Arabic dialectology

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l’arabe de Damas à la fin des années 1970

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par le canal de la télévision), et aux contacts quotidiens avec les habitants de Damas non originaires de la ville : la diversité linguistique fait partie du quotidien des Damascènes (ce qui explique à la fois leur ‘tolérance’, leur finesse de perception et, souvent, l’intérêt qu’ils prennent à parler de ces questions) ; certaines variantes, repérées ou non, ne sont assorties d’aucun jugement d’aucune sorte, ceci étant renforcé peut-être par le fait qu’on les retrouve, mutatis mutandis, ailleurs qu’à Damas (par ex. l’alternance e/o de la voyelle d’inaccompli de certains verbes, cf. § 8). Il n’est pas possible d’aborder, dans ces quelques pages, le rôle que joue la référence, implicite ou explicite, à la norme de l’arabe standard. Il est évidemment à prendre en compte, et s’exerce, comme souvent dans le monde arabophone, de façon complexe et parfois contradictoire (d’autant qu’une forme standard ou réputée telle pourra, selon le contexte, être ressentie comme élégante ou pédante— ces valeurs associées évoluant d’ailleurs avec le temps). Il apparaît en tout cas clairement que cette référence n’est qu’un des facteurs parmi d’autres de l’évolution du dialecte, et n’est certainement pas le plus important. On s’aperçoit ainsi que lorsqu’un informateur déclare avoir consciemment ‘réformé’ son propre usage (mʿaddǝl-a “j’ai corrigé cette façon que j’avais de dire telle chose”), c’est en général pour adopter une forme plus koinique, moins marquée socialement, et souvent ‘plus dialectale’, au sens qu’on a déjà indiqué de ‘plus éloignée’ de la forme standard correspondante. En tout cas, si les emprunts, lexicaux en particulier, à l’arabe standard sont sans doute de plus en plus nombreux, ils sont acclimatés, et finalement dialectalisés (souvent assez rapidement, via quelques étapes intermédiaires parfois), aussi bien sur le plan morphonologique que sur le plan sémantique. Et l’on ne peut qu’être frappé, lorsqu’on compare les usages contemporains à ceux qui sont documentés pour les périodes antérieures, tant dans la littérature dialectologique que dans les textes dialectaux ou dialectalisants de périodes plus anciennes, par la ‘résistance’ et la grande stabilité du dialecte de Damas, malgré l’importance des apports de populations nouvelles à l’époque récente.14 14

C’est à juste titre que C. Miller (Miller 2003a p. 193-194 et 2003b p. 254-255) range le dialecte de Damas dans la première des quatre catégories qu’elle distingue à cet égard, celle des ‘Old capital-cities with a prestigious and well-established dialect’, catégorie dont elle dit : “Their vernacular developed long ago in a sedentary environment and the historical leveling processes did not seem to have led to radical structural changes”.


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