d’âge et surtout hors normes.

dents sur 3 niveaux, tous en chambres individuelles. Des

Outre la qualité, il permettra aussi une rationalisation

locaux seront également dédiés à l’animation et aux activités qui ponctuent une journée en maison de retraite : salle d’activités, salles à manger, Snoezelen4, coiffeur, salle de kinésithérapie… Une dizaine de chambres seront réservées à l’hébergement temporaire. Notre futur Foyer d’accueil spécialisé n’en est encore qu’à la phase étude. Un concours d’architecte est ac-

CHT : Communauté Hospitalière de Territoire 5

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Notre Unité Culinaire de Production va remplacer les 3 cuisines actuelles hors d’âge et surtout hors normes.

des moyens. Cette nouvelle construction répond aux exigences de la politique de développement durable amorcée par le CHDB. Ainsi avons-nous prévu de récupérer les calories produites par les appareils de cuisson pour chauffer le bâtiment ou encore d’éliminer les biodéchets dans un circuit distinct des déchets ménagers. Dès 2015,

tuellement en cours, en vue de restructurer le pavillon

cette nouvelle cuisine permettra de produire annuelle-

Sainte Louise pour pouvoir accueillir les résidents de

ment 700 000 repas et jusqu’à 1 million, si des demandes

Sainte Thérèse. Ce bâtiment est également vieillissant

émanaient des collectivités et/ou établissements autour

et ne répond plus actuellement aux normes de sécurité

de Bischwiller.

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© Centre Hospitalier de Bischwiller

REPORTAGE DH : CH de bischwiller (Bas rhin)

Hôpital de jour

Projet de la nouvelle Unité Centrale de Production

Où en est le projet de Communauté Hospitalière

fluidification des filières de soins. L’enjeu d’une Commu-

de Territoire en cours de constitution avec les

nauté hospitalière de territoire passe par l’abolition des

CH de Bischwiller, Haguenau, Wissembourg et

logiques institutionnelles propres à chaque établisse-

Saverne ?

ment. Ceci afin de se concentrer sur une réponse adap-

La convention constitutive de la CHT a été finalisée à la 5

fin de l’année 2013. Un socle de projet médical commun

tée aux besoins des personnes âgées, pour une prise en charge de qualité, dans une logique de territoire.

entre nos établissements est en cours d’élaboration. Le volet gériatrique a été validé par les membres de la

L’enjeu d’une Communauté hospitalière de territoire passe par l’abolition des logiques institutionnelles propres à chaque établissement.

CHT et présenté à nos différentes instances. Les grands axes, en cours d’écriture, sont repris dans notre projet d’établissement. La réflexion a été collective et participative pour permettre l’adhésion de tous à la mise en œuvre des objectifs du projet.

Vous avez renouvelé intégralement de l’équipe de Bischwiller est à 10 km d’Haguenau, et à 40 km de Wissembourg et à 47 km de Saverne... N’est-ce pas trop éloigné, surtout à la mauvaise saison ? Historiquement, nous avons une proximité avec ces établissements. Avec Wissembourg, une direction commune était en place jusqu’en 2012. Avec Haguenau, à une dizaine de kilomètres, nous avions déjà plusieurs partenariats formalisés (DIM partagé) ou informels

direction puisque vous-même et 3 de vos 4 directeurs adjoints sont en poste à Bischwiller depuis moins de 2 ans... C’est un management de combat ? Non, pas du tout (rires)… Reconstituer mon équipe de direction dans les mois qui ont suivi mon arrivée (septembre 2012) a été une bonne opportunité. Mais il est vrai aussi, qu’en matière de management, chaque directeur apporte sa touche personnelle.

(échanges entre les équipes). À l’ère du numérique, la distance géographique est de moins en moins une contrainte.

Avez-vous quelque chose à dire pour votre défense ? En toute humilité, je dirai que le CHDB poursuit

Quels espoirs fondez-vous sur cette nouvelle

son évolution et tente de travailler en bonne intelli-

structure qui s’ajoute à l’existant ?

gence avec l’ensemble des acteurs de la filière. Je

Les espoirs fondés sur cette nouvelle structure sont de

pense que la fluidité du parcours de soins de la per-

renforcer la complémentarité et la coopération entre nos

sonne âgée est un enjeu majeur et que l’ensemble

4 établissements et de participer à la structuration et la

des partenaires en ont pris conscience.

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REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Mécanique des fluides

Un diagnostic pour comprendre Pouvez-vous nous expliquer cette notion de « Diagnostic » territorial du parcours de soins des personnes âgées ? Quels sont les rôles respectifs du Conseil Général et de l’ARS ? Le CHDB a été missionné par l’ARS – conjointement avec le Conseil Général – pour être pilote de l’élaboration d’un diagnostic territorial. Il s’agit de poser les éléments constitutifs, les facteurs d’influence aux différentes étapes de la prise en charge en mettant en évidence les points de cohérence ainsi que les évenEntretien avec Patricia Krill, directrice des soins & Camille Apffel, directrice adjointe

DH MAGAZINE – Vous êtes directeur des soins dans un très grand établissement gériatrique... En cette qualité, mais aussi à titre personnel, quelle est votre compréhension, votre perception de la gériatrie ?

tuelles distorsions dans les parcours. Pour évaluer, il est intéressant de questionner les professionnels, mais les utilisateurs ne seraient-ils pas les premiers concernés ? Il s’agit de faire un état des lieux de l’offre de soins : sanitaire, médico-social, spécialités…, mais aussi « domicile/ hôpital ». Cet état des lieux concernera tous les

En 2009, la tranche d’âge des 75 ans et + représentait

paramètres : spécificités des compétences, quantités,

7,7 % de la population alsacienne. En 2020, elle dépas-

coordination, accessibilité.

sera 8,7 % ! La part des 85 ans augmenterait, elle, de plus de 50 % dans les 10 ans à venir ! Ces chiffres, ce vieillissement de la population représentent pour moi

En quoi ce projet est-il « porteur » ?

non seulement un enjeu fort de santé publique mais sur-

Ce projet sera porteur dans le sens où il accompagnera

tout une préoccupation sociétale... Au-delà de ces consi-

le CHDB dans son positionnement sur le territoire et où

dérations générales, la médecine gériatrique se décline

il sera articulé entre établissements publics, médico-so-

en une multitude de spécialités : géronto-psychiatrie,

cial, ainsi qu'entre divers acteurs et professionnels. Le

oncogériatrie, rééducation, éléments diagnostic, préven-

moment est d’autant plus propice que l’établissement

tion relative « au bien ou au mieux vieillir », notion de

est en « mode projet » : l’écriture du projet d’établisse-

handicap, maladies chroniques et vieillissement, soins

ment, du projet médical, du projet de soin et l’intégration

palliatifs, iatrogénie médicamenteuse... et la liste n’est

dans une vision prospective.

pas exhaustive.

Chacun de ces aspects, chacune de ces spécialités, impliquent de réelles expertises cliniques, médicales et soignantes. La coordination, l’accompagnement de la recherche médicale et de soins contribueront largement aux soins futurs et aux innovations techniques, technologiques et scientifiques. La recherche en soins, les pratiques avancées, les nouveaux métiers alliant expertises et connaissance des comportements, des modes relationnels et des organisations de soins auprès de ce public seront des clés et des facteurs de réussite pour cette frange de la population. En qualité de directeur des soins, c’est tout ce programme qui me mobilise avec les équipes soignantes et médicales. 110

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Qu’attendez-vous de ce « diagnostic » ? Il a pour objet d’identifier les actions à mettre en œuvre pour favoriser le maintien à domicile (ou substitut) en organisant la complémentarité et la continuité des prises en charge et des accompagnements. Les objectifs opérationnels poursuivis par ce projet sont les suivants :

© Centre Hospitalier de Bischwiller

REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

- Rendre lisible l’ensemble du dispositif (pour les usagers et les professionnels), - Anticiper les situations de rupture (en sortie d’hôpital, à domicile), - Assurer l’adéquation des missions des acteurs (exhaustivité, absence de doublons), - Organiser la coordination des acteurs (existence et pertinence des structures de coordination ; circulation de l’information). Les effets attendus sont notamment une diminution du recours aux urgences et des hospitalisations inadéquates.

Les résultats du diagnostic du Territoire de santé n°1 seront présentés en séminaire et ce seront les acteurs, professionnels de terrain, qui devront proposer des actions concrètes d’amélioration du parcours des personnes âgées. Une fois les constats partagés et le dialogue installé, les outils et les processus pourront se déployer.

fluidité, c’est une orientation à toutes les étapes d’un parcours, d’un chemin. La fluidité, c’est la réponse d’experts techniques ou de soins tout au long du parcours en fonction des capacités d’accueil. Et ce, dans des délais acceptables compte tenu des différentes situations. Voilà ce que représente pour moi la fluidité du parcours de soins...

Quels sont les freins à la fluidité du parcours de soins des personnes âgées ? L’un des freins, l’un des plus visibles, est le recours trop systématisé aux services d’urgence pour les personnes âgées qui restent parfois plusieurs heures sur un brancard, alors que d’autres établissements ou services pourraient les accueillir de manière plus adaptée...

Pourquoi cet appel à un prestataire de services pour piloter ce diagnostic ? Quelle plus-value spécifique en attendez-vous ? Il existe en Alsace de nombreux réseaux, filières, organismes de coordination..., y compris au sein de notre établissement. Il était fondamental de réaliser un état des lieux en toute objectivité. Pour permettre une neutralité irréprochable dans la démarche, l’appel à un

Mais tout ne se limite pas aux urgences. Les freins sont propres aux individus, ils sont aussi liés à la cohésion et à la coopération des professionnels de santé et du secteur social. Ils sont liés à une méconnaissance des parcours et des organisations, à l’insuffisance des ressources dont les ressources financières... Mais on peut en trouver autant que l’on souhaite... En fait, « le frein », c’est le manque d’analyse globale d’une situation !

prestataire externe s’imposait de facto. La méthode, la capacité d’analyse, la technicité des données nécesressources, des organisations et des « points de distor-

Quels sont les « axes d’amélioration » de la fluidité ?

sion ». Une analyse menée avec méthode et avec une

Les axes d’amélioration sont à trouver dans l’organisa-

certaine distanciation devrait permettre de clarifier le

tion de la « filière urgence » et la capacité à travailler en-

schéma d’organisation territoriale...

semble : entre établissements, entre professionnels et

sitent une réelle expertise et une mise en évidence des

« entre » enveloppes budgétaires... Tout cela est simple en théorie, mais beaucoup plus difficile dans la pratique.

Comment définiriez-vous le concept de fluidité en matière de soins ? Qu’est-ce qui est fluide ? Qu’est-ce qui ne l’est pas (ou plus) ? La fluidité d’une organisation ou d’un service, c’est

Dans quelle mesure peut-on dire : Cohérence + Accessibilité + Partenariat = Fluidité ?

qu’il n’y ait ni obstacle, ni frontière. Dans un parcours

C’est une vision idéaliste... Mais sans doute avons-nous,

de soins, il ne peut y avoir de « voie sans issue ». La

tous, cette recherche perpétuelle.

n

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© Emergence Architecture - Centre Hospitalier de Bischwiller

REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Le défi

Alsacien Un souci de coordination et une logique de parcours

Entretien avec Adeline Jenner, responsable du pôle Appui à la Performance et Gestion du Risque à l’ARS Alsace

La Stratégie nationale de santé, exposée par la Ministre

La démarche d’amélioration de la fluidité du parcours

des Affaires sociales et de la Santé le 23 septembre

des personnes âgées, initiée par l’ARS Alsace en parte-

2013, promeut une organisation du système de santé

nariat avec les Conseils généraux du Bas Rhin et du Haut

autour des acteurs de proximité, dans un souci de coor-

Rhin, vise notamment à assurer la continuité des prises

dination et une logique de parcours.

en charge entre les différents secteurs et à prévenir les

En Alsace, l’augmentation rapide du nombre des per-

cela, les principaux leviers identifiés sont les suivants :

sonnes âgées est un enjeu particulièrement important, en raison d’une tendance relativement forte à l’hospitalisation, notamment via les urgences, et à la prise en charge en institution. Parallèlement, et bien que le taux de maintien à domicile soit un peu inférieur à la moyenne nationale, 89 % de la population âgée de plus de 75 ans vit à domicile et, à 95 ans, cette proportion est encore de 49 %. Aussi, l’adaptation du système sanitaire et médico-social nécessite-t-elle une organisation

ruptures entraînant des hospitalisations évitables. Pour améliorer la connaissance et la coordination des acteurs, favoriser les interfaces entre les professionnels de ville et les professionnels hospitaliers, assurer une continuité de la prise en charge par une circulation fluide de l’information, rendre lisible l’ensemble du dispositif pour les usagers comme pour les professionnels. En termes de méthode, il s’agit d’une démarche participative où les acteurs sont chargés d’identifier et de mettre en place, en étroite concertation, les actions, outils et processus améliorant la fluidité du parcours des personnes âgées.

coordonnée des interfaces entre les secteurs (domicile / établissements de santé / Ehpad) et des prestations

Ainsi, sur chaque territoire, un établissement a été mis-

d’aide et de soins à domicile. Cette adaptation répond

sionné pour faire procéder à un diagnostic territorial

tout à la fois à un souci de qualité de la prise en charge,

partagé avec un panel d’acteurs des secteurs libéraux,

d’efficience du système de santé et d’amélioration des

sanitaires, médico-sociaux et sociaux, qui sera suivi des

conditions de travail pour les professionnels de santé.

travaux permettant de lever les écueils identifiés. Plus que le diagnostic lui-même, c’est le partage des constats

La démarche d’amélioration de la fluidité du parcours des personnes âgées, vise notamment à prévenir les ruptures entraînant des hospitalisations évitables.

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DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

entre les acteurs qui importe dans la 1ère étape du projet : apprendre à se connaître et comprendre les difficultés des autres intervenants dans la prise en charge sont des étapes nécessaires à la mise en place de véritables parcours. À la suite des séminaires territoriaux,


Projet du nouvel EHPAD Sainte-Marie

les représentants des différents secteurs s’organisent en groupes de travail et ont pour mission de proposer et d’expérimenter les actions concrètes d'amélioration du parcours des personnes âgées répondant aux constats qu’ils ont partagés. Le Comité de pilotage régional, composé de l’ARS, des conseils généraux et des établissements porteurs, veille à ce que les thèmes traités par les groupes de travail ne soient pas redondants. À la fin de l’année, les projets seront évalués par des indicateurs

Il s’agit d’une démarche participative où les acteurs sont chargés d’identifier et de mettre en place, en étroite concertation, les actions, outils et processus améliorant la fluidité du parcours des personnes âgées. améliorer les interfaces ville hôpital par des outils de liaison communs à l’ensemble des ES (Entrée / Sortie / Continuité de la prise en charge médicamenteuse) ; assurer la continuité médicamenteuse ; déployer, avec l’URMLA, un dispositif d’information des médecins

que les pilotes auront proposés. Ceux qui sont porteurs

généralistes portant notamment sur l’offre de prise en

de véritables améliorations dans le parcours feront l’ob-

charge (rôles et missions des acteurs, coordonnées…)

jet d’un déploiement régional.

et les principales causes d’hospitalisation évitables. • Territoire de santé n°3

Trois séminaires territoriaux ont été organisés depuis

Porteur : le Centre départemental de repos et de soins

septembre 2013 ; chacun a réuni plus d’une cinquan-

Séminaire le 4 avril 2014. Axes de travail : mettre en

taine de représentants des secteurs intervenant auprès

œuvre un référentiel commun des repérages géria-

des personnes âgées. Neuf groupes de travail ont été

triques et gérontologiques ; améliorer l’utilisation du

installés (12 à l’issue du séminaire du Territoire de santé

DLU ; optimiser le recours de l’aide aux aidants

n°1).

• Territoire de santé n°4

• Territoire de santé n°1

Porteur : le Centre hospitalier de Mulhouse)

Porteur : le Centre hospitalier de Bischwiller

Séminaire le 24 septembre 2013. Axes de travail :

Séminaire le 13 mai 2014

organiser un avis gériatrique par téléphone, à destina-

• Territoire de santé n°2

tion des professionnels du domicile ; améliorer l’orga-

Porteur : les Hôpitaux universitaires de Strasbourg

nisation de la sortie et déployer un document de syn-

Séminaire le 19 février 2014. Axes de travail : mettre en

thèse en sortie d’hôpital ; mettre en place un dossier

œuvre un dispositif d’alerte sur la fragilité des patients ;

de coordination au domicile.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

113


REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Le 22

à Asnières La télémédecine dans tous ses états

Entretien avec Dr Lise Lorentz, médecin court séjour, co-pilote du projet télémédecine & Dr Christophe Berna, médecin USLD, co-pilote du projet télémédecine

Le sketch de Fernand Ray-

sites comparables ont également été retenus en Alsace.

naud est un peu ancien

L’expérimentation est pilotée par le GCS Alsace e-santé

(1966),

le

et devrait se conduire jusqu’en fin 2015. L’ARS Alsace

trouve aisément sur Inter-

s’est également portée candidate pour tester un modèle

net. À l’époque, l’humo-

médico-économique de tarification des actes de télémé-

riste aurait sans doute eu du mal à imaginer l’évolution

decine. Si l’Alsace était retenue, cela permettrait une

des « télécommunications » pour utiliser un mot de

prise en charge des actes par la CPAM sur la base d’une

l’époque. Aujourd’hui, ce sketch, que l’on écoute encore

nomenclature expérimentale.

encore

qu’on

avec plaisir, illustre l’évolution fabuleuse de la médecine à distance. Ce qui n’était pas même un rêve devient une réalité voire, une « banalité » d’aujourd’hui.

DH MAGAZINE – Pouvez-vous nos résumer le scénario du sketch ?

Si l’Alsace était retenue, cela permettrait une prise en charge des actes par la CPAM sur la base d’une nomenclature expérimentale.

Lise Lorentz − Celui de Fernand Raynaud ? (éclat de

À quoi sert la télémédecine ?

rires) Notre sketch à nous, notre objectif, est de parta-

Christophe Berna − La télémédecine ne se limite

ger et faire partager l’expérience du CHDB sur l’expéri-

pas à transférer des informations électroniques. J’aime

mentation de la télémédecine et de communiquer sur

à définir la télémédecine à partir de 3 points : partage,

les pratiques innovantes réalisées au sein de l’établis-

distance et compétence. Le partage, c’est celui de l’in-

sement.

formation, du savoir : je communique les éléments dont je dispose. Chaque intervenant doit savoir ce que savent les autres. Ce savoir partagé permet d’aider et de guider

114

Comment ce projet a-t-il démarré ?

l’autre : c’est le « tutorat ». Ainsi, « l’expert » va-t-il assu-

L.L. − Le CHDB a répondu à un appel à projet de l’ARS

rer le guidage d’un soignant dans des actes techniques,

d’Alsace pour l’expérimentation de la télémédecine

par exemple la réfection d’un pansement complexe.

en établissements sociaux et médico-sociaux. Notre

Le second point, évidemment, c’est la distance. On

candidature ayant été retenue pour notre territoire de

ne passe plus seulement de la chambre 452 à la 453 :

santé, nous sommes devenus site pilote et coordina-

on passe d’un endroit à un autre situé à plusieurs kilo-

teur territorial de l’expérimentation. Plusieurs autres

mètres... Le résident n’est plus contraint de quitter sa

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Côté Télé-accompagnant et patient

© Centre Hospitalier de Bischwiller

© Centre Hospitalier de Bischwiller

REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Côté Télé-intervenant 1

chambre, dans son pavillon... L’ « expert » communique avec les soignants, il dispose des mêmes informations, il voit la même chose et il parle comme s’il était dans la même pièce. Ajoutant, ce n’est pas négligeable, que le malade voit l’expert sur son écran et il parle avec lui, plaisante avec lui, sourit avec lui. Il y a un côté « jeux » et « innovation », qui séduit le résident.

Côté Télé-intervenant 2

La maîtrise d’œuvre matérielle et logicielle a été confiée à un groupement de sociétés : Hopi et Neolinks, sous la supervision d’Alsace e-santé.

mais il n’a pas du tout le même objet. Et notre lutrin est aussi plus moderne... Il est fixé sur le haut de la machine et équipé d’une caméra orientable à distance avec un zoom très puissant ainsi qu’un large écran tactile apportant au patient-résident l’image en direct du télémédecin ou du téléconsultant. C’est un dispositif mobile,

Dernier point du triptyque : l’accès à la compétence. La

très maniable qui peut être déplacé sans difficulté... La

plateforme gérontologique de télésanté facilite l’accès

maîtrise d’œuvre matérielle et logicielle a été confiée à

au médecin spécialiste, quelle que soit sa spécialité. Elle

un groupement de sociétés : Hopi et Neolinks, sous la

rend inutile les déplacements quasi-impossibles pour

supervision d’Alsace e-santé.

des malades très fragiles, aux pathologies lourdes... Il serait injustifiable d’en priver les résidents, de plus en plus nombreux, dans nos structures. Ajoutons que la plateforme peut compenser, au moins en partie, la pénurie dans certaines spécialités.

tièrement équipé, il peut être équipé de 5 télé-instruments : • otoscope (examen des oreilles), • dermatoscope (examen de la peau),

Quels sont vos outils pour faire de la télémédecine ? Quels types d’examens pratiquez-vous ?

• stéthoscope avec fonctions cardio et pneumo (réglage du son différent), • sonde d’échographie (en cours de définition)

il ne s’agit pas du même que ceux des moines-copistes

• et même un ECG qui n’est pas encore installé à Bis2

chwiller.

ECG : Électrocardiographe

2

L.L. − L’équipement de base est appelé le lutrin1. Mais du Moyen Âge (rires). Il y ressemble – un tout petit peu –

Le lutrin est un petit meuble pour lire ou écrire commodément un livre. Il est particulièrement utile si l'ouvrage est volumineux ou précieux et, bien sûr, s'il ne peut être tenu à la main

1

Son éventail varie selon les usages des « pilotes ». En-

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

115


© Centre Hospitalier de Bischwiller

REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Outre les aspects purement technologiques, la télémédecine implique « l’invention » d’un nouveau mode de relation. Il faut apprendre à communiquer, à sentir, à « toucher », sans aucun contact physique : ce n’est pas si évident pour une consultation médicale. Comment trouver une alternative à la poignée de main en conservant le ressenti ? Enfin, pour que la technique ne prenne

Bilan neurocognitif

pas le pas sur la relation humaine, il faut qu’elle s’efface au maximum durant la téléconsultation... Au CHDB nous avons formé une aide-soignante – notre « télé-assistante » – dédiée à la coordination et à la logistique : organisation du planning, déplacement du lutrin dans les différents services, suivi du bon déroulement de la téléconsultation...

Quel est, après 10 mois, le retour d’expérience pour le CHDB ? L.L. − Comme toute innovation, la contrainte essentielle, pour le cadre de santé comme pour les deux médecins responsables du projet, est de développer en parallèle les autres activités de service. Mais le service rendu aux

tion pérenne d’un poste de télé-assistant a également été un des éléments déterminants de cette réussite... Il faudra toutefois attendre, fin 2015, l’évaluation réalisée par l’ARS Alsace en liaison avec les résultats d’autres régions et les organismes d’assurance maladie, pour une généralisation du projet.

Quelles sont les perspectives de déploiement à l’issue de l’expérimentation ? C.B. − Que les phobiques du cloud se rassurent : la télésanté ne doit pas, ne peut pas et ne pourra pas tout

résidents nous pousse à nous jeter corps et âme dans

faire ! Elle doit simplement trouver sa juste place dans

la mise en pratique, en routine, de cette technologie...

l’éventail médical du 3ème millénaire. Cette plateforme

Après 130 télé-actes, l’expérimentation est clairement

nous permettra de recevoir directement, pour nos 9 bâti-

positive. L’apport progressif d’autres télé-intervenants li-

ments, des avis spécialisés de l’extérieur : cardiologie,

béraux ou hospitaliers a développé de nouveaux axes de

neurologie, dermatologie, psychiatrie… Dans l’autre

travail. Le soutien de notre administration avec la créa-

sens, nous serons en mesure d’émettre des avis dans nos domaines de compétences : suivi des plaies chroniques, dépistage neurocognitif et/ou nutritionnel, suivi de la douleur chronique, assistance rééducationnelle, accompagnement en soins palliatifs vers différentes structures (les EPHAD par exemple) dans notre secteur. Nous allons aussi pouvoir créer ou renouer du « lien médical » entre tous les acteurs, y compris, bien évidemment, avec les résidents.

Que les phobiques du cloud se rassurent : la télésanté ne doit pas, ne peut pas et ne pourra pas tout faire ! Elle doit simplement trouver sa juste place dans l’éventail médical du 3ème millénaire. Quel est le projet suivant ? L.L. − Les perspectives d’avenir dans l’innovation pour la santé sont riches. Beaucoup d’idées et de concepts voient le jour, notamment concernant les équipements connectés renseignant en temps réel sur les paramètres physiques ou physiologiques du patient. Le prochain défi pour la médecine sera certainement d’arriver à conjuguer ce développement technique avec l’éthique et le sens clinique, pour que la technique soit bien au service des individus et non qu’elle devienne une fin en soi.

116

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

n


REPORTAGE DH : CHD de bischwiller (Bas rhin)

Souffler

n’est pas jouer ! Le Trèfle, plateforme d’accompagnement et de répit DH MAGAZINE – Le trèfle pouvait-il être autre

sieurs objectifs définis. Les professionnels intervenant

que vert ?

au sein du Trèfle sont : un infirmier référent, un assistant

Patricia Krill − Tout peut être débattu (rire). Mais,

de soins en gérontologie, un psychologue et différents

la couleur de « notre » Trèfle est le symbole du « porte

personnels médicaux techniques...

bonheur » à celui qui le découvre. Le Trèfle c’est d’abord est situé dans l’un des pavillons du CHDB. On y trouve

Plus concrètement, de quoi l’aidant peut-il bénéficier ?

un ensemble de moyens et des locaux. C’est un lieu de

P.K. − La liberté. Un peu de temps disponible pendant

vie ; on peut s’y rencontrer, parler, échanger avec les

lequel la personne est prise en charge... Un temps de

membres de l’équipe. Le Trèfle s’adresse aux familles

répit pendant lequel on confie son parent, son conjoint.

et aux proches : les « aidants ». Permettre un répit, une

Au-delà de cette question, la plateforme répond à des

pause, un renfort, une assistance : tout cela est considé-

besoins d’écoute, de conseil et de soutien – individuels

rable pour l’aidant... Le Trèfle, c’est la volonté de dispo-

ou collectifs – pour les aidants.

notre « Plateforme d’accompagnement et de répit ». Il

Entretien avec Patricia Krill, directrice des soins & Camille Apffel, directrice adjointe

ser d’un panel de solutions à la disposition des aidants tation pour les malades... Tout dispositif de répit est

Est-ce le CHDB qui a pris l’initiative de cette réalisation ? Le Conseil général ? Et qui la finance ?

fondamental dans une filière gériatrique cohérente qui

C.A. − Le Conseil général du Bas-Rhin mène de nom-

veut associer les proches dans une prise en charge spé-

breuses actions en faveur des aidants, mais l’offre du

cifique. Le Trèfle est bien positionné et préparé pour ré-

Trèfle est nouvelle. La plateforme d’accompagnement et

pondre à toute question relative à la maladie d’Alzheimer.

de répit répond à un appel à projet émanant de l’ARS.

Elle témoigne d’un besoin identifié auprès des usagers.

Qui sont les aidants ?

L’ARS finance la coordination des actions de la plate-

Camille APFFEL − Dans notre cas, l’aidant est toute

forme, une partie dans le cadre d’un forfait. Pour l’aidant

personne qui s’occupe d’un malade qui ne peut, comme

comme pour malade, aucune prestation ne donne lieu

l’on dit parfois, « s’en sortir » seul. Bien sûr, l’aidant

à facturation sauf s’agissant des activités choisies qui

n’est pas n’importe qui pris au hasard. C’est souvent le

restent à la charge des bénéficiaires.

: conseils, disponibilité d’écoute, recherche d’une orien-

mari ou la femme ; le plus valide des deux s’occupe de proche : les enfants, petits-enfants bien sûr. Mais aussi

Le Trèfle n’est pas l’unique « prestataire » de service ?

et plus rarement un voisin, un ami... Dans tous les cas,

C.A. − Vous avez raison. De nombreux services ayant

c’est pour l’aidant une charge très lourde et surtout quo-

pour missions l’aide aux aidants existent déjà. Notre

tidienne, permanente. Le soignant qui a fini son service

objectif est de parvenir à une vision claire, du « qui fait

peut s’occuper à autres choses. Pas l’aidant ! C’est là

quoi ». Il s’agit de coordonner l’ensemble des services,

que nous pouvons, peut-être, soyons modeste, apporter

d’éviter superpositions et doublons en orientant les per-

un petit plus. Un petit moment de répit, un moment pour

sonnes vers les services les mieux adaptés. Une coor-

souffler.

dination fait l’objet d’un groupe de réflexion au niveau

l’autre. C’est aussi très souvent un membre de la famille

départemental. Nous devons aussi savoir communiquer

Comment aidez-vous les aidants ?

sur l’existence de la plateforme et présenter ses mis-

C.A. − Notre outil, c’est notre plateforme qui offre

sions aux différents professionnels : médecins libéraux,

conseil, orientation et soutien à toutes personnes qui

assistantes sociales, partenaires, accueils de jour… La

s’adresse à elle. Elle est rattachée à l’accueil de jour.

plateforme d’accompagnement et de répit est un service

Une plateforme d’accompagnement et de répit, c’est un

récent au sein du CHDB. Sa montée en charge est pro-

« ensemble de moyens coordonnés » avec un ou plu-

gressive. Il reste encore beaucoup de choses à faire.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

117


Reportage de Florence Boizard, élève directeur d’hôpital 2014-2016, membre d’EHESP Conseil, association des élèves de l'École des hautes études en santé publique (EHESP) Photos fournies par le centre hospitalier de Blois

118

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


reportage Le

Centre Hospitalier

de

Blois

Un hôpital innovant

© Clément Helluin - Service Communication - CH de Blois

« Soyons réaliste, demandons l’impossible », c’était un slogan de « Mai 68 ». Dans ce troisième millénaire, à l’hôpital, c’est devenu aujourd’hui la norme de base ; pour les médecins, les hospitaliers et, encore un peu plus, pour les directeurs. Le CH de Blois répond, avec sérénité, à cette équation exigeante en deux mots : « S’adapter et inventer ». Ce ne sont pas que des mots, c’est une doctrine et une mise en œuvre ! DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

119



REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

Les symptômes de la dynamique du Centre Hospitalier de Blois « Je suis fier de l’équipe de direction qui sait insuffler à son personnel le dynamisme pour mener à bien ses projets. »

Entretien avec Richard Bousiges Directeur général les achats de textiles et les

3 sujets les plus importants à mettre en valeur concernant le fonctionnement de votre hôpital ?

marchés d’assurance, de telle

RICHARD BOUSIGES − Le climat social, le respect des

encore plus une force éco-

crédits, l’évolution et l’adaptation de l’établissement aux

nomique sur le territoire de

normes et au contexte local et national.

santé. Nous affichons l’objectif

sorte que l’entité représente

de promouvoir la mutualisation

Lorsque vous parlez du Centre hospitalier de Blois, vous insistez sur son dynamisme, que veut dire l’expression « hôpital dynamique » ?

des achats afin d’obtenir des

Le dynamisme réside tout d’abord dans la capacité de

GCS Achats assure la sécurisa-

s’adapter aux besoins des patients et des personnels, il

tion des procédures de consul-

s’agit aussi d’inventer pour faire progresser l’établisse-

tation dans le cadre du code

ment vers ce qui peut se faire de mieux au meilleur coût.

des marchés publics et permet

Ainsi, l’équipe de direction a compris la nécessité d’une

d’engager l’harmonisation des

coopération avec les autres structures hospitalières du

pratiques

département et le centre hospitalier de Blois est plei-

entre les établissements.

conditions qualitatives et financières les plus pertinentes. Le

professionnelles

nement positionné en qualité d’acteur fédérateur d’acti-

Quelques chiffres de 2013 1 285 lits et places dont 700 lits EHPAD et ULSD 44 5916 journées d’hospitalisation 47 026 passages aux urgences,

c e nt r e hos p i t a l i e r d e blo i s

DH MAGAZINE – Quels sont, selon vous, les

soit 129 par jour

142 570 consultations externes 47 401 journées d’hospitalisation 44 5916 radiologies 9 232 scanners 4 906 IRM 9 904 interventions chirurgicales 27 157 232 actes de laboratoire 1 585 naissances

qui sont basés au CH de Blois ; il existe aussi des GCS à

Pour plusieurs raisons clas-

vocation départementale comme le GCS Loire/Sologne

siques : les textes nous y incitent, comme l’ordonnance

pour les activités de laboratoire et le GCS Chirurgie vas-

de 2005 et la loi HPST, les contraintes économiques nous

culaire. Pour le GCS Achats, de 47 adhérents au départ en

y poussent, et surtout ils permettent de réaliser des écono-

2010, nous sommes passés aujourd’hui à 95 membres

mies conséquentes, par exemple 140 000 e d’économies

et nous avons élargi la palette du GCS jusqu’à inclure

pour l’appel d’offre des produits pharmaceutiques, ou

et Cher, a impulsé une dynamique pour mettre en place plusieurs GCS (groupement de coopération sanitaire) à

vocation régionale : le GCS Télésanté et le GCS Achats

Pourquoi avoir choisi la formule de GCS, autrement dit des groupements de coopération sanitaire ?

vités. L’hôpital de Blois, établissement référent du Loir

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

121


© L'agence Ivars et Ballet, architectes associés

REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

encore 200 000 e d'économies d'assurance, 400 000 e

On sent chez vous la passion et la mobilisation

d’économies pour le marché des couches pour la région.

du directeur !

De 2009 à 2011, certains établissements du département

Je dispose d’une très bonne équipe, ce sont d'excellents

et de la région travaillaient en coopération dans le cadre

professionnels et je suis fier de l’équipe de direction qui

d’un groupement d’achats, appelé le CERAP, qui s’est

sait insuffler à son personnel le dynamisme pour mener

transformé en 2011 en GSC et le CH de Blois a été désigné

à bien ses projets.

établissement siège. Un GCS est tout le contraire d’une coquille vide, c’est une structure intégrée dans la vie de

Pouvez-vous nous faire part de « trucs » pour

l’établissement et les GCS fonctionnent bien. À noter aussi

rendre une équipe dynamique ?

que le programme PHARE nous a copié dans la méthodologie de son développement, c’est-à-dire qu’il a été un programme local avant de devenir un programme régional.

Comment expliquez-vous la volonté de coopération sanitaire dans le département ? Je suis Président de la Conférence de Territoire de Santé, ce qui correspond au département et, en cette qualité, j’ai fait établir un programme territorial de santé (PTS) - déclinaison du Programme régional de santé (PRS) - qui a été voté en Assemblée générale devant 110 professionnels et je suis très fier d’avoir obtenu une unanimité. Un des dix axes du PTS consiste à développer les coopérations sur des objectifs médicaux correspondant à des besoins de santé publique, nous avons ainsi en projet de créer une unité de soins palliatifs, une unité neuro-vasculaire et une unité de prise en charge de la douleur. Ce PTS est un programme politique et le Directeur s’en occupe conjointement avec

J’aime bien les valoriser et je suis heureux pour eux de me dire qu’on avait tel objectif et qu’on l’a atteint.

Le CH de Blois est-il un établissement comme les autres ? Oui et non. En fait, il y règne un bon climat social qui fait entretenir de bonnes relations avec le corps médical et non médical. Et surtout, c’est plus facile de gérer un établissement de cette taille qu’un CHU ou un CHR.

Quelle est l’attractivité de l’hôpital ? Nous venons d’inaugurer en octobre 2013 un bâtiment neuf avec 100 lits de SSR, 35 lits de soins de suite locomoteur et neurologique et 25 lits de médecine interne gériatrique. Cela pour répondre aux besoins de la population qui vieillit. Tous ces travaux ont été réalisés dans les délais et dans les coûts prévus, soit 31 millions d’euros. J’en suis fier. Nous avons eu l’honneur de

l’ARS, les GCS sont un des moyens de cette politique.

recevoir la visite de Madame la Ministre Michèle

Est-ce que vous pouvez nous parler de la dynamique d’engagement du CH de Blois dans la démarche qualité ?

connu une baisse de l’activité de la maternité pourtant de

Delaunay pour l’inauguration. Il est vrai que nous avons niveau 2B, passant de 1800 à 1500. Il s’agit maintenant de la rénover et d’humaniser les chambres.

S’engager dans une démarche qualité et être certifié sont des éléments valorisants pour le personnel.

Disposez-vous d’un budget dynamique ? Jusqu’à présent, le budget a présenté un léger excédent,

122

Qu’est-ce qui fait alors que l’établissement fonctionne de manière supérieure à la moyenne ?

et cette année, nous connaissons un léger déficit

Des objectifs qui sont en réalité des challenges.

pas été compensée.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

(360 000 e) du fait d’une baisse de tarification qui n’a

n


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

Coopération et certification,

l’hôpital de BLOIS dans tous ses états « Quand les généralistes toussent, c’est l’hôpital qui s’enrhume »

DH MAGAZINE – Quels sont, selon vous, les 3 thèmes les plus marquants à faire ressortir concernant votre direction fonctionnelle ?

Les médecins généralistes ont-ils compris et adhéré à votre projet ? Le management, la gestion des deniers publics et la

Patrick expert − L’implication du CH de Blois vis-

méthodologie de la conduite de projet ne sont pas, sauf

à-vis des médecins généralistes de proximité, le GCS

exception, leurs finalités premières. Début 2004, on a

régional Télésanté, la médicalisation de la démarche

réfléchi, rencontré des médecins pour leur exposer les

qualité et gestion des risques.

problématiques. L’hôpital a choisi pour commencer un secteur semi-rural qui connaissait le plus de difficultés.

Comment l’hôpital de Blois en est venu à impliquer les généralistes ?

Au début, j’ai rencontré une centaine de médecins, et le

Suivant l’adage, « quand les généralistes toussent, c’est

projet nous intéresse, mais vous ne trouverez pas de

l’hôpital qui s’enrhume », nous avons décidé de prendre

financements ». Lorsque je présentais ce projet aux

les devants à partir de constats de démographie médicale.

tutelles, j’ai entendu la réflexion inverse : « vous allez

En effet, notre département connaît un faible nombre de

trouver des financements mais pas de médecins ».

généralistes, sans être dans une situation désespérée,

En synthèse de ces prédictions créatrices, nous avons

il est en situation difficile. La plupart des médecins ont

trouvé et des médecins et des financements.

Entretien avec Patrick Expert, directeur de l'évaluation et de la stratégie, directeur délégué du pôle psychiatrie, pôle mère-enfant, administrateur du GCS Télésanté

premier accueil s’est conclu par cette réflexion : « votre

passé 55 ans et ce trou d’air ne fait que commencer.

L’hôpital a agi par anticipation en créant la Plateforme Alternative d’Innovation en Santé – PAIS –, en cherchant la meilleure solution de concert avec les généralistes de proximité, sinon les urgences et nos services vont finir par être assiégés et paralysés.

En outre, trop peu de médecins décident de s’implanter en libéral et en proximité, seulement 10 %, les autres sont salariés ou ont choisi des spécialités. Et moins il y a de médecins de proximité, plus il y a de monde aux urgences. L’hôpital a agi par anticipation en cherchant la meilleure solution de concert avec les généralistes de proximité sinon les urgences et nos services vont finir par être assiégés et paralysés. Sur la méthode, il a fallu

Comment fonctionne concrètement ce dispositif ?

travailler mieux avec moins de moyens. Le dispositif

Le

s’appelle PAIS (Plateforme Alternative d’Innovation en

régulateur au SAMU, a aidé certains généralistes à

Santé), il a été pensé et mis en œuvre par un médecin du

travailler sous une autre forme d’exercice. L’intérêt pour

SAMU CRRA 15, le Dr Isaac Gbadamassi, et moi-même

les médecins réside d’abord dans le renforcement du

pour réduire les effets de la désertification médicale

secrétariat médical en qualité et en quantité, le filtrage

et limiter l’ampleur de l’hospitalocentrisme. Tout est

des appels, la rationalisation du travail administratif et

mis en œuvre pour que les médecins généralistes se

des conditions de vie plus souples pour les médecins : fin

consacrent à leur cœur de métier, limitant les contraintes

des interruptions téléphoniques pendant les rendez-vous

géographique et logistiques.

et limitation des rendez-vous inutiles, ça ressemble à un

Docteur

Gbadamassi,

urgentiste

et

médecin

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

123


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

L’intérêt pour les médecins généralistes réside d’abord dans le renforcement du secrétariat médical en qualité et en quantité, le filtrage des appels, la rationalisation du travail administratif et des conditions de vie plus souples pour les médecins : fin des interruptions téléphoniques pendant les rendez-vous et limitation des rendez-vous inutiles… ▲

« cabinet du bonheur » dit un jeune médecin stagiaire.

Finalement, qui finance ce dispositif ?

Et l’intérêt s’étend aussi pour l’hôpital par un moindre

L‘ARS finance le renforcement des secrétariats à 100 %

recours aux urgences et à ses services, une meilleure

la première année, et dans une moindre proportion

gestion de l’argent public et au final, une présence

les années suivantes. L’assurance-maladie finance

médicale optimisée pour les patients : les appels au

les actions de prévention. Les mutuelles « Mutualité

SAMU ont baissé dans le cadre de ce dispositif, cela a

française du centre » et « Harmonie mutuelle » et

été démontré et chiffré. Le SAMU forme les secrétaires

quelques communautés de communes concourent au

des cabinets médicaux de proximité au filtrage des

financement. Le Conseil départemental de l’Ordre des

appels, à la gestion d’un secrétariat commun et d’un

médecins du Loir-et-Cher a accepté le déploiement

carnet de rendez-vous partagé, au partage de données

d’une solution dérogatoire.

médicales et à un outil informatique commun. Le SAMU les forme aussi à apprécier l’urgence. Concrètement, les médecins gagnent entre 3/4 h à 1 h par jour. Chaque jour, à tour de rôle, un médecin de proximité assure la prise en charge des soins sans rendez-vous ou imprévus. Le SAMU dispose de la liste des médecins assurant ces soins imprévus par bassin de vie de 15 à 20 000 habitants. Enfin, une partie du temps gagné est réinvesti par les médecins dans la prévention. Les médecins généralistes sont incités à s’investir dans la prévention collective, c’est-à-dire à faire en sorte que se réalise un regroupement de patients par exemple atteints de diabète, d’obésité. Les médecins généralistes formés peuvent aussi intervenir auprès des équipes de maison de retraite par exemple sur le thème du « mieux travailler » la nuit hors présence de médecins ou d’infirmières.

Quelles sont la place et le rôle de l’hôpital dans cette nouvelle manière de faire travailler les médecins généralistes de proximité ? Outre d’avoir été initiateur et vecteur, l’hôpital, dans ce dispositif, est en fait une structure-relais, car les financeurs du dispositif PAIS ne peuvent payer directement les médecins, il faut préalablement valider le service fait. L’hôpital propose et fait disposer aux généralistes libéraux de ses compétences en ingénierie de projet, en financement public et parapublic des organisations, c’est un tiers facilitateur, qui devra continuer

d’évaluer

ce

dispositif.

L’établissement

hospitalier perd en quantité (moins d’hospitalisations injustifiées) pour gagner en qualité (meilleure régulation des flux). En fait, PAIS repose sur des caractéristiques reproductibles avec une organisation modulaire de proximité attachée au territoire, sa mise en œuvre

Concrètement, les médecins gagnent entre 3/4 h et 1 h par jour. Chaque jour, à tour de rôle, un médecin de proximité assure la prise en charge des soins sans rendez-vous ou imprévus.

Combien de généralistes sont mobilisés ? Ils sont 22 sur un total de 300, ils étaient 4 au lancement du dispositif. Ce dispositif concerne à ce jour, 4 cantons peuplés de 66 500 habitants. On peut ainsi voir qu’un établissement de taille moyenne comme le nôtre est capable d’innovation.

124

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

est souple et tient compte de l’organisation médicale existante.

GCS Télésanté Centre

Vous êtes aussi administrateur du GCS Télésanté Centre : pouvez-vous nous le présenter ? Un GCS est aujourd’hui une forme de coopération privilégiée. Le GCS Télésanté regroupe les principaux établissements de santé de la région Centre, publics


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

et privés, et l’ensemble des unions régionales des professionnels de santé, (URPS). L’idée est de favoriser les échanges entre professionnels de santé pour déployer par exemple le dossier médical personnel, l’accès mutualisé au haut et au très haut débit, sécuriser les systèmes d’informations, mutualiser les images entre établissements et entre un établissement et les médecins de ville. Pour faire avancer ces projets, nous proposons des solutions mutualisées et des prestations à nos membres. Restera, à l’avenir, à bâtir un système d’information en santé cohérent à l’échelle de la région.

Le GCS Télésanté est en fait bien plus qu’un simple logiciel ? Et oui, on peut dire qu’il forme un système. Il vise à organiser et à rendre cohérent une nouvelle culture que les professionnels sont en train de s’approprier parce que l’informatique est en avance sur les professionnels. Nous travaillons actuellement avec l’ARS et 54 membres dans ce GCS. Enfin, dans le cadre du PAERPA (Personnes âgées en risque de perte d'autonomie), sont expérimentés en Indre-et-Loire des outils informatiques pour coordonner le partage de données entre professionnels.

Quelle est votre conception de la qualité en hôpital ? Nous cherchons désormais à médicaliser la qualité et la gestion des risques, parce que quelques médecins hospitaliers considèrent encore que la qualité est une démarche administrative voire une lubie de la direction :

Leader National dans le domaine du Génie Climatique, COFELY AXIMA allie la force d’un groupe international et l’expertise pour la performance de vos installations. L’agence COFELY AXIMA de TOURS est spécialisée dans le traitement d’ambiance, dans le domaine hospitalier et la production pharmaceutique.

de ce fait, il s’agit d’attirer ces derniers récalcitrants. Afin de faciliter ce processus, on a intégré dans notre équipe des représentants du corps médical et soignants avec un temps dédié. Auparavant l’équipe qualité était animée par un ingénieur non soignant, depuis un an, elle est composée : d’un cadre de santé à temps plein, d’un coordonnateur médical à 30 %, d’un pharmacien

ZAC de l’Arche d’Oé II 5 rue du Tertreau 37390 NOTRE DAME D’OE Tél. : +33 (0)2 47 85 34 34 Fax : +33 (0) 2 47 85 34 35

à 30 %, d'un responsable et d'un assistant qualité. L’équipe voit sa gouvernance partagée entre le président de la CME, le Dr Michel Tossou, médecin ORL, la

coordinatrice générale des soins et la direction dont

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

125


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

c H d e blo i s

Quelques chiffres de 2013 2 589 agents 117 131 191 € de charges de personnel

11 123 jours de formation continue pour les agents

j’ai la charge. Nos dernières priorités d’amélioration

d'entraînement pour les autres agents. Le passage

s’inscrivent autour de 4 axes : la sécurisation de la

de la qualité papier à la qualité terrain est certes à

prise en charge médicamenteuse, la nouvelle charte

perfectionner. Pour cela, nous disposons d’un autre

d’organisation du bloc opératoire, l’évaluation des

outil, celui du patient traceur, notre hôpital s’engage

pratiques professionnelles, l’amélioration du suivi des

dans cette voie avec une forte volonté.

traitements antibiotiques. L’évaluation de la qualité est une démarche globale, collective et suivie qui requiert

Le patient traceur, pourquoi, comment ?

l’implication de tous les professionnels de l’hôpital.

Il s’agit de rencontrer un patient proche de la sortie après un parcours complexe, par exemple réanimation,

Où en êtes-vous de la procédure de certification ?

urgence. Ce patient doit être volontaire, capable de

Nous faisons partie des cent premiers établissements

s’exprimer et de porter une appréciation tant positive que

hospitaliers à être certifiés. Nous détenons une

négative. Son parcours est aussi soumis à une analyse

certification générale par la HAS et des certifications

contradictoire avec une équipe pluri-professionnelle.

spécifiques, ISO 9001-2008 en blanchisserie, bio-

L’accent sera plus particulièrement porté sur le recueil

nettoyage, maintenance et stérilisation et ISO 22000-

de son consentement à chaque acte majeur en soins,

2005 en restauration. Plus récemment, le laboratoire

sur le respect de l’identito-vigilance, sur l’identité de la

de biologie clinique s’est engagé dans la voie de

personne de confiance, sur la rédaction des directives

la certification. Le CH de Blois est engagé dans sa

anticipées. Jusqu’à présent, nous avons réalisé un

quatrième procédure générale de certification, celle-ci

patient traceur.

se déroulant tous les 4 ans. Les notes obtenues dans les cotations les plus élevées représentent 88,9 % des

Que vous apporte le patient traceur ?

critères.

Le patient traceur est un outil pour l’analyse de la qualité du terrain et de l’analyse du vécu. Il permet

QueI est l’impact réel de ces procédures d’évaluation ?

de prendre en compte la parole du patient pour

Il y a un réel impact. On voit que des professionnels

jusqu’à la sortie par exemple. Analyse avec l’équipe

s’impliquent grâce à ce levier que constituent les

comprise, le patient traceur nécessite 3 à 4 heures.

certifications. Ensuite, elles constituent une vertu

126

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

vérifier, avec lui, les étapes de sa prise en charge

n


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

L’investissement soutenable comme traitement

« Le CH de Blois est un hôpital très attachant et même les financiers sont dans le réel. »

DH MAGAZINE – Quels sont pour vous les

moteur et neurologique. Il comprend aussi un plateau

3 points les plus importants à mettre en valeur dans le cadre de votre direction ?

technique de haut niveau : kinésithérapie, balnéothéra-

ELSA LIVONNET-MONCELON − Le financement du

et un appartement thérapeutique de rééducation. Des

projet d’établissement, l’organisation d’une filière géria-

consultations spécialisées s’y déroulent aussi : gériatrie,

trique complète et l’ouverture du bâtiment de La Rose-

« mémoire », urodynamique et spasticité. Nous dispo-

lière à l’automne 2013.

sons également d’une salle équipée pour réaliser des

pie, ergothérapie, orthophonie, une zone d’appareillage

consultations en télémédecine.

Que mettre sous le mot investissement ?

D’un point de vue financier, le projet a été financé

Des projets pertinents et soutenables compte tenu de la

sur fonds propres et par emprunts. L’aide du Plan

taille et des perspectives de l’établissement.

Hôpital 2012 a pris deux formes : une subvention du

Entretien avec Elsa LivonnetMoncelon, directeur des finances, directeur délégué au pôle autonomie, neurologie et prise en charge du vieillissement, administrateur du GCS Loire-et-Sologne

FMESPP consistant en une aide directe en capital et des

Vous liez, en grande partie, investissement et financement. Comment avez-vous réussi à financer la construction de La Roselière ?

crédits ONDAM sur 20 ans destinés à compenser les

La tour principale du CH de Blois date de 1978. Si la

de l’UHR et de l’UCC, le CH de Blois a aussi bénéficié

surcoûts d’exploitation, et tout particulièrement les frais financiers liés aux intérêts des emprunts. S’agissant

maintenance interne de ce bâtiment est de très bonne qualité, celui-ci n’est plus adapté aux standards hôteliers attendus par les patients et les surfaces manquent pour réaliser les restructurations nécessaires à l’évolution des prises en charge médicale et chirurgicale.

Ce projet est une réalisation exceptionnelle qui vient couronner deux belles années de travail avec les équipes soignantes, techniques et logistiques.

La construction d’un ensemble immobilier de 375 lits s’est ainsi imposée et a été soutenue dans le cadre du

des dispositions issues du Plan Alzheimer. Ma double

plan national d’investissement Hôpital 2012. Les travaux

« casquette » de directeur fonctionnel en charge des

de construction se sont déroulés en deux tranches. Inau-

finances et de directeur délégué au pôle « autonomie,

guré en 2009, le premier bâtiment comprend 100 lits

neurologie et prise en charge du vieillissement » a sans

d’USLD et 110 lits d’EHPAD. Il comprend une unité

doute facilité le bouclage du plan de financement.

d’hospitalisation renforcée pour les résidents atteints

Des difficultés ?

deuxième bâtiment, mis en service en septembre 2013,

Disons de la chance et de la malchance. Ce dossier a été

accueille 25 lits de médecine interne gériatrique, 100 lits

soutenu au plus haut niveau, mais la décision d’ouverture

de SSR polyvalent et gériatrique dont une unité cogni-

du Plan Hôpital 2012 a été retardée pour la deuxième

tivo-comportementale, ainsi que 30 lits de SSR loco-

tranche. Cela a eu pour conséquence de nous placer

de la maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées. Le

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

127


© Agence Ivars et Ballet, architectes associés

REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

Agence Ivars et Ballet, architectes associés

en plein resserrement du crédit bancaire début 2011. Nous avons cependant pu « boucler » le financement du projet à temps et dans des conditions satisfaisantes en souscrivant deux emprunts à taux bonifiés : l’un auprès de la Caisse des dépôts et consignations et l’autre auprès du secteur conventionnel adossé à un financement de la Banque européenne d’investissement. Outre les financements Plan Hôpital 2012, nous avons également bénéficié du concours de l’ANAP et ainsi cédé un bâtiment à titre onéreux à la ville. Par ailleurs, la situation économique était telle que les résultats de la consultation des entreprises ont été favorables au projet ; nous avons ainsi pu retenir des options techniques et qualitatives que l’économie générale ne nous avait pas permis d’envisager dans la première tranche. Pendant ces 33 mois de chantier, certaines entreprises ont connu d’importantes difficultés de trésorerie, d’autres ont même dû être placées en liquidation judiciaire. Nous avons fait face et géré chaque situation, au cas par cas.

des arbitrages difficiles. Et, à titre personnel, je suis très fière et satisfaite de cette aventure. Je ne crois pas ne pas connaître un seul des m² de ce bâtiment.

Des regrets ? Des regrets de directeur financier car, compte tenu de la forte baisse des taux depuis, les taux d’intérêt des

est de bénéficier de l’expérience passée. Et si nous

emprunts contractés peuvent sembler finalement un

avons conservé et développé ce qui fonctionnait bien

peu élevés (même si les conditions sont très satisfai-

après plus d’une année de recul de mise en service de

santes) ! Et quelques surcoûts d’exploitation sans doute

la première tranche, nous avons pu

liés à la dispersion de certaines installations et des flux

modifier certains aménagements qui

logistiques.

coût de la première tranche

31,5 M d'€ c H d e blo i s

le projet d’organisation même s’il a fallu parfois rendre

L’intérêt d’une opération à tranches comme celle-ci

Les travaux de La Roselière en chiffres 24,5 M d'€

n’apportaient pas toute satisfaction. Malgré

tout,

et

naturellement,

Qu’est-ce qui est facile ? De dire « oui ». De voir les patients et les équipes évo-

subsistent quelques erreurs.

luer dans de nouveaux locaux, agréables et fonctionnels,

Que retirez-vous de ce projet ?

et surtout que l’hôpital public offre à tous un plateau

C’est une réalisation exceptionnelle

technique de rééducation de grande qualité et une filière

coût de la seconde tranche

qui vient couronner deux belles

gériatrique logique et complète.

33 mois : Durée des travaux

années

de

équipes

soignantes,

de la seconde tranche

travail

avec

les

techniques

A-t-on posé les bonnes questions ?

et logistiques. Grâce à l’équipe

Le CH de Blois est un hôpital qui sait se mobiliser

de maîtrise d’œuvre, ce bâtiment

pour des projets bien dimensionnés et soutenables au

de la deuxième tranche

est réussi au plan architectural.

plan financier. Les investissements futurs sont déjà

150 ouvriers en même temps

Le chantier s’est bien déroulé et a

déterminés : mise aux normes des laboratoires de biologie

sur le chantier

connu des moments forts ; nous

et d’anatomie-pathologie dans une logique de plateau

20 entreprises sont intervenues

avons même respecté la tradition

technique de territoire, développement de la capacité en

lors d’un « gigot-bitume » pour fêter

chirurgie ambulatoire et d’hôpital de jour de médecine et

la fin du clos-couvert. Les équipes

de cancérologie, extension des consultations externes. n

43 emplois créés à l’occasion

sur le chantier

128

hospitalières se sont remarquablement investies dans

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

L’hôpital sublimé

par ses fonctions hôtelières « La satisfaction est agréable à entendre »

DH MAGAZINE – Jean-Luc Annazo, respon-

9001. Validé par un organisme professionnel indépen-

sable du service central bio-nettoyage, pouvezvous présenter votre travail ?

dant, cela contribue à faire acter nos compétences par

Jean-Luc Annazo − Mon travail consiste au manage-

qualité sanitaire (certification HAS). En interne, par la dif-

ment d’une équipe de 22 personnes spécialisées dans le

fusion de documents par lesquels le public peut prendre

bio nettoyage pour 22 000 m à entretenir.

connaissance des indicateurs objectifs (affichage dans le

2

l’institution et permet de nous positionner dans la chaîne

hall, journal de l’hôpital, …), par les enquêtes de satisfac-

Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce travail ?

tion auprès des patients et des services clients, par l’idée

J-L.A. − L’aspect management d’une équipe qui,

de contribution à la culture d’entreprise.

en outre présente la particularité d’être constituée uniquement de femmes. Rendre propres et sains des

De culture d’entreprise ?

locaux est un métier parfois ingrat mais nécessaire où

J-L.A. − Oui, les patients sont aussi des clients pour

les professionnelles travaillent « dans l’ombre » tôt

les prestations hôtelières et l’institution hospitalière en

le matin. Parfois même, elles ne sont pas vues. Il est

vient à cette culture dans le bon sens du terme, c’est-

important pour nous et pour les équipes que les patients,

à-dire la satisfaction de la relation avec ce client, mais

les visiteurs et les utilisateurs constatent et disent que

aussi avec le service utilisateur.

l’hôpital est bien entretenu. La satisfaction est agréable dans ce domaine, la qualité est invisible. En fait, c’est

Comment professionnaliser les agents de votre service ?

la première chose que l’on perçoit par défaut en cas de

J-L.A. − Par un système de formation sur les différentes

problème.

techniques, par la reconnaissance des parcours profes-

à entendre. Si l’on observe bien, on pourrait dire que,

Entretien avec Daniel Lemestre, directeur des achats, des équipements et de l'hôtellerie, directeur délégué au pôle technique, médical et chirurgical, ex-administrateur du GCS achats du centre, Jean-Luc Annazo, responsable du service central bionettoyage, Jérôme Geffray, responsable de la restauration, & Patrice Hersant, responsable de la fonction linge

sionnels, par leur sentiment d’appartenance totale au

Quelles sont vos astuces pour gérer ?

monde de l’hygiène hospitalière. Les agents anciens

J-L.A. − Le respect des collaborateurs avec qui on

forment et tutorisent les nouveaux par une pédagogie

travaille, leur formation et la reconnaissance de leurs

« maison ». En début d’année, l’équipe de direction

compétences.

déroule un plan d’action dont une revue est réalisée

Si

surviennent

des

difficultés,

les

situations sont analysées et réajustées aux procédures

chaque trimestre, pour le faire évoluer et progresser.

et au cœur du métier. Les adaptations doivent être en relations humaines et de compréhension. L’attribution de

Comment s’est déroulée la certification en bio nettoyage ?

la confiance et la valorisation des métiers « invisibles »

J-L.A. − Le service est certifié sans interruption depuis

sont incontournables pour la recherche de la qualité.

2004. La dernière a été réalisée en janvier 2014. À

permanence recherchées. Le travail est constitué de

chaque renouvellement de certification, une montée en

Comment se manifeste la reconnaissance de votre travail ?

charge en matière de champ d’investigation et de rigueur

J-L.A. − En externe, par le système qualité et par le fait

accéder à un cap nouveau. Pour cela, il faut les moti-

de satisfaire aux normes exigeantes de la certification ISO

ver pour les actions quotidiennes et pour l’échéance de

est constatée. À chaque fois, les équipes semblent

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

129


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

chaque nouvelle certification. La participation de la totalité des agents à la mise en œuvre de la procédure est incontournable.

« La traçabilité met l’agent en prévention d’un éventuel problème ».

Des freins ? J-L.A. − Quelques agents peuvent penser être fliqués pendant le travail, notamment par la traçabilité et les contrôles mis en œuvre. Il faut alors réexpliquer ce qu’est la certification et surtout l’objectif recherché.

Comment ont réagi les syndicats ? J-L.A. − Ils ont souhaité que la certification, gage de valorisation du personnel, soit connue à l’extérieur. Ils participent à certains travaux et nous entretenons ensemble des rapports cordiaux.

La reconnaissance est-elle suffisante ? J-L.A. − Jamais assez. Sinon, nous vivrions sur des acquis qui très vite s’éroderaient.

Reste-t'il des frustrations ? J-L.A. − Peut-être parfois dans l’articulation de la qualité du service avec celle de l’hôpital.

Pouvez-vous faire de la qualité et des économies en parallèle ?

Jérôme Geffray, responsable de la restauration – Dans un hôpital comme celui de Blois, combien servez-vous de repas ? JEROME GEFFRAY − Un million de repas annuel servis par 54 agents. Cela s’apparente à une organisation industrielle, des commandes jusqu’à la distribution.

Industrielle ? J.G. − Oui, ce terme montre l’aspect quantitatif, mais aussi sécuritaire. Il est cohérent avec notre politique.

Sous la quantité, que reste-t-il de la « traditionnalité » des repas ? J.G. − Une tradition du bien manger à l’hôpital de Blois est entretenue et nous recueillons un satisfecit de manière générale. Nos cahiers des charges mentionnent prioritairement des critères qualitatifs. Si historiquement l’hôpital a parfois quitté les préparations culinaires pour les faire élaborer par l’industrie pour des raisons financières, il s’avère en contrepartie, que la médiocrité a un coût à posteriori : par exemple dénutrition, escarres,

J-L.A. − C’est possible dans le cadre du processus dégra-

chutes, baisse de moral. Manger doit redevenir un plai-

dé, c’est-à-dire non satisfaisant mais acceptable. Cette

sir ; des périodes de conservation courtes des aliments

situation est mise en place en cas de sous-effectifs, de

préservent le goût. Surtout à l’hôpital et en établisse-

crise interne ou de difficultés financières de l’établisse-

ment pour personnes âgées, l’alimentation concourt

ment, heureusement occasionnelles. Un protocole a été

au meilleur soin et au confort du patient et du résident.

écrit à l’avance. En fait, la situation dégradée consiste

De plus, la qualité de la restauration apparaît toujours

à aller à l’essentiel, par exemple réduire l’entretien des

comme le premier critère évoqué par le consommateur

bureaux administratifs ou tout autre secteur plus éloigné

lors de son passage à l’hôpital, au risque d’en oublier la

du patient parce que ce n’est pas vital pour lui.

raison réelle de son hospitalisation.

À quelle fréquence vous retrouvez-vous en mode dégradé ?

Quels sont vos critères qualitatifs ?

J-L.A. − C’est très occasionnel, une fois l’an en

soient réellement consommés et ne finissent pas à la

moyenne. Par exemple, en 2012, cela a duré quatre

poubelle, la sécurisation de l’ensemble de la chaîne

semaines en fin d’exercice financièrement tendu pour

de production jusqu’à l’assiette du patient constituent

l’établissement. Ainsi, le service apporte aussi sa contri-

nos critères piliers de la démarche qualité. En outre,

bution à la performance médico-économique.

le Comité de pilotage donne l’aval aux échantillons, au

J.G. − La préservation du goût afin que les aliments

en quelques chiffres

respect de notre très exigeante norme de certification,

130

La logistique 185 M d'€ d’exploitation 29 251 708 € d’investissement 1 048 292 repas servis 1 462 214 kg de textile traité

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

l’ISO 22000.

Qu’est-ce qu’elle a généré ? J.G. − En outre, une inversion du processus de dénutrition. En effet, bien que cette norme ne soit pas centrée sur l’écoute client, ni sur la satisfaction de la clientèle, mais sur la sécurité alimentaire, elle rejoint les attentes des services vétérinaires et impose une approche méthodique de type industrie agroalimentaire. Nous sommes passés à une approche prospective pour anticiper le


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

risque de toxi-infection, l’idée est d’anticiper les problèmes pour construire un plan de prévention générale.

Quel est le moteur qui vous a conduit à vous engager dans une démarche de certification aussi rigoureuse ? J.G. − Une succession de problèmes ou plutôt d’incompréhensions avec les services vétérinaires. Avant, on réagissait de manière différée, en fonction de leurs observations. Maintenant, nos exigences sont supérieures à ce qu’ils demandent pour la restauration collective. Désormais, la relation est devenue prospective et il est fréquent que nos documents soient exploités au niveau régional.

Comment ont-ils réagi ? J.G. − Ils nous ont encouragés et étaient en attente de cette expérience novatrice. Ils nous ont audité à 3 reprises dans la même année et ont porté un regard très favorable. L’échange s’est modifié ; d’un mode inspectoral et censeur, il est passé à la collaboration active et surtout anticipée. Ces services nous délivrent un indice de confiance très élevé et ont attribué à l’établissement la cotation A, niveau maximum de leur échelle d’inspection. à la recherche de germes pathogènes), tant sur les den-

En quoi êtes-vous plus exigeant que les services vétérinaires ?

rées elles-mêmes que sur les surfaces de travail et les

J.G. − Par exemple, sur la gestion du danger allergique.

zaine de jours après font l’objet d’une analyse critique

Les 14 allergènes majeurs sont repérés. Pour ce faire, la

systématique coordonnée par le comité de direction de

diététicienne définit un programme alimentaire hypoal-

la restauration.

chariots de distribution. Les résultats délivrés une quin-

lergénique, cela apporte une plus-value de sécurité et les fournisseurs ne peuvent être retenus que s’ils ré-

Des points faibles ?

pondent en toute transparence au risque allergène (ce

J.G. − Je n’en ai pas remarqué. Je suis encore béotien.

critère est intégré dans la politique d’achat et de sélec-

C’est la première année que nous sommes certifiés ISO

tion des candidats). Nous avons aussi une plus-value au

22000, mais je crois pouvoir dire que des progrès sont

regard de la gestion des dangers microbiologique (ex :

à faire en matière de contrôles, de validation des tem-

nombre de microbes non pathogènes acceptables), phy-

pératures des chambres froides pour mieux détecter

sique (ex : repérage d’éventuels corps étrangers dans

les dérives en chaîne du froid, et surtout de comporte-

les repas) et chimique (ex : résidus de produits lessi-

ment hôtelier au niveau des unités de soins et d’héber-

viels).

gement. 90 % de nos interventions sont préventives et 10 % curatives, c’est-à-dire lorsque la crise est là.

Tout cela est-il perçu par les malades ? J.G. − Les anciens patients ou résidents ont perçu la différence. Les retours d’enquêtes sont très satisfaisants. Tel le maître d’hôtel, le personnel des unités de soins ou d’hébergement contribue à l’information des consom-

Concernant les préparations culinaires, il s’avère en contrepartie, que la médiocrité a un coût à posteriori : par exemple dénutrition, escarres, chutes, baisse de moral.

mateurs clients.

Est-ce qu’on fait trop de sécurité ? J.G. − C’est l’évolution de la société.

Quand et comment percevez-vous une crise ? J.G. − Immédiatement ou jusqu’à 6 h après, avec une méthodologie de recherche des toxi-infections et une procédure de retrait de produits alimentaires. Nous pro-

J.G. − Par des analyses régulières et très fréquentes

cédons périodiquement à des exercices de retrait trans-

(10 fois par mois effectuées par un laboratoire extérieur

mis aux unités de soins.

Comment mesurez-vous la qualité ?

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

131


REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

Comment la certification est-elle perçue par les agents ?

Le fainéant réfléchit à peiner le moins possible

J.G. −Il a fallu expliquer au préalable à quoi sert la certification. Par exemple, le cuisinier ne comprenait pas. Il affirmait en outre, et ce n’est pas nouveau, qu’il n’était pas là pour empoisonner les gens. Par exemple, il a été démontré que la traçabilité écrite, qui pouvait en une première approche être vécue comme un surcroît de travail peu gratifiant, peut (et doit) devenir un outil de sécurité pour l’établissement, pour eux-mêmes, et surtout pour le convive.

Il a d’abord fallu démontrer dans les groupes de travail que les obstacles appelaient des solutions et des anticipations. Ensuite, il a été donné crédit à la parole de l’agent et celle-ci a été valorisée à sa juste mesure.

fonction est souvent perçu comme un échec de l’établissement qui n’aurait pas su s’organiser en interne. Aujourd’hui plus que jamais, le centre hospitalier de Blois doit prouver que l’activité en interne réalise un meilleur rapport qualité/prix qu’une externalisation. Il est donc recherché la qualité de la prestation textile au meilleur coût, avec un effectif au plus juste possible et un rendu donnant satisfaction au client (patient, résident, personnel, …). Tous les jours et avec 31 agents, 6 tonnes de linge sont nettoyées et assainies. Enfin, le contrôle bactériologique (sur le textile, les plans de travail et le matériel) contribue à attester que le travail est correctement réalisé. La traçabilité, effectuée dans le cadre de la certification ISO 9001, permet d’analyser l’origine probable du problème, ainsi que les moyens de sa résolution.

Comment gérer au départ ce formalisme ? travail que les obstacles appellent des solutions et des

Votre blanchisserie est certifiée, en quoi êtesvous bon ?

anticipations. Ensuite, il a été donné crédit à la parole

P.H. − Nous cherchons à apporter le meilleur service au

de l’agent et celle-ci a été valorisée à sa juste mesure.

client, et le client c’est l’unité de soins ou d’héberge-

Le professionnel voit ainsi son avis pris en considération

ment qui procède au dernier contrôle qualité avant de

et il est impliqué individuellement dans la résolution du

faire le lit ou de procéder à la toilette. Réaliser le tra-

J.G. − Il a d’abord fallu démontrer dans les groupes de

problème. Quelques agents, souvent plus âgés, ont eu des difficultés à adhérer à la démarche. Dans ce cas, ils se demandent ce qui va changer pour eux en termes de réalité sur le terrain. Il convient de convaincre que la traçabilité les met en prévention d’une éventuelle suspicion. La conduite du changement se réalise par et avec

en quelques chiffres

les agents.

La logistique 65 210 litres de carburants consommés par les véhicules de l’hôpital 661 648 km parcourus par les véhicules de l’hôpital

vail à moindre coût sans faire de qualité ne constituerait qu’une économie à court terme. La non qualité se paie au moment le plus inattendu et devient alors hors de prix. Nous respectons les normes RABC de base et la norme ISO 9001. Nous envisageons prochainement de répondre aux exigences de la norme 14000. Afin de respecter l’objectif d’être le plus rigoureux possible, l’hôpital investit régulièrement pour le renouvellement du matériel de blanchisserie (Le coût d’une chaîne de nettoyage est comparable à celui d’un scanographe).

Quelles sont les formes de pénibilité en blanchisserie ? P.H. − Le fainéant réfléchit à peiner le moins possible ! Plus sérieusement, ce sont les troubles musculo-squelettiques, la chaleur, le bruit des machines. Nous tenons compte de ces contraintes dans la définition des cahiers des charges et des critères de choix lors des consulta-

Patrice Hersant, responsable de la fonction linge – Qu’est-ce qui est différent chez vous ? PATRICE HERSANT − Les opérations de blanchisserie consistent à transformer le linge sale en linge propre !

132

tions dans le cadre du code des marchés publics.

Quels sont vos indicateurs qualité en blanchisserie ? P.H. − L’indice de relavage pour lequel nous nous situons

Les hôpitaux connaissent une tradition française des

entre 1 et 1,5 % (au niveau national, ils sont entre 2 et

blanchisseries en régie, à tel point que concéder cette

2,5 %). Quelques difficultés subsistent avec le linge des

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


résidents, pour les limiter, nous travaillons en association avec les services de soins pour établir la liste d’un trousseau type compatible avec les méthodes de travail de l’unité de traitement du textile. La certification impose de revoir nos procédures tous les 3 ans et la norme ISO est supérieure en exigence à la norme HAS. Depuis le début de l’année, un premier client hospitalier a recours à notre prestation et un second confirme son adhésion

© Agence Ivars et Ballet, architectes associés

REPORTAGE DH : CH de blois (Loir-et-Cher)

pour 2015. La production passera alors à 8,5 tonnes par jour. Ce succès dans un environnement privé très concurrentiel constitue aussi un moteur auprès des professionnels de la blanchisserie-lingerie pour dynamiser à la fois la

en quelques chiffres

qualité de la prestation tout en maîtrisant les coûts.

La logistique 25 757 499 Kw de gaz consommés 11 779 146 Kw d’électricité consommée 125 093 M d’eau consommés 3

services ne constitue le déversoir d’agents « dits indésirables » dans d’autres unités – Les compétences sont un préalable obligatoire au recrutement – La formation, y compris promotionnelle, représente une force. Elle émane également de la compréhension des objectifs du travail produit, de l’implication dans le mieux-être du

Daniel Lemestre, directeur des achats, des équipements et de l'hôtellerie – Avec des responsables collaborateurs aussi motivés, quelle est votre perception ? DANIEL LEMESRE − Les services hôteliers apparaissent comme les contributeurs de référence pour l’image de l’établissement exprimée par le patient et le résident. Reformulé : à l’issue de sa sortie ou lors des visites, il exprime très souvent en premier lieu sa perception de la propreté des locaux et des draps ou le goût des aliments avant l’objet médical de sa présence à l’hôpital. Le centre hospitalier de Blois a pris le parti de valoriser

patient et du résident, de la valorisation des techniques et connaissances. La réussite d’aujourd’hui alimente les progrès de demain. Les professionnels tirent de leur résultat une fierté et une reconnaissance facilitant le dialogue social.

Bien au-delà du minimum requis par la certification sanitaire HAS, l’établissement s’est engagé dans la reconnaissance du très haut degré de performance qualité validé par les instances nationales indépendantes de l’industrie. Les prestations bio nettoyage, blanchisserie sont certifiées ISO 9001 et la restauration ISO 22000

l’exemplarité des équipes hôtelières parfois méconnues du public, voire des professionnels de santé. Bien au-de-

La satisfaction du service client et du consommateur

là du minimum requis par la certification sanitaire HAS,

est systématiquement mesurée et objectivée. Des indi-

l’établissement s’est engagé dans la reconnaissance du

cateurs qualité spécifiques sont déterminés et évalués,

très haut degré de performance qualité validé par les

y compris dans l’efficience économique. Les mesures

instances nationales indépendantes de l’industrie. Les

correctives ou améliorantes sont systématiquement re-

prestations bio nettoyage, blanchisserie sont certifiées

cherchées et validées par les acteurs eux-mêmes, ainsi

ISO 9001 et la restauration ISO 22000 (moins de 25 re-

responsabilisés.

connaissances dans la totalité de l’industrie agroalimen-

La sécurité durant toutes les étapes des processus est

taire dont seulement 3 hôpitaux).

érigée en axiome non négociable.

Quelles en sont les idées forces ?

Quel enseignement en tirez-vous ?

D.L. − Cette performance rendue possible résulte de la

D.L. − Avoir confiance dans les équipes hôtelières contri-

professionnalisation de tous les emplois (aucun de ces

bue à la sérénité du management.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

133


Reportage de Edouard Bourdon, élève directeur d’hôpital 2014-2016, membre d’EHESP Conseil, association des élèves de l'École des hautes études en santé publique (EHESP) Photos fournies par le Centre Hospitalier de Lens

134

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


reportage Le

Centre Hospitalier de

Lens

Échéance 2020

Photos © Centre Hospitalier de Lens

Si le Centre Hospitalier de Lens n’a pas réussi à s’adapter immédiatement aux nouvelles réformes hospitalières, la perspective de la construction d’un nouvel établissement à l’échéance 2020 constitue une opportunité et un enjeu majeur en termes d’offres de soins pour les usagers et une source de motivations pour les professionnels.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

135


REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

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136

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

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REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

La renaissance du CH de Lens

Le « Nouvel Hôpital de Lens », une construction et un nouvel élan pour un territoire de santé à reconstruire

Entretien avec Edmond Mackowiak Directeur général Le Centre Hospitalier de Lens, établissement de référence sur le bassin Artois Douaisis (1,3 million d’habitants) constitue le troisième établissement de la région

Le new deal du CH de Lens

Nord - Pas-de-Calais avec 1091 lits et 174 places dont 694 en MCO. Son budget de 250 millions d’euros en

Face à ce scénario catastrophe qui condamnait pro-

fait l’un des 13 établissements les plus importants de

gressivement le CH de Lens à disparaître, Edmond

France.

Mackowiak a été « missionné » en octobre 2012 afin de « porter » le projet d’un nouvel hôpital. À son arri-

Mais, en déficit depuis une dizaine d’années, le CH de

vée, il a su mettre à profit son expérience à la tête

Lens n’avait pas suffisamment appréhendé la mise en

de l’hôpital de Douai pour maîtriser une grève illimitée,

place de la tarification à l’activité et les nouvelles règles

un déficit de 11,2 millions d’euros et une suspension

financières et cumulait par ailleurs de nombreux handi-

des coopérations avec l’Association Hospitalière Nord

caps. Son organisation pavillonnaire, caractérisé par une

Artois Clinique (AHNAC).

vétusté importante (77 % des surfaces sont obsolètes) Depuis, il bénéficie de plusieurs facteurs favorisants.

plémentaires. Les bâtiments ne sont pas adaptés aux

Il peut s’appuyer sur un véritable soutien politique

normes du 21ème siècle. Les coûts d’exploitation exces-

local, régional et national et sur une communauté mé-

sifs précipitent inévitablement l’établissement vers un

dicale compétente et responsable. Après la prise de

déficit structurel important qui s’élevait à 24 millions

conscience de la situation et l’engagement du député

d’euros en 2006. La présence des administrateurs pro-

maire Guy Delcourt en faveur de la construction d’un

visoires aurait pu laisser croire au déclin annoncé d’un

nouvel hôpital, Marisol Touraine, ministre des affaires

des plus gros centres hospitaliers. En 2011, les mesures

sociales et de la santé avait indiqué en 2013 dans une

prises concernant la maîtrise des dépenses et une meil-

lettre d’engagement que « le retour à l’équilibre finan-

leure exhaustivité du codage de l’activité avaient cepen-

cier du CH de Lens constitue un objectif permanent

dant permis d’arrêter l’hémorragie. Mais c’était loin

dont le projet de reconstruction du nouvel hôpital fait

d’être suffisant !

partie intégrante ». Elle avait aussi insisté pour que

n’est pas fonctionnelle et génère des charges sup-

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

137


© Centre Hospitalier de Lens

REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

« les coopérations entre le CH de Lens et l’AHNAC

faire de l’orthodoxie financière mais avec un objectif :

mais aussi avec les autres établissements du territoire

financer le nouvel hôpital. Sous l’impulsion du comi-

permettent de dimensionner le futur hôpital à partir

té interministériel de la performance et de la moder-

d’un projet médical ». Edmond Mackowiak a profité

nisation de l'offre de soins (COPERMO), toutes les

également du soutien méthodologique et financier de

directions adjointes se sont focalisées sur la maîtrise

l’Agence Régionale de Santé (ARS). Des enveloppes

des dépenses, notamment par le biais de la masse

d’aide de trésorerie d’un montant global de 45 millions

salariale. Le résultat : une stabilité des effectifs depuis

sur les 3 dernières années ont participé au redresse-

2012. L’accent a également été mis sur l’amélioration

ment financier. Par ailleurs, il a réussi à renouer le dia-

du système d’information pour optimiser le codage de

logue social au sein de son établissement avec l’aide

l’activité. Par ailleurs, les achats et le renouvellement

d’un médiateur indépendant.

des équipements ont été limités dans la perspective de la reconstruction. Grâce à ces mesures et aux

Depuis juillet 2013, un accord sur un « schéma cible » a été validé par l’ARS et les deux structures hospitalières (CH de Lens et l’AHNAC).

efforts de tous les acteurs, le déficit du CH de Lens devrait passer en 2014 sous la barre des 4 millions, ce qui évitera la mise en place d’un nouveau plan de retour à l’équilibre. « Ce qui veut dire – pour Edmond Mackowiak – qu’une bonne gestion des effectifs bien répartis, accompagnant les activités médicales permet

Depuis juillet 2013, un accord sur un « schéma cible »

de bien gérer un établissement ».

a été validé par l’ARS et les deux structures hospitalières (CH de Lens et l’AHNAC). Les enjeux consistent à conjuguer les politiques de santé publiques de façon à réduire les inégalités sociales et territoriales dans un rapport gagnant-gagnant : le site de Riaumont apparte* L’AHNAC (Association Hospitalière NordArtois Cliniques) comporte 6 entités : Clinique Teissier, Centre de Réadaptation Les Hautois, Polyclinique de la Clarence, Polyclinique d’HéninBeaumont, Polyclinique de Riaumont, Centre de Psychothérapie Les Marronniers

138

nant à l’AHNAC (Association Hospitalière Nord-Artois Clinique* avec le CH de Lens pour constituer le pôle hospitalier de la Gohelle.

La mise en place d’un plan

d’actions pour accompagner le changement Un management participatif a permis à Edmond Mackowiak et son équipe de direction de mobiliser tous les acteurs autour d’un plan d’actions avec un

Transformer

le cercle vicieux en cercle vertueux

suivi sur quatre volets. Un groupe pluri-professionnel travaille sur les modalités opérationnelles de transfert d’activités entre établissements. S’agissant du cadre juridique de la coopération, les structures concernées

Les premiers efforts de la direction du CH de Lens se

arrêteront avant le mois de juin avec l’ARS la forme

sont concentrés sur la maîtrise des dépenses sans

que prendra la coopération. Enfin, il s’agit d’accompa-

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

Les efforts doivent être soutenus d’ici 2017 et se poursuivre dans le temps. Le risque « c’est de croire que les établissements (CH de Lens et l’AHNAC) pourraient après une première coopération, s’arrêter là… On est au milieu du gué, il faudra développer toujours et encore des coopérations ».

gner socialement toute la démarche dans la mesure où les personnels médicaux et non médicaux sont concernés dans leur exercice par la réorganisation des activités sur chacun des sites. Cette phase de changement sera marquée par plusieurs étapes. Les représentants des personnels et la direction ont d’ores et déjà validé une charte de grands principes sociaux. La mise en place d’un accompagnement individualisé va

Que reste-t-il à faire ?

se matérialiser sous la forme d’une cellule commune de gestion des emplois et des compétences avec une assistance extérieure. D’autres engagements en termes d’information et de communication ont été pris. Mais, lance le DG : « La pierre angulaire, c’est le projet médical » ! Le CH de Lens avait beaucoup d’atouts mais les compétences médicales n’étaient pas mises en synergie, ni valorisées. Le dernier projet médical datait de 2004. En arrivant, le nouveau directeur a donc impulsé la rédaction d’un projet médical avec l’aide d’un cabinet de consultants. À travers les axes transversaux, il définira les objectifs et les priorités

Le message de la ministre de la santé lors de sa visite à Lens le 23 janvier dernier a permis de rassurer la population. Le dossier du nouvel hôpital va être présenté au COPERMO immobilier d’ici septembre prochain. Le coût total de la nouvelle structure est estimé à 300 millions d’euros TDC. Le niveau de financement de chacune des parties prenantes sera dès lors précisé. Il reste à mettre en œuvre les axes de coopération avec l’AHNAC sur le territoire et définir l’entité juridique de cette nouvelle collaboration organique. En dépit « d’un déficit de 4 millions d’euros, le CH de Lens va retrouver en 2014 une capacité d’autofi-

de la communauté médicale. Ce document facilitera

nancement nette qui va permettre de réinvestir ».

la hiérarchisation des demandes en équipement, en

Les efforts doivent être soutenues d’ici 2017 et

investissement et en travaux, dont les médecins ont

se poursuivre dans le temps. Le risque « c’est de

tenu grand compte dans leur réflexion de la faible capa-

croire que les établissements (CH de Lens et l’AH-

cité d’investissement et la nécessité de mobiliser des

NAC) pourraient après une première coopération,

capitaux pour le nouvel établissement. Chaque acteur

s’arrêter là … On est au milieu du gué, il faudra dé-

assume pleinement les conséquences des déficits

velopper toujours et encore des coopérations ».

n

budgétaires passés.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

139


REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

Bons derniers ? Indicateurs de santé : l’Artois Douaisis occupe les derniers rangs du classement national Le territoire de population Artois-Douaisis peut se percevoir comme la réunion de deux territoires appelés à fonctionner de concert : une zone urbaine dense et étendue sur deux départements, de Béthune à Douai, en passant par Lens et Hénin-Beaumont, et l’autre autour d’Arras. L’ensemble compte 1,3 millions d’habitants. Ce territoire est découpé en quatre zones de proximité avec quelques particularités fortes. Lens-Hénin est la plus peuplée, avec plus de 400 000 habitants et une densité dix fois supérieure à l’arrageois qui compte près de 244 000 habitants mais

© Sources IGN, ARS

Entretien avec Hélène Avisse, Directrice générale adjointe chargée des coopérations et de la stratégie

sur un territoire bien plus étendu. Ceci contraste fortement avec les autres zones du territoire.

La zone de proximité LensHénin se situe au dernier rang du

classement national de l’Indice de Développement Humain (IDH) Développé par les Nations Unies depuis 20 ans, l’IDH permet de mesurer le développement national en

de santé, la mortalité évitable relevant de la prévention

termes de progrès dans les domaines de la santé et

est de 92 % plus importante qu’en France, et la mortalité

l’éducation. Dans l’Artois-Douaisis, les densités des pro-

évitable par action sur le système de soins, 40 % supé-

fessionnels de proximité et de pôle sont les plus faibles

rieure, plus élevée donc que la moyenne régionale (36%).

de la région, déjà en deçà du reste du pays. Béthune – Bruay et le Douaisis sont les plus affectés, avec à peine plus de 1000 professionnels de proximité pour 100 000 habitants, contre 1290 en moyenne nationale et

Rebattre les cartes et proposer un schéma d’offre de soins cohérent

1270 en moyenne régionale. La réflexion poursuivie avec l’ARS dans le cadre du Pôle

L’état de santé de la population

est très dégradé sur ce territoire où l’offre de santé est faible

hospitalier de la Gohelle établit le constat d’indicateurs de santé très dégradé, avec une offre hospitalière relativement dense mais une offre de premier recours fragile. Il arrive au 347ième rang sur 348 pour ce qui concerne la mortalité prématurée. La nécessité de conforter l’offre

140

En 2006, la mortalité prématurée dans l’Artois-Douaisis

pour répondre aux besoins de santé s’impose aux acteurs

– indicateur ultime des besoins – est de 45 % supérieure

du territoire. Comme l’indique Hélène Avisse, il s’agit de

à la moyenne nationale ; dans la zone de proximité de

« proposer une recomposition de l’offre, dans un projet de

Lens-Hénin, elle s’élève jusqu’à 163 %. Sur le territoire

coopération qui englobe tous les champs d’activités. »

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

n


REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

Tous ensembles Les coopérations : un savoir-faire lensois Précurseur ou...

... « avant-gardiste »

Le CH de Lens, explique Hélène Avisse, a été un pré-

Si la convention constitutive de la Communauté Hospitalière de Territoire (CHT) Artois Douaisis a été signée le 14 février 2013, l’idée du rapprochement des établissements est antérieure à la loi HPST. Avec un bassin très large de 1,3 million d’habitants, cette CHT a un profil atypique. Sa logique de redistribution veut que chacun développe et justifie ses propres activités. Bien que moins structurante elle n’en constitue pas moins un atout : la coordination autour d’activités de recours. Certaines spécialités se sont développées et essaient d’organiser

curseur dans le domaine des coopérations. Ainsi, c’est lui qui a créé le premier Groupement de Coopération de Santé (GCS) français. Il est également à l’initiative d’une organisation graduée des coopérations : coopération de proximité, territoriale et régionale. Pour autant, toutes les coopérations ne sont pas à mettre sur le même plan. À la fin des années 90, le CH de Lens et un établissement de la Générale de Santé avaient tous les deux des compétences pour créer une activité de chirurgie cardiaque. Plutôt que de se concurrencer, ils préférèrent travailler ensemble. Ce fut le premier rapprochement public privé français ; il fonctionne toujours. Il reflète une concurrence et une complémentarité qui permet de conforter le service de santé sur un territoire sinistré comme celui du bassin minier. Un autre GCS a été créé pour développer une activité de dialyse au milieu des années 2000. À l’origine, simple extension des CH de Lens et de Béthune et de la Clinique de Bois Bernard, il s’est transformé en GCS dans

un maillage sur le territoire.

LE CHT a un profil atypique. Sa logique de redistribution veut que chacun développe et justifie ses propres activités. Bien que moins structurante elle n’en constitue pas moins un atout : la coordination autour d’activités de recours.

Recherche

celle avec l’AHNAC, permet aux médecins de mesurer

La coopération peut aussi prendre une dimension régionale avec le Centre Hospitalier Régional et Universitaire (CHRU) de Lille. Hélène Avisse explique qu’un GCS a été constitué pour maintenir le fonctionnement de la chirurgie osseuse à Lens. Le soutien du CHRU a permis le renforcement de l’effectif médical ainsi qu’un appui au management de l’équipe avec la formalisation d’un projet médical. Ce GCS concerne d’autres spécialités comme la gynécologie, la chirurgie digestive... Des sujets de coopération en chirurgie vasculaire, en chirurgie infantile pourraient s’intégrer dans le GCS sous réserve de volumes d’activités suffisants. Enfin, le GCS recouvre le volet recherche qui constitue un enjeu important pour le CH de Lens. La coopération s’illustre à travers l’accom-

le rayonnement de leurs activités sur le territoire sans

pagnement méthodologique du CHRU de Lille et la for-

être en concurrence. À travers leurs complémentarités

mation de « cohortes » de patients. Le CH de Lens peut

et leurs coopérations, Lens et Riaumont peuvent voir

ainsi mettre en place des essais cliniques et mobiliser

l’avenir avec beaucoup de sérénité.

son centre de recherche clinique sur appel à projet.

lequel le CH de Lens a mis à disposition le personnel paramédical et la structure technique. Le CH de Lens a aussi transformé un GIE avec une clinique de radiothérapie en GCS pour développer une activité de chimiothérapie et une activité d’oncologie médicale d’hôpital de jour. Cette coopération a apporté une expertise et des compétences médicales. Si, pendant longtemps, Le CH de Lens et l’AHNAC ne s’étaient jamais associés allant jusqu’à causer mutuellement leurs déficits, la situation est bien différente aujourd’hui. Le bénéfice des coopérations notamment

Entretien avec Hélène Avisse, Directrice générale adjointe chargée des coopérations et de la stratégie

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

141


REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

Le grand jeu

Entretien avec Hélène Avisse, Directrice générale adjointe chargée des coopérations et de la stratégie

À Lens, l’histoire s’inscrit dans le paradoxe et le fruit de l’histoire. Le grand enjeu consiste désormais à développer une coopération structurée entre le CH de Lens et la polyclinique de Riaumont (AHNAC). Sous la pression de la ministre de la Santé, Marisol Touraine, un nouveau schéma d’organisation des soins a été validé en juillet

© Centre Hospitalier de Lens

Vers un nouveau schéma de l’organisation des soins

2013 entre les deux établissements et l’ARS afin de conjuguer les politiques de santé publique de façon à réduire les inégalités sociales sur le territoire de la Gohelle. Le Directeur Général a pu rassurer le 23 janvier dernier la ministre de la Santé et des Affaires sociales en visite à Lens sur l’évolution financière de l’hôpital de Lens et la

Le nouveau schéma d’offre de soins du territoire se déploiera dans le temps en plusieurs étapes. Il a pour objectif d’éliminer les doublons. La polyclinique de LiévinRiaumont (MCO) et le CH de Lens devraient commencer à répartir leurs activités à l’automne 2014 en fonction d’un nouveau schéma directeur à l’AHNAC et de la ca-

© Centre Hospitalier de Lens

mise en œuvre de ce schéma cible.

pacité d’hospitalisation disponible. Cela se traduira par le regroupement des activités de médecine spécialisée (cardiologie, neurologie, oncologie, pneumologie) sur le CH de Lens. À terme, la clinique de Riaumont deviendra un Pôle d’excellence gériatrique sur son site actuel en accueillant des activités de Soins de Suite et de Rééducation du territoire, des soins de longue durée, la création d’un court séjour gériatrique avec la reconversion des lits de médecine spécialisée.

une partie de l’activité chirurgicale programmée et une

Pour l’instant, il s’agit d’adresser l’activité aiguë de

« référence » sur la chirurgie carcinologique. Un des en-

médecine sur le site du CH de Lens. À court terme, il

jeux pour le CH de Lens est d’atteindre les seuils d’acti-

faudra maintenir un service d’urgence à Riaumont, un

vités chirurgicales pour garder ses autorisations. Il s’agit

service de médecine polyvalente et une unité d’aval des

de conforter actuellement l’activité carcinologique sur le

urgences car le CH de Lens ne pourra pas absorber cette

site d’Hénin et l’oncologie sur l’hôpital.

activité supplémentaire. Le dernier transfert sera celui de la maternité. Le CH

142

Le nouvel hôpital comprendra un pôle d’accueil des

de Lens possède une maternité qui réalise actuelle-

urgences conséquent pouvant admettre au moins

ment 2700 accouchements ; celle de Riaumont en

80 000 entrées par an. Ce pôle « chaud » développera de

assure 1400. L’objectif est d’avoir une seule maternité

l’activité chirurgicale traditionnelle et les spécialisations

de niveau 3 qui pourra assurer 4000 accouchements

chirurgicales existantes (ORL, ophtalmologie, chirurgie

par an sur le site du CH de Lens avec un ensemble

vasculaire). La clinique d’Hénin-Beaumont conservera

de techniques et d’équipements spécifiques.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

n


REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

Sortir de terre La construction du nouveau CH de Lens

D’une capacité de 758 lits et d’un montant de 300 millions d’euros TDC, le nouvel hôpital de Lens sera reconstruit sur les communes de Lens et de Loos en Gohelle. Il participera de l’amélioration de l’image du renouveau Lensois comme le Louvre Lens et la rénovation du centre-ville. La conduite du projet au sein du comité de pilotage (CoPil) stratégique est constitué du directeur général, du directeur des ressources physiques, de l’ingénieur des services techniques et de 3 médecins.

Un projet déjà sur les rails

ment de la performance hospitalière, amélioration des La planification du projet de construction a démarré dé-

conditions d’accueil et de prise en charge, amélioration

but 2014 et prévoit une ouverture fin 2020. La société

des conditions de travail des personnels, exemplarité en

SOCOFIT vient d’être choisie pour assurer l’assistance

termes de performance énergétique et de développe-

maîtrise d’ouvrage (AMO) jusqu’en 2021. Après l’éla-

ment durable…

Entretien avec Laurent Zaderatzky, directeur adjoint, chargé des ressources physiques (à droite) & Julien Depret, ingénieur en charge des services techniques

boration du programme technique détaillé en 2014, le choix des équipes de conception (ou de conception-réalisation) sera établi sur 2015. La poursuite des études sur 2016 débouchera sur le début de la construction en 2017. Le Copil peut compter sur une équipe des ressources physiques reconfigurée et dont l’objectif consiste à maintenir en fonctionnement le site actuel tout en faisant évoluer les pratiques. D’ores et déjà, une

D’une capacité de 758 lits et d’un montant de 300 millions d’euros TDC, le nouvel hôpital de Lens sera reconstruit sur les communes de Lens et de Loos en Gohelle. Il participera de l’amélioration de l’image du renouveau Lensois comme le Louvre Lens et la rénovation du centre-ville.

cellule de maintenance préventive prépare aux changements des habitudes les professionnels dans le cadre d’un plan global d’économie d’énergie.

Ces séminaires constituent un outil d’aide au changement. Julien Depret souligne qu’« un des enjeux pour la

Sur le plan méthodologique, une trentaine de groupes

réussite du projet est de faire en sorte que les acteurs

de travail se mobilisent suite à un cycle de séminaires

de l’hôpital ne vivent pas le déménagement comme

pour définir les besoins. Pour Laurent Zaderatzky, il ne

une situation de rupture ». La concertation au moment

faut pas « partir de la définition des organisations en

de la programmation permet de bâtir ces repères pour

place ». Au contraire, cette phase préalable d’appropria-

faciliter l’intégration des acteurs dans le nouvel hôpital.

tion est réalisée en demandant aux acteurs de décliner

Des visites d’hôpitaux et de sites industriels et commer-

les lignes directrices du projet autour de l’accueil du

ciaux, des rencontres avec des fournisseurs seront orga-

patient, du travail des professionnels et du positionne-

nisés pour avoir une vision prospective des innovations,

ment du bâtiment dans son environnement : développe-

des techniques, et des organisations.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

143


Photos © Centre Hospitalier de Lens

REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

L’atout maître

Une communauté médicale responsable et impliquée

Entretien avec Dr Patrice Bastian, président de CME (en haut) & Dr François Mounier-Véhier, président de la CACNP

Après une période de doute, le docteur Patrice Bastian,

avec un haut niveau de compétences. Grâce au soutien

président de CME élu en février 2011, commence, à

financier du conseil régional, cette équipe bénéficie de

l’image de ses confrères, à croire au projet du « Pôle

deux scanners et trois IRM dont une de trois Tesla. Par

de la Gohelle ». À l’époque, « les médecins se deman-

ailleurs, le CH de Lens compte sur le GCS établi avec le

daient si l’hôpital de Lens avait encore un avenir » nous

CHRU de Lille pour développer son activité chirurgicale

indique le Dr François Mounier-Véhier, acteur depuis de

et de recherche.

nombreuses années de la vie institutionnelle.

De nombreuses

compétences médicales

des techniques innovantes comme le télé-AVC

Alors que le contexte ne semblait pas favorable, il s’est

Ce dispositif de télé-AVC utilisant l’IRM en première in-

constitué au fil du temps une communauté hospitalière

tention est unique au monde de par son organisation, re-

« locale » avec de nombreuses compétences. La plupart

posant sur une garde mutualisée et « tournante » entre

des spécialités du CH de Lens comme la cardiologie,

différentes UNV situées dans des hôpitaux généraux sur

l’ophtalmologie, l’oncologie, la pneumologie sont géné-

deux territoires de santé.

ralement bien classées dans les palmarès des hôpitaux.

L’Accident Vasculaire Cérébral (AVC) est une pathologie

Les médecins viennent travailler dans une spécialité et

plus fréquente que l’infarctus du myocarde. Deux trai-

savent qu’ils pourront s’appuyer sur d’autres compé-

tements sont aujourd’hui validés : l’admission en unité

tences techniques pour mener des projets novateurs.

neurovasculaire (UNV) et la thrombolyse qui doit être

L’attractivité médicale a sans doute également été

administrée au plus tard dans les 4 h 30.

favorisée par le maintien d’une équipe de radiologues

144

Le CHL développe

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REPORTAGE DH : CH de Lens (Pas-de-Calais)

En 2009, on comptait seulement trois UNV situées essentiellement dans le nord de l’Artois et du Hainaut (2 millions d’habitants) au lieu de 8 identifiées dans le SROSS. En plus de la perte de chance pour les patients, les équipes en astreinte opérationnelle s’épuisaient. Les neurologues ont alors organisé la permanence des soins par le biais de la télémédecine et par la mutualisation

Depuis le 21 janvier dernier, le CHRU de Lille a développé sous l’impulsion des hôpitaux généraux une astreinte neurovasculaire 24h/24 permettant une discussion par le biais des outils de télémédecine pour des prises de décision thérapeutiques justifiant un transfert au CHU.

des ressources médicales et radiologiques entre Lens et Valenciennes dans un premier temps, puis avec les CH de Maubeuge, de Cambrai et d’Arras. Le dispositif repose sur la garde d’un neurologue et d’un radiologue qui interprète via la télémédecine les clichés d’IRM sur un des trois sites (Maubeuge, Lens, Valenciennes). À partir

Le projet médical

constitue un tremplin pour le nouvel hôpital

de ces éléments de diagnostic, le neurologue prend une décision concernant la thrombolyse qui peut être effec-

Pour le Dr Bastian, « les médecins doivent imagi-

tué au lit du malade. La nature de l’occlusion vasculaire

ner l’hôpital de 2030 ». L’essence du projet médical

nécessite parfois une désobstruction artérielle par voie

de transition est de maintenir les compétences exis-

endovasculaire. C’est pour quoi et depuis le 21 janvier

tantes, de les optimiser avec les progrès du monde

dernier, le CHRU de Lille a développé sous l’impulsion

scientifique, mais avec un investissement volontaire-

des hôpitaux généraux une astreinte neurovasculaire

ment restreint. Aujourd’hui, cinq consultants travaillent

24 h / 24 permettant une discussion par le biais des

avec les communautés médicales des deux établisse-

outils de télémédecine pour des prises de décision thé-

ments pour établir un maillage concerté des circuits

rapeutiques justifiant un transfert au CHU. Entre 2010 et

de prise en charge. Il s’agit également de proposer

2012, le nombre de patients thrombolysés a augmenté

aux usagers et aux médecins de ville plus de lisibilité

de plus de 80 %.

sur ces parcours de soins par un portail unique.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

145


Reportage de Manuela Klapouszczak, élève directeur d’hôpital 2014-2016, membre d’EHESP Conseil, association des élèves de l'École des hautes études en santé publique (EHESP) Photos fournies par les Hôpitaux du Bassin de Thau

146

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


reportage

Les

Hôpitaux du bassin

de

© Hôpitaux du Bassin de Thau

Thau

Les Hôpitaux du Bassin de Thau multiplient les initiatives pour renforcer leur offre de soins et de services. Il se positionne aujourd’hui comme l’un des plus innovants de la région et du territoire national.

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REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

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REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

L’enjeu de l’hôpital de demain : la qualité du séjour du patient

Entretien avec Jean-Marie Bolliet Directeur général L’évolution de notre système de santé tend à s’ajuster

et de réadaptation (SSR) ; 2 unités de soins de long

au plus près des besoins de l’usager en passant d’une

séjour (USLD), 4 établissements d’hébergement pour

logique d’offre à une logique de parcours, un parcours

personnes âgées dépendantes (EHPAD), une unité

centré sur la réponse à apporter aux besoins spécifiques

mobile gériatrique (UMG), des consultations mémoire

de la personne.

et dix places d’hospitalisation à domicile (HAD).

Prendre en compte

l’évolution démographique : une nécessité pour que la prise en charge soit adaptée aux besoins de la population

Ces infirmières « sentinelles » ont un rôle prépondérant à jouer en termes de prévention pour ces populations qui, souvent, ne sont pas en capacité d’aller consulter leur médecin traitant ou un spécialiste. La filière gériatrique externe se matérialise au travers d’un Groupement de Coopération Sanitaire et Médico-

tal de son environnement. Ce dernier doit prendre en

Social (GCSMS) constitué des Hôpitaux du Bassin de

compte les caractéristiques et les besoins du territoire

Thau et de 18 EHPAD, publics et privés, situés sur

dans lequel il s’inscrit. Pour les Hôpitaux du Bassin de

le Bassin de Thau. Cette coopération public-privé est

Thau (HBT), il s’agit d’ajuster leur offre de soins à la po-

devenue le support de plusieurs actions innovantes

pulation majoritairement âgée de l’ensemble des sept

telles que les infirmières d’astreinte de nuit, expé-

communes qui composent le territoire de santé de

rience ayant remporté le Trophée 2013 du magazine

proximité. En dédiant plus de la moitié de ses lits à la

Direction[s]. Un nouveau projet s’inscrivant dans cette

gériatrie et en mettant en place une filière gériatrique

même logique est aujourd’hui à l’œuvre, celui de créer

interne et externe très « poussée », les HBT répondent

un service d’infirmerie de ville chargé de rendre visite

à cet impératif. En interne, elle articule les urgences

aux personnes âgées fragiles ou vulnérables à leur

gériatriques, 10 lits de court séjour gériatrique pour

domicile. Ces infirmières « sentinelles » auraient un

les personnes âgées de plus de 75 ans souffrantes de

rôle prépondérant à jouer en termes de prévention

polypathologies à haut risque de dépendance phy-

pour ces populations qui, souvent, ne sont pas en

sique, psychique ou sociale ; 80 lits de soins de suite

capacité d’aller consulter leur médecin traitant ou un

Il n’est plus possible aujourd’hui de déconnecter l’hôpi-

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© Hôpitaux du Bassin de Thau

REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

spécialiste, et se « désanitarisent ». Il est difficilement

numérisé et immédiat des comptes rendus d’hospita-

acceptable que les services de portage de repas à

lisation, la détection des situations à risques par une

domicile du Centre Communal d’Action Sociale décou-

équipe mobile de géronto-psychiatrie et l’organisation

vrent encore aujourd’hui des personnes décédées

de soirées-débats réunissant les médecins hospitaliers

seules à leur domicile. L’objectif de cette opération pi-

et libéraux. L’ensemble de ces actions permet aux

lote est d’enrayer cette mortalité évitable en détectant

HBT d’ajuster en temps réel leur organisation afin de

les situations à risque. Elle s’inscrit ainsi dans l’optimi-

répondre au mieux aux besoins exprimés par la ville.

sation des parcours de soins des personnes âgées en risque de perte d’autonomie (PAERPA).

De façon plus globale, les HBT doivent se positionner comme l’interlocuteur privilégié de la médecine de ville afin de pouvoir adapter leur offre aux besoins de la population.

Renforcer la coordination du parcours patient par un meilleur partage de l’information

Peu d’études ont été menées sur la perte d’efficience dans les soins liée à une information imparfaite, c’està-dire absente, surannée, fausse, non partagée ou difficile à trouver. Or, au quotidien, cela génère une perte

De façon plus globale, les HBT doivent se positionner comme l’interlocuteur privilégié de la médecine

de temps et d’énergie considérable qui, dans le pire des cas, peut déboucher sur une perte de chance pour le patient.

de ville afin de pouvoir adapter leur offre aux besoins

150

de la population. Ce travail de collaboration passe, par

Les HBT sont donc en train de mettre en place le dossier

exemple, par la création d’un annuaire privé permet-

patient informatisé (DPI) qui sera opérationnel d’ici la fin

tant aux médecins libéraux d’entrer directement en

de l’année 2014. Il s’agit qu’il soit consultable au quoti-

contact avec les praticiens hospitaliers, par l’envoi

dien par les médecins via une application « nomade » sur

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REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

Les HBT mettent en place le dossier patient informatisé (DPI). Toutes les informations permettant d’identifier le patient doivent être accessibles, les résultats biologiques et/ou radiologiques, le dossier social… Tout ceci avec la possibilité de lire, d’écrire et de prescrire en temps réel. Une première en France.

de fournir aux professionnels de santé une aide pour l’orientation des patients en donnant accès à la description formalisée, fiable et actualisée de toutes les ressources présentes sur le territoire de santé et la région. Enfin, s’inscrit dans la politique d’innovation de l’hôpital, le lancement, en avril 2011, du programme expérimental de télémédecine gériatrique en lien avec les EHPAD du territoire. Il permet aux résidents accueillis dans ces éta-

tablette numérique afin d’éviter qu’ils ne perdent leur

blissements de pouvoir bénéficier d’avis de spécialistes

temps à rechercher les prélèvements du laboratoire, les

en diabétologie, orthopédie,

résultats des examens prescrits ou encore le suivi des

soins palliatifs, plaies et cicatri-

traitements. Toutes les informations permettant d’iden-

sations ou encore la prise en

tifier le patient doivent être accessibles. Qu’il s’agisse

charge de la douleur, ainsi que

de ses résultats biologiques et/ou radiologiques, son

d’une surveillance médicale

dossier social et, le cas échéant, son dossier gériatrique.

permettant de limiter les trans-

Tout ceci avec la possibilité de lire, d’écrire et de pres-

ferts inutiles vers l’hôpital.

un partenariat industriel avec Microsoft, DELL et l’édi-

Sans une gestion fine de

teur MEDASYS pour créer un applicatif nomade. Celui-ci

l’information − une informa-

aura un impact certain en termes d’efficience qu’il sera

tion en temps réel, conti-

très intéressant de pouvoir mesurer.

nue, réactive, partagée et comprise de tous − il y a un

Le nouveau logiciel permettra également d’obtenir la

risque de perte d’efficacité

cartographie des lits disponibles dans l’établissement.

et d’efficience à tous les ni-

Cette dernière ne sera plus basée sur du déclaratif

veaux, organisationnel, éco-

a posteriori, mais dépendra exclusivement des flux,

nomique et humain. Le « che-

admissions et sorties des patients, au temps « To ».

val de bataille » des HBT est

Ce dispositif s’articulera avec l’outil régional Répertoire

donc bien l’informatique qui

opérationnel des ressources (ROR), dont l’objectif est

libère et non qui asservit.

n

H ô p i t a u x du b a ss i n d e T h a u

crire en temps réel. Les HBT développent parallèlement

Quelques chiffres 900 lits et places dont 376 lits d'EHPAD 8 pôles 27 000 entrées totales dont 18 000 entrées MCO 33 000 passages aux urgences 774 naissances 5 500 interventions chirurgicales 115 M€/an b. d'exploitation 5 M€/an b. d'investissement 1505 ETP personnel non médical 103 ETP personnel médical

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REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

La gestion des lits :

les HBT accompagnés par l’ANAP

Entretien avec Dr Claude Pioch responsable du service des urgences & Martine Cassagne, faisant fonction de cadre supérieur de santé du pôle médecine

Améliorer l’occupation

des lits, c’est aussi améliorer la qualité du séjour des patients La parution du Rapport du Professeur Carli sur les urgences, remis en septembre 2013 à Marisol Touraine, Ministre de la santé, a été l’occasion de rappeler la nécessité d’entamer une grande réflexion autour de la

dans les services. Jusqu’à présent, ces transferts se font grâce à deux outils : un logiciel informatique qui permet de visualiser les lits disponibles dans les services d’hospitalisation et un recueil téléphonique des lits disponibles effectué trois fois par tranche de 24 heures. Cette organisation fonctionne relativement bien car les médecins savent collaborer et travailler en bonne intelligence. Elle demeure toutefois perfectible.

gestion des lits. Une gestion des lits fluide et régulée conduit à la fois à une augmentation des recettes d’activité de l’hôpital et accroît la qualité de la prise en charge des patients, ceux-ci n’étant plus contraints de patienter des heures sur un brancard aux urgences dans l’attente d’un lit.

Le programme de l’ANAP,

un support logistique à la gestion des lits Le dispositif d’accompagnement du programme national de gestion des lits de l’ANAP met à disposition du centre hospitalier des outils diagnostics et l’intervention d’un

Pour les HBT, l’objectif principal est donc qualitatif : améliorer la fluidité des parcours patients et, notamment, des transferts en interne dans les services.

« coach » assurant des formations collectives à destination des établissements de la région, mais aussi individuelles via des entretiens téléphoniques tous les quinze jours à trois semaines et des réunions mensuelles. Ce projet s’étale sur 18 mois. Les 4 premiers sont dévolus à la définition d’un diagnostic partagé et d’un plan d’action.

152

Les Hôpitaux du Bassin de Thau ont souscrit à cette

Les 13 mois suivants permettent la mise en œuvre de

démarche proposée par l’Agence Nationale d’Appui à la

ce plan et le dernier mois est consacré à son évaluation.

Performance des établissements de santé et médico-

Les HBT se trouvent actuellement dans la finalisation de

sociaux (ANAP) suite à l’identification de certaines

la phase de diagnostic. Il s’agissait de faire ressortir les

faiblesses dans le parcours des patients arrivant aux

problématiques propres à l’établissement afin de défi-

urgences : délais d’attente sur brancards trop longs,

nir des pistes de travail adaptées à sa typologie, celle

durée moyenne de séjour en unité d’hospitalisation de

d’un hôpital de proximité accueillant une majorité de per-

courte durée (UHCD) trop importante, patients hospita-

sonnes âgées polypathologiques. Rétrospectif, le dia-

lisés dans un service dont ils ne relèvent pas en raison

gnostic porte sur les séjours allant de juillet 2012 à juin

de l’absence de lits disponibles. Pour les HBT, l’objectif

2013. Les outils utilisés ont été : le taux d’occupation,

principal est donc qualitatif : améliorer la fluidité des par-

les indicateurs de performance à la durée moyenne de

cours patients et, notamment, des transferts en interne

séjour et le nombre de patients présents aux urgences

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


© Fotolia

REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

à 5 h du matin en attente d’un lit d’hospitalisation. Ce diagnostic ainsi que le plan d’actions établi en conséquence doivent être validés par le « coach » de l’ANAP, le directoire et la commission médicale d’établissement, puis in fine par l’ARS.

Anticiper le devenir

Pour la fluidification des parcours patients à partir du service des urgences, différentes pistes d’amélioration se dessinent. Ainsi, les examens complémentaires pourraient être programmés dès l’admission, de même que la date prévisionnelle de sortie afin d’avoir une vision prospective de l’occupation des lits.

du patient

Dans le cadre de la réflexion portant sur la fluidification des parcours patients à partir du service des urgences, différentes pistes d’amélioration se dessinent. Ainsi, les examens complémentaires pourraient être programmés dès l’admission, de même que la date prévisionnelle de sortie afin d’avoir une vision prospective de l’occupation des lits. Afin de faciliter les sorties, elles devraient être programmées la veille ou le matin et assorties d’une

est quotidienne dans les services de médecine, est de nature à faciliter ces sorties en organisant le devenir du patient hospitalisé. En fonction des besoins précis de la personne, ces services peuvent être appuyés par l’unité mobile de gériatrie ou l’équipe mobile de soins palliatifs. Une des forces de la structure, qui n’existe pas dans tous les hôpitaux, est la mise en place d’un outil d’infor-

check-list anticipant tous les éléments nécessaires pour

mation et de régulation interne, la Commission d’admis-

qu’elles se fassent dans les meilleurs délais et condi-

sion et des soins non programmés, qui a notamment

tions de sécurité tout en tenant compte de la prise en

défini un ensemble de procédures-types permettant

charge spécifique du patient (par exemple, retour au

de gérer les cas complexes. Par exemple, admettre

domicile avec l’aide éventuelle d’une auxiliaire de vie

un patient sur un lit disponible dans un service dont

ou orientation vers une structure d’aval type SSR ou

il ne relève pas tout en le laissant sous la respon-

EHPAD). L’intervention des services sociaux, qui aux HBT

sabilité du médecin de la spécialité concernée.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

153


REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

Des initiatives innovantes

afin de mieux réguler l’amont et l’aval d’une filière gériatrique

notamment en matière d’hygiène, la création d’une maison pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer (MAIA) qui correspond à un réseau intégré de partenaires pour les soins, l’aide et l’accompagnement des personnes vivant à domicile...

Les « infirmières d’astreintes » ou comment apporter confort et sécurité au patient tout en évitant des transferts injustifiés aux urgences Entretien avec Patricia Barreau, directeur des soins & Claude Cotterlaz, directeur de l’action médico-sociale et des établissements

Une filière gériatrique aboutie au sein d’un GCSMS

En plus de la filière gériatrique interne, le centre hospitalier a mis en place une filière externe comprenant 18 EHPAD, publics et privés, soit près de 1200 lits regroupés au sein d’un GCSMS. Ce groupement est le support d’actions communes innovantes telles que la mise en place d’astreintes infirmières la nuit et a aujourd’hui vocation à s’étendre à de nouvelles activités. Aussi l’hôpital a-t-il soutenu la création d’une plateforme de répit pour les familles des patients atteints de la maladie d’Alzheimer assurant le soutien, l’accompagnement et l’information des aidants familiaux.

Garantir la permanence des soins la nuit, assurer une prise en charge de qualité, éviter les hospitalisations inutiles des résidents en EHPAD, tels sont les objectifs du dispositif d’astreintes infirmières créé par les HBT. Centre de référence pour tous les EHPAD situés autour du Bassin de Thau, les HBT se sont interrogés sur les compétences que l’établissement pouvait mettre à disposition des autres structures pour améliorer la prise en charge de leurs résidents. Un des points faibles des EHPAD était de ne pas avoir de présence infirmière la nuit, ce qui obligeait les personnels (aides-soignants, agents des services hospitaliers ou veilleurs de nuit) à appeler le 15 en cas de difficulté alors même qu’il ne s’agissait pas d’une urgence. Le passage aux urgences fragilise les personnes âgées déjà vulnérables qui doivent patienter sur des brancards, hors de leur environnement habituel, et sont soumises à une batterie d’examens souvent inu-

Pour pallier aux inconvénients du passage aux Urgences, les Hôpitaux du Bassin de Thau ont donc décidé de mettre en place deux lignes d’astreinte assurées par une équipe de neuf infirmières ayant une compétence gériatrique.

tiles. Il en résulte un risque élevé de décompensation liée au stress et, parallèlement, un engorgement injustifié des urgences. Pour pallier à ces inconvénients, les Hôpitaux du Bassin de Thau ont donc décidé de mettre en place deux lignes d’astreinte assurées par une équipe de neuf infirmières

154

D’autres projets sont en cours. Ainsi la visiogériatrie

ayant une compétence gériatrique. L’objectif n’était pas

– acte médical à distance utilisant les Technologies de

de créer un SAMU bis infirmier, mais de mobiliser un

l’Information et de la Communication – pour bénéficier

savoir-faire et un savoir-être adaptés à la prise en charge

des conseils d’une infirmière en plaies et cicatrisation

de la personne âgée vivant en institution. Il leur a ainsi

par exemple. Ou encore des formations communes aux

été demandé d’être titulaires d’un diplôme universi-

équipes soignantes du centre hospitalier et des EHPAD

taire en gérontologie ou bien d’avoir au moins trois ans

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

© Fotolia

Ainsi avons-nous pu démontrer que le nombre de transferts jugés non adaptés aux urgences avait considérablement diminué. Aujourd’hui, les indicateurs valorisés sont davantage orientés sur la réponse aux besoins et sur le confort du résident.

d’expérience dans ce domaine. Ont été privilégiées leur capacité d’écoute, leur appétence à prendre en charge des personnes fragiles, leur faculté à évaluer précisément la situation sans chercher à la médicaliser à tout prix. Afin de ne pas faire perdre de chance aux résidents, le médecin gériatre et les infirmières ont

circonscrit

le

périmètre

d’action de cette équipe à des situations d’urgences relatives telles les chutes et malaises sans perte de connaissance, les perfusions arrachées,

de nuit, leur permettant par exemple de donner un anti-

les crises d’angoisse ou la prise en charge de la douleur.

douleur au résident souffrant.

En dehors de ces situations, le personnel en poste la nuit doit appeler le 15 en première intention.

Aujourd’hui, ces infirmières « couvrent » 4 EHPAD privés et 3 publics. Elles assurent les astreintes 7 j / 7 de 21 h 30 à 7 h du matin

Une expérience primée

par le Trophée 2013 du magazine Direction[s] L’originalité de la démarche des HBT tient aussi au fait que le service ne coûte rien aux EHPAD privés. En effet, le dispositif a d’abord été entièrement financé par l’hôpital, à hauteur de 20 000 e par an, avant que l’ARS ne dé-

Aujourd’hui, ces infirmières « couvrent » 4 EHPAD pri-

cide de soutenir cette action. L’expérience est extrême-

vés et 3 publics. Elles assurent les astreintes 7 j / 7 de

ment positive à la fois pour les résidents, qui voient leur

21 h 30 à 7 h du matin. La principale difficulté a été d’or-

confort et leur sécurité améliorés, et pour les infirmières

ganiser leurs interventions au sein des structures pri-

en gérontologie dont la fonction est valorisée. Tous les

vées. C’est ainsi qu’ont été prévus une visite préalable

semestres, le bilan des déplacements est réalisé : mo-

des établissements, des rencontres avec les équipes

tifs d’intervention, actions menées, transferts vers l’hô-

de jour et de nuit, l’identification de l’emplacement de

pital... Ainsi avons-nous pu démontrer que le nombre de

la pharmacie, l’accès au système d’information et aux

transferts jugés non adaptés aux urgences avait consi-

dossiers des usagers. Tout cela a nécessité du temps

dérablement diminué. Aujourd’hui, les indicateurs valori-

afin qu’une relation de confiance puisse se tisser entre

sés sont davantage orientés sur la réponse aux besoins

les infirmières et les établissements allant au-delà des

et sur le confort du résident. À terme, cette initiative,

engagements contractuels. Les médecins traitants ont

reconnue au niveau national par le Trophée du magazine

également été associés à cette démarche puisqu’ils ont

Direction[s], devrait s’étendre à de nouvelles structures

été encouragés à établir des protocoles individualisés et

apportant une réponse adaptée à chaque situation privi-

des prescriptions anticipées à l’attention des infirmières

légiant la qualité et la proximité des prises en charge.

n

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014

155


REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

Un nouveau plateau technique : accueil et orientation du patient dans des locaux et selon un circuit adapté

La nécessaire modernisation des locaux et des équipements

Cela fait maintenant plus d’un an que le nouveau plateau technique des HBT a ouvert ses portes. Sa construction a permis de pallier les nombreux dysfonctionnements résultant d’une architecture surannée qui ne correspondait plus aux besoins de la population. Ainsi, le service des urgences, créé en 1985, avait-il été conçu pour accueillir environ 12 000 patients par an alors que le flux actuel avoisine les 30 000 passages. Sa surface a donc été multipliée par 3 afin de pouvoir séparer les prises

© Hôpitaux du bassin de Thau

Entretien avec Olivier Colin, directeur des travaux et du patrimoine, Dr Philippe Pinel, chef de pôle Urgences Nathalie Chave, cadre supérieur de santé, assistante du pôle Chirurgieanesthésieréanimation Mireille Gasquet, cadre médicotechnique en Imagerie médicale.

Nouvelle hélistation en toit-terrasse du plateau technique

en charge, notamment pédiatriques, gériatriques et psychiatriques. Dans le but de fluidifier les parcours, le service, qui était auparavant organisé sur 2 étages est désormais accessible de plain-pied avec une unité de soins de courte durée attenante dont la capacité a augmenté de 8 à 9 places. L’absence de communication « géographique » entre les services d’imagerie médicale et les urgences posait également problème ; aussi l’imagerie a-t-elle été transférée au premier étage du nouveau bâtiment. L’organisation du service a été rénovée de façon à différencier l’accueil des patients hospitalisés de celui des consultants externes avec, pour chacun, des passerelles et des salles d’attente dédiées. Un nouveau secteur d’activité a été développé, l’ostéodensitométrie, examen radiolo-

La surface du service des urgences a été multipliée par 3 afin de pouvoir séparer les prises en charge, notamment pédiatriques, gériatriques et psychiatriques. surveillance panoramique des chambres tout en préservant l’intimité des patients. Enfin, l’ancienne hélisurface au sol a laissé place à une hélistation située sur le toit-terrasse du plateau technique. Conforme aux règles édictées par la direction générale de l’aviation civile, elle permet d’améliorer la sécurité des transports héliportés grâce à la surélévation de l’aire de pose.

gique permettant le diagnostic précoce de l’ostéoporose et l’évaluation du risque de fracture. L’hôpital a aussi investi dans un nouveau scanner plus performant et plus rapide (64 barrettes) et développe, à compter de cette année, une nouvelle activité de coroscanner pour explo-

La sectorisation des circuits, un préalable nécessaire à la fluidification des parcours

rer les artères coronaires des patients présentant une douleur thoracique atypique.

Afin d’éviter l’engorgement des urgences, le circuit de prise en charge a été totalement repensé en plaçant au

156

Au deuxième étage du nouveau bâtiment, le nouveau

centre un binôme médecin/infirmier d’accueil et d’orien-

service de réanimation et de surveillance continue est

tation de façon à diriger les patients le plus rapidement

directement connecté, par une passerelle, au bloc opé-

possible vers les filières dont ils relèvent. La gestion des

ratoire. Ce service a été conçu de façon à permettre une

flux par ce binôme, et non pas par un agent administra-

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


tif, permet de repérer les patients nécessitant une prise en charge rapide qui seront immédiatement orientés en salle de déchoquage en cas d’urgence vitale, les autres intégrant alors un circuit plus classique.

© Hôpitaux du bassin de Thau

REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

Ce circuit se compose de deux filières. La première correspond à des prises en charge prolongées pour des patients allongés arrivant par ambulances et/ou pompiers ou bien nécessitant des examens complémentaires. Sky ceilling, dalles lumineuses au plafond afin d'apaiser les patients dans la salle d'attente

La seconde assure les prises en charge plus légères (médecine générale, « bobologie », etc.) ou celles pour En outre, le service d’accueil des urgences est constitué de plusieurs secteurs, en particulier avec un secteur pédiatrique comportant deux box de consultations attenant à une salle d’attente dédiée et un secteur entièrement consacré aux urgences gériatriques.

© Hôpitaux du bassin de Thau

lesquelles des examens radiologiques sont nécessaires.

La qualité au centre de la prise en charge

L’accueil et l’orientation par le binôme médecin/infirmier ont nécessité qu’il investisse, en lien avec les autres

Mur à bulles multicolores dans la salle d'attente

équipes du centre hospitalier, certains domaines spécifiques tels que la prise en charge de la douleur chez

ment professionnel continu. Afin d’apaiser les patients,

l’enfant, en collaboration avec le service de pédiatrie, ou

la salle d’attente a été équipée d’écrans de télévision et

la prise en charge des personnes âgées fragiles, aidé en

d’un mur d’eau où pétillent des bulles multicolores. Des

cela par le service de gériatrie.

dalles lumineuses représentant le ciel et la végétation

Le déménagement des urgences a demandé au per-

(concept de « sky-ceilling ») ont été installées dans la

sonnel d’investir de nouveaux espaces, mais aussi de

salle d’attente des patients couchés.

savoir s’adapter à de nouvelles organisations et pra-

La formation des aides-soignants travaillant aux urgences

tiques. L’accent a ainsi été mis sur le développement

met, quant à elle, l’accent sur le confort hôtelier des patients puisque ces derniers peuvent y séjourner une journée

Le déménagement des urgences a demandé au personnel d’investir de nouveaux espaces, mais aussi de savoir s’adapter à de nouvelles organisations et pratiques.

entière, voire une nuit. Une salle de tri a donc été aménagée de façon à respecter l’intimité et la dignité des patients par l’installation de paravents. Une attention particulière a également été portée par le personnel à l’hydratation, à l’alimentation, aux postures ou encore à la toilette des patients en attente d’un transfert.Une réflexion est également en

de soi et du savoir-être au travail. La rapidité et la tech-

cours pour permettre à l’association des « Blouses Roses »

nicité que nécessite le service des urgences ne doivent

d’intervenir aux urgences afin de distraire les malades par

pas occulter l’information et la communication, socles

des activités ludiques, créatives ou artistiques.

d'une prise en charge de qualité. C’est dans cette lo-

Trois fois plus vaste, le nouveau service des urgences

gique qu’a été créé un salon d’accueil attenant à la salle

génère quelques inconvénients ; ainsi l’inquiétude des

d’attente des urgences dans lequel l’infirmier d’orien-

personnels sur certains postes « isolés ». Une formation

tation et d'accueil peut consulter un patient, l’écouter,

relationnelle à la gestion de la violence a constitué une

le rassurer et effectuer les premiers soins, comme par

première « réponse »...

exemple administrer des antidouleurs dans le cadre de prescriptions anticipées. Ce protocole d’accueil repose

Pour conclure, l’idée maîtresse sous-tendant l’ensemble

sur le référentiel d’accompagnement des nouveaux pro-

de ce projet a été de rendre le passage aux urgences le plus

fessionnels, qui propose des formations et des ateliers

confortable possible et le plus humainement acceptable

sur différentes thématiques dans le cadre du développe-

aussi bien pour les patients que pour les personnels.

n

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REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

Amener la spécialité jusqu’au lit du malade Entretien avec Dr Gérard Dufraisse, chef de pôle Gériatrie et soins de suite

La visiogériatrie

ou comment déporter l’expertise médicale au cœur des EHPAD

La visiogériatrie utilise des tablettes numériques de type IPad 2 et peut concerner diverses spécialités. Ainsi elle peut être utilisée dans le traitement des escarres en faisant appel aux conseils d’une infirmière en plaies et cicatrisation, permettre le suivi à distance par un ortho-

Les Hôpitaux du Bassin de Thau représentent le deu-

pédiste des suites d’une opération de fracture, assurer

xième plus grand secteur de prise en charge des per-

la surveillance glycémique et le traitement du diabète

sonnes âgées de la région Languedoc Roussillon, der-

chez des personnes grabataires. Elle peut également

rière le CHU de Nîmes. Il recouvre 4 établissements

permettre de faire appel à un algologue pour évaluer la

d’hébergement de personnes âgées dépendantes,

douleur et préconiser au médecin traitant une thérapeu-

2 unités de soins de long séjour, 2 services de soins de

tique adaptée, ou bien satisfaire à l’obligation de collé-

suite et de réadaptation, 1 unité de court séjour géria-

gialité dans la prise de décision pour un accompagne-

trique, des consultations mémoire, des consultations

ment en soins palliatifs. Elle est de plus en plus utilisée

gériatriques multidisciplinaires de dépistage de la fra-

dans le cadre des troubles psycho-comportementaux de

gilité, 2 accueils de jour et 1 unité mobile de gériatrie

la personne âgée souvent dus à la maladie d’Alzheimer

chargée de l’évaluation et de l’orientation des personnes

ou à des syndromes apparentés et qui sont souvent peu

âgées fragiles.

visibles au moment même des consultations. Bien sûr, la télémédecine n’a pas vocation à remplacer les consul-

Le support des consultations de visiogériatrie permet aux résidents de bénéficier d’avis de spécialistes ou d’une surveillance médicale de nature à éviter les transferts injustifiés vers l’hôpital. Le savoir-faire gériatrique est en majorité centralisé sur l’hôpital et, au vu de la pénurie de médecins coordonnateurs dans les EHPAD, il est nécessaire de mettre à leur disposition « des compétences gériatriques » afin d’assurer la permanence des soins. C’est la vocation du GCSMS constitué entre le centre hospitalier et les 18 EHPAD publics et privés du Bassin de Thau. Il est

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tations « physiques », mais elle peut aider les soignants à mieux prendre en charge leurs patients. La difficulté est la pérennisation de ce dispositif qui, pour l’instant, ne repose que sur le volontariat et n’est actuellement pas valorisé en termes de codage.

Le case-manager,

ambassadeur de l’hôpital auprès des EHPAD Le case-manager a pour fonction de proposer aux EHPAD ces nouvelles technologies de l’information et de la communication, dont la visiogériatrie fait par-

ainsi le support des consultations de visiogériatrie per-

tie. Pour cela, il peut se déplacer et former les équipes

mettant aux résidents de bénéficier d’avis de spécia-

soignantes aux différents dispositifs et à leurs proto-

listes ou d’une surveillance médicale de nature à éviter

coles d’utilisation. Il se tient également à leur dispo-

les transferts injustifiés vers l’hôpital, responsables de

sition pour leur apporter son expertise gériatrique. Il

l’embolisation des urgences et, souvent, cause de dé-

s’agit souvent d’un praticien hospitalier spécialiste en

compensation pour les personnes âgées.

gériatrie qui a en charge la coordination des EHPAD.

Ce service permet de réduire les coûts de consultation

Il noue ainsi des relations avec les médecins coordon-

grâce à la réduction des transports sanitaires. Il est peu

nateurs et les médecins généralistes intervenant dans

onéreux pour l’hôpital qui ne doit financer que l’acqui-

ces structures, afin de les appuyer dans la résolution de

sition des tablettes et le prix d’une connexion Internet,

cas compliqués et d'identifier les solutions que pourrait

coût qui se trouve remboursé à partir de 2 téléconsul-

mettre à leur disposition le centre hospitalier : temps

tations.

médical ou infirmier, formations, équipements.

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REPORTAGE DH : Hôpitaux du bassin de Thau

Portrait du Président de la CME : motivations et conception

DH MAGAZINE – Vous avez récemment été élu président de la CME, quelles motivations vont ont poussé à vouloir exercer ce rôle ? Dr Stanislas Bagnols − Une certaine idée du service public et la volonté de faire avancer les choses, de mettre en œuvre de nouveaux projets. L’hôpital accueille chaque jour de nouveaux patients et pouvoir contribuer, même modestement, à l’amélioration de l’organisation des parcours de soins et à la qualité des prises en charge était, pour moi, une motivation suffisante. Cela exige

Entretien avec Dr Stanislas Bagnols, Président de la CME

de bien connaître l’hôpital et d’avoir une vision institutionnelle qui, parfois, fait défaut à certains praticiens encore trop cantonnés aux intérêts propres de leur service. Une ambition collective doit animer les décisions de la commission médicale. La volonté de travailler en équipe, de se confronter à des cultures différentes, qu’elles soient administratives, financières ou gestionnaires, me semble donc primordiale.

Comment vous êtes-vous approprié ce rôle ?

J’ai décidé d’ouvrir la CME à l’ensemble des médecins exerçant à l’hôpital pour permettre à chacun de pouvoir exprimer son point de vue et fédérer ainsi toute la communauté médicale. Dans cette logique, je m’assure que les comptes rendus de la CME soient toujours transmis à tous les praticiens hospitaliers.

J’ai souhaité que la CME devienne un véritable lieu de dialogue et de partage permettant d’informer les praticiens

tions non programmées a permis à l’établissement de

sur les différents projets institutionnels, de recueillir leur

présenter sa candidature pour l’appel à projet « Gestion

avis et de permettre des échanges constructifs, non

des lits », mis en oeuvre aujourd’hui avec l’accompagne-

seulement axés sur le versant qualité privilégié par la

ment de l’ANAP.

loi HPST, mais couvrant l’ensemble des sujets médicaux relatifs à l’établissement. Pour cela, j’ai décidé d’ouvrir la CME à l’ensemble des médecins exerçant à l’hôpital pour permettre à chacun de pouvoir exprimer son point de vue et fédérer ainsi toute la communauté médicale. Dans cette logique, je m’assure que les comptes rendus de la CME soient toujours transmis à tous les praticiens hospitaliers. De même les praticiens sont sollicités pour faire des

La gouvernance de l’hôpital vous paraît-elle équilibrée ? Vous considérez-vous comme le bras droit du Directeur Général ? Je ne me considère pas comme son bras droit, mais davantage comme un copilote chargé de porter un regard médical sur l’ensemble des projets institution-

présentations sur leurs activités, les projets de leurs ser-

nels et, parfois, d’avoir un rôle d’impulsion. Nos rôles

vices, et échanger sur des thématiques institutionnelles.

sont très complémentaires et nous savons travailler

Par exemple, en mars 2013, un débat sur la remise en

dans une bonne entente avec un objectif commun :

place de la commission des admissions et des consulta-

assurer le meilleur service possible à la population.

n

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Rubrique DH : juridique

Lutte contre l’absentéisme : quelques pistes de réflexion Démotivation, désengagement, situations de travail ou relationnelles mal tolérées, l’absentéisme connaît de multiples causes pour aboutir au même constat : la fuite - justifiée ou non - devant le travail. Maître Omar Yahia, avocat au barreau de Paris, nous invite à la réflexion et suggère quelques pistes pour appréhender ce phénomène récurrent. La proposition de loi enregistrée le 11 février 2014 à l’Assemblée nationale, et relative aux arrêts de travail et aux indemnités journalières, propose, en son article 8, de rétablir le jour de carence des fonctionnaires en cas de congé de maladie ordinaire. L’exposé des motifs de cette proposition de loi justifie cette initiative en précisant que l’instauration de ce jour © DR

de carence avait eu un effet non négligeable sur l’absentéisme, et en particulier dans la fonction publique hospitalière.

L’évocation de ce phénomène impose, au préalable, un travail termi-

nologique.

Omar Yahia Avocat au Barreau de Paris Mail : yahialaw@yahoo.fr

trage entre obligations ressenties de sens contraire (exigence morale d’aller au travail ou exigence morale affective de garder son enfant malade) ou encore

H. Leteurtre, Audit de l’absentéisme du personnel hospitalier, Berger Levrault 1991, p. 13

1

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Contre quelle forme d’absentéisme doit-on

de désirs de sens contraires (désir de retrouver le

lutter ?

groupe et désir de se retrouver dans un univers autre

Le terme « absentéisme » recouvrirait « les absences

que celui du travail) »1.

pouvant – sans que la certitude ne soit jamais faite – révéler un comportement de fuite devant le travail

De cette définition, il ressort à la fois un aspect objectif et

résultant, soit d’un rejet de celui-ci (cause objective

subjectif dans la cause de la fuite devant le travail, visant

liée au travail ou à son organisation), soit d’un arbi-

l’absentéisme conjoncturel et l’absentéisme intentionnel.

DH Magazine 149 / 2e trimestre 2014


Rubrique DH : juridique

On exclura du débat l’absentéisme structurel, qui est organisé par la loi elle-même, à travers les différentes autorisations d’absence (congés annuels, jours de repos hebdomadaires, jours de réduction du temps du travail, jours fériés, repos compensateurs, congés pour formation professionnelle, congés pour formation syndicale et représentation syndicale, congés maternité, pour adoption et paternité, congés parentaux, congés de validation des acquis de l’expérience, congés de bilan de compétence, autorisations spéciales d’absence, etc.).

L’absentéisme conjoncturel renvoie à la maîtrise des risques professionnels (accidents de service, maladies professionnelles, etc.), cependant que l’absentéisme intentionnel – contre lequel le combat est le plus difficile à mener – demeure compliqué à débusquer (démotivation, désengagement, situations de travail ou relationnelles mal tolérées). L’analyse quantitative vise à permettre de formuler des hypothèses sur l’origine de l’absentéisme : l’âge de la Parfois même, les aspects conjoncturel et intentionnel

population a-t-il une incidence ? L’absentéisme est-il

peuvent s’entremêler, la démotivation conduisant, par

plus élevé en médecine, en chirurgie, en obstétrique, en

exemple, les agents à commettre des erreurs ou à être

soins de suite, en gériatrie, etc. ? Est-il le fait des aides-

moins vigilants dans leurs gestes professionnels.

soignants, des brancardiers, des agents des services hospitaliers qualifiés, etc. ? Existe-t-il des événements

En somme, la prévention et la lutte contre

de nature à déclencher des poussées soudaines d’absen-

l’absentéisme devraient se focaliser sur

téisme ?

les absences imprévues, voire imprévisibles. Il importe de mettre au point la base de données la plus Chaque établissement possède une forme d’absen-

exhaustive possible. Il est souhaitable de la constituer sur

téisme qui lui est propre. Si certaines causes génériques

deux, voire trois années consécutives. Cette période doit

peuvent se retrouver d’un hôpital à un autre (conditions

être suffisamment récente et ne pas comporter de carac-

de travail, ambiance de travail, relations avec l’encadre-

tère saisonnier trop marqué. Les informations élémen-

ment, organisation du travail, etc.), c’est notamment dans

taires, qui pourront y figurer, seront les suivantes : nom

l’intensité de la cause que s’opérera la différence entre tel

ou matricule de l’agent, date de naissance ou âge, date

et tel établissement.

de prise de fonction ou nombre d’années d’ancienneté au sein de l’établissement, qualification, statut (titulaire,

« Connais toi toi-même » ou l’enquête introspective

stagiaire, contractuel), catégorie, établissement, pôle, service, unité fonctionnelle dans laquelle il travaille, pour chacune des absences, la date de début d’absence, la date de fin et le nombre de jours calendaires (on calculera, pour plus de simplicité le taux d’absentéisme en divisant

ment à se poser de nombreuses questions sur les causes

la durée calendaire de l’absence par 365 ou 366 jours,

possibles, probables, certaines de l’absentéisme au sein

selon les années).

d’un établissement hospitalier. On ne pourra faire l’éco-

Le service de la paie du bureau du personnel sera le pour-

nomie d’une analyse quantitative et qualitative du phéno-

voyeur naturel de l’essentiel des informations ci-avant

mène.

requises.

Une analyse sérieuse et rigoureuse conduit nécessaire-

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Rubrique DH : juridique

Les lecteurs auront compris qu’il s’agit de mettre un « visage » sur l’absentéisme de l’établissement. Une analyse plus ou moins fine conduira l’établissement à effectuer les calculs suivants : le taux d’absentéisme de moins de 4 jours, de 4 à 7 jours, de 8 à 15 jours, de plus de 15 jours, la durée moyenne des absences, les jours critiques de début d’absences, les jours critiques de fin d’absences, le taux d’absentéisme par sexe, par tranche d’âge, par tranche d’ancienneté, par statut, par catégorie, par établissement, etc.

Deux conditions sont nécessaires pour réussir une bonne

L’établissement prendra soin de procéder aux formali-

analyse des chiffres : la première relève de la présenta-

tés requises auprès de la CNIL, s’agissant du traitement

tion des résultats et la seconde porte sur le choix des ana-

automatisé de données à caractère personnel, à des fins

lystes. Il faut à ce stade travailler en groupe. Le choix des

statistiques.

analystes peut s’avérer délicat dans la mesure où il faut des personnes qui ne soient pas trop parties prenantes

Traitement des données : le discours de la méthode

par rapport aux résultats mais néanmoins capables de les interpréter compte tenu de leur connaissance du contexte. L’analyse qualitative suppose un contact direct avec le

Après avoir recueilli lesdites données, il convient ensuite

« terrain ». Des entretiens semi-directifs devront avoir

de les traiter.

lieu auprès d’un échantillon représentatif de la population

Trois traitements sont possibles : le traitement « à plat »

afin de recueillir des informations qui valident ou invali-

(A), le traitement par comparaisons (B) le traitement par

dent les hypothèses posées.

corrélations (C).

Quatre conditions sont nécessaires : la représentativité

A- Le « traitement à plat » : il s’agit d’obtenir des résul-

de l’échantillon, un entretien ouvert, la restitution des élé-

tats en nombre de jours d’absence, durée moyenne des

ments d’information et le retour d’information.

absences, taux d’absentéisme, etc. et ce afin de repérer

Sur un sujet aussi sensible que l’absentéisme, il est pré-

des « zones de sinistralité ».

férable de recourir aux entretiens individuels plutôt qu’à

B- Le deuxième niveau de traitement consiste à

des entretiens de groupe car l’effet modérateur de l’ex-

obtenir des « comparaisons » avec d’autres données.

pression des membres du groupe peut avoir des consé-

4 types de comparaisons sont possibles : indicateurs

quences sur la qualité de l’information et s’avérer fatal à

externes (établissements de la région, par exemple), indi-

l’ensemble de l’opération.

cateurs internes (comparaisons entre pôles, entre caté-

En définitive, l’analyse qualitative permettra non pas de

gories, entre unités fonctionnelles, par sexe, par tranche

valider les causes mais d’écarter assurément les fausses

d’âge, etc.), indicateurs semi-externes (comparaisons

pistes de l’analyse quantitative. Elle donne des options

entre plusieurs sites de l’établissement), indicateurs tem-

solides sur lesquelles le plan d’action sera bâti.

porels (d’une année sur l’autre, d’un mois sur l’autre, etc.).

Sans ce travail préalable, les conjectures empêcheraient

C- Plus subtile encore, les « corrélations » : il s’agit de

toute prise de décision. L’expérience montre que, sans

rapprocher le nombre de jours d’absence avec d’autres

préjuger des résultats futurs, il est d’ores et déjà possible

données de l’établissement. Par exemple, le nombre de

de sérier les causes de l’absentéisme par 7 facteurs expli-

jours d’absence corrélé à l’effectif par âge. Ou encore,

catifs : l’organisation du travail, l’organisation du temps

l’évolution de l’absentéisme avec le volume de soins, de

de travail, les conditions de travail, la démographie de la

passages, de « file active », etc.

population des agents, le style de management, les relations sociales et l’ambiance de travail, et enfin le système de valeurs en vigueur dans l’établissement. Ainsi le traitement objectif de l’absentéisme peut conduire les directions d’établissement à s’interroger sur elles-mêmes. Plus révélateur que révélé, l’absentéisme ne saurait se réduire à une problématique RH. C’est l’affaire de tous. n

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