Dossiers du Changement n°8

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2 février 2012 — n°8

INTERVIEW EXCLUSIVE

Joël de Leiris Les dossiers du changement

Voter, c’est choisir. Choisir, c’est reconnaître par définition la diversité d’expressions. Dans cette diversité, les partis politiques ont longtemps structuré des approches différentes, voire même opposées. Cette étape est passée. Les idéologies ont parfois mobilisé des valeurs clivantes. Cette étape là est également passée. Le vrai débat démocratique doit désormais se structurer autour de projets concrets à travers des actes et non plus des discours généraux ou des oppositions dogmatiques. Une priorité doit donc être accordée à ce débat des réalités. Ces réalités consistent à donner la parole à des personnes qui connaissent sérieusement un dossier et qui sont animées par la volonté d’exposer des perspectives claires, possibles, utiles. C’est la fonction de notre Club et de ses supports d’informations. Il est alors indispensable de s’éloigner des refrains classiques. «Demain, on rase gratis» : c’est ce que disent tous les politiques. «Tout le monde, il est beau et peut devenir plus riche» : c’est ce qu’ils promettent tous. «La crise, c’est la faute aux autres ... » : c’est ce qu’ils affirment tous. Loin de telles incantations ou de tels «engagements» qui ne durent que le temps d’une élection, notre démarche vise à proposer du vrai, du concret et du précis.

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C’est dans cette approche que notre Rédaction s’est entretenue avec M. Joël de Leiris. L’entretien a porté sur 7 enjeux clefs en matière de positionnement de l’agglomération grenobloise en matière de politique universitaire.

Joël de Leiris, un universitaire de renom Après avoir obtenu une maîtrise de physiologie à l’Université de Paris Sud Orsay, Joël de Leiris intègre en octobre 1965 le laboratoire du Professeur Edouard Coraboeuf, pionnier de l’électrophysiologie cellulaire cardiaque, pour préparer sous sa direction un diplôme d’études approfondies (DEA) de physiologie cardiovasculaire qu’il obtient en 1968. Il entame alors un doctorat d’État de physiologie cardiovasculaire qu’il soutient en octobre 1972. Recruté dans le corps des enseignants-chercheurs universitaires en octobre 1966, il occupe successivement les fonctions d’assistant, puis de maître-assistant, à Orsay dans son université d’origine. En 1968, tout en poursuivant ses activités de recherche à Orsay, il est chargé de créer de novo les enseignements magistraux des 1er et 2ème cycles de physiologie animale à l’université du Maine (Le Mans). En octobre 1978, il est nommé professeur et titulaire de la chaire de physiologie animale de l’université de Grenoble, une fonction qui lui confère la direction du laboratoire de physiologie cellulaire animale. Il accède à la classe exceptionnelle des professeurs d’université en 1996. Dès son entrée dans la vie professionnelle, Joël de Leiris se consacre à la recherche en pathologie cardiaque expérimentale en étudiant les conséquences cellulaires et fonctionnelles de la maladie coronaire et de l’infarctus du myocarde. Après la soutenance de sa thèse de doctorat, il séjourne comme chercheur à l’Hôpital Groote Schuur de l’Université du Cap (Afrique du Sud), au sein de l’Institut de Recherche en Cardiologie, fondé par le Professeur Christian Barnard, pionnier des greffes cardiaques. Au cours de son séjour, il apporte la première démonstration du rôle délétère des acides gras circulants sur le cœur ischémique, travaux qu’il publie dans la prestigieuse revue britannique Nature. À son retour en France, il crée à Orsay une unité de recherche sur la physiopathologie cardiaque et la cardioprotection, unité qu’il dirige jusqu’à son départ pour Grenoble au début 1979. De 1979 à 2004, il dirige différents laboratoires ou unités de recherche, tous consacrés à la pathologie cardiaque. http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 2


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Son bilan scientifique comporte la responsabilité de nombreux contrats de recherche publics ou industriels, la publication de près de 180 articles ou chapitres dans des revues ou des ouvrages internationaux, la direction de plus de 30 thèses de doctorat ou habilitation à diriger des recherches, près de 200 conférences sur invitation en France ou à l’étranger, l’organisation de plusieurs congrès ou colloques internationaux, la participation à différents comités éditoriaux de revues internationales ou nationales, ainsi que des missions officielles à l’étranger (Canada, Hongrie, Koweit, Maroc, Russie ). Outre sa participation aux enseignements de la physiologie dans les différents cycles universitaires et la responsabilité de diverses filières ou unités d’enseignement, Joël de Leiris a présidé ou siégé au sein de nombreuses instances : membre de diverses commissions de spécialistes ou conseils d’UFR (biologie, médecine, géologie), membre des conseils d’administration de l’Institut National Polytechnique de Grenoble, du Muséum de Grenoble, du Centre Culturel Scientifique, Technique et Industriel de Grenoble, de l’Université Inter-âges du Dauphiné, président du Comité de gestion des équipements du Synchrotron, membre du Conseil de la Chancellerie du Rectorat de Grenoble, membre du Conseil d’administration du Pôle Européen Scientifique et Universitaire de Grenoble, membre du Comité consultatif du Centre d’Etudes Nucléaires de Grenoble, membre du CADUAG-Programme Université 2000, membre de la Commission d’élaboration des sujets de biologie du baccalauréat, membre du Comité d’attribution des bourses doctorales de la Région Rhône-Alpes, membre fondateur de la Fondation Rhône-AlpesFutur…). Il a par ailleurs dirigé, de 1983 à 1997, le département de langues de l’Université Joseph Fourier de Grenoble.

Participation de Joël de Leiris à des instances nationales d’évaluation 1986-1991 :

Membre du Comité National du CNRS (section 28)

1995-2010 :

Membre du Conseil National des Universités (section 66) et président de cette section de 2003 à 2006

Depuis 2007, membre des comités d’évaluation de l’Agence Nationale d’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (AERES).

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Repenser l’organisation du site pour mieux répondre aux objectifs d’excellence Question 01 : Sur le plan national, où en est la compétitivité du pôle universitaire grenoblois ? Joël de Leiris : Il est difficile de répondre brièvement à cette question si l’on veut être objectif. Certes, depuis plusieurs décennies, les politiques clament urbi et orbi que la recherche et la formation universitaire constituent l’un des tous premiers atouts du développement grenoblois. Ce n’est naturellement pas faux. Mais si le potentiel scientifique et universitaire de Grenoble est effectivement remarquable, divers éléments contribuent à relativiser la compétitivité du pôle grenoblois, notamment des éléments tels que sa visibilité ou sa gouvernance. La preuve en a récemment été donnée dans le cadre de la procédure IDEX (Initiative d’Excellence) mise en place par le gouvernement et qui a pour objet de faire émerger dans notre pays 5 à 10 pôles pluridisciplinaires d’excellence d’enseignement supérieur et de recherche de rang mondial, capables de rivaliser avec les plus grandes universités du monde. Dans cette procédure, qui bénéficie d’une dotation en capital de 7,7 milliards d’Euros, le projet IDEX "Grenoble-Alpes Université de l'Innovation" (dit aussi GUI+), qui regroupe Grenoble et l’Université de Savoie, présélectionné par un jury international, en mars 2011, sur la base de son puissant potentiel de recherche, n’a finalement pas été retenu dans la première vague de juillet 2011 de 3 lauréats : Strasbourg, Bordeaux, et l’ensemble PSL Etoile regroupant divers établissements prestigieux (Ecole Normale Supérieure Ulm, Collège de France, Université Paris-Dauphine…) en raison d’une notation moyenne ou médiocre des experts en ce qui concerne le potentiel de formation et surtout la gouvernance. On sait depuis le 3 février 2012 que la deuxième (et a priori, dernière vague) a retenu les ensembles ParisSorbonne-Universités, Sorbonne-Paris-Cité, Saclay, Toulouse et AixMarseille, qui viennent compléter la liste des grands campus universitaires français à vocation internationale. En d’autres termes, les projets Rhônealpins de Lyon-Saint-Etienne et de Grenoble ont raté leur entrée dans l’excellence. En matière de recherche, la position de Grenoble reste néanmoins assez exemplaire, ce qui est illustré par la position du pôle grenoblois dans une autre procédure lancée par le ministère, la procédure LABEX (laboratoires d’excellence), visant à attribuer aux laboratoires ayant une visibilité internationale des moyens significatifs leur permettant de faire jeu égal avec leurs homologues étrangers, d’attirer des chercheurs et des enseihttp://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 4


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gnants-chercheurs de renommée internationale et de construire une politique intégrée de recherche, de formation et de valorisation de haut niveau. Doté au total de 1 milliard d’euros (100 millions consommables et 900 millions de dotation en capital produisant des intérêts), l’appel à projets a suscité au total 241 projets, dont 100 ont été retenus. Parmi les projets retenus figurent 8 projets grenoblois (55 en Région Ile-de-France, 10 à Montpellier, 8 à Lyon, 8 à Bordeaux, 8 à Marseille, et 5 à Toulouse). Ces simples chiffres illustrent la compétitivité de la recherche grenobloise au plan national, tandis que la diversité des projets retenus (matériaux, nano-électronique, nanosciences et énergies du futur, instrumentation et nouvelles stratégies de modélisation en environnement, diversité et complexité des processus biologiques, innovation et territoires de montagne, interactions mathématiques-entreprises-société, valorisation des cultures constructives pour le développement durable) montre qu’en matière de recherche, Grenoble est restée dans l’excellence et a su dépasser le stade de la monoculture qui fut longtemps l’une de ses caractéristiques.

Question 02 : Si vous deviez mettre en relief les points forts et les points faibles actuels de ce pôle, quels traits majeurs retiendriez-vous ? Joël de Leiris : Sans tomber dans la provocation, je dirais que, s’il s’agit de renforcer l’image du pôle grenoblois en recherche ET formation, les points les plus importants sont les points faibles qu’il convient d’identifier et de corriger. Malgré tous les discours lénifiants qui finissent par lasser à force d’être entendus, ce qui semble évident en la matière, c’est la difficulté, voire l’incapacité des partenaires concernés à présenter une vitrine, une organisation, une identité unique : par exemple et en premier lieu celle représentée par le nouveau concept « Grenoble-Alpes-Université de l’Innovation ». A mon arrivée à Grenoble, j’avais été surpris par des comportements que je n’avais jamais observés dans mon université d’origine (Paris 11 Orsay), faits de rivalités entre composantes et établissements universitaires ou entre organismes de rattachement, de petites phrases (ainsi, on m’avait très vite expliqué que les bons étudiants étaient à l’Institut National Polytechnique, mais que les bons enseignants-chercheurs étaient à l’Université, …). Heureusement, grâce à la prise de conscience de certains responsables, ces petites guerres picrocholines ont quasiment cessé, mais il est clair qu’il y a http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 5


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encore de sérieux efforts à faire pour dégager une entité unique et visible pour qualifier les produits issus de la recherche grenobloise : les publications portant sur des travaux réalisés dans n’importe quel laboratoire grenoblois appartenant à l’un quelconque des établissements d’enseignement supérieur (3500 enseignants-chercheurs et enseignants, 3250 Biatoss, 65000 étudiants) devraient être identifiées « GRENOBLE-ALPES-UNIVERSITE » et non pas par le rattachement administratif de leurs auteurs à tel ou tel organisme ; les formations doctorales qui regroupent 4000 doctorants dont 45% d’étrangers devraient être identifiées « COLLEGE DOCTORAL GRENOBLEALPES-UNVERSITE », ... Sans oublier naturellement les autres composantes du potentiel de recherche que sont les unités propres du CEA, du CNRS, de l’INRIA, de l’INSERM, du CEMAGREF, le CHU et les grands instruments ou instituts internationaux (EMBL, ILL, ESRF), représentant au total plusieurs milliers de personnes, et dont, en bonne logique de visibilité, les activités devraient d’une façon ou d’une autre être identifiées comme partie prenante d’un grand ensemble cohérent, le pôle grenoblois. En outre et pour des raisons évidentes, la mise en place d’une structure unique de valorisation devrait également voir le jour. Certes il existe des structures performantes comme Floralis, filiale de valorisation de l’université Joseph Fourier, ou INPG entreprise SA, filiale de valorisation de l’Institut National Polytechnique, tout comme il existe des dispositifs comme GRAIN et GRAVIT, incubateurs d’entreprises et structures de soutien aux projets innovants, mais il est regrettable que ces différents acteurs apparaissent aux yeux de beaucoup d’observateurs extérieurs comme concurrents. Il y a quelques mois, l’Agence d’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (AERES) soulignait que la notoriété du label «Grenoble» repose sur plusieurs piliers : le potentiel de recherche considérable des laboratoires universitaires et de ceux relevant des grands organismes de recherche, un plan Campus bien piloté, un collège doctoral de site délivrant des doctorats sous sceau commun UdG (Université de Grenoble), un PRES (pôle de recherche et d’enseignement supérieur) dans une démarche d’amélioration constante de la vie étudiante. Mais cette même agence recommandait également de repenser totalement l’organisation du site en vue de répondre aux objectifs d’excellence et à un positionnement international, à une meilleure répartition des compétences, à la mise en cohérence des actions impliquant des partenaires multiples, et, cerise sur le gâteau, de passer de la règle paralysante d’unanimité entre les membres fondateurs du PRES à celle de majorité qualifiée. http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 6


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Renforcer l’autonomie des Universités pour les muscler dans la compétition internationale

Question 03 : Avec désormais le recul nécessaire grâce au temps écoulé, comment appréciez-vous la réforme de l’autonomie des Universités ? Joël de Leiris : Pour Valérie Pécresse, « l'autonomie n'est pas une fin en soi, c'est un moyen de refonder l'université française autour de trois maîtres mots : la réussite, pour les étudiants ; l'excellence, pour les enseignantschercheurs ; l'innovation, pour la société française dans son ensemble ». Cette réforme était effectivement indispensable et elle a été conduite courageusement. Mais dans les faits, elle s’est trouvée confrontée à de nombreux freins conservateurs. L’un des effets positifs les plus déterminants est à mon sens la modification du mode d’élection du président et l’ouverture des conseils à des personnalités extérieures. Toutefois, l’autonomie reste encore vraiment limitée. Ainsi, les universités ne sont pas en mesure de limiter les flux d’entrée, ni les critères de qualité des admissions, elles ne peuvent pas emprunter en fonction de leurs besoins financiers, leurs procédures de recrutement, de licenciement, de salaire et de promotion répondent à des règles strictes et nationales, elles dépendent très largement des financements publics et des textes réglementaires. Pour schématiser, on peut dire que l’autonomie est encore loin d’être réellement autonome, les universités françaises ont encore fort à faire pour rivaliser avec leurs homologues nord-américaines ou même avec l’Institut Pasteur qui engrange chaque année des millions d’Euros de dons et legs, à hauteur du tiers de son budget annuel ! Certaines universités ont réussi à convaincre des donateurs, entreprises ou particuliers, car ce type de dons bénéficie d’une déduction fiscale de 66% (60% pour les entreprises), mais cette pratique reste encore peu développée. En fait, l’autonomie doit aller bien au-delà d’une simple autonomie de gestion afin de donner véritablement aux universités les moyens d’assumer comme elles l’entendent leur triple mission et de fédérer toutes les forces du site. A ce jour, nos universités restent encore dans le dernier tiers des universités européennes en ce qui concerne leurs marges d’autonomie et il à remarquer que les nouvelles http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 7


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capacités d’initiatives qui leur sont conférées par la LRU sont encore fréquemment obérées par l’esprit centralisateur et jacobin si typiquement français.

Conforter le centre ville en lui reconnaissant une dynamique multipolaire Question 04 : Il a été question d’une affectation d’une partie du Palais Delphinal à l’accueil de filières de formations universitaires, quel est votre sentiment sur ce projet ? Joël de Leiris : L’aménagement des espaces a souvent été un sujet insuffisamment traité à Grenoble en dehors de la création d’Europole rue Pierre Sémard durant les années 80. La Villeneuve en est d’ailleurs une illustration parmi beaucoup d’autres. Or, derrière des choix d’aménagements d’espaces, il y a un sens global à trouver. Prenons l’exemple d’Europole. Il importe quand même de se souvenir que ce quartier était une zone de friche industrielle accueillant pour une superficie importante une zone de dépôts de Calberson. Avant Europole, tout arrivant sur Grenoble par le train tournait la tête et voyait alors comme première «carte postale» de la Ville une zone de friche c'est-à-dire la désolation … Europole a permis de corriger cette situation en offrant comme première «carte postale» un quartier moderne dynamique ouvert à des étudiants. Cet exemple montre, si besoin était, que chaque espace doit être situé dans sa vocation. C’est le cas aussi pour le centre ville et donc pour l’arbitrage sur le Palais Dephinal. Le centre ville connaît actuellement une triple évolution. Il a perdu en qualité apparente (propreté, sécurité). Il a perdu en attractivité notamment en raison des difficultés rencontrées pour y accéder en automobile. Il a perdu en vitalité parce que les deux premiers constats ont impacté sa réputation donc sa fréquentation. Or, un centre ville doit être un lieu privilégié de vie pour une Cité. http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 8


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Quatre mesures pratiques me semblent nécessaires : ❶conforter une logique multipolaire du «centre ville» qui doit aller du square Vaucanson à la place Victor Hugo mais aussi de la place Grenette au Palais Delphinal, ❷pour que cette logique multipolaire s’installe, il importe de faire vivre des pôles d’animations à chaque extrémité de cet espace, ❸ l’un des moyens pourrait en effet consister dans le transfert d’une partie de la Mairie de son actuelle localisation boulevard Jean Pain à l’ancien hôtel de Ville de Grenoble (jardin de ville) avec une utilisation du Palais Delphinal pour partie administrative et pour partie à vocation universitaire notamment à destination de la Faculté de droit et / ou de Sciences Politiques, ❹cette logique rééquilibrerait le centre ville en lui donnant d’ailleurs deux accès complémentaires : l’un par la rue Lesdiguières ou la place de Verdun et l’autre par les quais et la porte de France. Parallèlement, pour conforter cette logique multipolaire d’un centre ville ouvert à la vie et aux animations, il est probablement nécessaire de transformer le square Vaucanson en parking souterrain avec un parc de qualité en surface. Les arbres et les espaces naturels doivent reconquérir de nombreux quartiers grenoblois dont le centre ville. De même il y a probablement matière à aménager la place Victor Hugo avec des parkings souterrains et avec une zone d’activités commerciales pour partie en surface et pour partie souterraine à l’exemple des centres américains populaires de ce type. Un centre ville dynamique doit être accessible, ouvert, sûr, multi-activités ; bref : vivant. Il y a une deuxième tendance probable à terme : la création de Mairies de secteurs donc la fin d’une Mairie unique centralisée. C’est une tendance http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 9


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naturelle de démocratie de proximité mais surtout d’administration efficace de proximité pour les questions d’urbanisme, d’état civil, d’animations, de sécurité … Cette logique devrait induire à terme une structuration différente de l’espace qui entoure l’actuel Stade vide des Alpes. Il s’agit là de pistes de réflexion. Elles doivent être finalisées, enrichies par le dialogue avec les riverains, les techniciens, les experts. Mais ce sont là des perspectives qui me paraissent mériter une attention certaine. Par conséquent, je crois au retour nécessaire des étudiants dans la Ville et au fait que le Palais Delphinal puisse en être l’un des moyens dans le cadre d’une cohérence plus globale. Question 05 : Les liens entre l’Université et l’Ecole Supérieure de Commerce de Grenoble ont-ils progressé ces dernières années ? Joël de Leiris : Le seul élément que je peux apporter sur cette question est que l’on constate que de plus en plus d’étudiants scientifiques, diplômés d’une L3 ou d’un M1, voire d’un M2 Pro, se tournent vers des formations complémentaires dispensées à l’Ecole Supérieure de Commerce, ce qui leur donne une double compétence fort appréciée des entreprises auprès desquelles ils déposent un CV en vue d’y être recrutés. Question 06 : Comment jugez-vous l’ouverture sur l’international de la Ville de Grenoble ? Joël de Leiris : Répondre à cette question, c’est examiner l’offre de Grenoble sur l’international proche et celle sur l’international lointain. En ce qui concerne l’international proche, au cours des trois dernières années, nous avons assisté à la préfiguration des zones d’influences des prochaines métropoles. Lyon a clairement et officiellement effectué un choix en vue de la création d’une métropole européenne réunissant Lyon, St Etienne, Vienne et Bourgoin. C’est un choix qui peut mériter de nombreux commentaires notamment dans l’éclatement des structures départementales traditionnelles qu’il induit. Mais il y a un constat concret, Lyon ne s’est pas tourné vers Genève de façon privilégiée, bien au contraire. C’est une opportunité pour Grenoble qui devrait accélérer la formation http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 10


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concrète du sillon alpin en ouvrant des pistes privilégiées de collaboration avec Genève qui est une capitale internationale incontestable dotée d’une notoriété mondiale et d’un dynamisme de première qualité. Et au delà de Genève, Lausanne qui a une approche de recherche universitaire reposant sur des synergies originales (biologie et médecine, géosciences et environnement) et sur son Ecole Polytechnique fédérale avec son parc scientifique abritant plus de 100 start-up (la Silicon Valley helvétique). En ce qui concerne l’international lointain, je n’ai jamais été séduit par le «protocolaire symbolique». Je préfère l’efficacité en sélectionnant des villes qui partagent des caractéristiques communes d’activités ou de devenirs et qui ont donc vocation à échanger de façon utile. L’AIVA (l’association internationale des villes d’avenir) avait une telle vocation. C’est cette logique qui doit être travaillée plutôt que la «french touch» à destination de géographies en difficulté qui auraient qualité à bénéficier de la compassion ponctuelle française pour le moins condescendante et, si souvent, de moins en moins efficace et justifiée d’ailleurs. La philosophie qui avait présidé aux rapprochements et jumelages avec Rehovot, ville du prestigieux Weizmann Institute, Oxford, Phoenix ou Suzhou, reposait sur des bases scientifiques, économiques, industrielles, et humaines. Or, la réalité est que ces relations ont essentiellement consisté en des échanges de délégations ou des manifestations culturelles, ce qui peut certes présenter un certain intérêt lorsqu’il s’agit de jeunes qui peuvent ainsi s’ouvrir à des cultures autres que la leur, mais ne profite guère aux partenaires en termes de coopération scientifique, technique et industrielle, même si sont régulièrement organisées des grands messes au cours desquelles les élus s’engagent à impulser la relance de la coopération sur les thèmes industriels et universitaires….

Notre pays cumule les freins à l’innovation Question 07 : Par rapport aux enseignements de ce qui est vécu à l’étranger, les liens entre le monde de l’entreprise et le monde de l’université doivent-ils être encore renforcés et si oui selon quelles priorités ? http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 11


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Joël de Leiris : Ces liens sont une tradition déjà ancienne à Grenoble depuis la création par Paul-Louis Merlin de l’Association des amis de l’Université de Grenoble en 1947, et qui est devenue, en 2001, l’Alliance Université Entreprise de Grenoble (AUEG). Laboratoire d'idées et initiateur d'actions, ce «think tank» a pour objectif de contribuer au développement des échanges entre le milieu universitaire et l'environnement économique local, mais aussi de façon plus large. Il y a donc une réelle volonté de développer ces liens « université-rechercheentreprises » et un nombre croissant d’entreprises sont aujourd’hui conscientes de l’intérêt qu’elles peuvent avoir à développer des procédures innovantes reposant sur des données issues de la recherche fondamentale. Toutefois, le grand nombre de PME-PMI et la variété des structures de recherche ne facilitent pas la lecture pour celui (entrepreneur ou chercheur) qui désire trouver un partenaire ou une information. Les « aller-retour de et vers » l’entreprise sont essentiels, ils peuvent et doivent être renforcés, car les chiffres montrent que le nombre d’entreprises qui savent utiliser au mieux de leurs intérêts la richesse et la diversité scientifique de Grenoble reste encore assez limité, les deux cultures peinant toujours à trouver des terrains d’entente. Il faut bien reconnaître que notre pays cumule les freins à l’innovation. De ce fait, dans des domaines où près de 5 à 10% des publications scientifiques mondiales sont d’origine française, 2 à 3% seulement des brevets déposés dans le monde le sont par des français. Selon un rapport parlementaire récent, plus de 80% des jeunes docteurs ou des doctorants français sont conscients du fort potentiel d’innovation de la recherche française, mais ils soulignent dans le même temps que la France ne favorise pas les innovations de rupture. Il y a un domaine où des progrès immédiats sont possibles, c’est l’aide aux startups. C’est probablement dans ce domaine que les collectivités locales ont beaucoup de progrès utiles et rapides à faire. Pour tout contact : club20@orange.fr Pour bénéficier d’une information rapide privilégiée : http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ http://www.denisbonzy.com/ http://www.facebook.com/denisbonzy http://www.twitter.com/dbonzy http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/ 12


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